Jurij Tynjanov face au problème du personnage-auteur dans le Voyage à Arzroum de Puškin - article ; n°3 ; vol.55, pg 431-436
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Jurij Tynjanov face au problème du personnage-auteur dans le Voyage à Arzroum de Puškin - article ; n°3 ; vol.55, pg 431-436

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Description

Revue des études slaves - Année 1983 - Volume 55 - Numéro 3 - Pages 431-436
6 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1983
Nombre de lectures 8
Langue Français

Extrait

Madame Maria Bianca Luporini
Jurij Tynjanov face au problème du personnage-auteur dans le
Voyage à Arzroum de Puškin
In: Revue des études slaves, Tome 55, fascicule 3, 1983. Ju. N. Tynjanov. pp. 431-436.
Citer ce document / Cite this document :
Luporini Maria Bianca. Jurij Tynjanov face au problème du personnage-auteur dans le Voyage à Arzroum de Puškin. In: Revue
des études slaves, Tome 55, fascicule 3, 1983. Ju. N. Tynjanov. pp. 431-436.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/slave_0080-2557_1983_num_55_3_5350JURU TYNJANOV
FACE AU PROBLÈME DU PERSONNAGE-AUTEUR
DANS LE VOYAGE À ARZROUM DE PUŠKIN
PAR
MARIA BIANCA LUPORINI
La notion de literaturmja ličnost' (c'est-à-dire de l'individualité littéraire, de
la personnalité du poète, du conteur) représente pour Tynjanov une catégorie fon
damentale qu'on ne peut pas réduire à la notion plus générique de obraz avtora
(image de l'auteur) telle qu'on la trouve élaborée ou utilisée dans les travaux de V.
V. Vinogradov, G. A. Gukovskij, Ja. O. Zundelovič, D. S. Lixačev, quoiqu'il y ait
entre les deux notions des rapports et des affinités que nous n'analyserons pas ici.
Même chez Tynjanov au départ — par exemple dans les pages sur Blok (1921) —,
la notion de literaturnaja ličnost' (qu'il n'avait pas encore appelée ainsi) est en
germe, mais elle se confond encore avec celle de « l'image de l'auteur » telle qu'elle
se dégage du rapport de la figure réelle, plus ou moins mythifiée, avec la perception
du public contemporain. On peut observer que l'ensemble de cette problématique -
présence ou absence de l'image de l'auteur dans le produit littéraire — est discuté
de nouveau dans la science littéraire et linguistique russe aujourd'hui, comme par
exemple dans l'article de K. N. Atarova et G. A. Lesskis sur la structure et la sémant
ique de la narration à la première personne {Изв. АН, сер. лит. яз., t. 35, n. 4,
1976).
Chez Tynjanov la catégorie de la literaturnaja ličnost' se précisa au niveau
théorique dans les deux essais le Fait littéraire (écrit en 1923-24) qX De l'évolu
tion littéraire (écrit en 1927-28). Dans le premier, elle est présentée comme un
« principe constructif » selon la signification forte que Tynjanov attribue à cette
expression : un principe qui, « tracé dans un domaine quelconque, tâche de s'élar
gir et de se répandre dans des domaines toujours plus vastes » (Ј1ИЛК, p. 267).
Dans le cas de la literaturnaja ličnost' il s'agit d'un principe constructif qui, se
trouvant à l'étroit dans un matériau purement littéraire, déborde sur les phéno
mènes du byt.
Dans le second essai cette même catégorie devient encore plus complexe parce
qu'elle s'articule avec la notion ď« orientation verbale » et de « fonction verbale »
corrélative. L'usage des deux termes est ainsi précisé par Tynjanov :
Rev. Étud. slaves. Paris, LV/3, 1983, p. 431-436. 432 M. В. LUPORINI
Enlevons du mot « orientation » toute couleur téléologique, toute destination et « inten
tion ». Qu'obtient-on ? Ľ« » de l'œuvre (et de la série) littéraire sera sa fonction
verbale, sa corrélation avec le byt1 .
Sur cette base Tynjanov peut écrire :
La literaturnaja ličnost', ľavtorskaja ličnost', le geroj représentent à certaines époques
l'orientation verbale de la littérature et, à partir de là, se transportent dans le byt. Tels sont
les héros lyriques de Byron qui sont associés à sa literaturnaja ličnost' - à cette personnalité
que le lecteur déduit de ses vers - et qui se transportent dans le byt. Telle est la literaturnaja
ličnost' de Heine qui est assez éloignée du véritable Heine biographique. A certaines époques,
la biographie devient une littérature orale apocryphe. C'est un phénomène légitime condi
