Variables démographiques ou échanges internationaux : deux explications du développement - article ; n°6 ; vol.31, pg 1189-1210

Patrick Guillaumont

Description

Revue économique - Année 1980 - Volume 31 - Numéro 6 - Pages 1189-1210
Population variables versus international trade:
Two explanations of development
P. Guillaumont
Population variables (growth rate of the population, fertility rate) and international trade (foreign trade, capital investment) are used in literature in a totally independent way in order to explain underdevelopment and development. This independence, which is partly ideological at its origins, and the resulting anatytical impoverishment are brought to light in connection with those three factors which constitute development : growth, savings rate (a factor of future growth) and incarne distribution. A joint study of the role of these two types of variables is therefore necessary.
Variables démographiques (taux de croissance de la population, taux de fécondité) et échanges internationaux (commerce extérieur, apports de capitaux) sont utilisés dans la littérature de façon totalement indépendante pour expliquer le sous-déve­loppement et le développement. Cette indépendance, dont l'origine est en partie idéologique, et l'appauvrissement analytique qui en résulte, sont mis en évidence à propos de ces trois éléments constitutifs du développement que sont la croissance, le taux d'épargne (facteur de la croissance future) et la répartition des revenus. Un examen conjoint du rôle des deux types de variables est donc souhaitable.
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

• Sociologie, société et politique

Informations

• Publié par: REVUE_ECONOMIQUE
• Publié le: 01 janvier 1980
• Nombre de lectures: 29
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

