Les Huaqiao (Chinois d outre-mer) et le socialisme du Continent : une autre  voie ? - article ; n°86 ; vol.22, pg 459-466
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Les Huaqiao (Chinois d'outre-mer) et le socialisme du Continent : une autre voie ? - article ; n°86 ; vol.22, pg 459-466

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Tiers-Monde - Année 1981 - Volume 22 - Numéro 86 - Pages 459-466
8 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1981
Nombre de lectures 26
Langue Français

Extrait

Pierre Trolliet
Les Huaqiao (Chinois d'outre-mer) et le socialisme du Continent
: une autre voie ?
In: Tiers-Monde. 1981, tome 22 n°86. pp. 459-466.
Citer ce document / Cite this document :
Trolliet Pierre. Les Huaqiao (Chinois d'outre-mer) et le socialisme du Continent : une autre voie ?. In: Tiers-Monde. 1981, tome
22 n°86. pp. 459-466.
doi : 10.3406/tiers.1981.4034
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1981_num_22_86_4034LES HUAQIAO (CHINOIS D'OUTRE-MER)
ET LE SOCIALISME DU CONTINENT :
UNE AUTRE VOIE ?
par Pierre Trolliet
Un milliard de Chinois au bord du gouffre après l'utopie maoïste, mais 1 5
à 20 millions de du Nanyang1 réputés pour avoir, en moins d'un siècle,
établi un réseau commercial, bancaire et industriel d'une remarquable effica
cité en Asie du Sud-Est...
A défaut d'avoir été vraiment analysé sur le plan économique, un tel phé
nomène n'a pas manqué d'engendrer de multiples interprétations qualifiant
cette diaspora de « Troisième Chine », de « Cinquième colonne » ou de « Juifs
de l'Asie »... il s'agit plutôt des « entrepreneurs », des « managers » de la « Médit
erranée chinoise » selon l'heureuse expression de Denys Lombard.
On ne peut désormais échapper à la question de savoir si le développement
dans cette « Méditerranée chinoise » n'aurait pas quelque valeur exemplaire
pour le Continent : la formule des joint-ventures introduite récemment en Chine
populaire a déjà fait ses preuves à Singapour, et les récentes mesures démogra
phiques « un couple, deux enfants » puis « un couple, un enfant » mises en
œuvre par le gouvernement chinois reproduisent mutatis mutandis le two is
enough si efficace à Singapour depuis une décennie.
DES PHILIPPINES A LA BIRMANIE
Б n'est pas d'Etat de l'Asie du Sud-Est qui n'ait connu une implantation
chinoise, mais à des degrés fort variables, comme le montre le tableau suivant
(modifié depuis 1974- 197 5 par les liquidations et exodes du Cambodge puis du
Vietnam et du Laos).
D'importantes disparités quantitatives donc, mais doublées, ce qui est cer
tainement plus décisif, d'une disparité de statut qui peut se résumer en quatre grands
types de situation :
1) Discrimination. — C'est le cas en Indonésie, aux Philippines, en Birmanie.
Les modalités et la sévérité (récents pogroms à Java) varient d'un Etat à
l'autre mais le résultat est partout le même : tout est fait pour limiter la puis-
1. « Océan méridional », soit l'actuelle Asie du Sud-Est.
Revue Tiers Monde, t. XXII, n° 86, Avril-Juin 1981 460 PIERRE TROLLIET
Pays
laysia lande nésie pour Vietnam Huaqiao
Effectifs 3 700 000 3 400 000 3 100 000 1 500000 1 400 000
% de la population
30 totale 10 2,6 75 3,5
« Communauté » Hokkien Teochew Hokkien Hokkien Guangdong
dominante (Fujian) (Chaozhou)
30 60 41 40 (en %) 55
lippines Birmanie bodge Laos
Effectifs 520 000 440 000 58 000 435 000
% de la population
totale 1,6 2 i,4 6,5
« Communauté » Hokkien Teochew Teochew Teochew
dominante
80 ? 50 (en %) 67
sance économique de ces Huaqiao — presque tout — puisque s'est développée
alors une véritable institution — celle du « prête-nom » — commerçants,
hommes d'affaires, officiers, hauts fonctionnaires ou hommes politiques natio
naux. Cette « institution » remplit les poches des sus-mentionnés, permet aux
Huaqiao de poursuivre leurs activités mais ne nous permet plus d'évaluer
correctement le rôle économique des Chinois dans ces pays.
2) Intégration. — C'est le cas très remarquable de la Thaïlande2 où jusqu'à
la première guerre mondiale les immigrés chinois épousaient des Thais...
c'est aussi vrai ensuite, mais entre les deux guerres les Chinoises ont également
immigré. Quoi qu'il en soit tous portent des noms thais — de nombreux dir
igeants de ce pays sont en réalité d'origine chinoise — ce qui, comme dans les
