De la mouvance islamiste en général et des Gama ât islamiya en particulier (1970-1985). Essai de lecture sociologique - article ; n°121 ; vol.31, pg 57-72
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De la mouvance islamiste en général et des Gama'ât islamiya en particulier (1970-1985). Essai de lecture sociologique - article ; n°121 ; vol.31, pg 57-72

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Description

Tiers-Monde - Année 1990 - Volume 31 - Numéro 121 - Pages 57-72
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1990
Nombre de lectures 22
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Nicole Khouri
De la mouvance islamiste en général et des Gama'ât islamiya
en particulier (1970-1985). Essai de lecture sociologique
In: Tiers-Monde. 1990, tome 31 n°121. pp. 57-72.
Citer ce document / Cite this document :
Khouri Nicole. De la mouvance islamiste en général et des Gama'ât islamiya en particulier (1970-1985). Essai de lecture
sociologique. In: Tiers-Monde. 1990, tome 31 n°121. pp. 57-72.
doi : 10.3406/tiers.1990.3895
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1990_num_31_121_3895DE LA MOUVANCE ISLAMISTE
EN GÉNÉRAL
ET DES GAMA'ÂT ISLAMIYA
EN PARTICULIER (1970-1985)
ESSAI DE LECTURE SOCIOLOGIQUE
par Nicole Khouri
La mouvance islamiste en Egypte est loin d'être homogène. Ses acteurs
sont avant tout issus d'une crise et non des croyants marchant les yeux
fixés sur les Textes sacrés et leurs interprétations.
Dans ce qui suit, je ne traiterai que de conduites collectives, c'est-à-dire
ne travaillerai ni les discours idéologiques, ni les ouvrages théoriques
produits par ces groupes, par leurs détracteurs ou leurs commentateurs;
encore moins m'appliquerai-je à étayer des notions telles que islam et
modernisation, islam et politique, islam et sécularisation, laïcité, socia
lisme, capitalisme. Tout ceci me renverrait à un travail d'herméneutique
qui ne me semble pas essentiel pour le niveau d'analyse sociologique auquel
je me suis située.
<( La mobilisation des acteurs n'est forte que quand elle s'adresse à
leurs valeurs, à leur solidarité, à leurs représentations en même temps qu'à
des intérêts souvent difficiles ou impossibles à définir en eux-mêmes. Il
est plus facile de savoir contre qui ou avec qui on se bat que pour quels
objectifs... La solidarité familiale, la conscience religieuse, le nationalisme
ont plus de force mobilisatrice que la recherche d'avantages matériels
souvent difficile à définir dans des situations économiques très sensibles à
la conjoncture internationale et bouleversées par l'inflation » (A. Touraine,
Ouverture à la 2e partie de La parole et le sang : « Les formes d'action
collective »).
Quels sont les enjeux des groupes islamistes? Au moment de leur
apparition, aux moments forts de leur capacité mobilisatrice, la définition
de l'acteur et de l'adversaire est toujours beaucoup plus claire que celle de
Revue Tiers Monde, t. XXXI, n° 121, Janvier-Mars 1990 58 NICOLE KHOURI
l'enjeu. On ne peut réduire l'enjeu à l'analyse de la situation de départ
(dénassérisation, déceptions à l'égard des options développementalistes
de 1952 à 1970, défaite de juin 1967, incarcérations et répression sous le
régime de Nasser... autant de points de départ qui ont souvent servi à
l'interprétation de ces mouvements); ni à l'analyse des intentions des
acteurs (restauration de l'âge d'or de la communauté islamique première,
renaissance de la Umma...). Encore moins à l'analyse de l'instrumentante
ou de l'expressivité des moyens d'action (le Tyran à abattre, l'application
de la Chari'a, le vécu du « vrai » musulman).
N'étant ni journaliste, ni politologue, ne visant ni à informer du discours
et des actions des acteurs, ni à en clôturer la signification dans un calcul
politique; il s'agit de ma position de sociologue de rendre compte de leur
spécificité précisément au point obscur de leur relation à l'enjeu. Cette
relation oriente fondamentalement la nature sociologique des conduites
islamistes et renvoie au cœur même de l'interrogation sociologique actuelle.
A / Tout d'abord qu'exprime l'ensemble des courants religieux déjà
présents dans les années 1970?
В / Ensuite, quelle analyse construire des conduites collectives isl
amistes qui occupent la scène égyptienne entre 1972 et 1985?
