Fraternité Matin n°17316 - du mercredi 14 septembre 2022
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Fraternité Matin n°17316 - du mercredi 14 septembre 2022 , magazine presse

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Date de parution 14 septembre 2022
Langue Français
Poids de l'ouvrage 5 Mo

Extrait

Soutien aux femmes du secteur de la pêche Un don de 19 millions de Fcfa en matériels Mercredi 14 septembre 2022 / N° 17 316 www.fratmat.infoPrix: 300 Fcfa • Cedeao : 450 Fcfa • France: 1,70 € aux mareyeusesP. 8 PREMIER QUOTIDIEN IVOIRIEN D’INFORMATIONS GÉNÉRALES Lutte contre la fuite des produits agricoles
Kobénan Adjoumani : ‘‘ Au bout de cinq ans, on
ne parlera plus d’exportations illicitesP. 5
Université d’été pour la bonne gouvernance
Kandia Camara salue une
innovation pédagogique majeure
Prof. Musa David Soro,président de la Cn-Maep: ‘‘ Les efforts de gouvernance de la Côte d’Ivoire sont partagés avec les autres États membres ’’ PHOTO : DR
Consolidation de la paixMétro d’Abidjan /Paiement Élimination de la stule des indemnisations obstétricale d’ici à 2030Dossier AlliancesPp. 2-3-4 Amadou Koné Dominique Ouattara :‘‘ Nous interethniques, ciment rassure les déguerpis pouvons enrayer cette maladie si nous mutualisons nos effortsP.7de Port-BouëtP. 10 de la cohésion sociale
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Dossier
Mercredi 14 septembre 2022
Alliances interethniques Un bel outil pour consolider la cohésion sociale Ce mécanisme d’apaisement social, qui traverse le temps, suscite admiration et curiosité. Comment fonctionne-t-il ? Comment peut-il réellement servir comme outil de cohésion sociale et de construction de paix dans nos sociétés modernes ? n fait vécu dans le dé-partement de Katiola ouvre la voie à notre investigation. creUdi 22 au jeudi 23 août Dans la nuit du mer-2018, un jeune homme soupçonné d’être un voleur est battu à mort et enterré par des jeunes du village de kowara. Cette affaire conduit à un autre incident aussi grave. Attienkaha, un village voisin, est saccagé par des jeunes en colère venus de Katiola quelques jours après. Deux cent dix cases sont incendiées. Ces vandales pensaient que leur ami avait trouvé la mort dans ce village cité. Après quelques jours de recherche, les langues se délient et la réalité fait découvrir que la victime battue à mort l’avait plutôt été dans un autre vil-lage nommé Kohara. Entre-temps, Attienkaha subit le courroux des jeunes. Ce fait détériore considérablement le climat social entre jeunes tagbana et jeunes dioula, pour la plupart venus de Ka-tiola à la recherche de leur ami introuvable. Toutes les tentatives de réconciliation A Katiola, un espace pour magnier les alliances historiques à plaisanteries regroupe, chaque année, les populations venues des différentes régions du pays. avaient été amorcées sans réel impact. En juin 2019, les quentent effectivement au- (un événement qui célèbred’Attienkaha avaient pro-De part et d’autre, il y avait préfet Gilbert Gbagbeu qui, organisateurs du festival «jourd’hui et cela, depuis lesles alliances historiques enen plus d’être une autoritédes Coulibaly, des Ouattara gressivement décidé de ne Carrefour des alliés », sou- assises organisées en 2019, conviant des peuples alliésadministrative, appartient au pas imposer un suppliceet également des Koné et tenus par quelques cadres sur la base des alliances in- à sa tribune festive, pourplus long, vu l’effort déployédes Traoré. C’était donc plus groupe ethnique Yacouba. du terroir, ainsi que l’Unescoun temps de fraternité et deterethniques. Nalamatjen facile de prendre appui sur Nous nous sommes servisen convoquant à ces assises et son « réseau de jeunes Koné abonde dans son sens.partage), attire l’attentionles patronymes pour les rap-de la solide alliance entrele système des alliances à relais communautaires pour« Plusieurs cérémonies fes-sur quelques aspects de ceplaisanteries ».procher. Nous nous rendions Yacouba et Sénoufo pour la paix » formés au jeu destives voient aujourd’hui lamécanisme d’antan :« Nouscompte qu’au fur et à mesureprogresser dans ce proces-alliances interethniques parparticipation de jeunes de avons commencé par obser-que nous progressons dans sus de recherche de paix..Sanangouya en pays ladite institution engagentdivers groupes ethniques. ver ce qui les lie. A premièreles discussions, les prota-Les murs de méïance semalinké et Toukpê des négociations sur la basegonistes lâchent du lest. IlCe qui était vraiment rare à vue, c’était les patronymes. brisaient lentement maisen baoulé de ce mécanisme d’apai-C’était déun moment donné parce qu’il jà bonpour nous.y avait aussiparmi nous le sûrement. Lespopulations sement social des sociétésétait difïcile pour les popula-Appelé Sanangouya chez les traditionnelles africaines. Lations d’Attienkaha d’accepterMalinké et Toukpê (en baou-démarche semble aboutir etau départ un tel affront »,lé), ce mécanisme d’apaise-tendre visiblement vers une soutient-elle. Mais comment ment social né au cœur de issue favorable, au fur et à les acteurs de ce tempsl’Afrique traditionnelle pour-mesure que les négociationsd’échanges et de réconcilia-suit son chemin. De plus en avancent. tion ont-ils utilisé le