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GnakryLive du 2022-04-27
[ÉDITO] ‘‘Gouvernement de Toussaint, l’ouverture’’ : Macky Sall renonce à 2024 et adoube Idrissa Seck ?
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Ousseynou Nar Gueye _ editorialiste
Par Ousseynou Nar Gueye – Toussaint ? Tous ceints ! C’est la surprise du chef : on s’étonnait qu’il n’y eut aucun bouleversement institutionnel, constitutionnel ou électoral qui ait pu justifier la dissolution du gouvernement sénégalais, décidée par Macky Sall, le mercredi 28 novembre dernier. Eh bien, il y en avait bien un : l’élargissement de la majorité présidentielle à des acteurs très représentatifs de l’opposition, en cette Toussaint 2020. Ceci n’a été révélé au grand jour que ce dimanche 1er novembre, avec l’annonce du nouveau gouvernement et la nomination concomitante d’Idrissa ‘Idy’ Seck comme président du Conseil économique, social et environnemental. Arrivé second à la présidentielle de février 2019, avec un peu plus de 20% des suffrages, Idy rejoint l’équipage présidentiel, avec armes et bagages. Et avec ses hommes : deux de ses lieutenants dans le parti Rewmi, Yankhoba Diattara (Economie numérique et Télécommunications) et Aly Saleh Diop (Elevage), sont nommés dans ce nouvel attelage mackyen. « Tous ceints » ? Ou presque ? C’est un gouvernement « d’union » ou encore « de mission », selon les éléments de langage des spin doctors du palais présidentiel. Union ? Macky Sall réunit presque toute la famille libérale, issue des partis nés des flancs du PDS : en plus des rewmistes d’Idy, il y a là l’ex numéro 2 (jusque récemment) du PDS et leader du Parti des Libéraux et Démocrates PLD-And Suqqali, Oumar Sarr, qui siègera désormais aussi en conseil des ministres. En faisant l’union, Macky Sall opère aussi une soustraction mentale : on peut en effet valablement penser que l’actuel chef de l’Etat (dé)montre ainsi qu’il ne postulera pas à un troisième mandat en 2024. Et qu’il veut consacrer
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toute son énergie aux trois années et demi de mandat qui lui reste. En faisant de la place aux affaires à Idrissa Seck, Macky Sall sait bien que celui – ci n’abdiquera pas tout destin présidentiel futur pour ses beaux yeux et le confort des strapontins ainsi offert. Mais de toute sa classe d’âge, Macky Sall a considéré que celui avec qui il partage le même père aux velléités politico-infanticides passées, c’est à dire Abdoulaye Wade, Idrissa Seck donc, était le plus légitime pour tenir les rênes du char de l’Etat après lui. Exit donc tous les ambitieux de son parti, l’APR, qui étaient présumés à tort ou à raison vouloir lui succéder en 2024 : Amadou Ba, Mouhamadou Makhtar Cissé, Oumar Youm, et last but not least Aminata Mimi Touré, ont été priés de plier bagages. Dans une démarche très dioufienne, Macky Sall montre que le rôle d’un chef de l’Etat, au Sénégal, c’est aussi de préparer son successeur, fut-il son opposant le plus irréductible. Comme Abdou Diouf en avait fait de son opposant Abdoulaye Wade en 1991, puis en 1995, Macky Sall place à ses côtés son opposant à ses yeux le plus valable. Car Idrissa Seck est « le plus ancien dans le grade le plus élevé ». Et Macky Sall veut en revenir à la tradition qui a donné au Sénégal des présidents de la République par le fait de leur longévité et de leur endurance à attendre dans l’antichambre du pouvoir suprême. Abdou Diouf avait attendu (10 ans officiellement) avant de devenir président, et plus encore, depuis 1964 jusqu’en 1980, selon des révélations faites dans ses « Mémoires » parus en 2014. Abdoulaye Wade aura attendu 26 ans dans l’opposition. En 2012, seul l’accident de la quête irréaliste du troisième mandat par le président Wade a suscité l’arrivée au palais d’un président presque par génération spontanée : celle de lui-même, Macky Sall. Le Sénégal est donc remis