Service public et droit communautaire. Une nouvelle crise de la notion de service public en droit administratif français ?      - article ; n°1 ; vol.32, pg 37-57
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Sociétés contemporaines - Année 1998 - Volume 32 - Numéro 1 - Pages 37-57
SANDRINE GARCERIES
Public service and Community law: is there a new «crisis» in the notion of public service in French administrative law?
Today, the jurist has to consider a public service which is regarded both as sacred and commonplace, but which is also undergoing a «crisis». Anyway we can note that the building of Europe is much responsible for the critical period the public service is passing through. Because of the logic it generates, the regulations it develops and the new notions it sets out, Community law is challenging what everyone calls «the French conception of public service». But what is the situation like as far as law is concerned? Will the Community law toll the knell of the notion of public service shaped by the jurist? This question deserves a qualified answer. Even if the juridical analysis confirms the reality of the effects and finds the uncertainties, the edifice of the public service does not seem to be threatened. The measure of the im pact leads us to relativize the idea of a new crisis of this notion of public service in administrative law. Between continuation and revaluation, the present movement, which is generated by Community law, leads the jurist to return to the central issues.
HENRI COING
Urban public utilities are more and more integrated in global markets and supralocal regulations. At the same time, their spatial and territorial dimension is reinforced by environmental issues, new problems of affordability, and urban fragmentation process. Many sectorial researches illustrate the crisis of the traditional policy communities and the rise of new regulatory processes at the local level.
RÉSUMÉ: C’est un service public sacralisé, banalisé, mais également «en crise» qui s’offre aujourd’hui au regard du juriste. Un constat est fait: si le service public traverse une période difficile, la construction européenne y est pour beaucoup. Le droit communautaire, par la logique qu’il met en oeuvre, la réglementation qu’il développe et les nouvelles notions qu’il formule, remet en cause ce que tout le monde nomme la «conception française du service public». Mais qu’en est-il exactement en droit? Le droit communautaire sonne-t-il le glas de la notion de service public dont les juristes seraient les artisans? Cette question mérite une réponse nuancée. Si l’analyse juridique confirme la réalité des incidences et relève les incertitudes, la construction ne semble pas pour autant menacée. La mesure de l’impact invite à relativiser l’idée d’une nouvelle crise de cette notion de service public en droit administratif. Entre continuité et revalorisation, l’actuel mouvement, sous l’impulsion du droit communautaire, invite le juriste à recentrer le discours.
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Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 1998
Nombre de lectures 29
Langue Français

Extrait

      S A N D R I N E G A R C E R I E S        
SERVICE PUBLIC ET DROIT COMMUNAUTAIRE UNE NOUVELLE  CRISE  DE LA NOTION DE SERVICE PUBLIC EN DROIT ADMINISTRATIF FRANÇAIS ?
RÉSUMÉ :  C’est un service public sacralisé, banalisé, mais également « en crise  qui s’offre aujourd’hui au regard du juriste. Un constat est fait : si le service public traverse une période difficile, la construction européenne y est pour beaucoup. Le droit communautaire, par la logique qu’il met en œuvre, la réglementation qu’il développe et les nouvelles notions qu’il formule, remet en cause ce que tout le monde nomme la « conception française du service public . Mais qu en est-il exactement en droit ? Le droit communautaire sonne-t-il le glas de la notion de service public dont les juristes seraient les artisans ? Cette question mérite une réponse nuancée. Si l’analyse juridique confirme la réalité des incidences et relève les incer-titudes, la construction ne semble pas pour autant menacée. La mesure de l’impact invite à relativiser l’idée d’une nouvelle crise de cette notion de service public en droit administratif. Entre continuité et revalorisation, l’actuel mouvement, sou l’impulsion du droit communau-s taire, invite le juriste à recentrer le discours.  Aujourd’hui, nul ne semble le contester, le service public traverse une période critique, sous l’effet d’une « nouvelle donne européenne  pour reprendre la formule utilisée par le Rapport public du Conseil d’État pour 1994. Si la réalité du phéno-mène n’est guère discutée, la mesure de son ampleur suscite néanmoins la réflexion. Les exigences de la construction européenne ravivent depuis quelque temps, une thématique de la « crise du service public  qui n’est ni nouvelle, ni l’apanage des seuls juristes. Ceux-ci auraient pourtant été, dès les années 1950, les premiers à vi-vre une crise du concept juridique. Jean-Louis de Corail notamment, dans ses tra-vaux publiés en 1954, a mis en évidence la dégradation d’une systématisation asso-ciant service public, personne publique et droit administratif : conséquence des inter-ventions économiques croissantes de l’État, le champ d’application de la notion s’est étendu en même temps que le régime juridique qu’elle justifiait s’est décomposé. Si le bien-fondé du recours au concept de crise dans la pensée administrative a pu depuis susciter chez certains auteurs quelques interrogations (Bienvenu, 1986), les difficultés actuelles que connaît le service public ouvrent pourtant la perspective d’une réflexion portant sur la « crise d’une notion  au sens où l’entendait Jean-Louis de Corail, à savoir l’analyse des « modifications qui ont été apportées à ses Sociétés Contemporaines (1998) n° 32 (p. 37-56)   37  
