Les deux étapes de l industrialisation dans  le Tiers Monde - article ; n°91 ; vol.23, pg 479-498
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Description

Tiers-Monde - Année 1982 - Volume 23 - Numéro 91 - Pages 479-498
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 1982
Nombre de lectures 37
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Moïses Ikonicoff
Les deux étapes de l'industrialisation dans le Tiers Monde
In: Tiers-Monde. 1982, tome 23 n°91. pp. 479-498.
Citer ce document / Cite this document :
Ikonicoff Moïses. Les deux étapes de l'industrialisation dans le Tiers Monde. In: Tiers-Monde. 1982, tome 23 n°91. pp. 479-
498.
doi : 10.3406/tiers.1982.4138
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1982_num_23_91_4138LES DEUX ÉTAPES DE L'INDUSTRIALISATION
DANS LE TIERS MONDE
par Moïses Ikonicoff*
A) L'industrialisation pour le marché interne :
1930-1970
A partir de 1930 se produit le démarrage, échelonné dans le temps,
de l'industrialisation des pays du Tiers Monde. Il est la conséquence
soit des modifications intervenues dans le fonctionnement interne de
l'économie et dans le contexte international — c'est le cas de l'Amérique
latine — , soit fondamentalement des modifications du contexte mondial
— c'est le cas de la décolonisation des autres régions du Tiers Monde.
Les traits communs
Au-delà de l'hétérogénéité des situations, on peut caractériser le
processus d'industrialisation qui a eu lieu dans les pays du Tiers Monde,
entre 1930 et 1970, par un ensemble de traits communs : en premier lieu,
il s'agit d'une industrialisation pour le marché interne. La satisfaction des
besoins réels ou imaginaires, existants ou potentiels, mais exprimés dans
le cadre des Etats-nations, constitue le seul critère qui déterminera
l'implantation des industries1.
* Maître de recherche au cnrs.
1. A cette affirmation, il faut apporter deux nuances :
a) Un certain nombre de tentatives d'intégration régionale ont eu lieu. Ainsi, par exemple,
l'accord de Cartagène pour les pays dits du pacte Andin, en Amérique latine, ou l'accord des
pays riverains du fleuve Niger en Afrique. On constate que si ces tentatives ont réussi — dans
le meilleur des cas — à faciliter les courants commerciaux entre les pays concernés ou à rendre
possible une certaine concertation dans l'élaboration de politiques économiques et dans la
réalisation de travaux communs d'infrastructure, elles ont été loin de provoquer une unifi
cation de l'espace, notamment dans le domaine des structures productives.
b) Dans le cas des espaces unifiés au niveau monétaire, comme la « zone franc » en
Afrique, on peut constater, mais à titre exceptionnel, l'implantation d'industries visant le
Revue Tiers Monde, t. XXIII, n° 91, Juillet-Septembre 1982 480 MOÏSES IKONICOFF
Les marchés internes des pays du Tiers Monde étant relativement
limités2 — avec les conséquences que cette situation implique sur l'échelle
de production et sur les coûts — , l'industrialisation ne peut pas affronter
la concurrence extérieure de biens manufacturés. En conséquence — et
cela sera le deuxième trait commun — , elle va se développer dans le cadre
d'une protection douanière plus ou moins infranchissable.
Le troisième trait de cette industrialisation est la dépendance techno
logique. Cette notion doit être comprise ici comme absence de créativité
aussi bien dans les procédés de production que dans la nature des biens
produits. C'est une industrialisation réalisée à partir des équipements et
des techniques existant dans les pays avancés industriellement. On ne
constate pas l'apparition d'innovations majeures dans le processus
d'industrialisation des pays du Tiers Monde. Moins encore la réactivation
des « savoirs autochtones »3 qui auraient pu donner lieu à de nouvelles
techniques et même, comme le signale Charles Morazé, à une réorientation
totale de l'activité scientifique et technique4.
Le quatrième trait, lié aux précédents, réside dans l'orientation de
l'industrialisation vers la fabrication d'un éventail de biens reproduisant
le modele de consommation des pays occidentaux.