sur les rails de son cours historique politique normal. Outre les rewmistes et Oumar Sarr, Macky Sall confie un maroquin régalien, celui des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’Extérieur, à l’ex-pasionaria du parti Socialiste, Aissata Tall Sall, qui l’avait déjà rejoint avant la présidentielle avec son mouvement « Oser l’avenir » et à qui le président Sall aura fait attendre le délai de décence d’être considérée par la majorité présidentielle BBY comme étant des leurs, avant de la nommer au gouvernement. Union ? Macky Sall doit aussi se préparer à accepter de la division. Car cette ouverture à d’autres pans significatifs de l’opposition, actée par ce gouvernement de Toussaint du 1er novembre 2020, augure de la survenance de problèmes progressifs et croissants entre Macky Sall est ses alliés historiques que sont l’AFP et le PS. Ces deux partis, à plus ou moins long terme, et en tout cas avant la présidentielle de 2024, ont vocation à sortir de la majorité présidentielle. Ou à en être éjectés. Présidentielle de 2024 à laquelle le PS comme l’AFP ne manqueront pas de présenter des candidats. Pour l’instant, ce sont exactement les mêmes personnalités qui ont été maintenus aux mêmes postes ministériels, pour ce qui est des départements déjà détenus par ces partis, que sont le PS, l’AFP et le PIT. Deux départs -surprises toutefois : celui de l’inusable Mahammed Boun Abdallah Dionne (reposé pour raisons de santé ?) et celui du jeune ministre Abdou Karim Fofana, jusque là détenteur du portefeuille de l’Urbanisme, du Logement et de l’Hygiène publique, qui a beaucoup donné sur le terrain et sur les plateaux TV et radios, depuis un an et demi. Il est cependant exfiltré par le haut, prenant en charge le PSE avec rang de ministre. Fofana, un joker que le président Sall ne veut pas griller. L’ouverture aux rewmistes et les départs de présumés « mastodontes aux dents qui rayent le parquet » du gouvernement précédent laisse entrevoir aussi que cela va sérieusement tanguer chez les directeurs généraux et PCA de société publiques. Car, il va falloir faire de la place aux lieutenants des nouveaux arrivants et aussi « désamorcer » tous les DG et PCA qui sont des affidés des ministres qui ont été limogés. Idrissa Seck devra, quant à lui, faire sortir ses députés du seul groupe parlementaire d’opposition, le groupe Liberté et Démocratie (présidé par un député du PDS), où ils n’ont plus rien à faire. Quant aux contorsions de gymnaste obligatoires pour faire accepter son ralliement à Macky Sall, Idy sait y faire. Il a déjà refilé le mistrigri au président du comité de pilotage du Dialogue national Famara Ibrahima Sagna (celui-là même qui avait négocié l’entrée de Wade dans le gouvernement d’Abdou Diouf en 1991) et au général à la retraite Mamadou Niang, qui fut un ministre de l’Intérieur impartial pour départager le président Wade et son opposition d’alors : Idrissa Seck les a remerciés tous les deux, pour leur « facilitation » du rapprochement entre lui et Macky Sall. De même qu’il a remerciés les chefs de religieux, régulateurs
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sociaux incontournables et directeurs de conscience des Sénégalais, dont il a laissé clairement entendre qu’ils ne sont pas étrangers à ce nouveau pacte inédit. Enfin, il a aussi plaidé l’urgence du rassemblement autour de l’essentiel pour l’intérêt du pays : « la nécessité nous est apparue de répondre utilement aux besoins de la nation pour faire face aux urgences du moment. Je respecte le choix et l’intelligence de chacun, mais j’ai choisi le chemin pour redresser notre pays. Nous avons pris un choix positif de répondre à l’appel du président de la République». Mais à cette position de désormais troisième personnalité de l’Etat, Idrissa Seck devra surtout apprendre à (continuer de) se taire et à ronger son frein, en attendant son heure, et en évitant