S A N D R I N E G A R C E R I E S                 éléments constitutifs  et l’étude des « difficultés qu’il y a à lui assurer un rôle dans le domaine juridique . Le discours actuel révèle la menace qui pèse sur la pérennité d’un « système  français. Un mouvement de défense de la « conception française du service public  s’est constitué. Le droit communautaire, en soumettant dans une large mesure les entreprises économiques de l’État à un droit commun, reléguerait les services pu-blics aux seules fonctions de souveraineté. Au terme d’une banalisation, la question de la survie de la notion même de service public, telle qu’elle a été élaborée par les juristes, est posée. Si le juriste s’interroge aujourd’hui sur l’avenir de la notion, c’est toutefois une approche en termes de devenir qu’il semble retenir : l’idée d’un service public au-trement (Voisset, 1995) est avancée. Dès lors s’il est possible d’envisager la pers-pective d’une nouvelle « crise  de la notion juridique, conséquence de la construc-tion européenne, quel en serait le sens ? N’y aurait-il pas là aussi « quelques bonnes raisons  invitant à penser que « nous ne sommes pas en train d’assister à la décom-position de l’ordre juridique, mais à sa recomposition  ? (Caillosse, 1992). Oscillant entre indifférence et incidence, le droit communautaire oblige à posi-tionner la notion française par rapport à des notions qui demeurent « approchantes  (1). Mais au-delà de l’influence certaine qu’il exerce, ce droit communautaire af-fecte-t-il la notion française dans ses éléments constitutifs et dans sa fonction ? Me-surer l’impact revient finalement à relativiser la crise (2). 1. ANALYSE D’UNE RENCONTRE, PRESAGE D’UNE RUPTURE SERVICE PUBLIC ET DROIT COMMUNAUTAIRE, ENTRE (IN)DIFFERENCE ET INCIDENCE Constat trivial s’il en est, la notion de service public est loin d’occuper une place centrale dans les premiers textes de la construction européenne. Si la formule peut se retrouver ici et là, de manière isolée, tel à l’article 77 du Traité CE, force est de constater que la notion – éminemment française il est vrai – a été, jusqu’à une pé-riode récente, largement ignorée par le droit communautaire. Cette absence origi-nelle des principes juridiques devant gouverner l’édifice européen est significative : au-delà de ce qui pouvait apparaître comme une indifférence se modelait en réalité une différence des approches. Depuis peu – succès d’une mobilisation autour du thème de la défense de la conception française du service public et/ou reconnaissance des limites du libre jeu des forces du marché – une nette évolution est perceptible. Les services d’intérêt gé-néral, formule désignant « les activités de service marchand ou non, considérées d’intérêt général par les autorités publiques, et soumises pour cette raison à des obli-gations spécifiques de service public , semblent voués à devenir, selon les propres termes de la Commission, un « élément clé du modèle européen de société  (Com 96/C 281/03). Le Traité d’Amsterdam du 2 octobre 1997 confirme l’orientation prise 1 . L’intégration des valeurs qu’incarne le service public et le développement de  1. Insertion d’un nouvel article 7 D au Traité CE : « Sans préjudice des articles 77, 90 et 92, et eu égard à la place qu’occupent les services d’intérêt économique général parmi les valeurs communes
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          S E R V I C E P U B L I C E T D R O I T C O M M U N A U T A I R E notions approchantes concrétisent l’idée du passage d’une construction européenne ignorant le service public à l’édification d’un service public « à l’européenne . 1. 1. LA DIFFERENCIATION DES APPROCHES L’APPROCHE COMMUNAUTAIRE DU SERVICE PUBLIC : INDIFFERENCE OU DIFFERENCE ?  l’origine d’une large réflexion portant sur l’avenir du – ou plutôt des – servi-ces publics, se trouve l’absence de prise en compte d’une spécificité nationale à l’échelle européenne. Notion insaisissable, « saturée de significations multiples  (Chevallier, 1994), devenue pour certains un mot de passe, un label (Truchet, 1982), le service public reste aujourd’hui un principe unificateur tout en renvoyant à la di-versité. Dans sa confrontation au droit communautaire, la question principale n’est peut être pas : le service public a-t-il un avenir ? mais plutôt : de quel « service pu-blic  parle-t-on ? L’accent mis sur une certaine promotion du service public en Eu-rope a fait apparaître la nécessaire compréhension par les instances européennes d’un « système français . Mais derrière l’idée de la connaissance, un problème de reconnaissance se pose. 1. 1. 