Quiproquos. À propos d esthétique africaine - article ; n°2 ; vol.60, pg 53-64
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Description

Journal des africanistes - Année 1990 - Volume 60 - Numéro 2 - Pages 53-64
Quiproquo : about african aesthetics. As interest grows in the so-called primitive arts, African art has an outstanding place. Several questions can be raised about how it has been exhibited, analyzed and understood. In the light of recent events, exhibitions and conferences, discourses about African art are critically analyzed.
L'art africain occupe aujourd'hui un rôle de premier ordre dans l'intérêt grandissant porté aux arts dits primitifs. De nombreuses questions se posent sur la manière dont cet art doit être montré, analysé, compris. Cet article, en s'appuyant sur les événements récents de l'actualité, expositions et colloques, fait une analyse critique des discours tenus à ce sujet.
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1990
Nombre de lectures 36
Langue Français

Extrait

Michèle Coquet
Quiproquos. À propos d'esthétique africaine
In: Journal des africanistes. 1990, tome 60 fascicule 2. pp. 53-64.
Résumé
L'art africain occupe aujourd'hui un rôle de premier ordre dans l'intérêt grandissant porté aux arts dits primitifs. De nombreuses
questions se posent sur la manière dont cet art doit être montré, analysé, compris. Cet article, en s'appuyant sur les événements
récents de l'actualité, expositions et colloques, fait une analyse critique des discours tenus à ce sujet.
Abstract
Quiproquo : about african aesthetics. As interest grows in the so-called primitive arts, African art has an outstanding place.
Several questions can be raised about how it has been exhibited, analyzed and understood. In the light of recent events,
exhibitions and conferences, discourses about African art are critically analyzed.
Citer ce document / Cite this document :
Coquet Michèle. Quiproquos. À propos d'esthétique africaine. In: Journal des africanistes. 1990, tome 60 fascicule 2. pp. 53-64.
doi : 10.3406/jafr.1990.2451
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jafr_0399-0346_1990_num_60_2_2451MICHÈLE COQUET
Quiproquos
A propos d'esthétique africaine
L'art africain joue actuellement le rôle d'éclaireur dans l'intérêt grandis
sant porté aux arts dits primitifs.
Cette place de premier plan est due pour l'essentiel au développement excep
tionnel d'un marché qui repose moins sur l'augmentation de la valeur des piè
ces, qui sont en effet encore relativement faciles à trouver, que sur la recon
naissance d'une tradition prenant racine dans l'art occidental de ce siècle. Les
arts d'Afrique sont désormais indissociables dans la vision de l'art de nos con
temporains des expériences plastiques déjà anciennes comme celles des artistes
du cubisme (Les Demoiselles d'Avignon de Picasso, peint en 1907, en est l'exem
ple canonique), et des conséquences qu'elles eurent pour l'art moderne : indis
sociables en général de l'engouement des intellectuels, artistes, écrivains et col
lectionneurs du début du siècle, et qui furent les premiers amateurs d'art
« nègre », comme Tristan Tzara, Apollinaire, Vlaminck, et bien d'autres encore.
La compréhension de l'art africain; comme celle de ses homologues océa
niens, australiens, etc., semble ne pas pouvoir se faire désormais sans référence
à l'histoire contemporaine des formes occidentales. Pas un catalogue d'exposi
tion qui n'échappe à la règle, et une grande manifestation avait même célébré
cette tendance, organisée en 1984 par le Museum of Modem Art de New. York,
sous le titre de Primitivism in 20th Century Art : comme si l'art africain ne
devait sa légitimité qu'à l'intérêt qu'il a pu susciter chez nos meilleurs artistes. .
Paris, fidèle à cette longue tradition esthétique, accueille de plus en plus
de manifestations le concernant : non seulement dans les institutions consa
crées telles le musée des Arts africains et océaniens ou la Fondation Dapper,
mais également dans d'autres lieux normalement destinés à d'autres choix artis
tiques, comme le Grand Palais où s'est tenue à la fin de l'année 1989 l'exposi
tion sur la Côte-d'Ivoire.
On ne peut que se réjouir de cette floraison de démonstrations, toutes de
très grande qualité. Mais justement peut-être parce que cet art s'est fait découv
rir, non pas comme propriété de cultures originales, mais comme un interlo
cuteur formel presque anonyme des interrogations pré-abstraites des premières