d’installer toute dualité. Depuis la présidentielle de février 2019 consommée, il a prouvé qu’il savait avoir un silence d’or. Idy peut se rassurer, également, enfin, avec les précédents historiques de « reniements-ralliements » (transitoires) dans l’histoire politique contemporaine du pays. Notamment celui de l’alors opposant Abdoulaye Wade au président Abdou Diouf, par deux fois. Wade (père et fils) et le PDS, qui décidément, sont les plus grands perdants de ces grandes manœuvres mackyennes, cornérisés qu’ils sont désormais dans l’opposition (radicale ?), dont ils devront se disputer le leadership avec le Pastef en pleine crise de croissance d’Ousmane Sonko. Gouvernement de mission ? Celle confiée à ce gouvernement de la Toussaint est de permettre à Macky Sall de se donner toutes les chances de réussir sereinement son « Fast Track », avec des réalisations et des avancées socio-économiques palpables sur une période à venir de trois ans, dans un contexte mondial de Covid-19, une économie nationale quelque peu chamboulée de ce fait et un environnement géostratégique sous – régional de l’Uemoa et de la Cedeao très peu stable, dans l’horizon temporel des prochaines années. Ousseynou Nar Gueye Tract
Ousseynou Nar Gueye2020-11-03T02:20:53+00:00
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GnakryLive du 2022-04-27
[ Paria ] Alpha Condé : le seul chef d’État au monde (Djibouti) qui l’a félicité, 10 jours après sa réélection, cherche un… 5ème mandat
Alpha Condé paria
Le président guinéen sortant, Alpha Condé, a gagné la présidentielle avec 59,49 % des voix, remportant ainsi un troisième mandat controversé, a annoncé samedi 24 octobre la commission électorale. Son principal opposant, Cellou Dalein Diallo, qui s’était proclamé vainqueur de l’élection présidentielle avant la publication des résultats, a obtenu 33,5 % des suffrages, selon la commission. La CENI (Commission électorale nationale indépendante) publiait depuis le mardi précédent les résultats circonscription par circonscription. Cellou
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des élections, et qu’il comptait les contester. « Nous allons protester contre ce hold-up électoral par la rue, a-t-il déclaré à l’Agence France-Presse (AFP). Nous sommes en train de constituer des dossiers, très difficilement puisque nos locaux sont occupés. On n’a pas accès à nos documents, mais nous allons quand même saisir la Cour constitutionnelle, sans trop nous faire d’illusions. ». La France et l’UE sont venues apporter de l’eau au moulin de Cellou Diallo, en indiquant que les PV ne correspondaient pas aux résultats annoncés et qu’ils doutaient de la transparence de ce scrutin. La Cedeao a envoyé une mission à Conakry, qui a plus constaté le D lein Diallo a répété le samedi 24 octobre qu’il ne reconnaissait pas les résultats publiés par l’organe chargé statu quo que fait avancer les choses, même si le blocus autour de lamaison de Cellou Diallo a été levé. Avectout cela, les 15 chefs d’État de la Cedeao, y inclus les présidents des 8 pays de l’UEMOA, jouent aux statues de sel : aucun d’entre eux n’a encore félicité Alpha Condé pour sa victoire. Même les potentats d’Afrique centrale experts en mandats à rallonge (Paul Biya, S1ssou Nguesso, Obiang Nguema, etc.) sont restés cois sur cette réélection de Condé et on gardé fermé leur stylo à signature. C’est bien simple : un seul chef d’Etat a félicité Condé à ce jour, 9 jours après sa « vicoire ». Il s’agit du président de Djibouti, Oumar Guelleh, qui lui-même caresse ouvertement l’idée de briguer un …5ème mandat présidentiel en avril 2021. Qui s’assemble se ressemble. Damel Mor Macoumba Seck Tract
Damel Mor Macoumba Seck 2020-11-02T14:55:40+00:00
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GnakryLive du 2022-04-27
[ Portrait ] Akon City : Qui est l’architecte libanais de 46 ans de la ville à 3500 milliards de FCFA d’Akon?
