Le Mariage pende - article ; n°1 ; vol.22, pg 53-73
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Description

L'Homme - Année 1982 - Volume 22 - Numéro 1 - Pages 53-73
21 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1982
Nombre de lectures 64
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Paul Jorion
Gisèle Meur
Trudeke Vuyk
Le Mariage pende
In: L'Homme, 1982, tome 22 n°1. pp. 53-73.
Citer ce document / Cite this document :
Jorion Paul, Meur Gisèle, Vuyk Trudeke. Le Mariage pende. In: L'Homme, 1982, tome 22 n°1. pp. 53-73.
doi : 10.3406/hom.1982.368256
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hom_0439-4216_1982_num_22_1_368256LE MARIAGE PENDE
par
PAUL JORION, GISÈLE DE MEUR et TRUDEKE VUYK
Au cours des trente dernières années, les théoriciens de la parenté, anthropo
logues et mathématiciens, ont exploré le domaine de ce que C. Lévi-Strauss
baptisa en 1949 « structures élémentaires de la parenté » : les espaces définis dans
la plupart des sociétés humaines par l' obligation (de principe) d'épouser un parent
précis, c'est-à-dire une personne appartenant à une catégorie déterminée de la
terminologie de parenté.
Aux structures élémentaires s'opposent les « structures complexes » dans
lesquelles les époux ne se reconnaissent pas comme parents préalablement à leur
mariage (nos définitions s'écartent quelque peu de celles de C. Lévi-Strauss pour
des raisons qui apparaîtront par la suite) . Bien entendu, les démographes sont dans
ce cas à même de déterminer la connexion de parenté moyenne des époux, mais
celle-ci se répartit alors de façon non structurée dans l'espace des parents éloignés.
A la fin de la préface de la deuxième édition des Structures élémentaires de la parenté
(1967), C. Lévi-Strauss appelait anthropologues et mathématiciens à se pencher
sur certains systèmes d'alliance intermédiaires selon lui entre les structures él
émentaires et les structures complexes, les systèmes d'alliance crow-omaha :
«... des systèmes qui ne font qu' édict er des empêchements au mariage,
mais qui les étendent si loin par l'effet des contraintes inhérentes à leur
nomenclature de parenté, qu'en raison du chiffre relativement faible de
la population, n'excédant pas quelques milliers d'individus, on peut espérer
obtenir leur converse : système de prescriptions inconscientes qui reproduir
ait exactement, mais en plein, les contours du moule creux formé par le
système des prohibitions conscientes » (p. xxiv).
L'intuition de Lévi-Strauss était exacte. En fait, il suffit — nous espérons le
montrer dans un avenir proche sur un cas empirique — qu'il y ait une tendance à
se marier dans les lignages interdits dès que cela redevient possible, pour qu'un
nombre significatif de mariages aient lieu entre cousins éloignés, mais strictement
définissables sur l'espace de parenté. En somme, il existe une possibilité pour
L'Homme, janv.-mars]ig82, XXII (1), pp. 53-73. PAUL J ORION, GISÈLE DE MEUR, TRUDEKE VUYK 54
l'anthropologue de traduire des règles négatives en termes de parenté, mais expli
cites, en règles positives en termes de parenté, mais implicites. Les systèmes
d'alliance crow-omaha susceptibles d'être « traduits » de cette façon se révèlent
alors comme autant de structures élémentaires.
Mais une telle traduction n'est-elle possible que dans le cas de règles exprimées
négativement en termes de relations de parenté ? Bien entendu, non. Un cas
banal est celui des systèmes à classes ou à sections australiens : un anthropologue
ayant quelque familiarité avec la littérature n'éprouve aucune difficulté à traduire
en termes de parenté les mariages entre sections. Par exemple, le système kariera
à quatre sections équivaut au mariage entre cousins croisés bilatéraux. Mais n'y
a-t-il pas d'autres cas où un certain décryptage des règles de mariage explicites
mais en termes autres que de parenté renverrait à des structures élémentaires ?
