Itinéraires du travail domestique en Inde : les filles d Erayiur - article ; n°170 ; vol.43, pg 353-371
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Itinéraires du travail domestique en Inde : les filles d'Erayiur - article ; n°170 ; vol.43, pg 353-371

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Tiers-Monde - Année 2002 - Volume 43 - Numéro 170 - Pages 353-371
Aurélie Varrel — Itineraries of domestic labour in India : the girls from Erayiur.
India has a large but complex domestic labour sector. Little housemaids, adolescents of rural origin employed as servants by the urban middle classes, constitute a particular category, which is nonetheless at the centre of recent mutations. The spatial and professional itineraries of the young girls are supposed to be socially established ; but, in fact, they show diversified and complex patterns, related to their insertion in an economic whole, thereby transforming the archaic image generally associated to domestic employment.
19 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2002
Nombre de lectures 46
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Aurélie Varrel
Itinéraires du travail domestique en Inde : les filles d'Erayiur
In: Tiers-Monde. 2002, tome 43 n°170. pp. 353-371.
Abstract
Aurélie Varrel — Itineraries of domestic labour in India : the girls from Erayiur.
India has a large but complex domestic labour sector. Little housemaids, adolescents of rural origin employed as servants by the
urban middle classes, constitute a particular category, which is nonetheless at the centre of recent mutations. The spatial and
professional itineraries of the young girls are supposed to be socially established ; but, in fact, they show diversified and complex
patterns, related to their insertion in an economic whole, thereby transforming the archaic image generally associated to domestic
employment.
Citer ce document / Cite this document :
Varrel Aurélie. Itinéraires du travail domestique en Inde : les filles d'Erayiur. In: Tiers-Monde. 2002, tome 43 n°170. pp. 353-371.
doi : 10.3406/tiers.2002.1598
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_1293-8882_2002_num_43_170_1598ITINERAIRES
DU TRAVAIL DOMESTIQUE EN INDE :
LES FILLES D'ERAYIUR
par Aurélie Varrel*
Le secteur du travail domestique en Inde est important et complexe.
Les petites bonnes, adolescentes d'origine rurale employées comme ser
vantes à demeure par les classes moyennes urbaines, y constituent une
catégorie particulière, mais néanmoins inscrite au cœur de ses mutations
récentes. Les itinéraires spatiaux et professionnels de ces jeunes filles,
censés être extrêmement encadrés et balisés, apparaissent en fait de plus
en plus diversifiés et complexes, traduction de leur insertion croissante
dans les logiques économiques d'ensemble, recomposant ainsi l'image
archaïque souvent attachée, ailleurs, à ce type d'emploi domestique.
Le travail domestique en Inde est un phénomène massif et même
sans doute actuellement en expansion, grâce à l'élargissement des
classes moyennes et à la double activité des ménages nucléaires qui s'y
développe. Cette étiquette recouvre toutefois une grande variété
d'activités, qui n'ont fait l'objet jusqu'ici que d'une production scienti
fique restreinte, focalisée sur quelques types assez précis de travail
domestique : les castes spécialisées dans certaines activités de service
aux particuliers (Karlekar, 1982), les employés de maison des fonction
naires (Raghuram, 1993 ; Adams, Dickey, 2000), les servantes attachées
traditionnellement à un groupe précis (Schenk-Sandbergen, 1988) ; et,
dans l'ensemble, surtout les domestiques non logés (Singh, 2001 ;
Adams, Dickey, 2000). De même, il est difficile d'avoir des évaluations
à grande échelle du nombre de travailleurs domestiques en Inde, car ils
sont noyés par l'appareil statistique indien dans la rubrique « other ser
vices », rassemblement disparate d'activités tertiaires très diverses.
* Géographe, Université de Paris X - Géotropiques/MSHS-Migrinter.
Revue Tiers Monde, t. XLHI, n° 170, avril-juin 2002 354 Amélie Varrel
Cet article veut attirer l'attention du lecteur sur une catégorie de tra
vailleurs domestiques largement inaperçue par la recherche sur le sujet,
en particulier dans le champ indien1 : celle des domestiques de sexe fémi
nin, seules, logées chez l'employeur, et que je nomme « bonnes » en réfé
rence à l'écho que possèdent ces caractéristiques dans l'histoire sociale
européenne. Ce sous-secteur de l'emploi domestique, qui correspond de
plus en plus aux classes moyennes urbaines montantes, est pour partie
alimenté par des migrations circulaires de jeunes filles d'origine rurale,
au point de constituer localement des niches migratoires2.