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Hussein Bakri est l‘architecte libanais chargé de la conception du projet Akon City au Sénégal. Il vit aux Émirats arabes unis. Ce « citoyen du monde » parle ici de sa philosophie de l‘architecture.
2020-10-31T10:30:39+00:00
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GnakryLive du 2022-04-27
[ Inventaire des Idoles ] « Idy, graine sans fleur » (Par Elgas)
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[ Publié pour la première fois le 21 novembre 2018. Republié suite à la nomination par décret présidentiel d’Idrissa Seck comme président du CESE, ce 1er novembre 2020 ] – S’il faut chercher un homme qui résume assez bien la scène politique sénégalaise, Idrissa est un beau spécimen. Fils du royal Cayor, redoutable dans sa maîtrise du wolof, chatoyant disciple religieux, prédicateur coranique, formé à l’école occidentale, bluffeur intellectuel sans lectures consistantes, amateur de bons petits mots en wolof, en anglais, et en français, précoce militant, opposant valeureux, taulard prestigieux, premier ministre velléitaire…La boucle est loin d’être bouclée. Il est redevenu banal opposant, gardant pour lui tout le pedigree précité, tout juste traine-t-il, accolée comme une tare, cette image d’un Sisyphe moderne qui veut conquérir son rêve de présidence, et qui sème sa graine depuis des lustres sans jamais la voir fleurir. Ce n’est rien exagéré que de dire que la scène politique sénégalaise, depuis les indépendances, a eu ses grandes figures aussi emblématiques qu’impui ssantes.
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L’intransigeance morale avait Mamadou Dia, la morale intellectuelle avait Cheikh Anta Diop, l’intellect dictatorial avait Senghor, la dictature de la grande ambition avait Wade, l’ambition marxiste avait produit une portée d’aspirants, de Amath Dansokho à Landing Savané et bien d’autres. Tous ces hommes, excepté Cheikh Anta Diop mort hélas précocement, ont à un moment donné de leur carrière, pactisé, avant de divorcer. Tantôt compagnons d’une unité nationale recherchée pour le « bénéfice suprême de la nation », tantôt ennemis, recherchant curieusement la même unité dans l’opposition. L’aventure solitaire, la claire destination d’un parti politique, a toujours été la hantise des rassemblements sénégalais. D’où la relative facilité avec laquelle les pouvoirs peuvent piller les ressources de l’opposition, en lui adressant le baiser de la mort. Le culte de l’unité, la fabrique du consensus, comme pratiques politiques, contribuent à rendre illisible la scène politique, où les idées sont bien secondaires face aux alliances et aux (im)postures. De toute cette rapide lecture, Idrissa Seck est presque la synthèse. Symbole de la présence de réelles prédispositions mais bafouées par les jeux mesquins de pouvoir et l’absence totale d’idées au souffle long. Idrissa Seck est comme un condensé d’une séquence, faite de vanité et d’égotisme. Toute une génération d’aspirants politiques, nés dans les années 80, lassés de voir les responsables peu à l’aise dans l’élocution, sans bagage intellectuel rayonnant, marionnettes des forces hégémoniques, se sont laissé duper par Idrissa Seck. Dans le désert, il est facilement devenu le diamant qui, avec quelques formules bien senties, redonnait corps au rêve des jeunes de voir leurs leaders s’élever au niveau des standards qu’ils admiraient. L’ancien pensionnaire de Princeton, étoile filante à Sciences Po, en avait à priori l’étoffe, avec ces écoles cotées. Avec son aisance en wolof, plus d’ailleurs qu’en français, qu’il entrecoupait de prêches religieux comme le pays en raffole, il gommait presque sa formation occidentale, apparaissant comme un pur produit local. Comme héritier d’un lignage royal du Cayor, ce wolof choisi, brillant, espiègle et taquin, plaisait et faisait