Instabilité des cours du maïs et incertitude en milieu rural : le cas de la déforestation dans la région de Tuléar (Madagascar) - article ; n°164 ; vol.41, pg 815-839
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Tiers-Monde - Année 2000 - Volume 41 - Numéro 164 - Pages 815-839
25 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2000
Nombre de lectures 21
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Sylvain Fauroux
Instabilité des cours du maïs et incertitude en milieu rural : le
cas de la déforestation dans la région de Tuléar (Madagascar)
In: Tiers-Monde. 2000, tome 41 n°164. pp. 815-839.
Citer ce document / Cite this document :
Fauroux Sylvain. Instabilité des cours du maïs et incertitude en milieu rural : le cas de la déforestation dans la région de Tuléar
(Madagascar). In: Tiers-Monde. 2000, tome 41 n°164. pp. 815-839.
doi : 10.3406/tiers.2000.1439
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_1293-8882_2000_num_41_164_1439INSTABILITÉ DES COURS DU MAÏS
ET INCERTITUDE EN MILIEU RURAL
LE CAS DE LA DEFORESTATION
DANS LA RÉGION DE TULÉAR
(MADAGASCAR)1
par Sylvain Fauroux*
La fin des années 1980 a vu le rapide essor d'une filière de product
ion et de commercialisation du maïs dans la région de Tuléar, à Madag
ascar. Les producteurs de maïs utilisant de préférence des techniques
d'essartage, en quelques années le couvert forestier s'est considérable
ment dégradé. Parmi les facteurs susceptibles d'agir sur la vitesse de
propagation de la deforestation, le prix du maïs, variable de référence
pour tous les acteurs de la filière, se trouve au centre de notre analyse. À
première vue, la grande instabilité qu'il véhicule dans un contexte naturel
très incertain semble limiter son impact sur les stratégies de défriche
ment des producteurs.
Depuis le milieu des années 1980, la mise en place d'une politique
européenne de promotion de l'élevage porcin dans certains pays de
l'Union, dont la France, a conduit au développement rapide d'un él
evage intensif à l'île de la Réunion. Les qualités énergétiques du maïs
et son faible coût de production en font l'aliment de base des
cochons.
Jusqu'alors, l'île de Madagascar ne produisait du maïs qu'à des
fins essentiellement vivrières, exception faite du boom des années 1930
* Conseiller économique, Handicap international.
1. Cette étude a été réalisée dans le cadre du programme de recherche « Gestion de l'espace rural et
de l'environnement à Madagascar (gerem) » issu d'un partenariat entre l'Institut de recherche pour le
développement (IRD) et le Centre national de recherche sur l'environnement (CNRE) du ministère de la
Recherche scientifique malgache. Le travail de terrain a été encadré par Pierre Milleville, directeur de
recherche en agronomie à l'iRD et responsable du programme gerem.
Revue Tiers Monde, t. XLI, n° 164, octobre-décembre 2000 816 Sylvain Fauroux
dans la région de MorondavaK En outre, les quantités échangées sur
les marchés locaux restaient marginales par rapport à celles destinées
à Pautoconsommation. La brusque apparition d'une importante
demande de la part d'un partenaire économique régional2 est à
l'origine d'une forte expansion de la production de maïs dans la région
de Tuléar, passant promptement d'une culture vivrière à une culture
commerciale.
La région de Tuléar, située dans le sud-ouest de Madagascar, est
une zone côtière caractérisée par un climat aride3. Ce climat condi
tionne un paysage agricole spécifique où les principales cultures vivriè-
res sont le maïs et le manioc. La culture du maïs est partagée entre
baiboho et hatsake4, le manioc est cultivé sur baiboho.
La culture du maïs sur hatsake présente l'avantage d'être une cul
ture vivrière dont les rendements sont élevés, les temps de travaux
réduits et dont l'investissement initial se borne à l'apport en semences5.
En quelques années les principales forêts de la région ont vu leur
superficie considérablement réduite et, au rythme actuel, elles seraient
vouées à disparaître dans quelques décennies. Cela soulève deux pro
blèmes majeurs : celui de l'éradication probable d'espèces animales et
végétales endémiques, et celui du devenir de populations rurales qui,
pour assurer leur autosuffisance alimentaire, se reportent systémat
iquement sur les ressources de la forêt pendant la soudure, ou épisodi-
quement lors des campagnes désastreuses6.
