Classification des végétaux chez les Dogon - article ; n°1 ; vol.22, pg 115-158
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Description

Journal de la Société des Africanistes - Année 1952 - Volume 22 - Numéro 1 - Pages 115-158
44 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1952
Nombre de lectures 18
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Germaine Dieterlen
Classification des végétaux chez les Dogon
In: Journal de la Société des Africanistes. 1952, tome 22. pp. 115-158.
Citer ce document / Cite this document :
Dieterlen Germaine. Classification des végétaux chez les Dogon. In: Journal de la Société des Africanistes. 1952, tome 22. pp.
115-158.
doi : 10.3406/jafr.1952.1845
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jafr_0037-9166_1952_num_22_1_1845.
CLASSIFICATION DES VÉGÉTAUX
CHEZ LES DOGON
PAR
G. DlETERLEN
Un herbier d'environ trois cents végétaux a -été constitué dans la
région de ,Sanga (Falaises de Bandiagara) en 1950 et 1952 x. Les
enquêtes préliminaires auxquelles il a servi de point de départ ont
fait apparaître un classement systématique en « familles » (togu)
des plantes que les Dogon connaissent et utilisent.
Comme toutes les catégories d'êtres et de choses de l'univers conçu
par lès Dogon (par ex. : les astres, les tissus, les animaux, les institu
tions, etc.) les végétaux sont classés en vingt-deux « familles »
principales auxquelles il convient d'ajouter deux familles complémenta
ires, ce qui porte le total à vingt-quatre 2.
Chaque catégorie d'êtres ou de choses est en correspondance avec
toutes les autres, en principe rang pour rang (par ex. le n° 4 des tissus
correspond à tous les n° 4 des autres catégories) 3. D'autre part, cha
cune des vingt-deux familles principales de chaque catégorie est en
rapport avec l'une des vingt-deux parties du corps humain, lui-même
considéré comme un tout.
L'ensemble offre un système de correspondances cosmo-biologiques
cohérent qui se présente comme une synthèse des connaissances des
Dogon ; ainsi, pour ces derniers, l'univers entier se projette-t-il
notamment, pour chacune de ses parties, dans l'être humain, expres
sion privilégiée du microcosme.
De plus, chaque catégorie de choses, d'êtres, qu'il s'agisse d'ani-*
maux, de minéraux, d'objets, d'institutions, de techniques, a d'une
1. Cet herbier a été établi à la demande de l'Institut Français d'Afrique Ncire. Nous remer
cions ici le Service de Botanique de cet établissement qui a déterminé les espèces récoltées.
2. Sur ces éléments complémentaires, cf. infra, p. 118 et 120.
1 3. Le classement des catégories en familles et les correspondances des diverses catégories entre
elles, ont déjà été relevés au cours des enquêtes précédentes. Cf. notamment G. Dieterubn, Les
Correspondances cosmo-biologiques chez les soudanais. M. Griaulh et G. Dibterlen, La harpe-
luth des Dogon et Signes graphiques soudanais. Les études poursuivies depuis ces publications témoi
gnent de la généralité de ces classements chez les Soudanais. . ,-
' Les indications complètes des ouvrages ou articles cités sont données dans un index bibliogra
phique, en fin d'article. . . • SOCIÉTÉ DES AFRICANISTES 116
part un rôle de représentation générale de l'univers (qui n'est pas
l'objet du présent exposé 1), d'autre part un. rôle particulier.
Dans le cas de la catégorie végétale, ce dernier rôle est de constituer
les bases de l'alimentation et de la pharmacopée indigènes. Aussi le
classement en familles, connu dans ses grandes lignes par la plupart
des adultes cultivateurs, est-il l'objet d'une véritable science de la
part des guérisseurs.
Nous rappelons ici, pour l'intelligence de ce qui va suivre les gran
des lignes du mythe de création des Dogon auquel sont associés
toutes leurs institutions comme leur mode de pensée.
Après un premier essai qui n'aboutit pas, l'univers, dans son en
semble, est issu d'un infiniment petit créé par la « parole » (so) d'un
Dieu unique, Amma ; il est symbolisé actuellement, sur terre, par la
graine de Digitaria exilis (pô), dans l'eau par l'œuf du Clarias sene-
galensis (anagonno) et dans l'espace par un satellite de Sirius, l'étoile
Digitaria (pô tolo) 2. Cet infiniment petit s'étant développé forma
une vaste matrice, dite « œuf du monde» (aduno tal), scindée en deux
éléments jumeaux, contenant deux placentas, qui devaient donner
naissance à deux couples également jumeaux de Moniteurs Nommo,
prototypes de l'homme et possédant le verbe créateur.