rire. En une formule il pouvait se sortir d’une position difficile, offrant aux populations ce qu’elles voulaient d’un dirigeant, les garanties de l’authenticité, même si au niveau national, ce wolofisme ne séduisait pas tout le monde. Aux élites, il s’adressait dans ce français académique, solennel, plus fluide, qu’il infusait aussi de passages coraniques, et il triomphait aussi. Ainsi est-il devenu un amuseur politique, un conteur écouté avec admiration mais dont le propos finissait toujours aux oubliettes. Toute maîtrise d’une langue, quelle qu’elle soit, vous donne du pouvoir. Vous en devenez l’expert couru, dont les phrases suscitent à la fois de l’admiration et de la convoitise. Dans un pays de l’art du discours comme fait royal et dynastique, mais aussi fait propre du prêche et de la prédication, l’instrument de la parole est un pouvoir de domination qui sépare d’ailleurs les élites des populations. C’est un instrument aussi de promotion. Cet ancien talibé qu’est Idrissa Seck en a fait l’instrument de son ascension, jouant au risque d’en faire trop, de ces différents registres. C’est la part tendre et romanesque de son histoire, il reste un produit de la méritocratie et il en a gardé une forme de gratitude dont l’expression manque cependant de régularité. Quand en 2005, alors première phase active de la croissance économique au Sénégal sous Wade – le pays venait en effet de négocier et d’obtenir beaucoup d’argent des institutions financières – Idrissa Seck est jeté en prison à cause des chantiers de Thiès par son mentor et père, la scène politique sénégalaise tient sa première tragédie moderne du siècle. Chez Senghor et Dia, l’amitié et le pacte avaient volé en éclat sur l’autel du désaccord et de l’ambition. Mais chez Wade et Seck, la famille éclate pour l’ambition du second et la crainte du père. L’art du discours qui l’a toujours maintenu à flot, viendra de nouveau à la rescousse d’Idy, avec les fameux CD où il relate, depuis la prison, son affaire, font l’effet d’une bombe. La presse s’arrache le scoop. Les commentaires pleuvent. Le contenu autant que le processus de vulgarisation de ces CD intriguent et fascinent. C’est le moment sans doute où le génie devient tragique, voire martyr. Le ton obscur, les références, la voix clandestine, la diction, l’idée même de cette défense, signent la patte Idy, qui suscite de la compassion mais aussi lui ouvre cette place d’opposant numéro 1, dans un duel avec le père. Pour être juste, il faut mettre au crédit d’Idrissa Seck d’avoir été la première victime d’un arbitraire politique, avec son bras armé judiciaire, qui ne cessera de se répliquer sous la présidence Wade, et ensuite sous Macky Sall. La mise hors d’état de nuire
d’un indésirable devient pour tout pouvoir, un moyen de dresser l’appareil républicain pour des fins personnelles. Cette dérive qui a précipité la désaffection pour Wade dans l’opinion est une pente glissante qui fragilise les institutions. Idrissa Seck pourra dire, et à raison, avoir été la victime zéro, l’oiseau qui annonçait les caprices antidémocratiques de Wade. Mais de ce potentiel, Idrissa Seck ne fera rien. Il a connu le sommet de sa gloire très tôt. Par paresse intellectuelle d’abord, incompétence politique ensuite, mais surtout par une suffisance et une arrogance coupables. Celui qui devait incarner la nouvelle génération d’hommes politiques se perdra dans de vieilles pratiques combinatoires. Il s’est tellement vu dans son destin, beau et grandiose, déjà président, tel un Bayrou croyant avoir eu un message de la Vierge Marie, qu’il s’est dispensé du vrai travail, des vrais sacrifices qui auraient pu l’y conduire. Dans ce mélange de messianisme religieux et de culte de sa propre personne, Idrissa s’est cru né pour être président, offrant à chacun de ses discours ce mysticisme surfait revenant sur l’essence divine