Tirésias, ou Sainte-Beuve, la critique et le féminin dans les Portraits de femmes - article ; n°115 ; vol.32, pg 25-39
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Tirésias, ou Sainte-Beuve, la critique et le féminin dans les Portraits de femmes - article ; n°115 ; vol.32, pg 25-39

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Romantisme - Année 2002 - Volume 32 - Numéro 115 - Pages 25-39
L'objet de notre étude sera de mettre au jour l'importance et la signification de la présence de La Rochefoucault dans les Portraits de femmes, ce qui nous permettra ensuite d'étudier les rapports qui s'établissent chez Sainte-Beuve entre la critique et le féminin, rapports dont nous avancerons d'ores et déjà qu'ils sont constitutifs du projet de Sainte-Beuve dans son ensemble et que les Portraits de femmes mettent exemplairement en évidence.
This study examines the presence of La Rochefoucault in Sainte-Beuve's Portraits de femmes and its implications. It seeks to understand the links between the author's criticism and the feminine, which we consider central to Sainte-Beuve's overall project and which the Portraits de femmes illustrate in an exemplary fashion.
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2002
Nombre de lectures 14
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

M. Laforgue Pierre
Tirésias, ou Sainte-Beuve, la critique et le féminin dans les
Portraits de femmes
In: Romantisme, 2002, n°115. pp. 25-39.
Abstract
This study examines the presence of La Rochefoucault in Sainte-Beuve's Portraits de femmes and its implications. It seeks to
understand the links between the author's criticism and the feminine, which we consider central to Sainte-Beuve's overall project
and which the Portraits de femmes illustrate in an exemplary fashion.
Résumé
L'objet de notre étude sera de mettre au jour l'importance et la signification de la présence de La Rochefoucault dans les
Portraits de femmes, ce qui nous permettra ensuite d'étudier les rapports qui s'établissent chez Sainte-Beuve entre la critique et
le féminin, rapports dont nous avancerons d'ores et déjà qu'ils sont constitutifs du projet de dans son ensemble et
que les Portraits de femmes mettent exemplairement en évidence.
Citer ce document / Cite this document :
Pierre Laforgue. Tirésias, ou Sainte-Beuve, la critique et le féminin dans les Portraits de femmes. In: Romantisme, 2002, n°115.
pp. 25-39.
doi : 10.3406/roman.2002.1074
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/roman_0048-8593_2002_num_32_115_1074Pierre LAFORGUE
Tirésias, ou Sainte-Beuve, la critique et le féminin dans les Portraits de femmes
in memoriam Annie Prassoloff
Entre 1844 et 1846 Sainte-Beuve rassemble les portraits qu'il a faits et les publie
chez Didier en six volumes : Portraits littéraires (deux volumes) et Portraits de femmes
(un volume) en 1844 et Portraits contemporains (trois en 1846. Les Portraits
de femmes, auxquels nous allons consacrer notre propos, sont eux-mêmes composés de
treize études sur des femmes, de deux nouvelles {Madame de Pontivy, Christel), d'un
poème {Maria), et d'une étude sur La Rochefoucauld '. Il peut paraître un peu étonnant
que Sainte-Beuve fasse suivre ses portraits de femmes de deux nouvelles et d'un poème,
mais cela est compréhensible, et nous aurons en tout cas l'occasion de revenir sur cette
rencontre de la fiction romanesque et de la critique littéraire ; quoi qu'il en soit, il est
bien plus étonnant de faire figurer dans un volume intitulé Portraits de femmes une
étude sur un homme. Cela ne semble guère avoir gêné Sainte-Beuve, qui s'en explique
dans une note, comme en passant :
M. de La Rochefoucauld ne nous a point paru pouvoir se séparer des deux femmes qui
ont tenu une si grande place dans sa vie ; en le mettant, en exception, dans ce volume
tout consacré à des gloires plus douces, nous ne sommes pas pour cela de l'avis que son
succès a été un succès de femmes, comme il nous revient de temps en temps qu'on le
murmure autour de nous : nous entendons simplement lui faire une faveur dont il est
digne et dont, certes, il ne se plaindrait pas 2.
L'explication est plausible, elle n'est pas absolument convaincante. Sainte-Beuve a
beau s'efforcer de rendre vraisemblable la présence de La Rochefoucauld au beau
milieu des Portraits de femmes, il n'empêche que cette présence masculine ne va pas
de soi. Et elle va d'autant moins de soi que nulle écriture n'est plus étrangère à celle
dont l'éloge est fait à propos de la plupart des ouvrages de dame dans le reste du
recueil. Sans doute La Rochefoucauld est-il fort proche de Mme de La Fayette 3 pour ce
qui est de l'esprit et du génie, mais l'on aura beaucoup de mal à voir une quelconque
relation entre l'auteur des Maximes et les Mme de Souza, Mme Guizot, Mme de
