Carl Gustav Jung. Esquisse d une œuvre - article ; n°2 ; vol.28, pg 343-367
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Description

Annales. Économies, Sociétés, Civilisations - Année 1973 - Volume 28 - Numéro 2 - Pages 343-367
25 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1973
Nombre de lectures 23
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Luigi Aurigemma
Carl Gustav Jung. Esquisse d'une œuvre
In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 28e année, N. 2, 1973. pp. 343-367.
Citer ce document / Cite this document :
Aurigemma Luigi. Carl Gustav Jung. Esquisse d'une œuvre. In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 28e année, N. 2,
1973. pp. 343-367.
doi : 10.3406/ahess.1973.293350
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1973_num_28_2_293350Carl Gustav Jung
Esquisse d'une œuvre
Ces toutes dernières années ont été publiés en français deux ouvrages
de C. G. Jung qui occupent, à des titres différents, l'un et l'autre une place
importante dans la très vaste production du savant suisse : Psychologie et
Alchimie en 1970 x, Les racines de la conscience en 1971 2. Ces ouvrages affrontent
et posent de tels problèmes que l'analyse approfondie et précise qu'ils méritent
demande au moins une connaissance suffisante des lignes directrices et des
motivations essentielles des recherches jungiennes. Il semble par ailleurs hors
de doute que, dans les milieux français cultivés en général et plus particuli
èrement dans les milieux scientifiques concernés par ces ouvrages, un tel degré
de connaissance soit encore peu répandu ; plus souvent ces milieux ne font
pas preuve d'une méconnaissance absolue, ce qui après tout serait un moindre
mal ; l'œuvre de Jung est plutôt entourée d'une sorte ď « aura » parfois fra
nchement négative.
L'examen approfondi des facteurs qui ont contribué à créer une telle
situation mériterait certainement d'être entrepris. Il montrerait la part respec
tive qui, dans cet état de fait, revient aux conditions mêmes de l'introduction
de l'œuvre de Jung en France, aux caractères socio-culturels propres aux
milieux scientifiques français ou aux conditions dans lesquelles l'œuvre même
a été élaborée. Un tel examen exhaustif n'est pas dans mes intentions ici.
Jung, le phénoménologue prudent, le psychologue qui n'a pu concevoir de
psychisme individuel que dans l'inter-relation au collectif, l'historien suff
isamment ouvert et respectueux de ce qui existe ou a existé pour s'en soucier
bien plus que des doctrines et des interdictions, a été souvent mal compris
1. Psychologie und Alchemie, Zurich, Rascher, 1944. Traduit et annoté par Henri
Pernet et Roland Cahen, Paris, éd. Buchet-Chastel, 1970.
2. Von den Wurzeln des Bewusstseins, Zurich, Rascher, 1954. Traduit par Yves Le
Lay, Paris, éd. Buchet-Chastel, 1971.
343 HISTOIRE ET PSYCHANALYSE
au point qu'on a pu le qualifier de « mystique » fumeux. Aussi ne m'a-t-й pas
paru inutile de présenter avant tout un portrait, naturellement rapide mais
aussi précis que possible, des grands thèmes de l'œuvre jungienne, précédé
de quelques rappels historiques simples 3.
Les prémisses
Le passage de l'affirmation spéculative ou de l'expérience religieuse de
l'inconscient à la démonstration expérimentale objective est avant tout le très
grand mérite de la psychologie clinique française des dernières décennies du
xixe siècle et de ses observations et découvertes dans le domaine des troubles
nerveux 4. Déjà vers le milieu du siècle dernier une conquête d'une très grande
importance fut la conception de la névrose en tant que trouble fonctionnel du
système nerveux ; une maladie réelle même en l'absence de cause organique,
et non pas « imaginaire », ou « extraordonaire », ou «simulée», comme on le
disait alors. Dans la recherche des moyens thérapeutiques l'attention de ces
chercheurs se concentra sur des phénomènes dans lesquels la conscience est
amoindrie : le sommeil, le somnambulisme, l'hypnose, l'hystérie. Liébault
observa le premier que l'affaiblissement ne supprime pas la continuité ultime
de la conscience, même lorsqu'on parvient à un déboublement : ce que Bernheim
confirma, en remarquant que l'oubli au réveil de ce qui a été ressenti dans
l'état somnambulique n'est pas nécessairement définitif, au contraire (Freud
tira le plus grand profit de cette constatation). Tout le problème fut donc celui
de déterminer les conditions de formation de ce qu'on appela les « idées fixes »,
sorte de « grumeaux » de pensée « inférieure », soustraits au « contrôle cérébral »,
et qui, par conséquent, sont cause de désordre et de souffrance.
