Il était une fois, ...
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Paroles de Bouffon

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Publié par
Publié le 18 janvier 2013
Nombre de lectures 104
Langue Français

Extrait

Salut voyageur temporel.
Sois le bienvenu dans cette portion de ton passé qui se trouve être mon présent.
J’ai juste une petite histoire à te raconter. Un souvenir. Une anecdote. Une de mes plus belles
images.
J’étais enfant. Si, si, ça m’est arrivé. J’étais juste assez grand pour pouvoir m’enfuir quelques instants
de la maison, à condition que je passe par le point de contrôle mère-grand.
Elle habitait le village du dessus, La Fontaine, ça s’appelait, au bas de la montagne, tandis que nous,
nous étions relégués à son pied, en bordure de la plaine.
Sa maison était juste à côté de la place du Tilleul. Son nom venait évidemment du magnifique arbre
qui trônait en son centre. Evidemment, l’esplanade était en pente, ce qui permettait d’avoir à son
sommet, un double escalier formant comme une estrade, vestige d’une ancienne épicerie jouxtant le
café.
Les mercredis après-midi, il y avait …, zut, j’ai oublié son nom. Pourtant il mériterait tant que je m’en
souvienne. Il me reviendra plus tard.
On l’entendait arriver de loin, parce qu’il débarquait précédé des roulements de son tambour. Il
sortait de sa cahute dans la forêt, pour venir inonder le brave peuple, composé des vieux et des
enfants du village, de ses si précieuses observations, il montait sur le podium, jouait un peu avec ses
baguettes et se mettait à monologuer, sans jamais se laisser interrompre.
Il répandait ses vérités, cruellement crues. Racontait ce qu’il percevait de ses semblables. Sermonnait
sur l’importance de s’accepter tel que l’on est, sur le sens véritable de la compassion, et autres sujets
à la pointe de ses préoccupations. ….
C’était la pause discours, où tout le monde en prenait pour son grade, mais, où tout le monde s’en
foutait, parce que tout le monde savait bien que dès que l’orateur aurait tourné les talons, tout le
monde serait d’accord pour dire que c’est un fou, pas dangereux, mais fou d’avoir trop étudié ou
réfléchi. Tout le monde débattrait un petit moment sur cette dernière question, puis repartirait à ses
occupations habituelles. ….
Parfois, j’arrivais à échapper à la surveillance de la vieille et je raccompagnais cet ami. J’aimais sa
compagnie, car il brûlait d’une certaine flamme intérieure. Un jour, il me raconta son secret. Comme
tous les autres. Lorsque j’étais petit, personne ne pouvait s’empêcher de me conter ce qu’il n’osait
avouer à autrui. J’incarnais l’innocence et inspirais la confiance.
Vois-tu, me dit-il. Ce qui me comble, c’est de pouvoir me passer de la compagnie des hommes.
Même lorsque j’entre dans leur monde, je ne sors jamais du mien qui est nettement plus beau. Il est
fait à ma mesure, il est fait à mon goût, il est fait à ma hauteur. C’est moi qui l’ai fait.
C’est aussi simple que ça. Ce ne sont ni mes études, ni ma passion pour la réflexion qui m’ont rendu
fou, c’est mon désir de trouver le bonheur. Ma chair, mes fidèles et ma spiritualité valent toutes les
églises les plus accueillantes, ajouta-t-il, une larme à l’œil, avant de terminer par : à présent casses-
toi avant que je ne te jette des pierres. Je ne l’ai plus jamais revu. Si mes souvenirs sont exacts, il serait mort d’une manière un peu bizarre.
Si je tenais à te raconter ce petit trait de mon passé, c’est surtout pour m’expliquer pourquoi la
photographie littéraire de mes débuts dans l’ère nouvelle d’après la célèbre fin de 2012 et de la
grand crise mondial qui l’a amenée, avait pris cette forme.
Ma mère avait beau tenter de me faire peur avec le sceptre de la folie qu’elle brandissait à chaque
fois que j’avais envie d’apprendre quelque chose d’autre que ce que l’école imposait, elle n’y
parvenait plus, depuis que je disposais d’un magnifique exemple, que j’aurais pu appeler Jésus, dans
ma mémoire.
