Le spiritisme en Chine - article ; n°1 ; vol.7, pg 87-100
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Description

Bulletins et Mémoires de la Société d'anthropologie de Paris - Année 1906 - Volume 7 - Numéro 1 - Pages 87-100
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1906
Nombre de lectures 31
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Paul Enjoy d'
Le spiritisme en Chine
In: Bulletins et Mémoires de la Société d'anthropologie de Paris, V° Série, tome 7, 1906. pp. 87-100.
Citer ce document / Cite this document :
Enjoy d' Paul. Le spiritisme en Chine. In: Bulletins et Mémoires de la Société d'anthropologie de Paris, V° Série, tome 7, 1906.
pp. 87-100.
doi : 10.3406/bmsap.1906.8142
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bmsap_0037-8984_1906_num_7_1_8142d'eNJOY. — LE SPIRITISME EN CHINE 87 PAUL
• 820e SÉANCE. — 15 Février 1906.
Présidence de M. Cuter.
Elections. — M. le Marquis de Breteuil, présenté par MM. Hervé, Deniker,
Yves Guyot, Sébillot; M. A. Siffre, présenté par MM. Capitan, Mahoudeau,
Manouvrier, sont nommés membres titulaires.
M. le Lieutenant Desplagnes, présenté par MM. Hamy, Verneau, Delisle,
Hervé et Papillault, est nommé correspondant national.
LE SPIRITISME EN CHINE
Par M. Paul d'Enjoy.
Les. Esprits jouent dans l'imagination populaire chinoise, qui en peuple
le monde, un rôle des plus importants. 11 n'est pas d'événement heureux
ou malheureux, qui ne soit attribué par le vulgaire à l'influence, bien
veillante, malicieuse ou cruelle, d'une puissance occulte et cette croyance
est tellement répandue, elle répond si exactement au besoin de mysticisme
qu'éprouve le Chinois, qu'elle a gagné jusqu'aux classes instruites de la
nation.
Les lettrés, imbus des idées morales et positivistes de l'illustre Kon-
Phou-Chéou, ce philosophe pratique par excellence, qui excluait de sa
doctrine, comme discussions superflues, spécieuses, vaines, toutes les
questions purement théoriques ou spéculatives et n'admettait de débats
philosophiques que ceux qui déterminent des. applications réelles, ne
croient évidemment pas à ces interventions, au moins en tant qu'émanées
de puissances démoniaques. Ce sont, à leur sens, des fantaisies gros
sières, de nature superstitieuse et sottes. Fidèles au You-Kiao, ils ont foi»
en l'existence d'un principe supérieur de vie, indépendant de la matière,
qui l'anime, la vivifie; en un mot, ils croient à, l'âme, comme entité
vitale; mais leur doute naît pour ce qui suit la mort physique. Un point
d'interrogation se pose dans leur esprit, relativement à la conséquence,
du divorce consommé entre l'âme et le corps. Ils ne savent quoi penser
de l'existence du principe subtil de vie et, par conséquent, des manifest
ations sensibles de cet élément spirituel dans le monde matériel, lorsqu'il
a dépouillé son enveloppe charnelle, qu'il a abandonné le corps pour le
livrer a l'œuvre du néant. -
Kon-Phou-Chéou, interrogé sur ce point par un de ses disciples, le
célèbre Ki-Lou, qui s'inquiétait de ce que devenait l'âme après la mort,
lui répondit : « Frère aimé, comment oserions-nous scruter les mystères
« de la mort,- nous qui n'avons pas pu pénétrer encore les secrets de la 15 'février 1906 88
« vie? » Et comme Sé-Kon, un autre disciple cher auphilosophe, insis
tait auprès de lui pour savoir au moins si les mânes pouvaient avoir
connaissance de ce qui se passe sur terre, le maître s'exclama : « A quoi
« «bon me demander ce que tu apprendras certainement un jour par toi-
« même? »
Kon-Phou-Chéou ne voulait-il pas ou bien ne pouvait-il pas répondre
à ces questions, intéressantes au premier chef pour un peuple dont tout
l'édifice social repose sur l'unité de la Famille, constituée en dogme? Les
lettrés sont divisés sur ce point. Aucun n'ose affirmer, nul n'ose nier
que les morts, comme le croient les gens du peuple, ne vivent autour de
nous d'une vie spirituelle sans doute, mais agitée des mêmes désirs, mue
par les mêmes passions, soumise aux mêmes entraînements des sens,
en proie aux mêmes émotions. Qui sait? disent les sages, en hochant la
tète. La forêt des pinceaux frémit, jusque dans ses profondeurs, des
mêmes angoisses à l'égard des Esprits que le vaste et onduleux champ
populaire, car il est bien vrai ce vieux proverbe chinois :
Les petites feuilles qui tremblent font vibrer le gros tronc.