1. SPECIFICITE DE LA NOTION DE SERVICE PUBLIC EN FRANCE Au cœur d’un vaste débat en Europe, le service public est brandi comme un étendard. Dans le tumulte, la confusion règne au point que la question se pose par-fois de savoir quelle acception est donnée à l’expression « service public  utilisée. Qu’entend-on par « conception française du service public  ? Qu’envisage-t-on par « défense du service public à la française  ? Le recours systématique à ces formules, qui ne sont peut-être pas synonymes, est relativement récent – avec une réserve toutefois pour la première qui se retrouve sous la plume de certains juristes établissant dans les années 50 une crise de la no-tion (Morange, 1947). Il symbolise une volonté de marquer du sceau de la singulari-té un concept, produit historique d’une évolution juridique, devenu « emblématique d’un véritable modèle de société  (Chevallier, 1997). Si, au plus fort de sa construction, le service public apparaît comme une réponse apportée par le Droit, dans le cadre de l’édification d’un droit administratif auto-nome, aux mutations de l’État et à la recherche d’une légitimation de l’action admi-nistrative, il renvoie aujourd’hui, débordant du cadre juridique, une image pluridi-mensionnelle – que d’une certaine manière le langage reproduit par l’usage du singulier ou du pluriel ou encore par l’apposition ou non d’une majuscule. Ainsi, le service public rassemble des activités et structures prises en charge directement ou non par les collectivités publiques, organisant une partie de la sphère publique sans pour autant parvenir à la borner ; indissociable d’une régulation sociale, il cristallise un ensemble de valeurs, vecteur de l’action des pouvoirs publics qu’en même temps  de l’Union ainsi qu’au rôle qu’ils jouent dans la promotion de la cohésion sociale et territoriale de l’Union, la Communauté et ses Etats membres, chacun dans les limites de leurs compétences res-pectives et dans les limites du champ d’application du présent traité, veillent à ce que ces services fonctionnent sur la base de principes et dans des conditions qui leur permettent d’accomplir leurs missions  (JOCE C340 du 10-11-97).
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S A N D R I N E G A R C E R I E S                 il justifie et légitime ; tourné vers l’intérêt général et rattaché à la personne publique, il postule et conditionne la mise en œuvre de règles juridiques propres et spéciales. En droit, la notion de service public joua un rôle fondamental dans l’élaboration du droit administratif, au point qu’elle a pu en apparaître comme le principe explica-tif. Clé de l’application de ce droit et de la compétence du juge administratif dans un système contentieux fondé sur le dualisme juridictionnel, elle est une notion unitaire, synthèse des éléments du régime de l’action administrative. l’origine de l’édifice se trouve une construction de Léon Duguit, assise sur une conception de l’État « coopération de services publics organisés et contrôlés par des gouvernants , faisant du service public « le fondement et la limite du pouvoir gou-vernemental . Fonction obligatoire à la charge des gouvernants, il est instrument de la soumission de l’État au droit : le concept de « service  devant être rendu à la col-lectivité remplace celui de « puissance  publique, renforçant les garanties offertes aux individus. La notion vise alors « toute activité dont l’accomplissement doit être assuré, réglé, et contrôlé par les gouvernants parce que (...) indispensable à la réali-sation et au développement de l’interdépendance sociale et qu’elle est de telle nature qu’elle ne peut être réalisée complètement que par l’intervention de la force gouver-nante  (Duguit, 1928). Soumise à des obligations, l’administration assume les prin-cipes de fonctionnement qu’implique le service public et les administrés, devenant usagers, détiennent des droits en retour. Au terme d’un processus évolutif à la fois endogène et exogène, la notion juridi-que est, à l’aube de la construction européenne, singulièrement plurielle. Aux côtés des services publics administratifs – recouvrant notamment des activités régaliennes – qui connaissent parfois l’application du droit privé, des services publics industriels ou commerciaux soumis en grande partie au droit privé et à la compétence du juge judiciaire ont été identifiés. L’unité d’un régime juridique, qui apparaît alors hy-bride, mélange de règles de droit public et privé, est brisée. De plus, la distinction de ces deux services est incertaine. En l’absence de qualification législative expresse, un service public est présumé être administratif. Le juge lui reconnaît un caractère industriel ou commercial si du point de vue de l’objet du service, de l’origine des ressources et des modalités d’organisation et de fonctionnement, il ressemble aux activités entreprises par les particuliers (CE Ass 16.11.1956 USIA, Rec. p. 434). L’interprétation de ces indices étant fluctuante, une même activité peut être qualifiée de service public administratif ou de service public industriel ou commercial selon qu’elle est ou non par exemple subventionnée par une collectivité publique. Par ail-leurs, les modes de gestion s’étant diversifiés, personnes privées et personnes publi-ques exerçant des activités de service public, la mixité du régime s’est accrue. Atteinte dans ses éléments organique et formel, la notion de service public reste matérielle et permet aux juristes de qualifier une activité assumée directement ou non par une personne publique en vue de satisfaire un besoin reconnu d’intérêt géné-ral, afin de mettre en œuvre un régime juridique spécifique 2 .  2. Outil des juristes, la notion est le moyen par lequel ceux-ci « appréhendent des faits en vue de dé-terminer quelles règles de droit leur sont applicables : la notion permet de qualifier des faits, c’est à dire de les faire rentrer dans une catégorie connue et répertoriée, à laquelle ces faits paraissent cor-respondre et, en conséquence, de leur déclarer applicable le régime juridique établi pour cette caté-gorie  (Bénoit, 1995).
