STAGEXPLOITATION
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Description

Du pseudo-esclavage moderne en entreprise …ou l’expérience d’une stagiaire en entreprise PARTIE 1 EPIDOSE 1: DE CHARYBDE EN SCYLLA Ne vous ai-je jamais témoigné de l'expérience de cette stagiaire en fin d’étude d’ingénierie agroalimentaire, dont la tutrice, une pauvre femme ménopausée, rongée par la jalousie et gangrenée par le pouvoir, lui demandait inlassablement : « Peux-tu m’apporter le café ? ». Cette femme que la féminité avait désertée était l’archétype des personnages en embonpoint des tableaux de Botéro. Un jour, la stagiaire à qui toutes ces tâches dégradantes étaient insidieusement confiées, avait rêvé d’utiliser la neige qui avait stagné sur le sol, pour préparer le café de la ménopausée. Elle s’était même résolue à y ajouter sa touche personnelle en y mettant ses expectorations. Dommage, elle présenta sa démission avant que ses plans ne se réalisent. Quoi qu’il en soit, cette stagiaire, meurtrie au fond d’elle-même, entreprit de nouveau sa recherche de stage. Fructueuse recherche. Les sollicitations pour des entretiens affluaient de toute la France. Finalement, elle opta pour un stage en management de la qualité dans un grand groupe qu'elle prendra soin de ne pas nommer. Heureux dénouement à l’exception près, qu’une composante inattendue n’avait été prise en compte...de Charybde en Scylla ou de Scylla en Charybde. Peu importe.

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Publié le 22 novembre 2013
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Langue Français

Extrait





Solem








STAGEXPLOITATION

Les mésaventures d’une stagiaire

Ou comment en finir avec l’hypocrisie des stages qui n’apportent rien au stagiaire
















PARTIE 1

EPIDOSE 1: DE CHARYBDE EN SCYLLA
Ne vous ai-je jamais témoigné de l'expérience de cette stagiaire en fin d’étude d’ingénierie
agroalimentaire, dont la tutrice, une pauvre femme ménopausée, rongée par la jalousie et gangrenée
par le pouvoir, lui demandait inlassablement : « Peux-tu m’apporter le café ? ». Cette femme que la
féminité avait désertée était l’archétype des personnages en embonpoint des tableaux de Botéro.
Un jour, la stagiaire à qui toutes ces tâches dégradantes étaient insidieusement confiées, avait rêvé
d’utiliser la neige qui avait stagné sur le sol, pour préparer le café de la ménopausée. Elle s’était même
résolue à y ajouter sa touche personnelle en y mettant ses expectorations. Dommage, elle présenta sa
démission avant que ses plans ne se réalisent.
Quoi qu’il en soit, cette stagiaire, meurtrie au fond d’elle-même, entreprit de nouveau sa recherche de
stage. Fructueuse recherche. Les sollicitations pour des entretiens affluaient de toute la France.
Finalement, elle opta pour un stage en management de la qualité dans un grand groupe qu'elle prendra
soin de ne pas nommer. Heureux dénouement à l’exception près, qu’une composante inattendue
n’avait été prise en compte...de Charybde en Scylla ou de Scylla en Charybde. Peu importe.

Un mois et demie plus tard :
Les guerriers ne connaissent que le courage
Ils ont peint leurs corps de tatouages
Signes de persévérance et de combativité
Ils n’abandonneront pas, quelle que soit leur destinée.

Je m'appelle Kizzi Solem. Dans le nord du Togo, en pays Kabiyé, Kizzi signifie « refuse ce qui ne te
plaît pas », Solem veut dire Amour. Je porte deux valeurs très fortes pour deux si petits prénoms. J'ai
pris la douceur de ma mère et un peu de son intelligence émotionnelle. J'ai pris la rage de travail de
mon père, sa fougue et un peu de son impertinence. Je suis le produit d'une Guadeloupéenne d'un
mètre cinquante-deux et d'un Togolais d'un mètre soixante et un. Je mesure un mètre soixante-trois.
Mes yeux sont environ perchés à un mètre cinquante-huit, en prenant comme référence le niveau de la
mer. Mais, je vois le monde avec beaucoup plus de hauteur; je m'élève et me transcende pour le
comprendre.

