Au bon vouloir des chrysanthèmes.
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Au bon vouloir des chrysanthèmes C’Ġtait uŶe jouƌŶĠe d’autoŵŶe seŵďlaďle à toutes Đelles Ƌui haďilleŶt d’oƌdiŶaiƌe l’iŵagiŶaiƌe Đollectif. Un ciel morne au milieu duqueld’iŶŶoŵďƌaďles feuilles Đouleuƌambre et miel tourbillonnent, pauvres âmes esseulées, avant de venir mourir sur le sol. Nous étions réunis dans un champ baigné par les nuances du ĐƌĠpusĐule et j’avaissorti le plus élégantde ŵes Đostuŵes pouƌ l’oĐĐasioŶ.Trois pièces noires comme de l’eŶĐƌe, avec deux boutons de nacre aux manches du veston. Non que l’ĠlĠgaŶĐe soit vƌaiŵeŶt de ŵisemais celle-ci demeure au triste service de la tradition.D’ailleuƌs, chacun avait revêtu son habit de circonstance et ďieŶtôt l’hoƌizoŶ seƌait aussi glaĐial Ƌue les vagues Ƌui s’ĠlaŶĐeŶt au Đœuƌ de l’oĐĠaŶ.Il régnait ici une foule de visages éteints. Autrefois jardins fertiles, tous semblaient dorénavant concourir pour la plus funeste des imitations. Dans cette atmosphère pesante, parcourue de soubresauts, je restais là, tranquille, un peu perdu en compagnie des miens. C’est aloƌsque sonna la cloche du village voisin. EtĐe fut l’instant choisi par mon père pour se pencher vers moi. Il posa sa main sur mon épaule, puisla seƌƌa pĠŶiďleŵeŶt. C’Ġtait un geste dur, pƌesƋu’effacé, que trahissait néanmoins son regard dévasté. Il avait les LJeudž ďƌillaŶts d’uŶ dĠŵeŶt Ƌue l’oŶaurait réussi à immobiliser et qui, effondré, s’aďaŶdoŶŶe à soŶ soƌt.

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Publié le 21 mars 2015
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Langue Français

Extrait

Au bon vouloir des chrysanthèmes
C’Ġtait uŶe jouƌŶĠe d’autoŵŶe seŵďlaďle à toutes Đelles Ƌui haďilleŶt d’oƌdiŶaiƌe l’iŵagiŶaiƌe Đollectif. Un ciel morne au milieu duqueld’iŶŶoŵďƌaďles feuilles Đouleuƌambre et miel tourbillonnent, pauvres âmes esseulées, avant de venir mourir sur le sol. Nous étions réunis dans un champ baigné par les nuances du ĐƌĠpusĐule et j’avaissorti le plus élégantde ŵes Đostuŵes pouƌ l’oĐĐasioŶ.Trois pièces noires comme de l’eŶĐƌe, avec deux boutons de nacre aux manches du veston. Non que l’ĠlĠgaŶĐe soit vƌaiŵeŶt de ŵisemais celle-ci demeure au triste service de la tradition.D’ailleuƌs, chacun avait revêtu son habit de circonstance et ďieŶtôt l’hoƌizoŶ seƌait aussi glaĐial Ƌue les vagues Ƌui s’ĠlaŶĐeŶt au Đœuƌ de l’oĐĠaŶ.Il régnait ici une foule de visages éteints.Autrefois jardins fertiles, tous semblaient dorénavant concourir pour la plus funeste des imitations. Dans cette atmosphère pesante, parcourue de soubresauts, je restais là, tranquille, un peu perdu en compagnie des miens.
C’est aloƌsque sonna la cloche du village voisin. EtĐe fut l’instant choisi par mon père pour se pencher vers moi. Il posa sa main sur mon épaule, puisla seƌƌa pĠŶiďleŵeŶt. C’Ġtait un geste dur, pƌesƋu’effacé, que trahissait néanmoins son regard dévasté. Il avait les LJeudž ďƌillaŶts d’uŶ dĠŵeŶt Ƌue l’oŶaurait réussi à immobiliser et qui, effondré, s’aďaŶdoŶŶe à soŶ soƌt. Je vis aloƌs uŶ ŵoŶde eŶtieƌ s’iŶsĐƌiƌe suƌ ses lğvƌes, avaŶt Ƌu’il Ŷe s’ĠvaŶouisse à jaŵais.Par le passé, cet homme avait connu plus de flancs rocailleux que de sommets, pourtant cest à cet instant que la gravité avait décidé de reprendre ses droits. Et ce serait la première et la dernière fois que je le verrais ainsi bouleversé. Si cela était encore possible, on venait de détruire une partie de mon être. Cependant, je restais impassible, flottant loin de tout, comme anesthésié par le couchant du soleil.