Bien que la généralisation du modèle de consommation ait rencontré
des résistances dues à la vigueur des traditions culturelles ou inspirées
marché régional. Ainsi, par exemple, une production de café soluble destinée au marché
constitué par l'ensemble de l'Afrique de l'Ouest a été organisée par une filiale de Nestlé
en Côte-d'Ivoire.
2. Les marchés connaissent des limites structurelles dans la faiblesse du revenu moyen.
Cependant, pour un nombre important de pays, une répartition plus égalitaire du revenu
aurait pu susciter une demande permettant d'élargir l'échelle de production et en réduire
sensiblement le coût. Dans ces conditions, le phénomène de concentration du revenu sur
une minorité de la population, qui accompagne le processus d'industrialisation au cours de la
période 1939-1970, fixe une limite fonctionnelle à l'expansion du marché.
3. Charles Morazé, Le point critique, Paris, puf, 1980, iEDEs-collection Tiers Monde.
4.op. cit., écrit ceci : « II convient aussi d'attirer l'attention sur la grande
variété des conditions culturelles faussement unifiées sous le nom de Tiers Monde. Sans
qu'on puisse parler de différences de valeurs entre ces diverses réserves d'expériences mentales,
il en existe de fortes dans leurs modalités. Les rôles joués par les pays d'Asie ou d'Afrique
dans l'exploration de la condition humaine, de ses manières de raisonner et d'exprimer des
certitudes de toutes sortes, ont été historiquement différenciés selon la place donnée à chacun
d'eux dans, ou à l'écart, des cheminements ayant conduit aux sciences modernes. De même,
tous les pays d'Amérique latine ne sont pas tous également peuplés d'Européens; des savoirs
autochtones y sont à réélucider, et si les cultures latines elles-mêmes prolongent celles de
leurs pays d'origine, elles se sont en outre enrichies d'expériences locales spécifiques; elles
peuvent être le mieux à même de réévaluer les aspects méconnus ou oubliés d'une évolution
scientifique unidimensionnelle. Certaines applications possibles sont ainsi restées lettre morte :
d'autres n'ont été revivifiées que grâce à des efforts locaux effectifs, encore que gênés par les
conditions propres au temps où les transferts de connaissances demeuraient de type colonial,
même dans le cas de nations s'étant rendues politiquement indépendantes. » l'industrialisation dans le tiers monde 481
par les idéologies politiques, l'industrialisation ne semble pas avoir ren
forcé la recherche de l'identité culturelle des pays du Tiers Monde. Au
contraire, elle a contribué de façon décisive à l'homogénéisation du
modèle de consommation à l'échelle mondiale.
Celso Furtado a analysé les rapports entre l'absence de créativité et la
reproduction du modèle de consommation5.
Le cinquième trait commun est le comportement du secteur externe.
En ce qui concerne les importations, on peut observer deux carac
téristiques :
a) L'accroissement de la valeur des importations, à l'exception des
pays de l'Amérique latine au début de leur processus6 d'industrialisation.
b) Le changement de la composition des importations. La part des
biens de consommation finale diminue rapidement au profit de biens
intermédiaires et d'équipement.
Le nouveau profil des importations rend leur structure plus rigide.
Une variation des niveaux provoque des effets autrement plus importants
sur l'appareil productif qu'à la période où les biens de consommation
finale y étaient dominants. Donc, la structure des importations va
accroître considérablement la vulnérabilité du système économique des
pays du Tiers Monde.
En ce qui concerne les exportations, leur composition — contraire
ment aux importations — ne va pas changer. En effet, les coûts élevés
de biens manufacturés fabriqués dans le cadre d'une industrialisation
« protégée » ne permettent pas à ces biens en général d'affronter la
5. Celso Furtado, Créativité et Dépendance, Paris, puf, 1 981, iEDEs-collection Tiers
Monde, a écrit : « Tout objet d'usage final qui ne provient pas directement de la nature est le
fruit de l'invention humaine et un objet d'art. Sa finalité est d'enrichir l'existence des hommes.
Celui qui construit sa propre maison y met son

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