Pouvoir politique et fonction religieuse dans l islam marocain - article ; n°3 ; vol.25, pg 699-713
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Description

Annales. Économies, Sociétés, Civilisations - Année 1970 - Volume 25 - Numéro 3 - Pages 699-713
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1970
Nombre de lectures 44
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Ernest Gellner
Lucette Valensi
Pouvoir politique et fonction religieuse dans l'islam marocain
In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 25e année, N. 3, 1970. pp. 699-713.
Citer ce document / Cite this document :
Gellner Ernest, Valensi Lucette. Pouvoir politique et fonction religieuse dans l'islam marocain. In: Annales. Économies,
Sociétés, Civilisations. 25e année, N. 3, 1970. pp. 699-713.
doi : 10.3406/ahess.1970.422251
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1970_num_25_3_422251Pouvoir politique et fonction religieuse
dans l'Islam marocain
d'une monde, pour sport membres, à notre Rendant un professionnelle équipe et vision membre on un compte jeu de suppose cosmologique soit, réserve de valeurs. de si a souvent nécessaire, invariablement, prête sociétés Ce ou à que à qui remplacer en nos en chaque me termes totalité. valeurs paraît outre la membre de Il morales. première une l'équipe croyances en erreur va a généralement Avec, un soit présentée majeure. jeu et à cependant, raison de de croyances valeurs Toute au de d'un même public, une équipe de membre sur quant difféleurs plus de le
rence intéressante : quand la vision cosmologique et les valeurs morales prétendent
à une validité unique et exclusive, il serait honteux, hérétique et scandaleux de
posséder et d'exhiber une alternative différente. Sans parler du reste, cela ruinerait
la confiance dans cette vision cosmologique et ce jeu de valeurs uniques. Mais pos
séder une vision et des croyances vise, entre autres buts, à rassurer non seulement
soi-même, mais les autres, et à proclamer que certaines idées, certaines attitudes,
sont tout simplement hors de question. Une personne qui révélerait que sa confiance
dans ses propres positions fondamentales (supposées indiscutables) est moins que
totale, et qu'elle tient prête une alternative valable, ruinerait du même coup la
crédibilité dans ses propres positions et encouragerait l'intransigeance chez les
autres. Elle ne le ferait jamais.
Ainsi, les alternatives sont pudiquement dissimulées. Il n'y a là rien d'insolite,
et on en trouvera de nombreux parallèles dans le domaine social et politique : par
exemple, un gouvernement reconnaît les autorités légales et légitimes d'un pays
voisin et il commettrait un acte hostile et provocateur en reconnaissant, en même
temps, un « en exil » qui dirigerait un mouvement révolutionnaire
visant à renverser les chefs actuels de l'État voisin. Mais il ne serait pas sage de
n'avoir aucune relation avec ce mouvement révolutionnaire : après tout, ils peuvent
gagner. Et pendant que le ministère chargé de la diplomatie entretient des rela
tions cordiales et exclusives avec le gouvernement officiel, les services secrets ont la
liberté de conserver des relations de même type avec les révolutionnaires.
699 ET HISTOIRE ANTHROPOLOGIE
L'importance des uîama tient au fait qu'ils fournissent officiellement les normes
de la communauté des croyants ; ils sont les dépositaires et les arbitres de la légi
timité. Cela, en théorie. Car il est un point bien connu où la réalité diverge de la
théorie : le verdict des ulama sur la légitimité, comme le vol de cet oiseau très sur
estimé qu'est le hibou de Minerve, n'a lieu qu'après l'événement, et il ratifie donc
la situation actuelle du pouvoir plutôt qu'il ne s'en fait le juge. Du point de vue
de l'intelligence de la structure sociale générale de l'Islam, cette limitation parti
culière n'importe peut-être pas beaucoup : car elle signifie que les ulama, en général,
ne peuvent pas grand-chose pour déterminer l'identité du chef et qu'ils sont contraints
de ratifier celui qui l'emporte par la force des armes. Sans doute ; mais s'ils ne
peuvent déterminer l'identité du chef, s'ils doivent, bon gré mal gré, s'incliner
devant une force supérieure, cela ne les empêche pas d'être extrêmement influents
sur le type général de société auquel le chef préside. Un groupe d'hommes peut
être impuissant quant aux rôles individuels à remplir dans une société, et cepen
dant extrêmement influent quant à la nature du système des rôles qu'il faut tenir.