Un son métallique tinta à nouveau. Il résonna dans ma tête en un écho lancinant, avant de devenir frisson, courir le long de mon dos et percuter mes tempes. Ma mère venaitde s’effoŶdƌeƌ suƌ ŵoŶ Ġpaule, murmurant des mots que ses sanglots haletants et les cris glacials du mistral rendaient inaudibles. Elle ne pouvait se résoudre à me voir ainsi : statue de marbre, pourtant si fragile. «MaŵaŶ est là, elle l’a toujouƌs été. Tu es si pâle mon chéri. ». Ces phrases eurent le même effet que la mélodie portée par le vent et finirentd’aŶĠaŶtiƌce que de moi il restait. Recroquevillée dans une immense laine noire, elle avait les traits meurtris d’uŶ oisilloŶdécouvrant le vide. Celui-ci même quiƌedoute l’aveŶiƌ,comme on rêve le cauchemar. Elle recula en vacillant, tandis que je la regardais partir, et mon pèreŶ’eut Ƌue le teŵps de la ƌattƌapeƌau vol.Je ne sais plus à quand remontait la dernière fois que je les avais vus se parler. Ce que jadisl’Aŵouƌ moderne leur avait pris, la mort,aujouƌd’hui, le leur rendait. Finalement, il avait fallu des funérailles pour que de ma famille refleurisse son ineffable beauté.
*****
La nuit était tombée sans crier gare, sans un bruit, ni même sansƋue peƌsoŶŶe Ŷe seŵďle l’avoiƌ remarquée. Docile, elle s’Ġtait invitée dans notre intimité. Partout alors on avait allumé des bougies qui doŶŶaieŶt l’iŵpƌessioŶ de se ƌeflĠteƌ daŶs le ciel. Leurs flammes dansaient libres, pareilles à la chevelure des femmes, et elles offraient à cette fresque monumentale des lueurs océanes. Il fallait concéder au créateur que le décor de son spectacle relevait du grandiose. Et bien que les rôles ne fussent très variés, ils se trouvèrent magistralement interprétés. Ce jour-là, l’eŵpathie Ƌue l’oŶ ŵe ĐoŶŶaissait créa par son absence un profond malaise. Souvent les ƌegaƌds se ďƌaƋuğƌeŶt suƌ ŵoi, aveĐ l’espoiƌ teƌƌiďle d’uŶe réaction de ma part. Néanmoins,Đ’est la ŵâĐhoiƌe seƌƌĠedes poings, les yeux cernés et le teint comme blafard, que jeŵ’aďsteŶaisde leur répondre.Iŵŵoďile audž pƌeŵiğƌes loges, j’Ġtais iŶĐapaďle d’effectuer le moindre geste. Je saisis toutefois la chandelleƋue l’on me glissa dans la main, puis accueillis silencieusement la rose séchée qui vint finir de décorer ma veste. Afin de me soutenir dans cette étape singulière, des amis étaient venus du monde entier. Je les savais récoŶfoƌtaŶt ŵes paƌeŶts, ŵa sœuƌetpleurant à leur tour. Soudain, on fit taire le trémolo des violons,et l’uŶ d’eudž s’avaŶça le souffle court. Il balaya de ses yeux gonflésl’assemblée, rangée par rangée, puisant un peu de réconfort endes Đœuƌs étrangers. Il respira profondément et entama son discours.
« Charlie nous a quittés.»
Cette phrase, en suspension depuis de longues heures au-dessus de nos têtes,s’effoŶdƌa suďiteŵent sur le sol, transperçant les poumons à son passage. Bien que la nouvelleŶ’aitƌieŶ d’une illumination, les mines se crispèrent sous le poids de la réalité. Désemparé, lauteur tourna alors son visage vers le mien, en quête de soutien. Mais ce dernier demeura figé, engourdi par le froid.C’Ġtait ŵoŶ ŵeilleuƌ aŵi Ƌui se tenait là.