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          S E R V I C E P U B L I C E T D R O I T C O M M U N A U T A I R E Les formules « conception française du service public  et « service public à la française  dépassent cette perception issue du droit administratif. Dans le discours, la première renvoie à la place de l’État dans le jeu social : par le service public, l’État, fort d’une légitimité tournée vers la satisfaction des besoins collectifs jugés essentiels, a été doté d’une solide personnalité. L’idée de service public implique alors que certaines activités doivent rentrer dans la sphère de la responsabilité de l’État pour être gérées en fonction de considérations à la fois générale et spécifique que la logique marchande ne peut complètement satisfaire (lutte contre l’exclusion, gestion spatiale et temporelle des ressources...). Plus particulière, la seconde vise davantage la trilogie Services publics – Entreprises publiques – Monopoles publics, c’est à dire des modalités d’organisation de certains services publics – surtout ceux en réseaux – adoptées en France, « celles qui consistent à confier l’exécution des services publics (...) à des monopoles publics (...) dont les salariés bénéficient d’un statut particulier  (Denoix de Saint Marc, 1996). 1. 1. 2.  UNE APPROCHE EUROPEENNE DIFFERENTE  la différence des précédentes crises l’ayant affecté, le service public se trouve confronté à l’émergence d’une « société  européenne et surtout à une politique de libéralisation appréhendée comme moyen de réalisation du marché unique – le sec-teur des services étant le dernier libéralisé. D’essence économique, l’édifice euro-péen repose sur un ordre juridique tourné vers le marché, la libre circulation des produits et des services qu’une situation de concurrence non faussée permet d’obte-nir. Si le droit communautaire ne peut certes pas se réduire à un droit de la concur-rence, ce dernier reste central : il est l’instrument juridique de la réalisation du mar-ché unique ayant pour fin l’établissement d’un « bien-être  de la collectivité européenne. Globalement se révèle une philosophie juridique fondée sur le primat du libre jeu des forces du marché et sur une forte suspicion envers les interventions de l’État. Cette approche intellectuelle mesure d’emblée une divergence par rapport au « système  français : alors que « beaucoup d’Européens pensent que le marché fait bien les choses, et qu’il appartient à l’État (...) de prouver qu’il peut faire mieux , « la tradition française a tendance à inverser la charge de la preuve : c’est au marché de montrer qu’il peut faire mieux que l’État  (Rapport Stoffaës, 1995). La politique européenne a eu pour effet d’inscrire les entreprises de service pu-blic dans un environnement concurrentiel, en abordant autrement que par le concept de service public l’action publique sur le marché. Ce qui n’est pas reconnu, c’est une approche par le service public de l’action étatique ; ce que l’Europe ne fait pas, c’est une recherche de la légitimité de cette action. Aussi, l’Europe communautaire atteint peut-être davantage sur le fond l’action publique que la raison d’être du service pu-blic (Lyon-Caen, 1997). L’Union européenne s’est construite en laissant au service public une portion congrue (Rapport du Conseil d’État, 1995). En réalité, il semble mal s’y intégrer, pouvant constituer un frein au libre échange recherché. En effet, si des services pu-blics peuvent se retrouver sur le marché – ce qui est le cas des services publics in-dustriels ou commerciaux – ils ne sont pas susceptibles d’être soumis entièrement à ses lois, la logique de l’intérêt général n’étant pas toujours compatible avec celle du
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S A N D R I N E G A R C E R I E S                 marché : aux confins de l’État et du marché, ces services publics, tout en obéissant à des règles commerciales, ont, compte tenu de leur mission d’intérêt général, des droits et obligations spécifiques ; par-dessus les luttes d’intérêts privés, ils visent un dessein supérieur. Une approche autre du droit communautaire, progressive, par secteur, ne ren-voyant pas vraiment l’image d’une unité, s’est imposée. Elle aborde la question des services publics en terme d’équilibre entre concurrence et intérêt général, la pre-mière étant la règle, la seconde l’exception selon la lettre même de l’article 90 § 2 du Traité CE 3 . Surtout, elle utilise un nouveau vocabulaire. La différence terminologi-que présuppose une démarche proprement européenne à l’égard de ce qui est appelé en France « service public  : c’est une manière pour le droit communautaire de re-fuser toute référence aux systèmes existants dans toute leur diversité au sein des États membres ; c’est surtout une manière de revendiquer la maîtrise sémantique et d’ouvrir la matière à de nouvelles conceptions. Un effort de clarification et des réajustements sont désormais entrepris. La Commission notamment reconnaît que les services d’intérêt général « répondent (...) à des besoins fondamentaux  et que « la fonction de ciment de la société  qu’ils « assument dépasse le seul niveau des préoccupations matérielles  (Com 96/C 281/03). Si le jeu des mécanismes du marché bénéficie toujours d’une présomption d’efficacité, il est reconnu comme présentant certaines limites pouvant aboutir à des formes d’exclusion et heurter la cohésion sociale. Et c’est dorénavant, au-delà d’un équilibre, une « interaction bénéfique  entre l’intérêt général et le grand marché eu-ropéen qui est recherchée. Mais le service public apparaît toujours à la lumière des textes récents comme un moyen adapté à la correction des effets ou des défaillances du libre jeu du marché. En reléguant l’intervention publique au rang de complément aux lois du marché, l’approche communautaire est loin de reprendre la conception d’ensemble du service public français. 