Les crânes trépanés de la vallée du Petit-Morin - article ; n°3 ; vol.10, pg 249-263

J. Dastugue

Description

Bulletins et Mémoires de la Société d'anthropologie de Paris - Année 1973 - Volume 10 - Numéro 3 - Pages 249-263
Résumé. Douze ouvertures crâniennes volontaires et un volet osseux isolé forment l'objet de la présente étude concernant les pièces néolithiques de la vallée du Petit-Morin (collection de Baye). Huit crânes portent des trépanation faites sur le sujet vivant dont six ont été suivies de cicatrisation. Ces exemples suffisent à démontrer que la trépanation était, à cette époque, un acte vraiment « chirurgical » supposant une technique bien réglée et une connaissance anatomique précise de la région. Trois autres pièces portent des découpages exécutés post-mortem mais leur examen attentif incite à penser que l'intention du praticien était sans doute de pratiquer un véritable examen nécropsique plutôt que de prélever des « rondelles » à signification magique.
Summary. Twelve trephinned skulls and one isolated bone plate are the matter of the present study, which deals with the neolithic pieces of Petit Morin valley (de Baye's collection). Eight skulls show trepannations performed on alive subjects, six of which were followed by survival and healing. Such examples bear sufficient evidence that, during that period, trepannation was an actually surgical act, implying a methodical technique and an accurate anatomical knowledge of the region. Three other pieces show postmortem carvings but, after careful examination, one is prompted to think that the practitionner's purpose was, doubtless, to perform an anatomical investigation rather than to cut off magic meaning discs.
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

• Sociologie, société et politique

Informations

• Publié par: BULLETINS_ET_MEMOIRES_DE_LA_SOCIETE_D-ANTHROPOLOGIE_DE_PARIS0
• Publié le: 01 janvier 1973
• Nombre de lectures: 46
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

