La dengue, maladie réémergente
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URGENCES Chapitre462007 La dengue,co-fondateursmaladie réémergente1 1 1J. LAVERSANNE , G. DONUTIL , K. HAMICHE , 1 2 1P. GUEGUENIAT , F. DJOSSOU , J.M. FONTANELLA 1. IntroductionL‘Organisation Mondiale de la Santé (OMS) reconnaît que la dengue estdevenue, ces dernières années, un important sujet de préoccupation pour lasanté publique internationale ; d’une part par la progression spectaculaire desa prévalence ces deux dernières décennies se propageant désormais sousforme de flambées épidémiques explosives, sur un fond endémique dans plus de100 pays (1, 2) (figure 1), d’autre part, par la proportion des cas graves, sousformes sévères hémorragiques ou avec état de choc susceptibles d’entraîner undécès, les enfants en bas âge étant les plus concernés. La dengue serait devenueune des maladies à transmission vectorielle qui progresserait le plus rapidementdans le monde. Y contribuent : l’accroissement de la densité démographique denombreux pays tropicaux, l’inorganisation de l’assainissement des mégapolessans urbanisation cohérente, l’explosion des échanges internationaux despersonnes et des biens, les limites actuelles de la lutte antivectorielle (3, 4).L’Institut de Veille Sanitaire (INVS), les Cellules Inter Régionales d’Épidémiologie(CIRE) des DOM, la Direction de la Santé et du Développement Social (DSDS), etles Agences Régionales d’Hospitalisation (ARH) ainsi que le ministère de la Santésont de plus en plus ...

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URGENCES Chapitre46
2007
La dengue,
co-fondateurs
maladie réémergente
1 1 1J. LAVERSANNE , G. DONUTIL , K. HAMICHE ,
1 2 1P. GUEGUENIAT , F. DJOSSOU , J.M. FONTANELLA
1. Introduction
L‘Organisation Mondiale de la Santé (OMS) reconnaît que la dengue est
devenue, ces dernières années, un important sujet de préoccupation pour la
santé publique internationale ; d’une part par la progression spectaculaire de
sa prévalence ces deux dernières décennies se propageant désormais sous
forme de flambées épidémiques explosives, sur un fond endémique dans plus de
100 pays (1, 2) (figure 1), d’autre part, par la proportion des cas graves, sous
formes sévères hémorragiques ou avec état de choc susceptibles d’entraîner un
décès, les enfants en bas âge étant les plus concernés. La dengue serait devenue
une des maladies à transmission vectorielle qui progresserait le plus rapidement
dans le monde. Y contribuent : l’accroissement de la densité démographique de
nombreux pays tropicaux, l’inorganisation de l’assainissement des mégapoles
sans urbanisation cohérente, l’explosion des échanges internationaux des
personnes et des biens, les limites actuelles de la lutte antivectorielle (3, 4).
L’Institut de Veille Sanitaire (INVS), les Cellules Inter Régionales d’Épidémiologie
(CIRE) des DOM, la Direction de la Santé et du Développement Social (DSDS), et
les Agences Régionales d’Hospitalisation (ARH) ainsi que le ministère de la Santé
sont de plus en plus actifs tant pour la surveillance de cette maladie que pour
l’organisation d’aides ponctuelles. Les signes cliniques de type grippal sont le
plus souvent d’apparition brutale et intense. Les risques vitaux bien que
statistiquement faibles sont loin d’être nuls. L’évolution, incubation comprise,
peut dépasser 15 jours. C’est dire que dans notre monde d’intenses échanges
1. Service d’Accueil des Urgences (SAU) du centre hospitalier de Cayenne.
2. Unité des Maladies Infectieuses et Tropicales (UMIT) du centre hospitalier de Cayenne.
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Figure 1 – Répartition géographique de la dengue dans le monde (d’après Gubler DJ)
internationaux, n’importe quel médecin, et qui plus est, médecin « urgentiste »,
de n’importe quel pays, peut être confronté à cette pathologie.
Il est donc indispensable de savoir apprécier la menace en fonction de la géo-
graphie, savoir suspecter cliniquement cette maladie, en connaître les méthodes
diagnostiques et reconnaître les signes de gravité qui doivent faire envisager une
hospitalisation ou un suivi médical répété. Il est nécessaire de surveiller tout cas
suspect, plus particulièrement chez l’enfant, car certains cas gravissimes se
démasquent en moins de 12 heures, après une apparente amélioration clinique
inconstante. Le suivi de l’évolution est d’autant plus important qu’il n’existe
aucun vaccin, aucun traitement spécifique. Seule la précocité des traitements
symptomatiques des cas graves peut faire la différence.
Le seul moyen de lutte reste le contrôle des moustiques vecteurs dans les zones
concernées.