Ces dernières années, les travaux de L. de Heusch, puis de F. Héritier et de
A. Kuper ont montré que certains systèmes d'alliance africains dont la logique
explicite est formulée en termes politico-économiques font apparaître la récur
rence systématique de mariages entre cousins au deuxième degré1. Il semble dès
lors, et ce n'était que trop prévisible, que toute structuration des alliances en termes
de groupes organisés sur une base permanente (groupes de filiation, résidentiels,
économiques, etc.) autorise une traduction en termes de catégories de parenté,
c'est-à-dire renvoie en fin de compte à des structures élémentaires. Cette affirma
tion est programmatique et ne sera pas illustrée ici dans sa généralité. Dans le
présent article, nous nous limiterons à dégager la structure élémentaire implicite
dans le système d'alliance des Pende, une société zaïroise pour laquelle les données
qui nous intéressent furent rapportées en 1955 par L. de Sousberghe2.
Notre thèse est simple, le mariage pende est un mariage préférentiel entre
cousins au deuxième degré : un homme épouse la fille de la fille de la sœur du père
de la mère (mfzdd) qui se trouve être aussi la fille du fils de la sœur du père du père
(ffzsd). Ce type de mariage n'est pas équivalent aux mariages des systèmes à sec
tions australiens, il exige en particulier un autre traitement de l'objet mathé
matique (le mariage d'un homme en fonction de celui de ses parents et le mariage
d'une femme en fonction de celui de ses parents ne peuvent pas être considérés
comme les générateurs du groupe de permutations constituant le modèle, comme
dans les cas australiens). Une des conséquences du système — c'est elle qui
explique la perplexité des analystes antérieurs — est que dans certains cas les
cousines au deuxième degré « convergeront » (l'expression est de Rivers) avec des
1. Nous traduisons ainsi pour simplifier l'anglais « second cousin ».
2. Notre ambition n'est pas d'ajouter à la littérature africaniste, mais de faire progresser
l'étude formelle et algébrique des structures élémentaires. Nous n'entrerons donc pas dans
les détails des analyses antérieures de L. de Hkusch (1955, 1971 et 1981) et de R. B. Lane
(1962) ; nous reconnaissons toutefois notre dette envers ces auteurs dont les analyses ont
facilité notre travail. LE MARIAGE PENDE 55
cousines au premier degré, les cousines croisées, fille du frère de la mère (mbd) et
fille de la sœur du père (fzd) ; celles-ci resteront toutefois distinctes et ne conver
geront pas en une cousine bilatérale.
En 1955 paraissait un petit livre de L. de Sousberghe intitulé Structures de
parenté et d'alliance d'après les formules pende (ba-Pende, Congo belge). Son objectif
était de mettre en rapport la pratique du mariage pende avec un certain nombre
de « formules de motivation » (normes ou règles de comportement idéal) énoncées
par les Pende à propos de leur système d'alliance. L'ouvrage est constitué d'une
part d'un ensemble de telles formules, accompagnées d'explications quant à leur
sens, d'autre part, de commentaires interprétatifs dont le but avoué est de reconsi
dérer la distinction analytique entre cousine croisée matrilatérale (mbd) et cou
sine croisée patrilatérale (fzd), en raison du fait que les Pende eux-mêmes la
jugent inessentielle, et semble-t-il à juste titre.
La société pende que L. de Sousberghe décrivait en 1955 était une société à
chefferies et à clans matrilinéaires partagée entre les provinces de Léopoldville
(aujourd'hui Kinshasa) et du Kasai. Bien que cette société constituât alors une
unité culturelle, une « tribu », L. de Sousberghe constatait une différence majeure
dans la pratique matrimoniale des chefferies « kasai » et des chefferies « léo ». Dans
les premières, il était recommandé à un homme d'épouser sa cousine croisée
patrilatérale (fzd) et il lui était interdit d'épouser sa cousine croisée matrilatérale
(mbd). La différence se marquait dans les termes d'adresse : un homme appelait sa
fzd « mon épouse », alors qu'il appelait sa mbd « mon enfant » (p. 37). Dans les
secondes, un homme devait se marier de préférence avec sa fzd, mais la mbd était
considérée comme une ép

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