Après la mort, que devient l'âme? Où vont, où sont, que font les mânes
des ancêtres? Grave problème, qu'on n'agite qu'en frissonnant et qu'on ne
résout jamais de quelque incertitude qu'on soit saisi, qu'en s'abritant
derrière les rites cultuels, comme pour y chercher un refuge au trouble
de l'esprit qui interroge. Les mânes, concluent les lettrés qu'on presse,
doivent survivre puisqu'on les évoque;, ils s'intéressent" sans doute
à la vie puisque les rites prescrivent en leur honneur des cérémonies
familiales et que ces cérémonies ont précisément pour but d'établir,
notamment au retour de l'an, une communion mystique entre les morts
et les vivants. A quoi tendraient les formules d'invocations, particulières
à chaque foyer, qui se transmettent pieusement de père en fils, si les
âmes évoquées ne pouvaient les entendre? Pourquoi les convier à des
festins rituels, si elles n'éprouvent plus, dans le monde immatériel où
elles flottent, les appétences des aliments? Les Esprits de la Famille ne
viennent-ils pas aspirer les fumées des cassolettes où se consument l'en-,
cens, le bois de santal et les feuilles d'eucalyptus? Ne se complaisent ils
pas au parfum dès baguettes de fiente de buffle ou de chameau, impré
gnées d'essences balsamiques? Pourquoi leur fait-on,, s'ils n'ont pas de
besoins, des offrandes d'or et d'argent, en brûlant devant les tablettes où
est gravé le chiffre de la Famille, des papiers recouverts d'une mince
couche de ces métaux, représentative des barres d'or et d'argent qui leur
sont données pour satisfaire aux nécessités de leur vie spirituelle? Pour
quoi enfin confeclionne-t-on à leur intention des vêtements complets en
papur de soie, des maisons de carton, des temples en miniature, qu'on
incinère cérémonieusement dans des braseros placés au pied des autels
dédiés au culte ancestral; si les Esprits ne visitent jamais les toils qui
abritent leur descendance,' si les défunts ne survivent pas à la mort PAUL d'eNJOY. — LE SPIRITISME EN CHINE 89
physique d'une manière immatérielle mais concrète, s'ils ne peuplent pas
l'espace qui nous environne, si leurs ombres n'errent pas sans cesse dans
les endroits qui, de leur vivant, leur étaient familiers?
Telles sont les incertitudes troublantes qui agitent l'esprit des lettrés
chinois et qu'ils laissent volontiers en suspens, affectant une attitude comp
laisante aux superstitions populaires. Le peuple," avec son appréciation
simpliste, n'hésiste pas dans sa foi robuste. Le bouddhisme d'ailleurs est
venu, sous la dynastie des Ilan, lui donner le goût des divinités tangibles.
Pour le vulgaire, la mort n'affranchit pas des passions. Les âmes, puis
qu'elles existent, procèdent de l'être qu'elles continuent après la mort.
Elles aiment et haïssent surtout terriblement et c'est là ce qui motive la
terreur superstitieuse du peuple, avec une violence que décuple, pour
ainsi dire, leur délivrance des contraintes charnelles.
Elles souffrent, elles gémissent, elles crient, elles effraient les humains
par leurs plaintes sinistres. Que signifient les hululements qu'on entend
parfois, dans le silence d'une nuit calme, plus particulièrement, d'après
l'opinion commune, aux carrefours déserts, sinon qu'un Esprit se plaint
des angoisses de la faim? Pourquoi perçoit-on, aux époques voisines du
nouvel an, des gémissements étouffés qui semblent provenir du milieu
touffu du bois sacré d'une pagode, sinon que des mânes n'ont plus de
famille vivante pour entretenir leur culte ou que leurs descendants les
négligent, qu'elles pâtissent du froid, de l'abandon, du manque de nourr
iture, de la misère spirituelle enfin, si proche de la misère humaine? Et
les petites flammes bleues qui sautillent le long des ruisseaux herbeux,
les feux. follets errant autour des tombes, ces phénomènes physiques
issus de l'humidité, qui ont tant troublé nos paysans français, sont, pour
les Chinois, lés corps lumineux des Esprits, l'âme elle-m

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