Mariages secondaires et foires aux femmes en Inde centrale - article ; n°2 ; vol.1, pg 51-88
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Mariages secondaires et foires aux femmes en Inde centrale - article ; n°2 ; vol.1, pg 51-88

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Description

L'Homme - Année 1961 - Volume 1 - Numéro 2 - Pages 51-88
38 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1961
Nombre de lectures 24
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Jean-Luc Chambard
Mariages secondaires et foires aux femmes en Inde centrale
In: L'Homme, 1961, tome 1 n°2. pp. 51-88.
Citer ce document / Cite this document :
Chambard Jean-Luc. Mariages secondaires et foires aux femmes en Inde centrale. In: L'Homme, 1961, tome 1 n°2. pp. 51-88.
doi : 10.3406/hom.1961.366377
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hom_0439-4216_1961_num_1_2_366377MARIAGES SECONDAIRES ET FOIRES AUX FEMMES
EN INDE CENTRALE
par
JEAN-LUC CHAMBARD
L'étude qui suit se propose de présenter, en y apportant simplement quelque
ordre et quelque unité, des observations sur les mariages secondaires faites dans
un village indien situé dans l'ancien État princier de Gwalior, à la limite nord du
plateau Malwa.
Deux séjours successifs1, comme chercheur du C.N.R.S., nous ont fait passer
deux ans et demi dans le gros village de Piparsod qui compte 2 ooo habitants2
Note sur la transcription des mots hindi :
i° La scientifique est employée pour les textes et pour les mots locaux
dont on veut préciser l'orthographe.
Quelques modifications ont dû être apportées au système classique en raison de certaines
particularités du dialecte local :
ai devient ê car dans le dialecte les sons a et i peuvent se suivre sans se
combiner.
au devient d pour la même raison.
Les deux sons ê (e ouvert) et ô (o ouvert) correspondent du
reste assez exactement à l'ê et à I'd français.
la nasalisation des voyelles est marquée par ~ (exceptionnellement par n pour les voyelles
ayant déjà le signe de longue. Ex. : ân).
c = tch français
s = s français
g = ch (a été préféré au ç en raison du fait que s et é sont très souvent
employés l'un pour l'autre dans les textes)
s — ch cérébralisé.
2° Pour les noms propres ou les mots habituels, une orthographe simplifiée est adoptée
ou bien celle d'usage courant maintenue, mais dans ce cas les mots restent en caractères droits.
Dans cette transcription l'usage anglais prévaut pour les sifflantes :
ch = tch français
sh = ch français.
1. D'août 1956 à août 1957, puis de septembre 1958 à mai i960.
2. Un village de 2 000 habitants a, dans l'Inde en général et notamment dans la région
étudiée, une population supérieure à la moyenne, celle-ci étant de 4 à 600 habitants. Cepen- JEAN-LUC CHAMBARD 52
et où l'on trouve deux castes dominantes : les Brahmanes (30 % de la population
environ) et les Kirar (environ 20%). L'opposition de ces deux castes dont les
styles de vie sont très différents et qui affirment leur personnalité en fonction de
cette différence a été un des éléments les plus favorables pour l'enquête. Par
exemple, ce que nous avons appris du mariage secondaire kirar nous serait ce
rtainement resté très longtemps caché si les Brahmanes ne nous en avaient parlé
les premiers, un peu par dérision, car les Kirar préfèrent cacher ces faits ou les
déguiser sous des dehors orthodoxes. Un autre atout a été de bénéficier de l'aide
d'un fidèle serviteur qui était un nâi (Barbier). Or les Barbiers non seulement sont
au centre des transactions matrimoniales en tant que messagers, intermédiaires
et officiants dans les cérémonies, mais ils possèdent un système d'alliance très
proche de celui des Kirar, ce qui leur permet de parler savamment de ces derniers
sans avoir l'air d'en livrer trop sur leur propre caste.
Nous traiterons le sujet un peu comme nous l'avons découvert, à la manière
d'un puzzle dont les différents éléments ne se sont mis en place que lentement,
souvent par une série de hasards et de rencontres, dont seul peut-être le temps
prolongé passé sur le terrain a permis de réunir les conditions.
Avant d'aborder la question des mariages secondaires, examinons les caracté
