L endroit et l envers du décor : la « touristicité » comparée d Haïti et de la République Dominicaine - article ; n°178 ; vol.45, pg 293-317
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L'endroit et l'envers du décor : la « touristicité » comparée d'Haïti et de la République Dominicaine - article ; n°178 ; vol.45, pg 293-317

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Tiers-Monde - Année 2004 - Volume 45 - Numéro 178 - Pages 293-317
Jean-Marie Théodat — The right and the wrong side of the picture : Comparative facilities of tourism in Haiti and the Dominican Republic Haiti and the Dominican Republic happen to be the only « islands » which are not wholly surrounded by water from all sides. In fact the two countries have a distinct insularity that results from antagonistic territorial appropriations and from differing approaches to tourism policy. They participate in the same Afro- Latin and Creole ambiance that attracts three per cent of global tourism. And yet the windfalls of the tourist manna are unequally shared from one side of the border to the other. The article analyses the conditions of such inverse tourist dispositions between the two Caribbean territories.
25 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2004
Nombre de lectures 31
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Monsieur Jean-Marie Théodat
L'endroit et l'envers du décor : la « touristicité » comparée
d'Haïti et de la République Dominicaine
In: Tiers-Monde. 2004, tome 45 n°178. pp. 293-317.
Abstract
Jean-Marie Théodat — The right and the wrong side of the picture : Comparative facilities of tourism in Haiti and the Dominican
Republic Haiti and the Dominican Republic happen to be the only « islands » which are not wholly surrounded by water from all
sides. In fact the two countries have a distinct insularity that results from antagonistic territorial appropriations and from differing
approaches to tourism policy. They participate in the same Afro- Latin and Creole ambiance that attracts three per cent of global
tourism. And yet the windfalls of the tourist manna are unequally shared from one side of the border to the other. The article
analyses the conditions of such inverse tourist dispositions between the two Caribbean territories.
Citer ce document / Cite this document :
Théodat Jean-Marie. L'endroit et l'envers du décor : la « touristicité » comparée d'Haïti et de la République Dominicaine. In:
Tiers-Monde. 2004, tome 45 n°178. pp. 293-317.
doi : 10.3406/tiers.2004.5466
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_1293-8882_2004_num_45_178_5466L'ENDROIT ET L'ENVERS DU DÉCOR:
LA « TOURISTICITÉ » COMPARÉE D'HAÏTI
ET DE LA RÉPUBLIQUE DOMINICAINE
par Jean-Marie Théodat*
Haïti et la République Dominicaine présentent la particularité d'être
les deux seules « îles » qui ne soient pas entourées d'eau de tous les
côtés. En effet, les deux pays mettent en avant une insularité distincte,
fondée sur une appropriation antagonique du territoire et une approche
différente de la politique touristique. Ils participent de la même ambiance
afro-latine et créole de la Caraïbe qui attire trois pour cent du tourisme
mondial. Et pourtant les retombées de la manne touristique sont très in
également réparties de part et d'autre de la frontière. L'article analyse les
conditions de cette « touristicité » inverse entre les deux territoires cari-
béens.
La touristicité d'un territoire est la combinaison des paramètres
qui permettent d'évaluer à la fois la notoriété et la position de celui-là
dans le développement du phénomène touristique. La notoriété, c'est-
à-dire la renommée, et la capacité d'accueil d'un pays déterminé,
quand elles sont fortes, créent les conditions d'une touristicité élevée,
avec une fréquentation touristique parfois supérieure à la population
résidente. Certains facteurs physiques, tels que l'exiguïté du territoire,
renforcent une impression de congestion sensible dans certains sites
totalement voués à l'activité touristique ; cependant une notoriété
excessive et une capacité d'accueil élevée peuvent déboucher sur l'effet
inverse : la baisse de la fréquentation, donc de la touristicité, par un
effet de saturation, de déjà-vu. La touristicité repose sur différents
types de facteurs : certains sont des paramètres transitoires tels que la
conjoncture internationale, la situation politique et le degré de déve-
* Maître de conférences, Université de Paris I.
Revue Tiers Monde, t. XLV, n° 178, avril-juin 2004 !
I L'endroit et l'envers du décor 295
loppement du reste de l'économie d'un pays, d'autres correspondent à
des données, sinon figées, du moins fixées durablement, telles que la
faune, la flore, la culture et les habitudes d'une communauté.