1. 2. L’ACTION OBLIQUE DU DROIT COMMUNAUTAIRE L’ACTION NORMATIVE SUR LES SERVICES PUBLICS : INTERFERENCE ET INCIDENCE Si l’Union européenne, dans sa démarche particulière, approche la question des services publics par le travers (Belorgey, 1996), la production normative qu’elle gé-nère traverse en plusieurs points la sphère du service public. D’une part, le droit communautaire tant originaire que dérivé appréhende l’intérêt général par de nou-veaux concepts qu’il développe progressivement : alors que le Traité de Rome envi-sageait le sort des entreprises chargées de la gestion d’un service d’intérêt économi-que général, les autorités communautaires s’attachent depuis peu à l’établissement d’un concept de service universel. D’autre part, il édicte des mesures ayant des ré-
 3. Selon cet article, « Les entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général ou présentant le caractère d’un monopole fiscal sont soumises aux règles du présent traité, notam-ment aux règles de concurrence, dans les limites où l’application de ces règles ne fait pas échec a l’accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie. Le dévelop-pement des échanges ne doit pas être affecté dans une mesure contraire à l’intérêt de la Communau-té .
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          S E R V I C E P U B L I C E T D R O I T C O M M U N A U T A I R E percussions sur les modes d’organisation et de fonctionnement des services publics en France. 1. 2. 1. L’EMERGENCE DE CONCEPTS APPROCHANTS Le service d’intérêt économique général est un concept posant les bases d’un ré-gime juridique européen de certaines activités de service public. L’article 90 § 2 du Traité CE, tout en soumettant en principe toutes les entreprises – publiques ou pri-vées 4 aux mêmes règles de concurrence, réserve l’exception des entreprises char-gées d’un service d’intérêt économique général. Pour celles-ci, les règles du Traité sont écartées dès lors qu’elles sont susceptibles de faire échec à l’accomplissement de leur mission particulière. Cette disposition, reconnaissant l’existence de missions spécifiques imparties à certaines entreprises, organise en conséquence un régime dé-rogatoire autorisant, entre autres, la détention de droits spéciaux ou exclusifs. Ré-serve faite de l’approche en terme d’exception, la fonction de ce concept semble proche de celle de la notion de service public : identifier des activités afin de leur appliquer un régime juridique spécifique, les faisant échapper aux seules lois du marché ; légitimer des dérogations aux règles du droit commun. L’article 90 § 2 ne contenant pas de définition précise du service qu’il vise, l’identification de ces activités s’avère toutefois difficile. La lettre du texte met en évidence un caractère économique : le régime dérogatoire que l’existence d’une mis-sion d’intérêt économique général justifie ne concerne que des entreprises. Cela ne doit pas surprendre : cet article qui tente de concilier intérêt général et concurrence sur le marché ne s’attache pas à réglementer des activités administratives. Une dis-tinction fondamentale est faite en droit communautaire entre les activités d’autorité publique et les activités d’entreprise des personnes publiques – les premières suppo-sent la mise en œuvre des règles relatives aux États membres, les secondes celles applicables aux entreprises. Les conclusions de l’avocat général Tesauro dans l’affaire Eurocontrol (CJCE 19-01-1994, SAT Fluggesellschaft mbH, aff. C-364/92, Rec.p.I-43) ont précisé cette distinction : « l’accomplissement d’une activité com-portant l’exercice de prérogatives de puissance publique  est incompatible avec la qualification d’entreprise, une telle qualification supposant « l’exercice d’une activi-té à caractère économique susceptible d’être exercée, du moins en principe, par une entreprise privée et dans un but lucratif . La notion d’entreprise au sens du droit communautaire est donc exclusive de celle de prérogatives de puissance publique. En France, le service public peut difficilement se passer des moyens que seule l’autorité publique détient. La notion de service d’intérêt économique général est précisée peu à peu par les autorités communautaires. Après avoir retenu le critère de la spécificité de l’activité économique exercée – « activité d’intérêt général exercée par une entité publique ou privée à qui l’exercice (...) a été confié par un acte de puissance publique  (CJCE 21-03-1974, BRT c/ Sabam, aff.127/73, Rec.p.313), devant présenter « des caractè-res spécifiques par rapport à celui que revêtent d’autres activités de la vie économi-que  (CJCE 10-12-1991, Merci Convenzionali Porto di Genova, aff. 179/90,  4. Le Traité ne préjuge, selon l’article 222, « en rien le régime de la propriété dans les Etats mem-bres .