Tout un vocabulaire chercha à formuler la prise de conscience naissante
de la part qu'ont des conditions affectives particulières dans un tel phénomène :
la « suggestibilité », Г « impressionnabilité », la « susceptibilité nerveuse »,
la « créduUté », Г « imagination », et ainsi de suite.
Le grand Charcot, que Freud écouta avec admiration à la Salpêtrière
à Paris en 1885-1886, et Bernheim à Nancy que Freud rencontra également,
lièrent de la façon la plus claire la diminution de la conscience, le symptôme
névrotique hystérique, à ce qu'ils appelèrent l'émotion terrifiante ; la « frayeur »,
la « colère », dans les termes de Bernheim, la « terreur », la « frayeur », dans ceux
de Charcot.
Charcot prouva de façon définitive la réalité active des « idées fixes ».
3. Au cours de cet article je citerai les différents écrits de Jung suivant le plan et les
numéros d'ordre de l'édition des Œuvres, en 18 volumes, déjà en cours en allemand, en
anglais et en italien. Il est à prévoir que le même plan sera adopté pour l'édition française,
lorsqu'il sera possible de la réaliser.
4. En analysant les bases historiques de la psychologie analytique Jung remontait
à la Révolution française (voir « "Ober das Unbewusste », Schweizerland, Zurich, IV, 191 8,
Œuvres, vol. 10). Dans ce rappel rapide il me suffira de prendre le départ à la fin du
xixe siècle.
344 L. AURIGEMMA С. G. JUNG
II y parvint en suggérant par exemple la paralysie d'un membre à des hysté
riques en état somnanbulique, puis en effaçant par le même procédé les symp
tômes induits artificiellement. Puisque les deux groupes de symptômes, induits
artificiellement et spontanés chez les hystéro-traumatiques, étaient identiques,
Charcot put en déduire que dans les deux cas le phénomène de la paralysie était
l'effet auto-suggestif de Г « idée d'impuissance motrice » agissant sur le corps
dans l'état particulier de conscience obnubilée (par l'hypnose dans ses expér
iences, ou par un traumatisme) ; et il put déduire que, puisqu'une telle « idée »
reste isolée et inaccessible au Moi, ce phénomène tend à se fixer et à persister.
Charcot démontra ainsi de façon impressionnante l'existence et l'activité de
phénomènes inconscients, prouvant empiriquement que des réalités psychiques
perdues pour la conscience (les idées fixes traumatiques) peuvent produire
un effet inconscient, et plus encore parvenir à troubler profondément l'état de
la conscience (comme justement par une paralysie).
Les démonstrations expérimentales de Charcot furent reprises, appro
fondies et élargies par Pierre Janet dont Jung suivit en 1902, pendant un
semestre, les leçons à la Salpêtrière, avec une admiration et un intérêt durables.
Janet a peut-être été le plus extraordinaire expérimentateur de la réalité
psychique inconsciente 5. Un de ses mérites remarquables a été de saisir que
l'hystérie (qui lui fournissait, de même qu'à ses prédécesseurs, l'essentiel du
matériel d'observation) ne fait qu'amplifier des données de la constitution
psychique normale : ce dont il put déduire que les résultats des observations
pathologiques concernent directement la constitution psychique « normale ».
Au moyen d'un nombre infini d'observations, Janet démontra, avec la plus
grande précision possible, l'extrême complexité de la réalité subconsciente :
depuis le nombre infini d'activités automatiques, plus ou moins isolées (« per
ceptions élémentaires », « associations d'idées », « habitudes », « sou

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