ristiques du mariage principal (byâh) kirar. Ce que nous désignons ainsi est en
général le premier mariage. Dans certains cas cependant (mort de la promise,
manque de conjoint approprié) la première union peut être secondaire. Un homme
peut faire successivement plusieurs mariages principaux, la polygamie de ce type
ou celle combinant mariage principal et secondaires étant assez fréquem
ment pratiquée par les Kirar. Le mariage principal se distingue par les traits
suivants :
i° On ne se marie qu'à l'intérieur de son khâft ou sous-caste. La caste des
Kirar est divisée en quatre groupes endogames nommés khâp, de statut inégal.
On ne trouve dans la région de Piparsod que le khàp des Dhâkar auquel appar-
dant Piparsod ne comporte aucun élément de « bâzâr » (ruelle bordée de boutiques) qui
l'assimilerait à un bourg (kasbâ ou basti) . Son économie est essentiellement agricole : c'est un
village de colonisation relativement récente et même les Brahmanes qui sont venus s'y
installer il y a environ 350 ans (probablement une centaine d'années après les Kirar) ont
commencé par partager droits sur le sol et vie agricole avec les Kirar déjà installés (tout le
district alentour est à majorité kirar) et ont tous effectivement cultivé la terre. Ce n'est que
depuis une quarantaine d'années qu'un certain nombre de Brahmanes se tournent à nouveau
vers des professions libérales : le village compte aujourd'hui 70 instituteurs et 20 patwaris
(« secrétaires de mairie » dont une partie de caste Kayasth, la plus proche hiérarchiquement
des Brahmanes et dont plusieurs familles sont établies d'ancienne date au village), fonction
naires disséminés dans la région mais continuant à avoir leurs femmes à Piparsod. Le reste
de la population est composé des ex-castes servantes des deux castes dominantes : Chamars
Cordonniers — « intouchables » — (environ 30 % de la population) qui forment la grande
masse des ouvriers agricoles et dont quelques-uns sont petits propriétaires ou exploitants, et
pour les 20 % restants : Kâchhi Jardiniers, Chaukidar Gardiens, Baniyâ Marchands, Nai
Barbiers, Dhobi Blanchisseurs, et divers artisans : menuisiers, forgerons, potiers. {Cf. pour
leur répartition concrète sur le terrain notre étude cartographique détaillée à paraître sous
le titre : « Atlas d'un village indien »). MARIAGES SECONDAIRES ET FOIRES AUX FEMMES EN INDE CENTRALE 53
tiennent toutes les lignées (got) du village, ainsi que celles des villages alentour
avec lesquels existent des relations d'alliance.
20 Exogamie locale. On ne peut épouser une personne de son propre village
car elle est de ce fait considérée comme un frère ou une sœur « dont on touche les
pieds » (pâo china) — en signe de respect.
30 Le mariage ne peut, de même, être contracté avec une « sœur » ou un
« frère » classificatoire, c'est-à-dire avec les enfants de ses oncles (dâjï, frère aîné
du père ; câcâ ou kâkâ, frère cadet du père ; mâmâ, frère de la mère) et tantes
(bud, sœur aînée ou cadette du père, môsï, sœur de la mère) paternels et maternels,
ainsi qu'avec les enfants de l'oncle ou de la tante maternels du père (bar mâmâ,
grand-oncle maternel et nâni, grand-tante maternelle de l'intéressé).
40 En les mariant, «on fait éviter (à ses enfants) quatre lignées (got ou gotiyâ) »
(car got bacdte) . On dit aussi qu'on leur « fait éviter laits » (car dudh bacâte) ;
bacânâ est le causatif du verbe bacnâ qui veut dire « éviter » et il se traduit par
« faire éviter ». Ce causatif donne une des clefs de toute la conception du mariage.
Ce n'est pas l'intéressé qui se marie, ce sont ses parents qui le marient et lui font
éviter les got proscrits — ce qui du reste va de soi puisque le mariage principal se
fait lorsque l'enfant a environ huit ans. La règle des gotiyâ ou des « laits » à faire
éviter a plusieurs formulations possibles, la plus courante étant : apnâ, mân, âjï
or nâni ka got (ou dûdh) bacâte, « on fait éviter (à son enfant) son propre got, celui
de sa mère, mân, celui de sa grand-mère paternelle, âjï et celui de sa grand-
mère maternelle, nânï ». La formule suivante est peut-être plus proche de la
façon concrète d'envisager les choses : bâfi aj

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