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S A N D R I N E G A R C E R I E S                 Rec.p.I-5923) –, la Cour de justice a établi plus subtilement dans les arrêts Corbeau (CJCE 19-05-1993, aff. C-320/91, Rec.p.I-2563) et Commune d’Almelo (CJCE 27-04-1994, aff. C-393/92, Rec.p.I-1508) un lien entre la nature du service et les obliga-tions qui pèsent sur l’entité qui en est chargée : obligation d’assurer des prestations à tous les usagers, sur l’ensemble d’un territoire, à des tarifs uniformes... Pour la Commission, ces services désignent « les activités de service marchand remplissant des missions d’intérêt général, et soumises de ce fait par les États membres à des obligations spécifiques de service public  (Com. 96/C 281/03). Ce concept euro-péen s’attache donc aux missions d’intérêt général imparties par un État à des entre-prises soumises en conséquence à des contraintes spécifiques. La notion de service universel est d’apparition plus récente. Si la formule paraît être empruntée à la législation américaine, la notion a été développée par les institu-tions communautaires dans le domaine des télécommunications et de la poste. Dans ces secteurs libéralisés, ce concept vient tempérer une complète ouverture à la concurrence en imposant aux opérateurs des principes communs jugés indispensa-bles pour la fourniture des services. Ainsi, contrairement à la notion de service d’intérêt économique général qui s’attache à préserver certaines activités de service public sur le marché en les soumettant à un régime dérogatoire, le service universel s’inscrit dans une optique concurrentielle en tentant de corriger les effets d’une libre concurrence tournée vers la rentabilité financière au détriment d’impératifs écono-miques et sociaux indispensables à la cohésion sociale. La démarche européenne est quelque peu nouvelle : le service universel paraît davantage être un correctif qu’une exception. Toutefois, la réflexion des autorités communautaires par secteur ne favo-rise pas l’émergence d’un concept générique, d’autant plus que dans les autres sec-teurs libéralisés l’expression « obligations de service public  est préférée. En l’état actuel des textes, le service universel définit « un ensemble d’exigences d’intérêt général auxquelles devraient se soumettre, dans toute la Communauté, les activités des télécommunications ou de la poste, par exemple. Les obligations qui en découlent visent à assurer partout l’accès de tous à certaines prestations essentielles, de qualité et à un prix abordable  (Com. 96/C 281/03). Ainsi, selon le Livre vert de la Commission sur les services postaux, le service universel est le « service de base offert à tous, dans l’ensemble de la Communauté à des conditions tarifaires aborda-bles et avec un niveau de qualité standard  (Com. (92) 476). Ce service universel doit donc permettre l’accès d’un maximum d’utilisateurs à un ensemble minimal de services de qualité – selon les nécessités du secteur – à un prix convenable. Cette notion tend à représenter sinon une « conception européenne du service public , du moins une approche communautaire de base de l’intérêt général. Elle rencontre la notion de service public sur le terrain des impératifs de l’intérêt général et des obligations spécifiques qui s’y rattachent – tout comme d’ailleurs sur celui de la plasticité de son contenu. Pourtant, la notion de service universel ne représente qu’une vision partielle du service public : elle ne s’attache qu’à une partie des activi-tés d’intérêt général qui relèvent en France du service public, tout comme elle ne s’attache qu’à l’aspect fourniture de ces activités (Fournier, 1997).