С / Parmi ces conduites collectives, les Gama'ât islamiya pourraient-
elles être considérées comme un acteur central ?
A / Durant les années 1970 apparaissent, dans les médias européens,
les termes de « société islamiste », « pouvoir islamiste », « mouvements
islamistes », alors que la langue arabe n'a jamais attesté d'un tel écart entre
islamiste et islamique. Abandonnant la connotation que le terme islamiste
a eue dans ces médias, je le retiendrai dans ce qu'il me suggère d'analogie
avec la distinction chrétienté-christianisme (Delumeau). Christianisme ren
voie à la croyance religieuse, chrétienté au mouvement paradoxal du rap
prochement de l'Eglise avec les forces du changement économique et social
(et de son entreprise interne de sécularisation) d'une part, et du déve
loppement des courants religieux exprimant les résistances à la décompos
ition de sociétés traditionnelles et les tentatives de création de nouvelles
communautés d'autre part1.
Si islamique renvoie à la foi musulmane, islamiste renverrait au mou
vement paradoxal du rapprochement des ulémas avec les forces du change-
1. L'analogie suggérée s'arrête au niveau de la distinction et du paradoxe indiqués. Il
est évident que, dans l'Egypte du troisième quart du xxe siècle, il ne s'agit ni d'assimiler l'Azhar
à une institution comme l'Eglise médiévale, ni d'examiner l'éclatement, la décomposition et
la résistance du champ religieux à l'aube de la modernité comme le fait M. de Certeau in
Ecriture de V histoire (chap. IV). MOUVANCE ISLAMISTE EN GÉNÉRAL, GAMA'ÂT ISLAMIYA EN PARTICULIER 59
ment politique (Frères musulmans), social (jeunesse étudiante, mouvements
associatifs) et économique (entreprises, sociétés, banques dites islamiques)
d'une part, et du développement de courants religieux plus radicaux, voire
extrémistes, d'autre part.
L'ensemble des courants religieux déjà présents, au début des années 1970,
expriment la rencontre de plusieurs types de conduites :
1 / Luttant contre Vanomie et la désorganisation sociale. C'est l'appel
à la moralisation, à la responsabilité individuelle et collective (lutte contre
la pornographie, la drogue, l'alcool); éthique du témoignage, de la conver
sion; « nous étions immoraux, nous sommes sur le chemin du Gihâd
personnel et collectif». "Je suis né en 1951", disait Sayed Kutb pour mar
quer sa conversion.
C'est aussi l'appel des confréries qui recréent des liens de solidarité,
fermant le groupe sur sa propre entente. Les confréries ne sont pas des
sectes et ne combattent rien du tout. Elles n'entrent même pas en relation
avec la modernité. Subissant un phénomène d'usure, les confréries urbaines
ont du mal à mobiliser une clientèle qui pourtant en faisait partie dans les
années 1930-1950. « Many of clerks, office workers, petty bureucrates,
small shopheepers and traders, students, young officers and school teachers
who were part of this stratum, the turuq represented forces from which
they whished to free themselves... Popular sufism came to be seen as tradi
tionalist and repressive by many elements of the petty bourgeoisie and
indeed the middle classes in general, who excluded it from their own
organised political and cultural alternatives. » L'homme des confréries
n'est pas l'homme islamiste (Frère musulman ou membre des Gama'ât
islamiya), il est même son contraire2.
2 / Créant une communauté témoin libérée de V impur. C'est encore
l'appel à une libération qui n'est ni politique ni sociale. La Société des
Musulmans de Chukri par exemple est une communauté ecclésiale, inté
griste, littérale, apolitique, asociale; espace clos d'une secte religieuse
utopique (au sens de Troelsch) qui rencontrera la société et l'Etat à partir
de sa propre dynamique d'apostasie.
Entre le regroupement confrérique, la communauté-secte utopique et
la solidarité vécue à travers le réseau associatif religieux (Gama'ât et
Gam'eyât) très dense qui balise toute la société égyptienne, les liens sont
très lâches.
2. Cf. M. Berger, Islam in Egypt today. Social and political aspects of popular religion,
Cambridge up, 1970, et M.Gilseman, Trajectories of contemporary sufism, in Islamic Dilemnas,
Gellner Ed. 60 NICOLE KHOURI
Ъ I Du côté

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