L'Emigration et la résistance démographique au pays bergamasque - article ; n°1 ; vol.4, pg 15-25

A.-M. Faidutti

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Méditerranée - Année 1963 - Volume 4 - Numéro 1 - Pages 15-25
11 pages

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• Publié le: 01 janvier 1963
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Anne-Marie Faidutti
L'Emigration et la résistance démographique au pays
bergamasque
In: Méditerranée, 4e année, N°1, 1963. pp. 15-25.
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Faidutti Anne-Marie. L'Emigration et la résistance démographique au pays bergamasque. In: Méditerranée, 4e année, N°1,
1963. pp. 15-25.
doi : 10.3406/medit.1963.1062
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/medit_0025-8296_1963_num_4_1_1062L'EMIGRATION
ET LA RÉSISTANCE DÉMOGRAPHIQUE
DU PAYS BERGAMASQUE
Au Nord-Est de Milan, les vallées du Brembo et du Serio ani
ment et dirigent vers Bergame un pays de moyennes montagnes et de
collines avant de se fondre dans la plaine du Pô. Cet ensemble qui ne
comprend qu'un quart de plaine forme la province de Bergame connue
pour sa vitalité.
L'étude des courbes de natalité et de mortalité de la province de
Bergame (fig. 1 et 2) comparées à celles de la région lombarde ou
même à celles de toute l'Italie permet de classer cette province d'Italie
du Nord dans un bon rang démographique. Certes l'excédent des
naissances sur les décès est inférieur à ceux des provinces méridio
nales mais sa composition où un grand nombre de naissances influe
plus que la rareté des décès et sa situation en Italie du Nord étonne.
En 1951 la pyramide d'âges de la province de Bergame, remarquable
ment équilibrée bien que légèrement vieillissante, fait pareillement
tâche parmi les provinces lombardes. La province de Bergame est une
des plus jeunes et une des plus prolifiques d'Italie du Nord; est-ce là
une qualité originale ou la marque d'une évolution démographique
décalée dans le temps par rapport aux autres provinces lombardes
comme le paraît grossièrement l'Italie du Sud par rapport à l'Italie
du Nord ?
L'évolution démographique bergamasque.
Depuis le début du siècle la natalité bergamasque domine, et parf
ois de beaucoup, la natalité moyenne de l'Italie; mais la différence
est surtout grande dans le premier quart du xxe siècle. Alors que la Mme A.-M. FAIDUTTI 16
Fig. 1. — Naissances pour 1 000 habitants
Courbes 1-2-3
Excédent des naissances sur les décès pour 1 000 habitants
Courbes 4-5-6
Province de Bergame
Lombardie
Italie ....
moyenne italienne baissait fortement sous l'influence des provinces
cisalpines vieillies par une émigration précoce et une fécondité en
rapide déclin, la province de Bergame avait plus de naissances pour
mille habitants que n'importe laquelle des régions méridionales. Après
les récupérations de naissances postérieures à la guerre de 1914-18, la
natalité bergamasque décline lentement mais inexorablement et plus
vite que la moyenne de l'Italie que maintient artificiellement la pro
pagande nataliste fasciste. Avec 19,6 naissances pour 1 000 habitants
en 1953 la province de Bergame reste encore nettement au-dessus de DEMOGRAPHIE DU PAYS BERGAMASQUE 17
la moyenne italienne de 17,3 pour 1 000, mais dans tout le Mezzogiorno
la natalité est supérieure. Au cours des dix dernières années la diff
érence s'atténue progressivement. En 1960 elle n'est plus que de 1
pour 1 000 en faveur de Bergame (18,9 et 17,9) .
Comme il est fréquent dans les pays à forte natalité, la mortalité
bergamasque resta jusqu'en 1930 supérieure à 20 pour 1 000 et se
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Fig. 2. — Décès pour 1000 habitants
Courbes 1-2-3
Excédent des naissances sur les décès pour 1 000 habitants
Courbes 4-5-6
Province de Bergame
Lombardie
Italie ....
maintient aujourd'hui aux environs de 10 pour 1 000; ce coefficient est
toujours supérieur à celui de l'ensemble de l'Italie qui bénéficie de
l'amélioration des conditions sanitaires en Italie du Nord puis de la
grande jeunesse des populations du Mezzogiorno atteintes à leur tour
par la dimension de la mortalité.