Pour comprendre comment la pratique du hatsake du maïs,
employée avec parcimonie par les anciennes générations, a graduelle
ment pris un essor dramatique, il est utile de se placer à l'échelle des
producteurs vivant dans la brousse de la région de Tuléar. Dans cette
région les exploitations de maïs sont largement dominantes. Parmi les
facteurs susceptibles d'influencer fortement les stratégies des product
eurs de maïs, le prix, variable de référence pour tous les acteurs pre-
1. Cette région côtière est attenante à la partie nord de la région de Tuléar. Les facteurs déclen
cheurs du boom du maïs et ses conséquences sociales et environnementales seront étudiées ultérieurement.
2. Dès 1988 les besoins annuels moyens des éleveurs réunionnais se situaient aux alentours
de 100 000 t.
3. La pluviométrie annuelle moyenne est de 600 mm, les pluies sont concentrées de mi-novembre à
mi-mars avec d'importantes variations suivant les zones et les années.
4. Le terme de baiboho correspond aux cultures sur des terres de décrue, celui de hatsake aux cultu
res sur défriche-brûlis. Selon une enquête menée par le Projet Sud-Ouest (pso) en 1994 auprès de 87 pro
ducteurs de la région de Tuléar, 58 % des exploitations de maïs correspondent à du hatsake, 42 % à du
baiboho [Ampilahy et al, 1994]. La culture du manioc sur hatsake est peu pratiquée, car cela lui donne
une forte amertume qui le rend difficilement consommable.
5. Les semences ayant généralement été stockées à l'issue de la précédente récolte, l'investissement
financier est souvent nul.
6. En dix ans (1990-1999) trois mauvaises campagnes ont été recensées (1992, 1995 et 1998), avec
pour origine un déficit pluviométrique ou de vastes attaques acridiennes. Instabilité des cours du maïs et incertitude en milieu rural 817
nant part au commerce de cette céréale, peut sembler approprié. Il
s'agira donc ici de s'interroger sur l'impact des variations du cours du
maïs sur les stratégies paysannes de défrichement, afin de déceler une
éventuelle relation entre la fonction prix et l'évolution des superficies
déboisées. Avant tout, il faudra s'intéresser au signal de prix qui par
vient au producteur, par l'analyse des connexions possibles du cours
local avec le cours mondial (partie I). L'enquête réalisée auprès des
producteurs de maïs servira à mettre en évidence l'incertitude
ambiante dans laquelle ils sont plongés, et à relativiser l'importance
des prix dans leurs choix culturaux (partie II). Toutefois, en remontant
à un niveau méso-économique, dans un cadre d'analyse dynamique, le
prix du maïs semble se retrouver au centre du problème de la defores
tation (partie III).
I. FLUCTUATIONS DES PRIX ET FONCTIONNEMENT DE LA FILIÈRE
1. Influence de l'instabilité du cours mondial
du maïs sur celui de la région de Tuléar
a) Le cours mondial du maïs au свот : une instabilité récurrente
Les échanges de maïs au sein du marché américain étant prédomin
ants, son cours, affiché au Chicago Board of Trade (свот), est rap
idement devenu le cours directeur du marché mondial. Aujourd'hui,
sur ce marché à terme de Chicago ont lieu toutes les transactions
boursières mondiales concernant le maïs, et le cours affiché sert de
référence à l'immense majorité des agents économiques de la filière,
qu'il s'agisse des grands négociants en grain qui assurent plus de 90 %
du commerce mondial de maïs, des producteurs, des éleveurs ou des
entrepreneurs industriels.
L'ouverture non régulée du marché mondial du maïs à de nou
veaux pays producteurs, l'élévation de la consommation mondiale par
la combinaison d'un taux de croissance économique et d'un taux
d'accroissement naturel de la population positifs rendent la courbe de
prix très instable dans le temps, avec l'impossibilité de prévoir sa ten
dance à long terme.
Néanmoins, jusqu'au milieu des années 1990, ce constat d'

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