jeu des plus mises en exergue de Selon quelques jeunes origi- alliances pour panser lesnos jours à l’occasion des fu-naires du terroir, les résultatsblessures d’une fracture so-nérailles ou des cérémonies positifs sont progressive-ciale qui s’annonçait ainsi ?festives et particulièrement, ment observés. C’est en tout à l’occasion des festivals cas ce que conrme OlivierPatronymesrégionaux, les alliances in-Kinaya. A la fois ancien étu-comme facteurs deterethniques suscitent plu-diant en Histoire, jeune Tag-rapprochementsieurs questions. Comment bana formé il y a quelques mettre à jour ce système tra-années aux rouages du jeu Dans ses locaux où nousditionnel qui, dans l’histoire des alliances interethniquesl’avons rencontré, Traorédes peuples africains, a dura-an de servir comme relaisBourlaye, directeur de la blement consolidé les bases communautaire pour la paix coopération culturelle aud’un climat social apaisé ? et par ailleurs acteur dans les ministère de la Culture etComment procéder an qu’il négociations à Attienkaha, il de la Francophonie et com- devienne un véritable outil de Les moments de deuil sont des occasions pour les peuples alliés d’exprimer leur solidarité. Ici,met surtout l’accent sur le faitmissaire général du festi- cohésion sociale pour les gé-une danse royale du pays Brong lors des obsèques du Premier ministre Amadou Gon Coulibaly que les populations de Ka- val « Carrefour des alliés » en avril 2021 à Korhogo.(PHOTOS : PORO DAGNOGO)SUITE PAGE 3 tiola et d’Attienkaha se fré-
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SUITE DE LA PAGE 2
nérations nouvelles ? Face à ces questions, Kanga Kouassi Hubert, âgé d’envi-ron 30 ans, livre sa part de savoir :« Quand tu es instruit par l’histoire des alliances à plaisanteries, tu n’es ja-mais coincé. Et lorsque tu es en contact avec l’un des peuples alliés, quel que soit ce que tu entends, rien ne t’énerve et généralement cette connaissance t’ouvre des portes ». Pour Atsé Yapi Jean-Claude, il faut surtout former les jeunes générations, les ins-truire sur ce fondement cultu-rel basé sur le jeu des mots, la façon de prendre la parole pour dire des vérités sans toutefois conduire à une frac-ture sociale.
Un véritable outil de paix
Même si 20% des personnes interrogées restent encore sceptiques quant à la pos-sibilité des alliances inte-rethniques à construire au-jourd’hui un climat de paix, en ce sens que leur capacité
Dossier
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De gauche à droite, Traoré Bourlaye (commissaire général du carrefour des alliés), Atsé Yapi Jean-Claude (société civile), Bouréima Yaméogo (chef Cedeao de Dignago) et Olivier Kinaya (relais communautaire pour la paix).(PHOTOS : DR)
à briser les barrières pour-rait entraîner une perte de l’autorité et un laissez-aller préjudiciable aux généra-tions nouvelles, nombreux sont ceux qui saluent la ré-appropriation de ce système social qui traverse le temps. Pour Gilbert Gbagbeu, ac-
tuel préfet de Bloléquin, il peut s’offrir comme un véritable instrument d’aide à la gouvernance locale.« Les alliances interethniques contiennent des principes qui peuvent apporter un plus à l’administration en général et particulièrement au corps
La charte de Kurukan Fuga, patrimoine immatériel de l’humanité perdue. L’empire manding qui s’apparente aujourd’hui à l’espace Cedeao transmet ainsi aux générations nou-velles le mécanisme histo-rique d’apaisement du climat social. A l’université Félix Houphouët-Boigny, le Prof. Méité Méké, actuel titulaire de la Chaire Unesco pour la paix, fait des recherches sur la Charte de Kurukan Fuga, l’un de ses principaux che-vaux de bataille. Et selon lui, la promotion des alliances interethniques devrait don-ner au Continent noir des arguments valables pour ré-d’entreprise. L’empire a dis-résentée comme pondre dignement au grand paru, mais les paroles de la l’une des plus an- rendez-vous de l’universel. ciennes constitutions Charte et les rites associés Un peu considérée comme P au monde, la Charteet magniés par le système l’ancêtre de la Charte des des alliances interethniques de Kurukan Fuga éga-droits de l’Homme, la charte et alliances à plaisanteries lement appelée Charte du de Kurukan Fuga a été continuent d’être transmis Mandén a été proclamée au inscrite depuis 2009, par 13e siècle, précisément enoralement, de père en ls et l’Unesco, au patrimoine 1236. A la suite des guerresde manière codiée au sein culturel immatériel de l’hu-. du clan des Malinké, pour meurtrières, le fondateur de manité l’empire du mandingue etque la tradition ne soit pas B. GUIRATHE tout son staff réuni avaient en effet proclamé « la Charte du Mandén nouveau » en vue d’établir un climat de paix. C’était à Kurukan Fuga, territoire situé dans le haut bassin du euve Niger, entre la Guinée et le Mali ac-tuels. Même si cette charte n’existait que sous la forme orale, elle est composée d’un préambule et de 7 cha-pitres prônant notamment la paix sociale dans la diver-sité, l’inviolabilité de la per-sonne humaine, l’éducation, l’intégrité de la patrie, la sé-curité alimentaire, l’abolition de l’esclavage par la razzia, la liberté d’expression et Pr Méité Méké, titulaire de la Chaire Unesco pour la paix.