Jean Dastugue
Les crânes trépanés de la vallée du Petit-Morin
In: Bulletins et Mémoires de la Société d'anthropologie de Paris, XII° Série, tome 10 fascicule 3, 1973. pp. 249-263.
Résumé
Résumé. Douze ouvertures crâniennes volontaires et un volet osseux isolé forment l'objet de la présente étude concernant les
pièces néolithiques de la vallée du Petit-Morin (collection de Baye). Huit crânes portent des trépanation faites sur le sujet vivant
dont six ont été suivies de cicatrisation. Ces exemples suffisent à démontrer que la trépanation était, à cette époque, un acte
vraiment « chirurgical » supposant une technique bien réglée et une connaissance anatomique précise de la région. Trois autres
pièces portent des découpages exécutés post-mortem mais leur examen attentif incite à penser que l'intention du praticien était
sans doute de pratiquer un véritable examen nécropsique plutôt que de prélever des « rondelles » à signification magique.
Abstract
Summary. Twelve trephinned skulls and one isolated bone plate are the matter of the present study, which deals with the
neolithic pieces of Petit Morin valley (de Baye's collection). Eight skulls show trepannations performed on alive subjects, six of
which were followed by survival and healing. Such examples bear sufficient evidence that, during that period, trepannation was
an actually surgical act, implying a methodical technique and an accurate anatomical knowledge of the region. Three other pieces
show postmortem carvings but, after careful examination, one is prompted to think that the practitionner's purpose was,
doubtless, to perform an anatomical investigation rather than to cut off magic meaning discs.
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Dastugue Jean. Les crânes trépanés de la vallée du Petit-Morin. In: Bulletins et Mémoires de la Société d'anthropologie de
Paris, XII° Série, tome 10 fascicule 3, 1973. pp. 249-263.
doi : 10.3406/bmsap.1973.2071
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bmsap_0037-8984_1973_num_10_3_2071Bull, et Mém. de la Soc. d'Anthrop. de Paris, t. 10, série XII, 1973, pp. 249-263
LES CRANES TRÉPANÉS DE LA VALLÉE DU PETIT-MORIN
(Collection de Baye)
par J. Dastugue
Les onze crânes qui sont l'objet de la présente étude appartiennent à
la collection de Baye du Musée des Antiquités Nationales à Saint-Germain-
en-Laye et je tiens, dès l'abord, à adresser mes vifs remerciements à Monsieur
le Conservateur en Chef R. Joffroy qui m'a donné les plus grandes facilités
pour mener ce travail à bien.
Toutes pièces proviennent des sépultures collectives hypogées de la
vallée du Petit-Morin (Marne), fouillées par J. de Baye et décrites par lui,
notamment dans la Revue des Sociétés Savantes (1874). Archéologiquement,
il suffit de rappeler qu'il s'agit de ces populations du Néolithique final que
les préhistoriens français qualifient volontiers de « civilisation Seine-Oise-
Marne ». On ne trouvera pas ici de considérations proprement anthropolo
giques ; de ce point de vue, les crânes du Petit-Morin ont été longuement
étudiés par R. Riquet (1953-1955) et il serait outrecuidant d'y revenir. Il
ne s'agira donc que de pathologie et plus spécialement de trépanations, bien
que cet aspect de la question n'ait nullement été négligé précédemment. En
effet, de Baye lui-même (1876) a longuement décrit cinq des crânes trépanés
de la collection et ces trépanations avaient elles-mêmes été présentées par
P. Broca en 1874 à la Société d'Anthropologie de Paris. Cependant, il m'a
paru intéressant de reprendre l'étude de l'ensemble à la lumière de toutes
les informations qui, depuis Broca, ont été accumulées sur la trépanation
empirique en général et préhistorique en particulier.
Etude des Pièces
№ 67772. — Dépourvu de son massif facial, ce crâne ne porte apparem
ment aucun stigmate pathologique spontané. Il est perforé d'un orifice à
cheval sur la branche droite de la suture lambdoïde, ovalaire à grand axe
sensiblement parallèle à la ligne médiane et à grosse extrémité postérieure.
Il est distant de 47 mm du lambda et partagé en deux moitiés presque égales
Mots-clefs : Crâne — Néolithique — Petit-Morin — Trépanation.
Key-words : Skull — Neolithic — — Trephinning. 250 SOCIÉTÉ D'ANTHROPOLOGIE DE PARIS
par la ligne de suture. Son bord est taillé obliquement aux dépens de la table
externe en sorte que ses deux diamètres extérieurs sont respectivement de
44 et 40 mm tandis que les intérieurs sont de 37 et 28 mm. Cepen
dant, l'obliquité du biseau n'est pas partout la même ; il est plus large et
plus incliné au pôle postérieur qu'au pôle antérieur ce qui suggère que
l'opérateur devait se tenir vers l'arrière du crâne. Ce simple fait me paraît
indiquer clairement que le sujet ne pouvait être mobilisé au gré de l'exécu
tant et on peut en déduire qu'il s'agissait bien d'un « patient » vivant. Ceci
cadre parfaitement avec le procédé de taille du volet osseux qui a été réalisée
avec les précautions habituelles pour ménager la dure-mère ainsi qu'on le
constate chez tous les « opérés » de cette époque ayant survécu (PI. I, B).
Malgré cette perfection technique, le sujet qui nous occupe est, lui,
certainement mort très rapidement, probablement même en cours d'inter
vention. L'absence de survie est prouvée par l'état de la tranche de section
qui ne montre absolument aucune trace de réparation. Aussi bien à l'œil nu
qu'à la loupe, on constate une netteté des bords et une visibilité des alvéoles
diploétiques qui ne laisse aucun doute à cet égard. L'examen radiographique
le confirme et on ne voit sur le cliché absolument aucune ébauche d'os cica
triciel. On peut ajouter qu'au voisinage du bord, autour du pôle antérieur de
l'orifice, la table externe porte des stries instrumentales qui auraient di
sparu si l'os avait eu le temps de réagir. Que la mort ait été probablement
immédiate et due à une hémorragie est indiqué par le fait suivant : par une
perte de substance de la base du crâne, il est facile de bien examiner les
bords endocrâniens de l'orifice ; on constate alors que le contour inférieur
de la trépanation « mord » légèrement sur la gouttière du sinus latéral et
l'on sait que la dure-mère est, là, adhérente à l'os. Sans aucun doute,
l'imprudente extension vers le bas du découpage osseux a déchiré le sinus et
provoqué un exitus immédiat.
On peut alors se demander le pourquoi d'une trépanation si postérieure,
inhabituelle chez les Néolithiques qui avaient parfaitement repéré la « zone
décollable » de Gérard Marchant à laquelle ils se cantonnaient généralement.
Sans doute la localisation présente fut-elle commandée par la symptomato-
logie, vraisemblablement des douleurs à maximum occipital ou tout au
moins retro-auriculaire ce qui évoque immédiatement une infection mas
toïdienne. Mais cette hypothèse ne trouve aucune confirmation dans l'examen
de la région et, en particulier, dans l'exploration méticuleuse de la caisse
du tympan à la loupe auto-éclairante. Dans ces conditions, et compte tenu
d'un endocrâne parfaitement normal, force est d'avouer notre ignorance de
l'affection qui avait pu motiver cette intervention de chirurgie crânienne.
№ 67773. — Sur un crâne apparemment sain et pourvu seulement d'une
suture métopique complète, ce qui est bien banal, siège un orifice à cheval sur
la moitié gauche de la suture coronale. Son bord droit est à 51 mm du bregma
et la suture le partage en deux moitiés sensiblement égales. Il est elliptique,
un peu irrégulier et à grand axe antéro-postérieur. Ses berges sont très
évasées et il est malaisé de donner ses dimensions extérieures (environ
42 mm sur 34). Si le bord périphérique du biseau est fortement arrondi et
se raccorde insensiblement à l'os voisin, par contre, le bord inscrit est net et DASTUGUE. CRANES TRÉPANÉS DE LA VALLÉE DU PETIT-MORIN 251 J.
mince mais no