Malgré un retard certain dans la lutte contre la mortalité, la pro
vince de Bergame a toujours joui et jouit encore d'un excédent de
naissances nettement plus important que dans l'ensemble de l'Italie
(fig. 1). 1
Mme A.-M. FAIDUTTI 18
Cette bonne tenue démographique peut-être mise à l'actif de
trois facteurs principaux. Un développement économique certain mais
diffus, important sur la bordure méridionale de la province, qui, tout
en donnant du travail à la majorité ,des paysans des collines berga-
masques ne les a pas urbanisés; une émigration traditionnelle tem
poraire vers l'Europe centrale, la France et le Suisse plus que les pays
d'Outre-Mer qui a permis le maintien de fortes densités montagnardes
bien supérieures aux possibilités économiques régionales; le tempé
rament des petits propriétaires agricoles bergamasques à la fois tra
ditionnels et novateurs, très attachés à leur foi catholique.
L'équilibre économique.
Nous n'insisterons pas sur le développement économique de la
partie méridionale de la province qui participe à la richesse de la
Lombardie milanaise et possède outre des industries textiles lainières
traditionnelles et en déclin, de modernes établissements cotonniers
ainsi que des entreprises métallurgiques et chimiques tel l'établiss
ement sidérurgique de la Dalmine. Au recensement de 1951 l'industrie
employait 44,3 pour cent de la population active contre 35,8 pour
cent à l'agriculture soit 110 693 personnes et 16 pour cent de la popul
ation totale, en 1957 cette proportion s'élevait à 20, 9 %. L'industrie
est donc la vraie richesse de la province bergamasque, elle pénètre
depuis longtemps les hautes vallées montagnardes aux ubacs fores
tiers où les villages s'accrochent aux flancs raides des adrets ou des-
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Fig. 3. — Bergame 1951. Pyramide des âges DÉMOGRAPHIE DU PAYS BERGAMASQUE 19
cendent vers les industries de l'aval. Dans le bas des vallées un
équilibre s'est établi entre la population et l'industrie; la petite métall
urgie, les industries chimiques ou textiles rappellent à la fois les
industries alpines et celles de la bordure nord-orientale de notre
Massif Central. L'émigration y a disparu mais dans les villages isolés
au flanc des auges ou blottis au sommet des ravins bergamasques
l'émigration saisonnière est une tradition plus que séculaire qui sévit
toujours avec la même vigueur et permet les fortes densités.
L'émigration.
Moins industrialisée que les provinces de Corne ou de Varèse la
province de Bergame est plus qu'elles riche d'hommes ; richesse qui
lui impose et que favorise l'émigration. Dès la Renaissance les Ber
gamasques monopolisent les durs travaux des ports âe Gènes et de
Livourne où ils animent des sortes de syndicats, dans la plupart des
grandes villes italiennes leurs colonies sont actives mais ils ne partici
pent pratiquement pas au grand mouvement d'émigration outre mer
du début du siècle.
L'émigration saisonnière se dirige traditionnellement vers la
Suisse et la France qui relayèrent en partie l'Autriche-Hongrie. Elle
comprend outre des bûcherons une main-d'œuvre générique utilisée
surtout dans le bâtiment et les travaux publics.
Le bûcheron bergamasque est une figure classique des montagnes
françaises ou piémontaises. Les chiffres officiels révèlent mal cette
émigration. Passant sans papiers ou avec des autorisations temporair
es, travaillant en équipe dans des coupes isolées du monde où il émi
gré, le bûcheron bergamasque pourrait n'être connu que de son em
ployeur, pourtant toute une région vit par et au rythme de cette
émigration. Avant 1914 on comptait de 10 000 à 15 000 départs par
an, entre 1920 et 1930 les évaluations atteignent pour 1922, 1923 et
1924 : 25 000 départs par an sur une population résidente de 580 000
personnes en 1921. De 1947 à 1955 l'émigration contrôlée se situe
autour de 5 000 personnes, les passeports concédés autour de 25 000
parmi lesquels 20 000 pour cause de travail. Ce sont essentiellement
des départs saisonniers.
Nous avons représenté, sur la figure 4, l'évolution des chiffres
officiels de l'émigration tant p