Ce bouffon de mon passé, explique pourquoi je tenais à être celui que je suis aujourd’hui. On ne le
voit peut-être pas, mais nous sommes exactement pareils, à un ou deux détails près.
Je ne grimpe sur aucune estrade. Je déteste les piédestaux, à chaque fois que l’on m’en a élevé un,
on m’en a aussi fait chuter.
Je ne joue pas du tambour, j’aime le silence.
Je préfère le son de mon clavier à la fatigue douloureuse du mode oral.
J’ai le plus beau bureau du monde, je ne suis pas obligé de sortir par mauvais temps, … mais, moi, je
ne suis jamais sûr qu’il y ait encore quelqu’un pour m’entendre quelque part.
J’attends que le monde s’arrête, pour lui déballer mon cœur.
Est-ce de la lâcheté ou de l’avarice ?
Qui es-tu ?
Tu auras peut-être remarqué que je suis fou ? Mais, t’es-tu demandé s’il en a toujours été ainsi ? Et
bien non. Pas du tout.
Il fut un temps, où je me souvenais de qui j’étais, ou du moins, croyais m’en souvenir assez pour me
satisfaire de ma vie, dès que l’envie m’en prenait. Il fut un temps, où je savais, tout, simplement.
Il fut un temps, où j’avais envie de me battre, de me dépasser, d’aimer, d’être aimé, de me réaliser,
de me glorifier, … et autres vanités. Il fut un temps où je ne croyais ni en la vie, ni en la mort, elles
étaient moi.
Il fut un temps, où je pratiquais la vérité et la liberté, alors même que j’étais incapable d’évaluer ces
concepts. Il fut un temps, où ma mémoire fonctionnait sans les derniers programmes bien défaillants
de l’héritage de ma génération.
Il fut un temps, où j’étais le plus heureux des hommes.
Cette ère a commencé très précisément le 28 juillet 1980 pour se terminer à grand fracas silencieux,
le 25 décembre 1981.
Il était une fois, il y a longtemps, mes huit ans, que je pleure amèrement depuis. Je les ai perdus au
grand jeu du mensonge, le monopoly mondial, la religion humaine.
Pour plaire à ma mère, pour plaire à mon père et à sa maman, qui m’ont fait croire que je saurais
ainsi plaire à tout le monde, j’ai renié ce que j’avais de plus sacré, le pont intérieur qui me liait
directement à la source de tout le truc à effets sensoriels qui m’entourait. Celui ou Ce que certains
semblaient chercher derrière l’étiquette Dieu.
Ma vraie relation. Celle que j’étais venu expérimenter dans cette dernière vie terrestre.
Depuis, j’erre sur terre, inconsolable, pétri de nostalgie, incapable de jamais vraiment me repérer,
incertain de ne pas être à côté du sujet éphémère qu’adorent mes semblables, inconscient des peurs
qui les tourmentent, les paralysent ou les rendent agressifs, …. Le Bouffon de service, le vrai, le seul
et l’unique, Saint-Damat.
Tu sais, ce pauvre qui dégueule dès qu’on essaye de lui imposer une convenance sociale qui est
contraire au bon sens universel ?
Tu sais, ce pique-assiette de parasite qui était devenu champion toute catégorie de la réalisation des
rêves des autres et qui à présent tire un gigantesque bras d’honneur à l’humanité en se fondant dans
les siens propres ?
Tu sais, cet anti-héros qui n’a l’air de strictement rien de connu et qui pourtant peut faire très peur à
des vilains pas beaux, cap de se cacher derrière des gros bras armés dont le salaire achète la
conscience ? Des grosses nuques, bien riches en monnaie, comme les appelaient mes serviles
moutons d’ancêtres directs.
Moi, … quoi !
Salut, l’ami qui ose ainsi t’aventurer dans les mémoires d’un fou, qui ne se souvient pas trop ce qu’il a
fait de lui-même. Ça risque de décoiffer, moi, je te dis. Veux-tu tenter le pari de me suivre jusqu’au bout pour savoir, avec moi, si je suis parvenu à me
réparer ou aurais basculé dans la terrible catégorie des incurables ? Paraît que c’est pire que l’enfer
quand tu tombes là-dedans depuis la caste des intouchables. Enfin, on n’est pas sûr, parce que
personne n’en est revenu pour nous le dire. On a juste entendu geindre, de loin.
Mais, ne te gausses pas trop, tout de même. Les risques ne sont que pour ma pomme. Toi, tout ce
que tu peux attraper,

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