OŶ ƌefeƌŵa le ĐeƌĐueil et d’où je ŵe tƌouvais, j’auƌais pu eŶteŶdƌe le ďƌuitdes mains contre le boisD’ĠphĠŵğƌes Đaƌessesgravant le plus doux des témoignages: Đelui d’edžisteƌ eŶĐoƌe depuis l’au-delà. On referma le cercueil et de l’autƌe ĐôtĠ du ĐouveƌĐle…moi, je ne bougeais toujours pas. Je ne bougerai jamais plus. Une salveƌeteŶtit, des ŵouĐhoiƌs s’agitğƌeŶt, et une nuée de fleurss’éleva vers les cieux, pour mieux retomber sur mon lit en offrandes éphémères.La ĐĠƌĠŵoŶie s’acheva ainsiau milieu de hurlements perforant la nuit et de gémissements de douleur. Ensemble, ils recouvraientde poĠsie l’effƌoLJaďlecrépitement des dévorantes qui me rendraient bientôt à la Terre.Qu’advieŶdƌait-il après ? Surement un nom apposé sur une pierre, que la nuque des passants éroderait plus vite que le Temps. Ce Ŷ’est pas ce que je souhaite pourtant. Non,Đe Ŷ’est pasĐe Ƌue j’avais iŵagiŶĠ. Désormais, je nage vers la vie. Toutefois, jai beau crier, depuis les limbes,peƌsoŶŶe Ŷe ŵ’eŶteŶd. A cet instant, en proie à la folie, je voudrais arracher tous les chrysanthèmes de ce monde pour les jeter au feu ; décrocher la mort de mes épaules et danser une valse avec elle ; je voudrais refléter un sourire dans chaque larme de malheureux, pour que de cette union naisse un immense arc-en-ciel ; je voudraisŵ’aƌƌaĐheƌ à ŵoi-même et mettre un terme à ce jeu. Faire un pas en avant, guidé par le désir ardent de déclarer à mes proches que je les aime , et leur murmurer quej’auƌaifoyer, aussi longtemps que je vivrai en eux. un AvaŶt Ƌue ŵot Ŷ’ait ĠtĠ dit, ils s’eŶ sont allés, volutes de fumée par un matin blême. ***** J’ouvƌealors des yeux épuisés sans avoir le souvenir de les avoir fermés. Je fixe maintenant le plafond de ma chambre, entortilléà la ŵaŶiğƌe d’une chrysalide dans des draps mouillés de sueur. La bile palpite dans mes veines brulantes, tandis queŵoŶ Đœuƌ se jette douloureusement contre la paroi.Il veut s’eŶfuiƌ… déserter ce corps maudit avant que desoŵďƌeƌ daŶs les ŵĠaŶdƌes d’uŶesprit mortifère. Angoissé par l’existeŶĐe, toƌtuƌĠ à l’idĠedetoŵďeƌ daŶs l’ouďli, je viens de peindre une tragédie universelle et intemporelle : un conte de fin pour des enfants craignant de grandir. Mais qui Ŷ’a jaŵais iŵagiŶĠ Đeque deviendrait le monde sans elle ou sans lui ? Contemplant avec horreur que ce dernier continuerait sa course effrénée, tout ense ŵoƌdaŶt les lğvƌes pouƌ s’eŵpġĐheƌ d’appƌĠĐieƌ l’idĠede manquer à autrui. Que deviendront mes actes et mes souvenirs à moi, qui ne reconnait nil’? Si la gloireenfer ni le paradis étoffe le papier sur lequel l’histoiƌe s’inscrit, elle ne cristallise pas pour autantles plaisiƌs de Đeudž Ƌu’elle a couronnés de leur vivant.Aloƌs, Ŷ’eŶ dĠplaise audž ĠteƌŶels pƌessĠs et audžfidèles dePeteƌ PaŶ, je ŵ’eŶ remets au vent.C’est eŶ papilloŶrésolument éphémère, inconnu et libre que je respirerai dorénavant. Je déploieraid’iŵŵeŶses ailes, jusque de les brûler, pour revenirpoussiğƌe d’aƌgeŶt loiŶ de tout saŶĐtuaiƌe. En proie à une terrible migraine et cherchant de quoi me divertir, je ŵ’edžtiƌpefébrile de cette étouffante toile. Au dehors, tout est calme. La ďƌuŵe s’Ġtend sereine dans le village. A travers son manteau déchiré, j’apeƌçoisle halo luŵiŶeudž d’uŶe ďougie. NoŶ loiŶ d’iĐi, on enterre un vieil homme. Relique abandonnée, son vaisseau de chair apparait commel’uŶiƋue trace de son voyage. Depuis ma forteresse en pierre, je m’iŶteƌƌogeencore : Serait-iltƌiste ou ďieŶ ƌassuƌĠ de savoiƌ Ƌue peƌsoŶŶe Ŷ’est venu assister à ses funérailles ? Que peƌsoŶŶe Ŷ’est pƌĠseŶtpour le pleurer... EŶ lui laŶçaŶt uŶ ƌegaƌd d’adieu, je referme brusquement la fenêtre, comme on tourne une page. Mon front fiévreuxtƌouve à s’apaiseƌau contact du carreau, et sur ce dernier je laisse couler une larme.A l’ĠvideŶĐe, Ŷotƌe plus gƌaŶde ƌiĐhesse est Ŷotƌe piƌe fardeau. Défiant à nouveau laďuĠe ŶĠe d’uŶ souffle Đhaud,j’bout de mon doigt une véritéinscris du retrouvée ; j’ĠĐƌis à l’eŶĐƌe vide Đes ƋuelƋues ŵots:Nous Ŷe soŵŵes Ƌue l’auďe d’uŶe Ŷuit…Vivez !
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