Rémusat, etc., qui ne sont pas passées à la postérité littéraire et sur le talent desquelles
la charité chrétienne dispense de rien dire. Manifestement, en ménageant une place à
La Rochefoucauld dans ses Portraits de femmes, Sainte-Beuve ne songeait pas qu'à
composer un triptyque dix-septiémiste réunissant trois écrivains qui furent très liés
entre eux. L'objet de notre étude sera de mettre au jour les enjeux que révèle à la
présence de La Rochefoucauld dans les Portraits de femmes, et cela nous permettra
1. En 1852, lors d'une nouvelle édition, toujours chez Didier, Sainte-Beuve ajoutera l'apologue des
Fleurs.
2. Sainte-Beuve, Portraits de femmes, éd. de G. Antoine, Gallimard, «Folio», 1998, p. 354. Toutes nos
références étant empruntées à cette édition, nous y renverrons dans le corps même du texte par le sigle PF,
suivi de la pagination.
3. Nous adoptons cette orthographe qui est celle de Sainte-Beuve par simple commodité.
ROMANTISME n° 115 (2002-1) 26 Pierre Laforgue
ensuite d'envisager quels rapports s'établissent chez Sainte-Beuve entre la critique et
le féminin, rapports dont nous avancerons d'ores et déjà qu'ils sont constitutifs du
projet beuvien dans son ensemble et que les Portraits de femmes mettent exemplaire
ment en évidence.
Nous commencerons par étudier l'organisation du recueil des Portraits de femmes
afin de voir comment Sainte-Beuve s'est employé à donner une unité problématique à
son texte. L'organisation des Portraits de femmes est singulière. Elle ne se fonde ni sur
l'ordre chronologique de publication des différents portraits ni sur l'ordre historique et
biographique des femmes dont le portrait est fait. Sans doute le premier de ces portraits
{Madame de Sévigné) est-il le plus ancien (mai 1829) et est-il suivi de textes qui ont été
publiés dans la Revue des Deux Mondes en juillet 1832 {Du roman intime ou Mademois
elle de Liron), mars 1834 {Madame de Souza), juin 1834 {Madame de Duras) et
mai 1835 {Madame de Staël), mais juste après ce dernier article l'ordre chronologique
de publication se défait avec le portrait de Mme Roland qui date de novembre 1840.
Cette rupture s'explique facilement : Sainte-Beuve a voulu réunir deux femmes de la
même époque révolutionnaire. Après quoi il revient à l'ordre chronologique de rédaction
avec les portraits de Mme Guizot (mai 1836) et de Mme de La Fayette (septembre 1836),
mais de nouveau se produit une rupture avec les portraits de La Rochefoucauld
(janvier 1840) et de Mme de Longue ville (août 1840). Pareillement cette nouvelle rupture
se comprend par la volonté de ne pas dissocier trois personnages très liés entre eux, ce
qui explique aussi que ce triptyque soit suivi par l'étude d'Une ruelle poétique sous
Louis xiv (octobre 1839), qui constitue une sorte d'appendice à l'évocation du grand
siècle qui a été faite à l'occasion des trois portraits de Mme de La Fayette, de
La Rochefoucauld et de Mme de Longueville. Une fois cet ensemble dix-septiémiste
achevé, Sainte-Beuve revient à l'ordre chronologique avec les portraits suivants {Mada
me de Krudner, juillet 1837 ; Madame de Charrière, mars 1839 ; Madame de Rémusat,
juin 1842), le décrochage qui se produit après avec Madame de Pontivy (mars 1837) et
Christel (novembre 1839) tenant à la nature particulière de ces deux portraits : ce sont
des nouvelles de Sainte-Beuve, mettant en scène des héroïnes de fiction. Aussi est-il
admissible que Sainte-Beuve les ait associées et les ait ensemble rejetées après les port
raits proprement dits, mais sans pour autant les mettre en annexe : elles sont suivies
d'un poème, Maria, qui est la pièce la plus récente du recueil (avril 1843) et à laquelle
revient la fonction d'être la clausule poétique et rêveuse des Portraits de femmes.
De ce qui précède il apparaît que l'organisation de l'ouvrage a sa logique ; elle
obéit même à une composition tout à fait concertée, nous voudrions le montrer. C'est
pourquoi nous lèverons préalablement une éventuelle objection, celle du caractère
somme toute très lâche de ce recueil 4, dont Sainte-Beuve aurait rassemblé les différen
tes pièces en fonction de ce qu'il avait déjà publié en revues, selon une poétique du
recyclage5. À l'appui de cette thèse est avancé le fait que d'autres portraits de femmes
se trouvent écrits à la même époque et redistribués ailleurs. Par exemple, aux Portraits
littéraires (1844) ont été intégrés les études Mademoiselle Aïssé (1846), Benjamin
Constant et Madame de Charrière (1844), Madame de Krudner et ce qu'en aurait dit
Saint-Évremond (1849) et Mémoires de de Staal-Delaunay (1846), et plus
4. Je vise ici l'interprétation qui est faite par G. Antoine dans la préface, au demeurant excellente, de
son édition, p. 23-24. Parler de «bizarreries

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