Fille de paysan, épouse de samouraï. Les lettres de Michi Yoshino - article ; n°1 ; vol.54, pg 55-86
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Fille de paysan, épouse de samouraï. Les lettres de Michi Yoshino - article ; n°1 ; vol.54, pg 55-86

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Annales. Histoire, Sciences Sociales - Année 1999 - Volume 54 - Numéro 1 - Pages 55-86
From peasant daughter to samurai wife. The letters of Yoshino Michi. WALTHALL. The household constituted the basic socioeconomic and religious unit in Tokugawa Japan 1600-1868. Although it was nominally patriarchal argue that the emo tional bonds between parent and daughter appearing in private documents parti- cularly letters and diaries complicate what we mean by this term. These documents allow us to situate some women at the intersection of entrepreneurial and aristocratic rural and urban cultures. They show how women could be used as vehicles for sociability in families of very different statuses through employment practices marriages and networks of social relations that tied the peasants to the military aris tocracy in vertical hierarchy. They also expose the dynamism of the ongoing relationships between daughters and their parents relationships too often ignored in discussions of the family economy In these documents women showed themselves to be resourceful and clever in preserving their positions sometimes to the benefit of their marital households sometimes to the benefit of themselves.
32 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1999
Nombre de lectures 37
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Madame Anne Walthall
M.-P Gaviano
Fille de paysan, épouse de samouraï. Les lettres de Michi
Yoshino
In: Annales. Histoire, Sciences Sociales. 54e année, N. 1, 1999. pp. 55-86.
Abstract
From peasant daughter to samurai wife. The letters of Yoshino Michi. A. Walthall.
The household constituted the basic socioeconomic and religious unit in Tokugawa Japan (1600-1868). Although it was nominally
patriarchal, I argue that the emotional bonds between parent and daughter appearing in private documents, parti cularly letters
and diaries, complicate what we mean by this term. These documents allow us to situate some women at the intersection of
entrepreneurial and aristocratic, rural and urban cultures. They show how women could be used as vehicles for sociability in
families of very different statuses through employment practices, marriages, and networks of social relations that lied the
peasants to the military aristocracy in a vertical hierarchy. They also expose the dynamism of the ongoing relationships between
daughters and their parents, relationships too often ignored in discussions of the family economy. In these documents women
showed themselves to be resourceful and clever in preserving their positions, sometimes to the benefit of their marital
households, sometimes to the benefit of themselves.
Citer ce document / Cite this document :
Walthall Anne, Gaviano M.-P. Fille de paysan, épouse de samouraï. Les lettres de Michi Yoshino. In: Annales. Histoire,
Sciences Sociales. 54e année, N. 1, 1999. pp. 55-86.
doi : 10.3406/ahess.1999.279736
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1999_num_54_1_279736FILLE DE PAYSAN EPOUSE DE SAMOURA
Les lettres de Yoshino Michi
Anne WALTHALL
Dans le Japon moderne époque des Tokugawa 1600-1868) la famille
constitue le fondement socio-économique et religieux tous les échelons
de la société est vrai pour le shogun au sommet de la hiérarchie qui
se distingue lui-même en utilisant le nom de Tokugawa pour désigner sa
propre lignée) est vrai aussi pour les couches inférieures de la société
les roturiers paysans artisans marchands) pour les daimyô les seigneurs
qui gouvernent leurs domaines au nom du chôgun mais sans lui rendre
vraiment de comptes ainsi que pour les guerriers samouraïs qui dans les
villes servent dans les administrations du shogun ou celles des daimyô
ensemble de la pyramide sociale obéit ce principe En théorie du moins
puisque statut social et lieu de résidence se transmettent héréditairement
il détermine donc le champ des possibilités offertes aux hommes et aux
femmes Les femmes samouraïs sont tenues de se conformer aux normes
que prescrit le confucianisme obéissance au père abord au mari ensuite
au fils enfin Le statut épouse leur interdit de aventurer trop souvent
extérieur de rendre visite leurs parents plus de deux fois an et cette
coutume touche certains milieux roturiers lorsque la propriété se
transmet de génération en génération Maîtres ou sujets tous se plient donc
la même règle le mariage sert non la satisfaction des inclinations
individuelles mais intérêt de la maison le ie dans les couches supérieures
de la paysannerie la valeur de corps collectif et transgénérationnel du ie
incluant propriété métier et nom est cependant acquise entre la fin
du 17e et le début du 18e siècle)1 Leur vie durant les femmes autant que
les hommes sont donc soumises aux contraintes un régime patriarcal
