De la latence conceptuelle à l expression discursive multiforme - article ; n°1 ; vol.14, pg 277-308
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Cahiers de linguistique hispanique médiévale - Année 1989 - Volume 14 - Numéro 1 - Pages 277-308
32 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1989
Nombre de lectures 121
Langue Français
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Extrait

Jean Roudil
De la latence conceptuelle à l'expression discursive multiforme
In: Cahiers de linguistique hispanique médiévale. N°14-15, 1989. pp. 277-308.
Citer ce document / Cite this document :
Roudil Jean. De la latence conceptuelle à l'expression discursive multiforme. In: Cahiers de linguistique hispanique médiévale.
N°14-15, 1989. pp. 277-308.
doi : 10.3406/cehm.1989.1073
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/cehm_0396-9045_1989_num_14_1_1073DE LA LATENCE CONCEPTUELLE
À L'EXPRESSION DISCURSIVE MULTIFORME
la mer Le Texte à laquelle médiéval il s'apparente juridique a par l'immensité son indéfinition et la profondeur — (où com- de
mence-t-il ? \ mais aussi: comment se dénomme-t-il ? 2) — , par son
ouverture à de continuels apports et brassages et par son épaisseur
substantielle aux graduations très fines. Sa limite, bien souvent,
est celle que nous lui fixons de la plage où nous le contemplons
pour l'étudier et où nous admirons ses vagues successives de
signes portés, ajoutés ou modifiés, commentés ou rapportés, ou
se sur-disant.
Il s'inscrit dans une latence de contenu dont il profite et
dont il s'enrichit, il se meut et se moule dans un continu antécédent, l'antériorité peut être restreinte, un certain nombre d'années
— ({'Espéculo par rapport aux Partidas; celles-ci par rapport au
1) Matériellement et substantiellement: l'inscription d'un texte sur le parchemin
peut soulever des problèmes d'identification puisqu'en l'absence d'incipit et
d'explicit, bien souvent, rien ne distingue le nouveau texte du précédent ou du
suivant (voir à ce sujet, Jean Roudil, Les inter-textes, ou le codex ouvert, in
Mélanges Maurice Molho, t. I, Paris, 1988, pp. 157-163, et aussi Bernard
Cerquiglini, Eloge de la variante. Histoire critique de la philologie, Paris, Seuil,
1989, p. 50 sqq.). Plus encore, le contenu lui-même provient de sources variées
et nombreuses, profondément imbriquées les unes dans les autres et aux contours
parfois mal délimités.
2) Pour YEspéculo, voir Leyes de Alfonso X. I. Espéculo, edición y análisis
crítico por Gonzalo Martínez Diez, Avila, 1985, pp. 18-19; le début — post-
alphonsin, semble-t-il — dit: «Este es el libro del ffuero que ffizo el rrey don
Alffonsso, ffiio del muy noble rrey don Fferrnando e de la muy noble rreyna
donna Beatriz, el qual es llamado Espéculo que quiere tanto dezir commo espeio
de todos los derechos», d'où la désignation actuelle de ce texte. Il serait facile
de multiplier les exemples. Ainsi, les dénominations du Fuero Real relevées par
Antonio Pérez Martín sont nombreuses (in El Fuero Real y Murcia, A.H.D.E.,
Madrid, 1984, t. LIV, pp. 55-57): «Libro del Fuero», «Fuero del Libro», «Fuero
de Burgos», «Fuero de Castilla», «Fuero castellano», «Libro de los Concejos de
Castilla», de la Corte», de las Leyes», «Libro del Fuero de
las Leyes», «Flores», «Libro de las Flores», «Flores de las leyes», «Fuero
Real», «Fuero Real de Valladolid», «Fuero Real de Castilla», «Fuero Real
de España», etc. 278 JEAN ROUDIL
Setenario3) — , ou vaste, des siècles — (les Siete Partidas par
rapport à l'œuvre de Justinien4; le Setenario par rapport aux
multiples traditions cosmologiques, magiques, juives, arabes, etc.
qui le sous-tendent et que notre collègue et ami de l'Université
de Murcie, José Perona, a récemment mises en lumière) — 5.
Les textes ainsi produits vivent comme manifestations
d'écriture que le philologue et l'historien de la langue essayent de
dater, comme étages superposés à d'autres et porteurs de construc
tions ultérieures. Une latence conceptuelle, traduite en discours
avant, mais toujours là, maintenant, à l'instance de rédaction, génère
une écriture nouvelle, réécriture d'une écriture antécédente.