du pouvoir. Cette vision du pouvoir comme don de Dieu rassemble nombre d’hommes politiques, mais oublient-ils, le peuple vote aussi. Parler à ce peuple reste le chantier premier d’un homme politique. Le démarcher, lui parler, le comprendre, qu’importe l’éduquer, mais le fréquenter au long cours, sont des étapes importantes sur le chemin du pouvoir. Idy, convaincu que sa piété aurait sa récompense, que son génie personnel, qui s’affadit avec le temps du reste, lui aurait donné de l’avance, s’est bercé d’illusions. Il a accumulé les échecs, toujours plus cuisants, jusqu’à apparaitre, après des débuts tonitruants, à l’âge souvent où la stature s’affirme, comme un parmi les autres, que l’on pourrait confondre avec n’importe qui. Toutes les conférences de l’ancien maire de Thiès sont des dialogues où, en scène, il discute de petites affaires politiques sans jamais s’élever au niveau des idées. Le lecteur et ami de Jacques Attali – on ne peut faire pire en termes de mentor – bien introduit dans les réseaux de Robert Bourgi, a pendant tout son parcours politique soigneusement évité de parler politique dans le dur des enjeux. Sur tous les sujets importants, il s’est caché dans des consensus nationaux mous. Ce qui reste invraisemblable, c’est de voir comment un homme qui a été si à l’avant-garde, est devenu, le temps d’une décennie, si has been. Aucune urgence nationale ou internationale n’a suscité une réflexion, une production intellectuelle, pour nous dire ce que pense le bonhomme. Ni livre, ni récit. Ni positionnement. Ni envergure. Il s’est dissimulé dans de longs silences, laissant son parti voguer avec une vitesse de sénateur, piloté par des lieutenants valeureux mais sans réellement de cap. Si les hommes politiques peuvent bien souvent se passer d’une réflexion sérieuse sur le monde, décliner des visions dans leur quête du pouvoir, on ne peut faire l’économie d’avoir un savoir-faire politique, si l’on veut conquérir réellement la fonction suprême. Dans les deux cas, Idrissa Seck est resté à sec et à cours d’idées, essayant de capitaliser sur un patrimoine politique ancien, hélas trop maigre pour lui assurer assez de provision sur la survie. Il y a comme l’impression que l’intelligence réelle du personnage s’est arrêté, figé dans le temps, incapable de se renouveler, perdant ainsi tous ces gens qui étaient disposés à l’aider, mais qu’il a déçus si profondément. A la veille des élections, nul doute qu’il reviendra comme à l’accoutumée sur la scène. A la poursuite d’une gloire qui se joue de lui comme son ombre. On ne le calcule même plus, peut-être est-ce sa seule chance, que dans le chaos généralisé, le mépris qu’il suscite chez le pouvoir, ne bascule en défiance en sa faveur. C’est peu probable. Si personnellement, Idrissa m’a donné, à l’âge de 15 ans, l’envie de faire des études de Sciences politiques, mon intérêt pour lui s’est dilué avec le temps. C’est l’histoire d’une réelle déception parce qu’elle naît d’une vraie affection que du reste je lui garde. Mon divorce avec lui a été total quand il a pris position dans l’affaire Oumar Sankharé. Si j’ai pendant longtemps, essayé de comprendre la sociologie électorale sénégalaise pour tolérer son mélange des genres entre le politique et le religieux, son opportunisme confrérique, l’absence de défense du professeur Sankharé en revanche, qu’il a même accablé avant sa mort, a ruiné le peu de sympathie que j’avais encore pour lui. Il est, du reste, assez amusant que lui-même a été jugé par le tribunal du blasphème dont il a lui-même été un radical juré. Tel est pris qui croyait prendre. Il n’est rien de plus coupable qu’une intelligence figée de certitudes. C’est comme les peuples. Le passé n’est pas l’horizon. L’intelligence se régénère, s’aère, se nourrit, s’adapte. Sinon, elle végète,
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