années du siècle, les attitudes intellectuelles actuelles à son égard foisonnent
de paradoxes.
nul des africanistes, Ы1 12) 1WO : 53 64 54 MICHÈLE COQUET
Illustration non autorisée à la diffusion
■-.H1
Fétiche en bois peint (Zaïre) : le corps est transpercé de lames en 1er et de clous. Les cou
leurs rouge et blanc sont atténuées. La tête coiffée d'un empâtement résineux surmonte un
visage marqué de scarifications, dont les yeux sont formés de deux éclats de porcelaine troués
au centre (hauteur : 86 centimètres). (CI. : musée de l'Homme.) QUIPROQUOS 55
LE POIDS DU PASSÉ
Pourquoi l'art africain est-il encore si difficilement reconnu comme l'égal
des objets d'art des sociétés européennes ? Pourquoi n'est-il, en fait, toujours
qu'œuvre bizarre pour amateurs éclairés, malgré sa réhabilitation certaine grâce
au rôle qu'il a joué (d'ailleurs surestimé) dans notre propre histoire de l'art ?
Questions qu'ont soulevées les polémiques concernant le projet d'ouverture de
la huitième section du Grand Louvre, qui devait comprendre des objets afri
cains, arctiques, américains, asiatiques et océaniens. Questions qui, de manière
indirecte, ont été également au centre du premier colloque sur les arts africains
qui s'est tenu, les 10 et 11 mars 1990, au musée des Arts africains et océa
niens, et dont l'heureuse initiative revient à L. Perrois et R. Lehuard.
La fascination qu'exerçaient ces œuvres sur nos artistes et nos intellectuels
était surtout d'ordre plastique. Elle n'a pas véritablement remis en question
une vision héritée d'un passé colonial de plusieurs siècles, si l'on considère les
périodes précédant le colonialisme moderne ; l'art africain n'est encore que dif
ficilement pensé comme étant comparable à celui de la Renaissance par exemp
le, modèle des modèles, comme si le lent développement technique et écono
mique des populations sans écriture que connaît l'Afrique n'avait pu produire
que des œuvres mineures, elles aussi en quelque sorte « retardées ».
Les difficultés avec lesquelles ces arts ont essayé d'entrer au 'Louvre ne
sont-elles pas révélatrices de cette attitude, bien que la voie ait été déjà ouverte
par un autre art africain,1 depuis longtemps sacralisé, l'art égyptien >?
Un manifeste publié il y a quelques mois dans la presse1 avait; appelé à
l'ouverture rapide de la huitième section ; bonne initiative mais qui laisse cer
taines questions ouvertes.
S'agit-ilde présenter ces arts comme les. primitifs, au sens de ceux qui
seraient venus avant, des arts européens, ou comme les égaux véritablement
— ce que proclamait ce manifeste — de ces derniers ? Ce n'est pas si clair,
et il en va d'autre chose que d'une simple querelle de mots : l'enjeu est celui
de la reconnaissance de cultures, nos contemporaines, qui, au-delà du clivage
d'ordre matériel; doivent être pensées comme nos égales.
Je prendrai pour exemple de cette équivoque la conception de la Fondat
ion Dapper, qui a clairement affirmé depuis le début de ses activités une posi
tion esthétique ; voilà un lieuoù l'on est sûr de toujours voir des objets de
très grande qualité, présentés avec beaucoup de soin et d'attention, comme il
convient à des « chefs-d'œuvre ». La dernière exposition, intitulée Bénin, tré
sor royal en donne l'exemple : il s'agit de la collection du Museum fur Vôlker-
kunde de Vienne qui s'est constituée à partir de 1899 par l'achat de pièces pro
venant du palais d'Abomey après la victoire des troupes anglaises en 1897." Le
parti pris en général par le musée Dapper est de nous montrer des œuvres réu
nies en un ensemble cohérent parce qu'appartenant à une même région, voire
à une même ethnie (comme l'exposition Abstractions aux royaumes des Kuba
en 1987) et traitant- d'un même type d'objets. Cependant, malgré toutes ces
1. Libération du 15 mars 1990, « Pour que les chefs-d'œuvre du monde entier naissent libres et égaux ,
56 MICHÈLE COQUET
précautions, la Fondation Dapper n'est pas toujours à l'abri, elle non plus,
des attraits de l'exotisme facile. L'exposition précédente, Objets interdits, en
l'honneur du tricentenaire d'O. Dapper, reprenait le thème des cabinets de curio
sités du XVIIe siècle qui comprenaient souvent parmi leurs pièces maîtresses les
fameux fétiches à clous du » Zaïre.-,
Or, que ressortait-il de cette réunion d'« objets interdits » ? Que l'art afri
cain n'est pas tant un ensemble de chefs-d'œuvre que l&#

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