Des allusions y sont faites dans maints prologues ou autres subdi
visions de l'espace (titres, lois, chapitres, etc.) au moyen de
séquences simples, simples allusions lourdes de sens : los libros, los
sabios, los entendidos, commo dicho es, ... qui, tout en magnifiant
le dit antérieur et en lui donnant rang d'autorité, justifient indirec
tement l'entreprise de réécriture nouvelle puisqu'elle s 'appuyé préc
isément sur le dit des libros, des sabios et des entendidos6. La
pratique du recours à l'auctoritas, qui est comme un iceberg textuel
remémoré pour mention ou, mieux encore, un phare toujours
éclairant et rassurant pour le rédacteur, permet d'exploiter une
masse de textes dans un fourmillement de variantes. Sous l'appa
rence du respect, elle facilite l'irrespect, c'est-à-dire les innovations:
souci de totalisation et de globalisation du savoir au XIIIe siècle,
caractère encyclopédique des projets (voir l'œuvre du grand archi
tecte que fut Alphonse X), abondance des écritures, utilisation du
«roman» — d'où le rapport avec l'intensité de la production — ,
subreptices modifications de contenu et de conception des ouvrages
en cours ou à mettre en chantier (voir les objectifs visés dans le
Fuero Real, VEspéculo et les Partidas, à la fois complémentaires
et autres, et présentés avec une habileté consommée faite de
délicatesse, de souplesse argumentative et de feinte).
3) Cette antériorité correspond à une position traditionnelle, mais les termes
pourraient être inversés et écrits : 1. Partidas; 2. Setenario (voir, à ce sujet: Jerry
R. Craddock, «El Setenario: última e inconclusa refundición alfonsina de la
primera Partida, in A.H.D.E., Madrid, 1986, t. LVI, pp. 441-466).
4) Le nombre des éditions du Corpus juris civilis (Institutes, Digeste, Code, Novellae)
au cours des siècles est une preuve de l'importance de ce texte, qui se place
après la Bible pour son succès et participe du caractère de l'orthotexte
(voir, dans ce volume, la conférence de Bernard Pottier).
5) In Espesores simbólicos de la glosa del mundo: el Setenario Alfonsí, una
aritmología sagrada, article publié dans Glossae. Revista de Historia de Derecho
Europeo, Murcia, 1988, t. I, pp. 35-96.
6) La véracité — conforme ou malicieusement fausse — de ces références pourrait
donner lieu à de belles études. DE LA LATENCE CONCEPTUELLE A L'EXPRESSION DISCURSIVE MULTIFORME 279
La conséquence scripturaire est que les œuvres de contenu
juridique offrent en commun, à des degrés divers, certes, une
immense variation, en diachronie et en synchronie, qui témoigne
de l'activité paraphrastique au Moyen-Âge, dans la Péninsule
ibérique. Ces œuvres alimentent des strates de deux types,
fondamentaux .
a. Dans le premier, les manuscrits d'une tradition — (par
exemple, ceux des Flores de derecho, ou du Fuero Real, au nombre
d'environ 40 pour ce dernier texte7) — , constituent une couche
intratextuelle :
Tradition manuscrite des Flores de derecho
au
Moyen -Âge 280 JEAN ROUDIL
Le texte, plutôt multiforme, se recopie; la redite règne, tout en se
dotant d'un réseau serré de fines et délicates variantes : l'idiolecte,
la main et l'esprit des copistes se manifestent. Des éléments de
réécriture peuvent se mêler à la simple redite, mais l'on demeure
dans un système de diffusion du texte et la comparaison, menée
verticalement, offre quelque homogénéité.
b. Dans le second type, plusieurs traditions clairement établies,
voisines entre elles ou plus ou moins éloignées, constituent des
couches intertextuelles (et, individuellement, intra textuelles).
L'on est davantage dans un système d'écriture autre, d'élaboration
nouvelle du texte, multiforme, et multi signifiant. La comparaison,
menée horizontalement, offre quelque hétérogénéité. Ainsi: p. 281.
Cette distinction entre couche intratextuelle, d'une part, et
couches intra- et intertextuelles, d'autre part, me paraît utile
et féconde pour rendre compte des manifestations de l'activité
paraphrastique, dans le discours juridique, et pour cerner plus
finement les concepts de texte, d'énoncé ou de séquence para-
phrastiques. Car tel est bien notre propos: si nous sommes unanimes
à déclarer et à constater l'activité de paraphrase au Moyen-
Âge, dont les manifestations sont multiples, et b

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