préfectoral car les alliés ont un devoir d’assistance mu-tuelle ; et un succès réalisé en territoire allié est un suc-
cès partagé. Un échec est aussi imputé à tous les alliés et de ce fait, un allié n’a pas le droit d’induire en erreur un
autre allié parce que ce qui vous lie a un caractère sa-cré »,dit-il. Autorités coutu-
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Quelques exemples de groupes alliés
Pr Amoa Urbain et sa « Carte des Alliances’’ à une édition du festival des alliés de Bondoukou.
omme outil de connaissance pour consolider la paix, «CCarte des alliances inte-le professeur Amoa Urbain propose sa rethniques et de parentés à plaisanteries ». Une carto-graphie qui donne une idée globale des populations ethniques alliées que sont entre autres les groupes : Sénoufo-Lobi/ Sénou-fo-Gouro/ Sénoufo-Toura/ Sénoufo-Yacouba/ Sénou-fo-Maou/ Sénoufo-Koyaka, Tagbana-Gouro, Tagba-na-Maou/ Tagbana-Koyaka/ Djimini-Maou. A l’intérieur des aires culturelles, le « père » des termes de « l’élé-gance langagière » et de « la diplomatie coutumière » dans les sociétés tradition-nelles présente également d’autres paires d’alliés.
Au sein du peuple Akan : Agni-Baoulé/Baoulé-Ano/ A n o - A g n i / A g n i - A b r o n / Abron-Ano/ Ano-Agni/ Agni-Barbo/Barbo-Ano/
M’Batto-Abbey/M’Batto-Ebrié/M’Batto-Abidji/Abou-ré-Akyé / Abouré - Abbey/ Abouré-Ebrié/Abidji-Ad-joukrou.
Au sein du groupe Gur L’on aura affaire à des paires : Lobi-Djimini/Djimini-Tagba-na/ Tagbana-Lobi/Lobi-Dja-mala/Lobi-Tagbana/Tgba-na-Sénoufo/Sénoufo-Lobi.
Au sein du groupe Krou Dida-Godié/Godié-Niaboua/ Niaboua-Bakwé/ Bakwé-Di-da/ Bété-Bakwé/Bakwé-Go-dié/Kouzié-Néyo/ Krou-men-Godié/Oubi-Bété. Au sein du peuple Mandé Gouro-Koyaka/Koyaka-Fou-l a / F o u l a - M a l i n k é / M a l i n -ké-Maou/Maou-Gouro/Ya-couba-Gouro/Gouro-Toura/ Toura-Gban/ Gban-Yacou-ba/ Malinké-Bambara/ Tou-ra-Foula.
Entre Akan et krou L’on note les paires : Ab-b e y - D i d a / A k y é - D i d a / A b i -dji-Dida/Abouré-Dida.
Au-delà des frontières ivoiriennes Ces alliances historiques qui magnient le pacte de paix et de non-agression, pacte pour lequel jamais aucune goutte de sang ne doit couler par la faute d’un allié, s’étend également au-delà des frontières. En effet, ladite carte fait savoir l’existence de groupes al-liés entre Ehotilé et Essou-ma de la Côte d’Ivoire et Ashanti du Ghana/Lobi et Birifor de la Côte d’Ivoire-Bi-rifor-Lobi-Jula Goin du Bur-kina Faso/ Sénoufo de la Côte d’Ivoire-Dagari-Bo-bo et Sénoufo du Burkina Faso/Sénoufo de la Côte d’Ivoire-Sarakolé-Bambara et Sénoufo du Mali/Maou de la Côte d’Ivoire-Sénou-fo, Sarakolé, Peulh et Bam-bara du Mali/Malinké de la Côte d’Ivoire-Maninka de la . Guinée
B. GUIRATHE
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