Tel est, je crois, le rôle des ulama dans la société musulmane: pas très puissants dans
le choix entre un chef et tel autre, entre une dynastie ou une autre, très influents
néanmoins pour déterminer la nature générale de la société.
Mais il y a une autre limitation à leur influence, d'une espèce toute différente :
non plus sur le choix des personnes, mais sur la structure sociale d'ensemble. Cette
limitation est notoirement attestée par le fait que d'énormes fractions de populat
ions musulmanes regardent moins vers les ulama, pour leur orientation spirituelle,
que vers d'autres types de groupes significatifs sur le plan religieux, qu'ils ont ten
dance à assimiler sous la notion de soufisme.
On peut trouver erronée cette assimilation indistincte de ce qui est, en fait, une
catégorie résiduelle. Sous la catégorie générale de soufisme on tend, par exemple,
à ranger ensemble d'authentiques mystiques et des saints personnages des tribus,
dont la connection avec le mysticisme est réduite. Non seulement les lettrés, mais
aussi les populations locales utilisent le même type de terminologie pour classer
les uns et les autres. Mais cela ne signifie pas que les deux phénomènes soient homog
ènes ni qu'ils méritent d'être classés ensemble, du point de vue de la signification
sociale, comme de celui de la phénoménologie religieuse. Plus grossièrement, on
dira : le mysticisme soufi des citadins est une alternative à l'Islam légaliste, res
treint, aride — selon ses contempteurs — des ulama. Le « soufisme » rural et tribal
en est un substitut. Dans le premier, une alternative est recherchée à l'Islam des
ulama parce qu'il ne satisfait pas pleinement. Dans le second, un substitut est exigé
en raison du fait que — quoiqu'on désire sa légitimation — l'Islam des ulama n'est
pas valable localement, ou pas utilisable dans le contexte tribal, sous sa forme
correcte et urbaine.
L'Islam connaît trois types majeurs de légitimation : le Livre — y compris son
extension par la tradition — , le consensus de la communauté et la ligne de succes
sion. Le Livre est un dépôt de la parole divine, utilisable publiquement, non incarné
dans une personne, un groupe, une institution ou une politique, et, par conséquent,
capable de sanctionner chacun d'entre eux. Cette qualité trans-ethnique et trans
sociale du Livre est sans doute essentielle pour comprendre la vie politique des
sociétés musulmanes et l'expansion de l'Islam. Même si les sociologues avaient
raison de supposer que le divin n'est que du social camouflé, il serait de la plus
grande importance que ce camouflage — si c'en est un — soit si rigoureusement
700 RELIGION ET POLITIQUE DANS L'ISLAM MAROCAIN E. GELLNER
conservé et qu'il assure par-là, énergiquement, la non-identification du divin avec
aucun de ses représentants concrets, humains ou sociaux.
Une autre forme importante de légitimation, dans l'Islam comme ailleurs,
est le consensus de la communauté. Dans l'Islam, cette approche a complété le
Livre plutôt qu'elle ne s'est opposée à lui, par-delà sa tradition. Les sociétés musul
manes n'ont jamais été ce qu'on pourrait appeler des sociétés démocratiques « pures »,
affirmant que la seule sorte de légitimité est le consensus de la communauté. Celui-ci
est invoqué seulement pour compléter la vérité divine par l'interprétation, quand
celle-ci est requise, et non comme une source indépendante et également puissante.
En pratique, le Livre exige des savants pour le lire, et le consensus pour l'interpré
ter : concrètement, l'autorité des ulama comme savants religieux, et celle de la
communauté comme interprète de la Parole, sont en harmonie.
Mais un troisième type de légitimation existe dans l'Islam, celui de la succes
sion. Celle-ci peut être physique ou spirituelle, et souvent une ligne généalogique
emploiera des liens à la fois physiques et spirituels. Les premiers tiennent au fait
que le célibat n'est pas exigé des chefs religieux. Les seconds sont rendus possibles
par l

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