incarné par les cérémonies que célèbre en honneur des esprits ancestraux
le chef de la maison toujours masculin et parfois adopté faute de descen-
Voir par exemple YAMAMOTO Eiji Ronin yuisho nise monjo myôji taito Kanto
kinsei shi kenkyû 28 juin 1990 29
55
Annales HSS janvier-février 1999 no pp 55-86 LA FEMME JAPONAISE
dant direct Seules échapperaient ce contrôle les familles de paysans
ordinaires et de tenanciers quoique les pressions exercées par les membres
de leur famille et parfois la communauté villageoise tout entière brident
leur liberté de choix sur le marché du mariage et déterminent le lieu de
leur résidence la fin de leurs jours2
Si pertinent et si communément admis soit-il ce tableau des normes
qui régissaient la condition féminine laisse dans ombre tout un pan des
expériences vécues par les femmes En effet la croissance économique
extraordinaire due la paix qui règne depuis le début du 17e siècle dé
bouche dans les milieux roturiers et chez les paysans en particulier sur
une économie plus diversifiée et plus commerciale Or les bénéfices de cette
inflexion dont bien des études ont établi les incidences sur le ie et son
chef masculin3 prirent un visage différent pour les femmes En effet parmi
les facteurs qui aube du 19e siècle rendent plus complexe la vie des
paysannes aisées résidant non loin Edo Tokyo hui) capitale du
shogun trois revêtent une importance particulière aptitude lire et
écrire les fonctions de suivante exercées dans les appartements du shogun
et du daimyô et les ressources financières accrues de leurs parents Ins
truction et postes occupés dans les maisons nobles exigeaient des frais dont
il serait difficile de réduire la portée au seul souci élargir la gamme des
mariages possibles Aussi notre hypothèse sera-t-elle que ces dépenses
accrues loin de servir seulement ambition un meilleur parti visaient
ouvrir éventail des stratégies de survie et cela parce que la famille
anticipait le destin de sa fille au-delà même de ses noces Il agirait donc
un investissement non court mais long terme Conséquence peut-être
imprévue les filles se virent par là accorder une chance de franchir les
frontières sociales de diversifier leur existence et exprimer leurs souhaits
propres par des biais souvent interdits aux hommes
Une hypothèse de ce genre ne peut guère appuyer sur une étude
statistique Age moyen des femmes au moment du mariage probabilité de
divorce nombre enfants durée moyenne de vie autant informations
dont nous disposons qui sont un piètre secours il agit analyser
le rôle des femmes dans ce qui les différencie des hommes intérieur
de leur réseau social rien ne filtre là de leurs désirs ou du maintien des
liens avec leur famille origine4 Aussi aurons-nous recours des récits
de vies individuelles Sans nous leurrer cependant un fait avéré pour un
Voir MEGA Atsuko Edo zenchuki no onna hôkônin no in ni tsuite Josei shigaku
no 1992 13 YAMAKAWA Kikue Women of the Mito Domain Recollections of Samurai
Family Life trad anglaise et introd de Kate Wildman Nakai Tokyo University of Tokyo
Press 1992 16 Les modèles endogamie et exogamie villageoise variaient considéra
blement une région autre Pour un examen du rôle joué par les lignages on se reportera
Herman OMS Tokiigawa Village Practice Class Status Power Law Berkeley University
of California Press 1996 pp 21-23
Voir par exemple Thomas SMITH Native Sources of Japanese Indutrialization 1750-
1920 Berkeley University of California Press 1988
Voir Laurel CORNELL Why are there no Spinsters in Japan Journal of Family
History 9/4 hiver 1984 pp 326-339 id. Peasant Women and Divorce in Preindustrial
Japan Signs Journal of Women in Culture and Society 15/4 1990 pp 710-732
56 WALTHALL PAYSANNE ET EPOUSE DE SAMOURA
individu peut être aucune pertinence pour un autre et le risque est
grand avoir en tout et pour tout établi une exception la loi commune
Mais la remise en cause des idées trop re ues exception qui infirme
la règle est parfois nécessaire
Cette étude se fonde donc sur existence une femme parfaitement
ordinaire Yoshino Michi naît en 1808 une famille paysanne résidant
dans le village de Shimo Morooka hui absorbé par la ville Orne la banlieue ouest de Tokyo Mais est Edo avec les lettres elle
adresse ses parents que débute la véritable histoire de sa vie Sans cette
correspondance son destin se bornerait pour nous une morne succession
de dates conservées dans les archives familiales de son père naissance
passage de la petite enfance âge de raison en 1814 mariage avec un
médecin samouraï en 1839 mort en 1883 mentionnée cette fois dans le
registre des décès de sa belle-famille)5 Les quelque 115 lettres elles-mêmes
laissent dans ombre de larges pans de son existence de sa vie antérieure
son départ pour Edo en 1828 âge de vingt ans elle se fait
suivante de celle elle mena après la disparition de son père en 1862
nous ignorons tout et absence de date portée sur les lettres interdit de
plus toute perspective strictement chronologique Cette correspondance
offre cependant une occasion sans guère équivalent examiner la na

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