Mais, de l'une des moitiés de l'œuf sortit, avant terme, un être mâle
unique qui, pour posséder seul l'univers en formation, vola les graines
créées par Dieu, dont la Digitaria, « germe du monde ». Dans l'espoir
d'emmener avec lui sa jumelle, il arracha un morceau de son placenta
qui forma une sorte d'arche avec laquelle il descendit dans l'espace
vide. Mais déjà Amma avait confié au couple de l'autre moitié de
l'œuf cette jumelle : le morceau de placenta volé devint la terre, où
le révolté pénétra et dans laquelle il tenta de semer les graines déro
bées.
Son intervention prématurée et l'inceste qu'il réalisa en s'introdui-
sant dans son propre placenta, troublèrent l'ordre de la création :
incomplet, il fut. transformé en animal, le renard pâle, yurugu (Vulpes
pallida) 8 et communiqua à la terre sa propre impureté, ce qui la
endit sèche et stérile.
1. En effet toute la classification marque, d'abord, les étapes de l'histoire de l'univers et de sov
organisation. Ce rôle est développé notamment par M. Griaule, Le Semoir des Dogon.
2. Sur l'étoile Digitaria cf. M. Gbiavlb et G. Dieteklen, Un Système soudanais de Sirius.
La graine de sent (Acacia albida) symbolise actuellement la première création d'Amma, aban
donnée. — Cf. Infra, p. 154.
& ротного, Htt. : i voleur de petit mil », de 90, < petit mil > (Pennisetum spicatum) et lugu
• voler, dérober >. DES VÉGÉTAUX CHEZ LES DOGON 117 CLASSIFICATION
Pour remédier à cette situation, Amma sacrifia, au ciel, Tun des
Moniteurs Nommo de l'autre moitié de Fœuf : ce dernier versa son
sang et les graines de ses clavicules, futures nourritures de Fhomme \
pour purifier l'univers. Du sang versé naquirent au ciel deux arbres,
le, kilena (Acalypha ciliata) et le pelu (Kahya senegalensis, cailcé-
drat^. A l'exception des deux bras, son corps partagé fut jeté dans
l'espace aux quatre points cardinaux par. morceaux qui, sur terre,
se manifestèrent en quatre arbres, sa (Lannea acida), grç (Adanso-
nia digitata, baobab^, minu (Achras parkii, karité), yullo. (Parkia
biglobosa), symboles de sa résurrection végétale et de la purification
effectuée par son sacrifice.
Ayant ensuite rassemblé au ciel le corps démembré, Amma le crépit
en forme d'homme, avec la terre célestielle et le ressuscita en util isant
l'arbre pelu. Il fit descendre sur la terre le placenta de la seconde moit
ié de l'œuf sous la forme d'une arche rectangulaire (кого) transport
ant, au centre, le couple de Moniteurs Nommo, jumeaux, mâle et
femelle, maîtres du verbe, du ciel et de l'eau, placés auprès d'un
kilena et d'un pelu et quatre autres paires mixtes, ancêtres des hom
mes, dont chaque élément était placé également auprès d'un arbre 2 :
à l'ouest, Amma Sérou 8 et sa jumelle avec le sene (Acacia albida)
et le baobab (Adansonia digitata) ; au nord Lébé Sérou et sa jumelle
avec le gobo pilu ( Guiera Senegalensis) et le gobo banu (non déter
miné) ; à l'est Binou Sérou avec le sa (Lannea acida) et le yullo
(Parkia biglobosa) ; au sud Dyongou Sérou avec le saselu et le bozo
kubo (non déterminés).
L'arche, seconde terre pure destinée à se plaquer sur la première,
contenait également tous les animaux, minéraux, végétaux qui de
vaient se développer et occuper la planète entière : en particulier elle des exemplaires nouveaux des graine s. volée s par Yourou-
gou.
La descente de l'édifice coïncida avec l'apparition de la lumière
solaire et avec la chute d'une pluie purificatrice, source de toute vie
et de toute fécondité. Née des unions des ancêtres de l'arche, l'human
ité se développa et la vie s'organisa sur terre ; les éléments consti
tutifs et complémentaires de cette organisation étant la nuit, la séche
resse, la stérilité, le d

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