diversité J U I L L E T
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Niveau: Secondaire, Lycée, Première

  • mémoire


diversité 165 J U I L L E T 2 0 1 1 85 La mixité filles-garçons dans les établissementsscolaires conduit souvent à une sorte de neutra-lité, dans le déni des différences. Ainsi en est- il des différences de sexe, et de leurs traductions subjec- tives et corporelles, particulièrement à l'adolescence. Elles sont d'autant plus occultées qu'elles peuvent sembler ne pas concerner les apprentissages et, de surcroît, ne pas engager la responsabilité de l'école. La question est là : certes l'école n'est pas à l'origine de ces différences, mais œuvre-t-elle à empêcher qu'elles ne se structurent en inégalités sociales ou, au contraire, accentue-t-elle leur évolution en ce sens? On peut comprendre la résistance du monde de l'école face aux diversités sociales des élèves. Leur prise en compte ne conduirait-elle pas à une « adaptation » de l'enseignement selon le milieu et le sexe, à l'aban- don de l'idée républicaine au bénéfice d'un relativisme culturel? Deux expériences me semblent illustrer qu'au contraire l'école peut prendre en considération les différences en œuvrant à une avancée de la culture commune : la première a trait au décrochage des adolescentes en éducation physique et sportive (EPS) et à l'éventuelle voie de réussite qu'elle pourrait, à l'in- verse, constituer pour les garçons ; l'autre concerne l'échec scolaire des garçons de milieux populaires dans le registre des activités langagières.