Les îles de la Caraïbe bénéficient à cet égard d'une rente de situa
tion, car leur renommée et l'aire sur laquelle elles exercent leur pou
voir d'attraction sont larges. Cette excellence est le résultat de plu
sieurs facteurs : le climat tropical, la proximité du marché nord-
américain, une orientation touristique ancienne. Certaines îles en ont
fait une spécialisation qui confine parfois à la mono-industrie : Cuba,
avant la Révolution, était réputée pour être le lieu de vacances d'une
certaine élite nord-américaine qui fit beaucoup pour la popularisation
des ingrédients qui constituent encore aujourd'hui les piliers de la
« touristicité » cubaine : la douceur latine de la vie (tabac, rhum,
soleil), la musique et le sexe ; les Bahamas, l'archipel le plus proche
des Etats-Unis, sont devenues une extension touristique intégrée à
l'espace ludique de leur puissant voisin continental. D'autres îles ont
depuis pris le relais, et la Caraïbe, avec environ 3 % de l'offre touris
tique mondiale1, est devenue l'un des bassins touristiques les plus actifs
de la planète.
La région connaît cependant des situations très contrastées. Certai
nes îles ont un taux d'occupation touristique qui se traduit par une
invasion massive de leur territoire, tandis que d'autres restent en
marge. Et pourtant le fond est commun : les paysages, la cuisine, la
langue parfois. Mais il ne suffit pas d'avoir des plages, du soleil et
diverses infrastructures qui caractérisent ce type d'économie pour
qu'aussitôt les touristes se présentent en masse aux frontières. Le déve
loppement touristique et le type de tourisme privilégié révèlent en
creux les orientations structurelles sur lesquelles les nations et les îles
de la Caraïbe diffèrent profondément. Leur « touristicité » dépend
autant, voire davantage, de l'hospitalité générale et de la qualité de
l'accueil que du climat ou des paysages. Les deux conditions sont
nécessaires, mais non suffisantes, prises séparément, pour asseoir un
réel essor du tourisme.
Parmi ces îles, l'une présente cependant une particularité : sa « tour
isticité » est partagée en deux entre, d'un côté, l'un des pays les plus
avancés en matière d'équipement touristique, la République Dominic
aine, et, de l'autre, le pays le moins visité de la région, celui où
l'activité touristique est presque nulle, Haïti. Ce dernier pays, en dépit
d'un potentiel culturel ou naturel intéressant, reste peu accessible au
1. Rapport annuel de Гомт (Organisation mondiale du tourisme), 2003. Sauf indication contraire,
toutes les données statistiques à suivre sont tirées du même rapport. 296 Jean-Marie Théodat
touriste. La « touristicité » inverse des deux territoires prend une
valeur de paradigme. Nulle part le contraste n'est aussi criant. A
croire que les deux pays forment deux îles distinctes.
Notre idée est qu'au-delà des conditions physiques communes,
c'est la situation politique et sociale qui décide en dernier ressort de la
touristicité d'un territoire. La difficulté d'accès de certaines régions
donne parfois la mesure de la nature répressive du pouvoir ; en
revanche il serait faux de penser que la présence de touristes est signe
de démocratie et de bien-être. La touristicité, comme résultante de
paramètres géopolitiques, économiques et sociaux à l'extérieur et à
l'intérieur du territoire, définit un espace d'accueil destiné aux visiteurs
dans le but d'attirer des devises fortes. Notre propos est d'analyser les
éléments qui ont conduit à l'opposition des situations touristiques
entre les deux versants de l'île Quisqueya1.
La République Dominicaine et Haïti offrent une image contrastée
des stratégies de développement adoptées pour promouvoir le tou
risme : d'un côté, on voit se mettre en place des infrastructures touris
tiques dont profite le reste de l'économie à des degrés inégaux. Les
opérateurs de séjours touristiques établis en République Dominicaine,
à l'affût de nouveaux sites afin de diversifier leur offre globale, lor
gnent déjà vers Haïti, avec des projets d'équipements qui provoquent
parfois la méfiance, souvent justifiée, des Haïtiens dont les projets sont
à l'opposé de la conception dominicaine du tourisme de masse. De
l'autre, le choix de l'informalité et de l'amateurisme laisse la part belle
à l'improvisation.
I - L'IRRÉSISTIBLE MONTÉE EN PUISSANCE
DE LA RÉPUBLIQUE DOMINICAINE <

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