tionné par l'orientation verbale d'un système donné : Puškin, Tołstoj, Blok, Majakovskij,
Ľsenin, que l'on peut opposer à l'absence de literaturnaja ličnost' de Leskov, Turgenev, Fet,
Majkov, Gumilev, etc., absence qui se rattache au manque d'orientation verbale vers la liter
aturnaja ličnost'. Pour que se produise cette expansion de la littérature dans le byt, il faut,
bien entendu, des conditions de byt tout à fait particulières.2
L'isolement statique ne mène absolument pas à la literaturnaja ličnost' de l'auteur, mais
d'une façon illégitime, à la place du concept de l'évolution littéraire et de la genèse littéraire,
introduit un principe de genèse psychologique3.
De plus le point de vue statique porte à condamner « des phénomènes littéraires
significatifs et valables ».
Le point de vue dynamique (et par conséquent évolutif) est lié chez Tynjanov à
sa conception même de la littérature (« construction verbale dynamique ») qui
comprend dans son élaboration la question des séries littéraires et extra- litté
raires. Nous ne pouvons pas développer ce problème ici dans toute sa complexité
théorique. Mais c'est au point de vue dynamique qu'est étroitement lié le problème
du personnage-auteur, c'est-à-dire la notion de literaturnaja ličnost'. En 1924
Tynjanov écrit :
L'individualité de l'auteur n'est pas un système statique, la literaturnaja ličnost' est dyna
mique comme l'époque littéraire avec laquelle et dans laquelle elle évolue. Il ne s'agit pas de
quelque chose de semblable à un espace clos qui contient quelque chose, c'est plutôt une
ligne brisée, que l'époque littéraire rompt et dirige.4
Chez Puškin, par exemple, ce problème est étroitement lié à la réforme du style
poétique qu'il a effectuée et aux reflets de celle-ci dans la question de la prose.
Cette dernière est développée par Tynjanov à travers l'analyse du processus de
formation chez Puškin de ce que appelle (et c'est sa découverte) la
nejtral'naja proza.
Dans l'analyse de cet objet littéraire, qui se déploie en deux étapes : le premier
essai, Puškin (1928), et le second, Voyage à Arzroum (1936), Tynjanov n'a pas
comme point de départ la catégorie de la literaturnaja ličnost'. Mais il la rejoint,
et nous allons voir de quelle façon, dans une modalité particulière : précisément
par rapport à la notion de nejtral'naja proza prise à son niveau stylistique global,
qui détermine l'optique sur les matériaux de la narration.
Tynjanov écrit l'essai Puškin en 1928 sur demande de la rédaction du Diction
naire Granat. Nous le lisons maintenant dans la version plus longue qui fut publiée
en 1929 dans le recueil Arxaisty i novatory. Dans cet essai le problème qui ressort
1 . « О литературной эволюции », in ПИЛК, р. 278.
2. fbid., p. 279.
3. « Литературный факт », in ПИЛК, p. 260.
4. Ibid.. p. 259. DU PERSONNAGE- AUTEUR 433 PROBLÈME
est celui de la transition de Puškin de la poésie à la prose, problème qui était très
important pour les formalistes.
La nouveauté de la contribution apportée par Tynjanov est liée au fait que,
en réalité, une fois que l'on avait découvert les plans et les programmes en prose
que Puškin avait écrits pour ses compositions poétiques, on ne pouvait plus parler
d'une transition poésie -* prose, comme le faisait Ejxenbaum, mais plutôt d'une
transition qu'on peut schématiser ainsi :
-*■ prose prose -*■ (poésie)
Ici le terme intermédiaire peut tomber, du moment que seule une « limite
mobile » sépare les plans préparatoires (c'est-à-dire les annotations privées de
Puskin) non pas de la poésie en vers, dont il n'est plus question, mais de la prose
définitive.
En effet, ce qui, du point de vue du discours poétique en formation, était de
simples « phrases d'appui » entre, une fois qu'il n'est plus question de transition
aux vers, dans une dynamique différente dont Tynjanov va mettre à jour l'articula
tion profonde, articulation qui est la dynamique même de la constitution de la
prose (publique) de Puškin et spécialement de sa prose narrative. La « phrase
d'appui » des plans, qui préparent soit la poésie, soit la prose, est objectivement
la phrase brève « neutre », la phrase brève de scénario (kratkaja scenarnaja

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