Monsieur Patrick Guillaumont
Variables démographiques ou échanges internationaux : deux
explications du développement
In: Revue économique. Volume 31, n°6, 1980. pp. 1189-1210.
Abstract
Population variables versus international trade:
Two explanations of development
P. Guillaumont
Population variables (growth rate of the population, fertility rate) and international trade (foreign trade, capital investment) are
used in literature in a totally independent way in order to explain underdevelopment and development. This independence, which
is partly ideological at its origins, and the resulting anatytical impoverishment are brought to light in connection with those three
factors which constitute development : growth, savings rate (a factor of future growth) and incarne distribution. A joint study of the
role of these two types of variables is therefore necessary.
Résumé
Variables démographiques (taux de croissance de la population, taux de fécondité) et échanges internationaux (commerce
extérieur, apports de capitaux) sont utilisés dans la littérature de façon totalement indépendante pour expliquer le sous-
déve-loppement et le développement. Cette indépendance, dont l'origine est en partie idéologique, et l'appauvrissement
analytique qui en résulte, sont mis en évidence à propos de ces trois éléments constitutifs du développement que sont la
croissance, le taux d'épargne (facteur de la croissance future) et la répartition des revenus. Un examen conjoint du rôle des deux
types de variables est donc souhaitable.
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Guillaumont Patrick. Variables démographiques ou échanges internationaux : deux explications du développement. In: Revue
économique. Volume 31, n°6, 1980. pp. 1189-1210.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/reco_0035-2764_1980_num_31_6_408575VARIABLES DÉMOGRAPHIQUES
OU ÉCHANGES INTERNATIONAUX :
DEUX EXPLICATIONS DU DÉVELOPPEMENT
Parmi les interprétations du sous-développement, il en est deux
qui paraissent particulièrement étrangères l'une à l'autre : celle
qui l'associe à la pression de la population sur les ressources,
celle qui le fait découler de l'échange international, qualifié, selon
les cas et pour la cause, d'inégal, d'impérialiste ou de quelque autre
terme : dans un cas, ce que P. Moussa appelait la spoliation par le
nombre, l'autre l'exploitation par les pays du « centre » . Deux
variables apparemment exogènes et exclusives : ici la fécondité, là le
système capitaliste.
Certes, l'analyse des facteurs démographiques du sous-développe
ment et du développement, notions qui ne se réfère.nt non seulement
au niveau du revenu par tête, mais tout autant à sa répartition, ne se
réduit pas à une critique des méfaits d'une fécondité excessive : le
néo-malthusianisme domine la pensée démo-économique relative aux
pays moins développés, mais aujourd'hui sans doute de façon moins
absolue que naguère, et non sans subir l'assaut d'arguments contraires.
Par ailleurs, l'interprétation néo-marxiste du sous-développement n'est
elle-même qu'une réaction localement dominante à l'égard de la pen
sée néo-classique qui voit dans l'échange international la principale
cause du progrès des nations, quelles qu'elles soient, et demeure très
vigoureuse.
Si, donc, en chacun même de ces deux domaines, celui des rela
tions démo-économiques et celui des échanges internationaux, des
interprétations contradictoires peuvent s'opposer à propos du sous-
développement et du développement, il reste, mise à part l'analyse
des migrations internationales, qu'il s'agit de deux domaines parfai-
* L'auteur tient à remercier Georges Tapinos et un lecteur anonyme pour leurs
observations, sans que leur responsabilité soit en rien engagée par le présent texte.
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Revue économique — N° 6, novembre 1980. Revue économique
tement indépendants. Il existe deux corps distincts de littérature, qui
paraissent s'ignorer alors même qu'ils examinent les facteurs — ici
démographiques, là internationaux — des mêmes variables. Cherche-
t-on ici à expliquer l'évolution économique sur une période plus longue
que là ? Ce n'est pas nécessairement le cas : les analyses démo-écono
miques du développement s'attachent souvent à des phénomènes tran
sitoires de moyenne période, les analyses de la spécialisation inte
rnationale s'intéressent à des périodes qui ne sont pas moins longues.
Il y a donc bien deux types d'interprétation d'un même phénomène.
Le but de cette note est de faire apparaître ce dualisme et l'appau
vrissement analytique qui en résulte à propos de trois des principales
variables constitutives du développement : la croissance économique,
le taux d'épargne interne, la répartition des revenus. Une façon sim
plifiée et certes discutable de définir le développement est de le consi
dérer comme une croissance susceptible de durer et de bénéficier à
l'ensemble des groupes sociaux : la croissance, le taux d'épargne
interne, la répartition des revenus sont ainsi des éléments essentiels
d'appréciation du développement. Or chacun de ces trois éléments a
été comparé de façon tout à fait indépendante, à des variables démo
graphiques d'une part, aux échanges internationaux d'autre part. A
leur sujet, on s'interrogera brièvement sur la portée de cette indé
pendance, sur le rôle respectif des deux types d'explication,
I. CROISSANCE ECONOMIQUE, CROISSANCE DEMOGRAPHIQUE
ET CROISSANCE DES EXPORTATIONS
Parmi les nombreux facteurs envisagés pour « expliquer » la croi
ssance économique au moyen de comparaisons internationales, la démographique et la croissance des exportations — variables
de nature très hétérogène — figurent en bonne place. L'indépendance
des analyses est de règle en la matière puisqu'il s'agit, par une démar
che empirique simple, de vérifier ou d'infirmer une explication « mo-
niste » de la croissance. Cependant les limites de l'analyse du rôle
d'une des deux variables explicatives peuvent inciter à examiner le
rôle de l'autre.
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1. Croissance démographique et croissance économique :
l'hypothèse de croissance démographique optimale
et les échanges extérieurs
Diverses représentations et régressions ont été faites de la crois
sance du produit par tête en fonction de la croissance démographi
que : voir notamment Kuznets [1967], Sauvy et Chesnais [1973]. Les
relations sont incertaines, souvent d'ailleurs mesurées sur des périodes
trop courtes pour être significatives ; à supposer qu'elles soient posi
tives, le sens de la causalité qui les fonde demeure incertain. Mais
pour des auteurs tels que Sauvy et Chesnais, l'absence même de cor-
relation, a fortiori son caractère positif, suffisent à mettre en doute
l'argumentation néo-malthusienne.
Il se peut aussi qu'une relation entre croissance démographique et
croissance du produit par tête existe sans être linéaire comme celle
que cherchaient à établir les calculs qui viennent d'être évoqués.
L'hypothèse d'une croissance démographique optimale, en ce sens
que la croissance du produit par tête serait successivement croissante
et décroissante avec la croissance démographique, a été avancée (Gui
llaumont [1976]), puis a fait l'objet d'une tentative de vérification
empirique sur divers ensembles de pays (Bara et Guillaumont [1976],
[1977]) qui s'avère peu concluante, sinon peut-être pour les pays
industrialisés. Mais l'analyse de la relation entre croissance de la popul
ation et croissance du produit, si elle ne peut que difficilement s'expr
imer par quelque courbe en cloche — équation parabolique ou expo
nentielle du second degré — laisse apparaître graphiquement un
nuage de points passant par un maximum à certains taux « interméd
iaires » de croissance démographique : à l'hypothèse non vérifiée de
croissance démographique optimale « réelle » pourrait se substituer
une hypothèse de croissance démographique optimale «