EPISODE 2 : BIENVENUE A CADILLAC
Lundi 12 mars 2007. 8h00. Premier jour de stage. Bienvenue à Cadillac.
Belle façade d’entreprise, entrée remarquablement arrangée. La politique édictée par le Siège trône
fièrement, celle du site n’est pas plus modeste. Il y a de quoi. Le site de production a appartenu à une
des ces nobles familles françaises, dont l’un des fils s’est distingué par ses explorations sous-marines.
Situé au coeur du Bordelais, au coeur des cépages qui ont fait la renommée de la France pour son
savoir-faire vinicole, l’entreprise se targue de son expérience en matière de fabrication de vins.
Les géniteurs de Cadillac auront quand même veillé à ne pas choisir des couleurs trop ostentatoires
dans ce cadre encore très naturel des petits villages français. Oui ! Cadillac est implanté sur un
minuscule territoire, le Batac, habité par quatre cent cinquante campagnards. D’ailleurs, dans ce petit
trou de la France, il ne doit pas y avoir plus de trois rues…
Une de ces rues, bitumée, avec une pente relativement abrupte mène à Cadillac.
Cette rue m’est aussitôt devenue familière. Tous les matins, je l’emprunte et croise quelques villageois
baillant aux aurores après une bonne nuit de sommeil, loin des nuisances sonores de la ville. J’aime y
chanter pendant mon parcours pédestre. J’adore prendre de longues inspirations et fermer les yeux le temps de quelques secondes. Dans ces moments, je sais que j’apprécie totalement la plénitude de la
vie. Un bonheur matinal. Je chante certes faux, mais je persiste et signe car c’est un moyen
d’expression libérateur pour moi. Mon entourage familial s'esclaffe dès que les premières sonorités
s’émancipent. Mais étrangement, je me sens comme infiltrée par la voix d’une diva dès que j’ouvre la
bouche.


Pas de trêve dans mes rêves
Là où ma liberté n’y est point entravée
Là où mes pensées se parachèvent
En succession d’indénombrables idées.

Heureuse je suis. Heureuse de travailler à Cadillac, filiale d’un grand groupe français. Ravie d’avoir
une mission transversale qui me permettra d’aborder de nombreux sujets et de rencontrer une
multitude d’interlocuteurs. Enchantée de pouvoir donner le meilleur de moi-même. J’ai envie de me
surpasser et la perfectibilité est mon credo.
Mon premier lundi se déroule remarquablement bien. J’ai le sentiment profond que je vais vivre de
toutes nouvelles expériences, les unes plus stimulantes que les autres. Pour le coup, j’ai délaissé mon
vieux jean noir délavé et déchiré dans l’entrejambe pour un pantalon tailleur noir, un pull orangé, une
ceinture qui me rétrécie la taille et qui s’accorde résolument bien avec les tons de mon pull. Par contre,
les efforts mesurables en matière vestimentaire ne pourront s’appliquer aux chaussures. Pour rien au
monde, je ne troquerai mes bottes plates et confortables pour des petits talons, certes esthétiques mais
synonymes de souffrance futile pour moi. C’est donc avec cette excitation palpable que je franchis
l’entrée de Cadillac. Une secrétaire m’accueille, m’invite à la suivre puis me propose de m’installer
dans un grand bureau. Elle porte une minijupe et un décolleté à faire se retourner des fans de football
en plaine retransmission de match. Du détail, poursuivons ! Angeline, ma trentenaire de tutrice, a pris
le soin de préparer des documents à mon intention afin que je puisse les parcourir pendant son
absence. J’apprécie. Je me plonge alors dans la lecture de manuels, prends des notes de façon assidue
pour essayer de comprendre les rudiments du fonctionnement de l’entreprise. Je m’efforce de me
concentrer mais pourtant je trouve que le temps commence à se faire long. Il est dix heures. Deux
heures que je patiente agréablement en lecture. Et soudain, Angeline ! Je ne crois pas que j’oublierai
ce petit bout de femme de sitôt. Le personnage est d’une bonhomie ambulante, ce qui la rend
terriblement ordinaire. Je distingue une longue queue de cheval châtain clair et une crête implantée sur
la partie frontale du crâne, tel un kiwi. (Aparté pour mes lecteurs : je ne fais pas référence au fruit
exotique asiatique mais à l’oiseau subtropical !). Pour couronner le tout, une dentition particulièrement
originale : des dents couleur roquefort qui sont toutes en compétition d’ostentation. Deux incisives
démesurées parachèvent le portrait et lui donnent un air de souris égarée.
Faisant fi de la première impression que tout individu procure, j’écoute avec attention les explications
qu’elle me dispense suite aux lectures que j’ai faites. Je suis agréablement étonnée du temps qu’elle
me consacre. A cet instant, je suis persuadée que ce stage sera particulièrement enrichissant et
valorisant. Angeline m’incite à poser des questions et nous abordons la question de mes horaires de
travail ! Un idéal ! Des horaires d’écolière : huit heures – dix-sept heures et un vendredi de repos
toutes les deux semaines. Je ne pouvais pas mieux tomber ! Et pour conclure cette phase de
familiarisation avec l’entreprise, ma chère tutrice déclare : « Surtout, en cours de sujet débattu avec les
collègues, n’hésite pas à intervenir pour donner ton avis».

Mercredi 14 mars.
Rien ne m’arrêtera. Je suis tellement déterminée au regard de la fâcheuse expérience que la Ménopausée m’a fait vivre. Agir pour ne pas subir. C’est ce que je fais et j’en suis heureuse. Je taris
d’éloge la structure familiale de l’entreprise et l’accueil qui m’a été réservé. Cela fait deux jours que
j'ai intégré Cadillac et tout se déroule parfaitement bien. D’ailleurs aujourd’hui, j’ai rencontré Ursulla,
la collègue d’Angeline, originaire du Siège avec qui j’ai participé au tri de 2000 bouteilles. Candide et
bienveillante, j’ai même réussi à oublier la pénibilité de la tâ

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