  • inégalités sociales

  • élèves des classes tertiaires

  • réussite scolaire


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Langue Français

Extrait

Rétrospective
«Elles papotent, elles gigotent»
L’indésirable différence des sexes…
Les différences de sexe chez les adolescents au
collège et leurs traductions subjectives et Annick DAVISSE
corporelles — éducation physique et sportive ou
activités langagières — sont d’autant plus
occultées qu’elles semblent ne pas concerner les
apprentissages et, de surcroît, ne pas engager la
responsabilité de l’institution. L’école œuvre-t-
elle vraiment pour empêcher que ces différences
a mixité filles-garçons dans les établissements
ne se structurent en inégalités sociales ou, auscolaires conduit souvent à une sorte de neutra-
contraire, accentue-t-elle leur évolution en ceL lité, dans le déni des différences. Ainsi en est-
il des différences de sexe, et de leurs traductions subjec- sens ?
tives et corporelles, particulièrement à l’adolescence.
Elles sont d’autant plus occultées qu’elles peuvent
sembler ne pas concerner les apprentissages et, de contraire l’école peut prendre en considération les
surcroît, ne pas engager la responsabilité de l’école. différences en œuvrant à une avancée de la culture
La question est là : certes l’école n’est pas à l’origine de commune: la première a trait au décrochage des
ces différences, mais œuvre-t-elle à empêcher qu’elles adolescentes en éducation physique et sportive (EPS)
ne se structurent en inégalités sociales ou, au contraire, et à l’éventuelle voie de réussite qu’elle pourrait, à l’in-
accentue-t-elle leur évolution en ce sens? verse, constituer pour les garçons; l’autre concerne
l’échec scolaire des garçons de milieux populaires dans
On peut comprendre la résistance du monde de le registre des activités langagières. Ces cas de figure
l’école face aux diversités sociales des élèves. Leur prise ont en commun d’interroger le monde de l’école sur
en compte ne conduirait-elle pas à une « adaptation » la construction de ses références culturelles d’une part,
de l’enseignement selon le milieu et le sexe, à l’aban- sur la prise en compte de l’activité réelle des élèves
don de l’idée républicaine au bénéfice d’un relativisme d’autre part.
culturel? Deux expériences me semblent illustrer qu’au
diversité 165 JUILLET 2011 85
Ville-École-Intégration, n°116, mars 1999Ville-École-Intégration, n°116, mars 1999
Adolescentes et adolescents, en sens inverse en EPS? équivalent scolaire puisque les associations sportives
La méfiance à l’égard de la diversité est plus vive d’établissement voient leurs effectifs féminins fondre
1encore lorsqu’est en cause la différence des sexes ; les avec l’âge: alors que l’on compte 47 filles sur 100
3femmes ont en effet payé cher, et longtemps, un biolo- licenciés dans la catégorie benjamin , la proportion
gisme qui les résumait à la fonction maternelle, à la descend à 43 % parmi les minimes, 37 chez les cadets
séduction et à la fragilité. Au nom de la lutte contre et 33 chez les juniors-seniors.
ce passé d’enfermement, faut-il devenir aveugle sur Quant aux cours d’EPS, c’est-à-dire au socle obli-
l’importance des corps sexués dans la construction de gatoire de pratique, le recul net du phénomène des
l’image de soi ? Elle est pourtant très visiblement agis- « dispenses » (souvent à prétextes) peut indiquer une
sante dans un domaine de corps comme celui de l’édu- meilleure adhésion des filles qu’il y a dix ou vingt ans,
cation physique et sportive (EPS), et cela d’autant mais — comme dans d’autres enseignements — cette
plus qu’approche l’adolescence. présence, en particulier en lycée, ne garantit pas leur
engagement dans l’activité physique. En témoignent
Les adolescentes en prise de distance les notes d’EPS au baccalauréat qui, même si elles
2Dans une étude de l’INSERM sur les adolescents , restent élevées, mettent les filles plus de un point…
à la rubrique « Le temps des loisirs », on peut lire en « derrière » les garçons (4). Témoignent également de
sous titre « Sport pour les garçons, lecture pour les difficultés les aléas de la mixité; ainsi, en collège, si
filles… ». Les auteurs précisent ainsi les écarts qui les sixièmes et les cinquièmes restent mixtes (à 90 %),
différencient selon le sexe les loisirs des adolescents: à partir de la quatrième, une classe sur deux au moins
« Les garçons sont plus nombreux à pratiquer un sport est « démixée » pour les cours d’EPS. C’est en parti-
(73 %) et de manière plus intensive que les filles culier à ce niveau du système éducatif que s’observe
(48 %) qui, en revanche, apprécient davantage la un désengagement des filles dans la plupart des acti-
lecture (53 % des filles contre 35 % des garçons lisent vités sportives, particulièrement en sports collectifs et
souvent). Les garçons sont aussi plus intéressés que en athlétisme. Cette distance ne fera que croître au
les filles par les jeux vidéo (59 % contre 27 %). » Cet lycée, notamment pour les élèves des classes tertiaires
écart augmente avec l’âge puisque, si 79 % des garçons et littéraires, les effets statistiques de sexe se trouvant,
et 62 % des filles disent pratiquer souvent du sport en comme il est de règle, redoublés par ceux du milieu
dehors de l’école dans la tranche 11/13 ans, après une social et de la réussite scolaire.
érosion continue, on compte encore à 18 ans 64 %
des garçons et seulement 33 % des filles. Ce sont les Ces différences d’adhésion lorsque le corps devient
filles scolarisées en lycée professionnel qui déclarent les adulte sont-elles des inégalités sociales ? Et après tout,
taux de pratique les plus bas: 27 %. faut-il être sportive? Il faut pouvoir choisir de l’être
Ces différences de pratiques « hors école » ont leur ou non, et c’est bien la mission de l’école, propre à ce
service public et sous la responsabilité natio-
nale, de garantir à tous, et en tout point du
territoire, des chances égales de pouvoir vrai- 1 La terminologie adoptée à propos de « la différence des
sexes » se réfère au travail de Geneviève Fraisse, notamment à La ment faire ce choix après ou hors le temps de
Différence des sexes, PUF (Philosophie) 1996, et à Muse de la raison l’école. Cette fonction d’initiation, au sens
publié en 1987 chez Alinéa, et en folio chez Gallimard en 1997.
fort, n’est en rien comparable à ce que font
2 « Adolescents, enquête nationale », étude de M. Choquez et S.
les clubs sportifs ou les conservatoires dont leLedoux publiée aux éditions de l’INSERM, 1994.
public est volontaire, adhérent et cotisant. 3 On avoisine donc… la parité. Ce taux élevé de licences
féminines, tout à fait remarquable, fait du sport scolaire un des L’école doit donc se colleter la question diffi-
atouts du sport féminin en France; cette réussite est cile de faire que des non-volontaires accèdent
généralement insuffisamment soulignée.
à un acquis culturel suffisant et partagé,
4 Une étude réalisée dans l’académie de Grenoble en 1996
élément d’une vision du monde permettantconfirme cet écart et indique que les notes des filles sont
de vivre ensemble. Qu’elle échoue, et l’onmeilleures que celles des garçons en danse et en gymnastique
mais nettement plus faibles en sports collectifs et dans les pourra durablement voir se croiser sans se voir,
activités duelles. sur des trottoirs différents, les jeunes filles des
86 JUILLET 2011 diversité 165Ville-École-Intégration, n°116, mars 1999
conservatoires de danse et les jeunes rappeurs des cités, les filles s’éloignent des activités sportives, les garçons,
les footballeurs et les joueurs de tennis. eux, les survalorisent, assurés qu’ils sont dans cette
L’institution scolaire tient-elle ce défi? Peut-on consi- adolescence qui les trouble d’y trouver de l’identifi-
dérer que l’EPS a joué tout son rôle pour que les diffé- cation virile.
rences d’images et de rapports aux pratiques du corps L’EPS est, à l’emploi du temps, ce que préfèrent les
ne dérivent pas en inégalités culturelles ? Oui et non. collégiens, comme l’indiquent les chiffres d’une
L’efficacité de l’action contre le décrochage des adoles- enquête de J.-P. Terrail pour la DEP selon laquelle
centes est liée à la capacité à interpréter les différen- les collégiens classent l’EPS en tête de leurs « mati&#

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