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          S E R V I C E P U B L I C E T D R O I T C O M M U N A U T A I R E 1. 2. 2. DE MULTIPLES MESURES AFFECTANT LES CONDITIONS D’ORGANISATION ET DE FONCTIONNEMENT DES ACTIVITES DE SERVICE PUBLIC Le premier élément notable est relatif au régime dérogatoire du droit commun applicable aux entreprises chargées d’un service d’intérêt économique général. L’attribution de ce régime est soumise à des conditions : l’application des règles du Traité doit faire échec à l’accomplissement de la mission d’intérêt général et les dé-rogations ne doivent pas affecter le développement des échanges dans une mesure contraire à l’intérêt de la Communauté. Il n’existe donc pas de régime juridique au-tomatiquement dérogatoire du droit commun, ainsi que l’établissait d’ailleurs l’interprétation stricte dont a fait l’objet l’article 90 § 2. Toutefois, un certain assou-plissement est à noter dans la récente jurisprudence de la Cour de justice des Com-munautés européennes. En effet, dans les arrêts Corbeau et Commune d’Almelo précités, la juridiction européenne envisage comme obstacle à l’accomplissement de la mission d’intérêt économique général la remise en cause de l’équilibre financier du service. Est re-connu pour ces entreprises le droit de fonctionner dans des conditions économique-ment acceptables, droit justifiant des exclusions de toute concurrence. Le risque était que la concurrence dans les faits ne s’établisse que dans les secteurs d’activités ren-tables, rendant difficile pour l’entreprise chargée du service d’intérêt économique général une compensation financière du secteur moins rentable par le secteur renta-ble. Pour lutter contre ce phénomène, la Cour distingue au sein des activités de l’entreprise deux types de services : les services de base, indissociables du service d’intérêt économique général parce qu’ils permettent la réalisation de la mission, et les services spécifiques, qui en sont « dissociables  parce que, répondant « à des besoins particuliers des opérateurs économiques , ils appellent des prestations sup-plémentaires que le service de base n’offre pas. Dans le premier cas, le régime est protecteur du service – il est donc dérogatoire du droit commun ; dans le second, le droit commun s’applique si l’équilibre économique du service n’est pas remis en cause. En outre, dans un arrêt Commission c/ France (CJCE 23-10-1997, aff. C-159/94, Rec.p.I-5819), la Cour précise que pour bénéficier du régime dérogatoire, il n’est pas nécessaire que la survie ou la viabilité économique de l’entreprise soit me-nacée : il suffit qu’en absence de droits exclusifs ou spéciaux, il soit fait échec à l’accomplissement des missions particulières qui lui sont imparties.  côté de cette conception particulière du régime juridique applicable, le droit communautaire s’attache à réglementer l’organisation même des activités dites en France de service public. Certaines mesures visent à clarifier les rôles et à mieux distinguer les genres, pour faire ressortir ces activités de la masse dans laquelle elles sont noyées. Tout d’abord, la séparation des fonctions de régulateur et d’opérateur est recher-chée. L’idée ici est d’exclure qu’une même entité puisse cumuler activités économi-ques et fonctions d’autorité publique dans une mesure contraire à la concurrence. Une transparence des activités étatiques sur le marché est voulue pour une réelle ef-fectivité de la concurrence. Différentes directives sont intervenues pour assurer cette séparation et confier les activités de réglementation à des entités indépendantes. En France, la loi du 26 juillet 1996 de réglementation des télécommunications (L 96.659 JORF 27.07.96 p.11384) met en place une nouvelle organisation de régula-
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S A N D R I N E G A R C E R I E S                 tion : « la fonction de régulation du secteur des télécommunications est indépen-dante de l’exploitation des réseaux et de la fourniture des services (...) Elle est exer-cée au nom de l’État (...) par le ministre chargé des télécommunications et par l’Autorité de régulation des télécommunications , nouvelle autorité administrative indépendante (Art. L 32-1,I,3°). Dans un même ordre d’idée, certaines dispositions communautaires imposent une différenciation des activités au sein même d’une entreprise. Une séparation comptable entre ses activités monopolistiques et ses activités concurrentielles est souvent exigée. De même, une dissociation des activités de gestionnaire d’une in-frastructure publique et de fournisseurs de biens ou de services est dans certains cas envisagée. Toutefois, cette présentation comptable séparée ne remet pas en soi en cause l’unité organique des Grandes Entreprises de service public : le risque de dé-mantèlement annoncé de ces « symboles nationaux  n’est pas certain. Enfin, la réglementation communautaire s’attache à la gestion des services pu-blics. Si d’une manière générale, il n’y a pas de remise en cause du choix du mode de gestion, l’approche libérale laisse à penser qu’une certaine préférence est à don-ner à la gestion par une entreprise privée des services publics en réseau et à l’effacement progressif de l’État. Mais aucune privatisation n’est imposée, et les États membres restent maîtres en la matière de leurs choix. Toujours est-il que la po-litique visant à supprimer les monopoles dans le domaine des télécommunications a abouti en France à la transformation de France Telecom, ancien exploitant public, en nouvelle entreprise nationale dont l’État détient directement plus de la moitié du ca-pital social (L. 96-660 du 26.07.96, JORF 27.07.96 p.11398) – et qui reste l’opérateur public chargé du service universel. 