2. Épidémiologie et appréciation de la menace
(fonction de la géographie)
eÉvoquée rétrospectivement aux Antilles, dans des documents du XVII siècle,
décrite depuis 1779, 1780, en Asie, en Afrique et Amérique du Nord, cette
« grippe tropicale », provoquée par 4 types de virus (1-4), a vu son expansion
se mondialiser sur l’ensemble de la zone intertropicale avec une recrudescence
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de la gravité en Asie, dans le Pacifique et en Amérique du Sud y compris dans
la zone Caraïbe (figure 1).
– 2,5 milliards de personnes sont exposées au risque de dengue ;
– 60 à 100 millions de personnes seraient touchées chaque année, les cas
annuels rapportés auraient été multipliés par 60 sur 10 ans de 1984 à 1993 en
Amérique du Sud (5, 6) ;
– 500 000 cas de dengue hémorragique nécessitant une hospitalisation seraient
recensés chaque année dont une grande proportion d’enfants en bas âge ;
– 20 000 à 30 000 décès seraient annuellement imputables à la dengue.
Ce sont les recrudescences des épidémies avec des formes sévères hémorragi-
ques ou avec état de choc qui font considérer la dengue comme réémergente,
dès les années 50 à partir du Sud-Est asiatique, puis dès la fin des années 70 en
Amérique du Sud et en zone Caraïbe, une nouvelle expansion s’étant manifestée
depuis le début des années 90 (7).
On connaît actuellement 4 sérotypes de la dengue : DEN 1 Souche Hawaï, DEN
2 Souche Nouvelle-Guinée, DEN 3 Souche H87, DEN 4 Souche H241 (8).
Isolés en 1940 et en 1946 en Guyane, ces virus se caractérisent par une taille
de 17 à 25 nm et un génome à ARN, avec nucléocapside hélicoïdale. Vincent
Deubel de l’Institut Pasteur réalisait dès 1988 le premier séquençage du génome
du virus de la dengue 2, responsable de fièvre hémorragique, ayant émergé dans
les Caraïbes au début des années 80. Avec Deprés et son équipe, ils séquen-
çaient d’autres virus en collaboration avec le Brésil et le Vietnam, leur objectif
étant de comparer les séquences des souches entraînant des formes modérées
de dengue aux souches entraînant des formes hémorragiques, afin de définir
d’éventuels critères de virulence. L’absence d’immunité croisée entre les séroty-
pes permet des infections successives chez un même individu. C’est une maladie
essentiellement interhumaine, même si des cycles forestiers ont été observés
entre des singes en Malaisie. La plupart des autochtones sont immunisés sauf
lorsqu’une nouvelle souche réémerge après un long délai. Les cas cliniques se
présentent donc plutôt chez les enfants et immigrants de fraîche date. Le taux
d’attaque, lors des phases épidémiques, est fréquemment de l’ordre de 40 à
50 % mais peut atteindre 90 % (2). Les infections successives à sérotypes diffé-
rents exposent le patient à un risque accru de développement d’une forme
sévère, dengue hémorragique (DHF) ou dengue avec état de choc (DSS). Les
4 sérotypes du virus de la dengue sont des arbovirus (virus transmis par un
arthropode) ; le vecteur est un moustique quasi exclusif : aedes aegypti (même
si d’autres moustiques ont également été décrits comme vecteurs : aedes albo-
pictus à la Réunion, aedes polynesiensis en Polynésie). Aedes aegypti est plutôt
actif le jour (mais non exclusivement), d’ou le rôle moindre des moustiquaires. Il
transmet le virus à sa descendance, est endophile (vit dans les habitations), a une
durée de vie de 2 à 3 semaines, présente une dispersion faible (moins de 100 m),
mais a une diffusion passive importante (véhicule terrestre, container, avion). Sa
population est très liée au climat : la température favorable se situe entre les
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isothermes 10 ˚C Nord et Sud et est fonction du régime de pluie : les pluies très
abondantes ne lui permettent pas de se développer par lessivage, par contre en
saison des pluies plus modérées, les réserves d’eau non protégées et les réci-
pients négligemment abandonnés permettent sa multiplication. Ceci explique la
grande étendue de l’aire de transmission vectorielle de la dengue (9).
En effet, la dengue se manifeste dans toute la zone intertropicale : Sud-Est
asiatique, Pacifique, Amérique latine, Caraïbes, Afrique intertropicale. Des cas
isolés ou des épidémies sporadiques estivales ont pu se manifester en dehors de
cette zone (par exemple par importation d’aedes aegypti en Grèce en 1928) ce
qui doit nous faire réfléchir avec l’amorce de réchauffement climatique actuel.
Dans les DOM-TOM, de nombreuses épidémies ont été constatées ces dernières
années, les plus importantes ont été : en Martinique, en 2001 : 25 259 cas
estimés et en 2005 : 13 412 cas estimés avec 4 décès chacune ; en Guadeloupe,
en 2005 avec 7 751 cas estimés ; en Guyane française, en 2006 avec 16 400
cas estimés et 4 décès déclarés (10) ; à la Réunion, après plus de 25 ans
d’absence une épidémie de

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