cas précédents, mais pour des raisons inverses — rend malaisée une juste appré
ciation de leur place dans l'économie du pays.
3) Puissance défait. — C'est le cas des Chinois de la Malaysia qui y forment
le tiers de la population, qui y occupent non seulement la plus grande partie
du secteur urbain, mais qui sont aussi largement implantés en milieu rural
— small-holdings d'hévéas, de poivriers, etc. Leur pouvoir économique est
considérable et plus nettement défini. Selon les chiffres officiels du gouverne
ment malais, les Chinois y détiennent en 1972 85 % du capital fixe de la cons-
2. Très remarquable aussi la situation au Cambodge jusqu'en 1974-1975 où l'on n'a jamais
cherché à intégrer de force les Chinois tout en les admettant volontiers — mariages « mixtes »
compris. Tolérance du bouddhisme ? CHINOIS D'OUTRE-MER 46 1 LES
traction, 33 % pour l'industrie, 35 % pour les mines, 55 % de la valeur du
commerce de gros et 76 % du commerce de détail. Vingt banques sur les
36 banques commerciales malaysiennes sont aux mains des Huaqiao. La situa
tion n'est pas simple pour autant : l'Islam y interdit pratiquement les mariages
« mixtes », l'Etat y favorise les bumiputra (« enfants du sol » = Malais et abori
gènes) pour la possession du sol et l'accès à la fonction publique, et les conflits
sont récurrents bien que l'une de leur organisation (Malaysian Chinese Assoc
iation) collabore très officiellement avec les autorités malaises.
4) Les Chinois au pouvoir. — Dans l'île-Etat de Singapour, les Huaqiao sont
devenus depuis 1965 des citoyens de la République de Singapour, symbole
eminent, seul exemple à ce jour où une partie de la diaspora a construit son
propre Etat. Mais peut-on alors encore parler de Huaqiao ? Quoi qu'H en
soit, un tel statut, paradoxalement, n'a pas simplifié leur pouvoir économique
comme nous le verrons plus loin.
Au-delà de cette différenciation de caractère politique au sens large, c'est
aussi une stratification sociale qu'iï n'est pas inutile de rappeler dans la mesure où
l'image des Huaqiao, entrepreneurs, banquiers, commerçants — ce qui est
exact — est devenue abusive, car ce sont aussi, en plus grand nombre, les petits
boutiquiers, les marchands ambulants, les petits paysans, les pêcheurs, les
ouvriers, les dockers... etc., ils constituent les deux tiers de la population chi
noise de Malaisie et la moitié de celle de Singapour où toutefois ce sont de plus
en plus des Malais (migrations alternantes ou installation temporaire) qui occu
pent les emplois les plus pénibles et les moins qualifiés...
UNE PROSPÉRITÉ D'ORIGINE COLONIALE
Comme on le sait les colonisations hollandaise, française et surtout britan
nique ont largement favorisé cette implantation chinoise3 — comme main-
d'œuvre réputée dure à la tâche et disciplinée, puis, par ses leaders, comme
auxiliaires de l'activité commerciale coloniale.
Un travail acharné, une épargne prodigieuse, des organisations remarqua
blement structurées — les Kongsi (Gongsi) notamment — l'établissement d'un
vaste réseau commercial et financier (Hong-Kong, Singapour, Malacca, Penang,
Cholon, Bangkok), une grande souplesse d'adaptation4 ont fait que Г accumul
ation primitive s'est réalisée dès avant la première guerre mondiale, réalisation
qui se concrétise, entre autres, par la création de la Chambre de Commerce
chinoise de Singapour en 1906.
L'entre-deux-guerres est alors la période d'émergence d'une classe de
3. A l'exception de la Thaïlande, absence de fait colonial qui explique peut-être, dans
une large mesure, la remarquable intégration des Huaqiao dans ce pays, comme nous l'avons
évoqué précédemment.
4. C'est par exemple, après le déclin du trafic par jonques, le transfert de ce monopole sur
les transports routiers au cours de la 2e décennie du xxe siècle, ou les « cycles » de cultures
spéculatives au gré des fluctuations du marché international ou de la conjoncture intérieure,
très caractéristiques sur la façade littorale du Cambodge (cf. la thèse de 3e cycle de J. Pour-
tier, Paris-Sorbonne, 1969) ou les reconversions successives des Chinois de l'archipel des
Riau (cf. notre communication à l'Académie des Sciences d'outre-mer, Mondes et Cultures,

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