2. MESURE D’UN IMPACT, RELATIVISATION D’UNE  CRISE  QUELLE EVOLUTION DE LA NOTION DE SERVICE PUBLIC EN FRANCE ? Les relations qu’entretiennent service public et droit communautaire procèdent désormais d’un double mouvement. Si le service public français doit se modeler à l’image de ses prescriptions, l’Union européenne intègre dans son ordre juridique l’idée d’un nécessaire service d’intérêt général conçu à l’échelle communautaire et venant corriger les effets du libre jeu des marchés. Cette constatation suffit à ne pas concevoir la dialectique service public-droit communautaire uniquement en terme de confrontation, mais également en terme de conciliation. Elle ne doit toutefois pas faire oublier les modifications qu’est amené à subir le service public français. Au premier plan, c’est une pratique française qui se retrouve sur la sellette (Be-lorgey, 1996) : le droit communautaire remet en cause les modalités de fonctionne-ment des services publics. Mais la notion juridique de service public ne se confond pas – et ne s’est jamais confondue – avec un modèle d’organisation et de fonction-nement combinant monopole public et statut juridique particulier des salariés qui y participent. L’attention du juriste, habitué aux crises de la notion, se porte davantage sur les modifications que pourrait subir le service public dans son cadre théorique. Il lui apparaît alors que l’évolution que suppose le droit communautaire est entamée depuis longtemps en France.
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          S E R V I C E P U B L I C E T D R O I T C O M M U N A U T A I R E 2. 1. UNE MODIFICATION DES CONTOURS DU SERVICE PUBLIC UNE CRISE DES ELEMENTS CONSTITUTIFS D’UNE APPROCHE FONCTIONNELLE ? Si en droit une définition incontestable du service public reste introuvable, la no-tion pour la majorité des auteurs se caractérise aujourd’hui essentiellement par son élément fonctionnel. Cette approche du concept permet de positionner – difficile-ment il est vrai – la notion dans son univers juridique et de déterminer la fonction de l’Etat dans le jeu social, y compris sur le marché. Toutefois, dans son approche par-ticulière, le droit communautaire vient modifier des frontières aux assises fragilisées. 2. 1. 1.  LA MAITRISE DU SERVICE PUBLIC : UNE APPROCHE ORGANIQUE EN PERDITION ? En droit administratif français, la notion de service public ne peut plus depuis longtemps se définir uniquement de manière organique : les personnes privées peu-vent se voir confier la gestion ou des missions de service(s) public(s) ; les activités des personnes publiques ne sont pas toutes des activités de service public – les no-tions de service public et de secteur public se rencontrent mais ne s’assimilent pas.  l’origine confondu avec le(s) service(s) de l’État, le service public aujourd’hui ne semble pouvoir se définir que comme visant une activité d’intérêt général assu-mée directement ou non par une personne publique. Si le critère organique n’est plus déterminant, c’est parce qu’il est devenu difficile de considérer qu’une délimitation nette entre les sphères publique et privée existe dans les faits – tout comme il est de-venu difficile de se la représenter. Toutefois, si l’élément organique n’est plus suffisant, il reste nécessaire : il ne saurait y avoir service public si l’activité d’intérêt général ne peut être rattachée au moins indirectement à une personne publique. Certaines activités des personnes pri-vées, tout en étant tournées vers l’intérêt général – les associations d’utilité publique par exemple – ne sont pas qualifiées d’activités de service public faute de lien avec la personne publique : elles demeurent des activités privées d’intérêt général. En France, l’une des caractéristiques du service public réside dans la compétence des pouvoirs publics quant à la détermination des activités qui relèvent du service public – et de son régime juridique ; son contenu a une dimension politique. Le projet de Charte européenne des services publics présenté en janvier 1993 par le Gouverne-ment français tentait d’ailleurs en ce sens une définition du service public : « maî-trise publique assumée par la puissance publique selon différentes modalités (...) en réponse aux spécificités et au caractère d’intérêt général de la mission  (citée par Belloubet-Frier, 1994). Par-delà la dimension mythique, le service public est au cen-tre d’une conception des rapports État/Société. Service public administratif ou in-dustriel et commercial, à gestion privée ou à gestion publique, peu importe : le maî-tre d’œuvre reste la personne publique, le maître d’ouvrage la collectivité. Qu’en est-il des concepts européens ? A priori, l’article 90 § 2 en reconnaissant les missions spécifiques des entreprises gérants des services d’intérêt économique général, afin de leur assurer un régime juridique dérogatoire du droit commun, n’établit aucun lien organique entre le service et la personne publique. Plus encore, la présence d’une personne publique sur le marché est ignorée en ce sens que l’État entrepreneur n’est pas placé dans une situation juridique différente de celle de
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