L'originalité de ce phénomène réside dans la distance qu'il repré
sente par rapport aux normes sociales, culturelles, religieuses, morales,
qui restreignent et limitent en théorie fortement la mobilité féminine,
tout comme le travail des femmes.
Après une présentation du contexte organisationnel du marché du
travail domestique en Inde mettant en avant les mutations d'ensemble
qui l'affectent, je me propose d'analyser la genèse, le fonctionnement
et les évolutions d'une filière spécifique de travail domestique, qui
s'incarne spatialement par une filière migratoire ayant pour origine la
bourgade d'Erayiur, dans les campagnes du nord du Tamil Nadu, État
qui semble être un des réservoirs de main-d'œuvre domestique à
l'échelle nationale3.
Au-delà de l'image d'archaïsme socio-économique et de survivance
culturelle qui semblent caractériser ce type de travail domestique, je
souhaite montrer les évolutions à l'œuvre dans ce sous-secteur, qui
l'inscrivent pleinement dans les mutations d'ensemble qui touchent la
société indienne en général, et le marché du travail domestique en part
iculier, et poser la question de la distance entre norme et réalité, place
et rôle effectif de la femme en Inde.
UN MARCHÉ DU TRAVAIL PROTÉIFORME, FORTEMENT
CONCURRENTIEL ET FÉMINISÉ
Le marché du travail domestique reflète les évolutions récentes de
la société indienne et du marché du travail national : on y constate une
1. Ce silence de la littérature s'explique au moins pour partie par la gêne attachée à cette forme
d'emploi, associée à nombre de récits sordides de mauvais traitements, détournements de mineures, gros
sesses illégitimes... Cela rend un certain nombre d'acteurs (employeurs, anciennes bonnes, parents, inte
rmédiaires) peu coopératifs à l'égard de toute question ou enquête.
2. De là l'objet de cet article : la bonne société catholique et francophone du territoire de Pondi-
cherry a longtemps, seule, fait venir ses « petites bonnes » exclusivement de la bourgade pourtant éloignée
d'Erayiur (trois heures de route).
3. Les stéréotypes régionaux présentent les bonnes comme Tamoules, dans le sud de l'Inde, dans le
Nord comme Biharis, Népalaises ou Bangladeshis. Itinéraires du travail domestique en Inde 355
diversification croissante des statuts, des rémunérations et des situa
tions, liée à une concurrence accrue pour l'emploi qui maintient une
forte pression sur les salaires et explique en partie la féminisation d'un
type d'emploi naguère identifié comme masculin.
La féminisation de l'emploi domestique,
indicateur d'un secteur peu attractif
Par rapport à la situation prévalant après l'Indépendance indienne
(Mehta, 1960), où les hommes prédominaient dans le secteur du tra
vail domestique sauf pour des emplois spécifiques (nourrices ou ayah),
on constate une forte féminisation du travail domestique en Inde, en
particulier dans les segments les plus précaires et les moins bien rémun
érés, ce qui correspond à une tendance présente dans tous les secteurs
de l'économie indienne.
Les hommes adultes se sont pratiquement retirés du service domest
ique aux particuliers, sauf dans des niches précises : emplois de jardi
nier, de gardien (mali), de chauffeur, toutes fonctions qui se doublent
occasionnellement d'un statut d'homme à tout faire et, moins souvent,
de cuisinier, notamment si l'employeur recherche une personne de
haute caste pour des raisons religieuses. Cela signifie qu'ils sont
employés surtout dans des familles aisées, donc présents dans ce sec
teur où les rémunérations sont les plus intéressantes et le statut presti
gieux.
En revanche, lorsqu'un statut d'employé de l'État est attaché à ce
type de travail (par exemple comme domestique affecté à un haut
fonctionnaire ou à un cadre d'une entreprise nationale, faisant partie
des « avantages » matériels de la fonction), on constate une très forte
représentation masculine. En effet, ces places sont mieux payées et
confèrent un statut de fonctionnaire, certes de très bas rang (public
servant), mais avec les avantages qui y sont associés (notamment :
couverture sociale, droit à la retraite) et le prestige qui en découle.
On peut donc dire que les hommes se sont retirés du travail domest
ique, avec l'ouverture de meilleures perspectives d'emploi, sauf dans
ses segments les plus avantageux. Ils ont été remplacés en majorité par
des femmes mariées, pauvres, souvent issues des migrations ville-
campagne, qui sont prêt

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