Histoire du Canada depuis sa découverte jusqu'à nos jours

F.-X. (François-Xavier) Garneau

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YORK UNIVERSITY LIBRARIES
3 9007 0438 4498 4HISTOIRE
DIT
DEPUIS DECOUVERTE JUSQU'A JOURS,SA NOS
fA'K
F. X. GAUNEAU.
TROISIÈME EDITION REVUE ET CORRIGEE.
TOME SECOND.
QUÉBEC :
IMPRIMÉ PAR P. LAMOUREUX, RUE LA MONTAGNE,
1869.——
HISTOIRE
CANADA.
SIXIEME.LIVRE
CHAPITRE I.
DE LA LOUISIANE.ÉTABLISSEMENT
1683-1712.
disposition deLaplusieurs vaisseaux à la—Louis XIV metla Louisiane.De
Départ de ce voyageur sesfonder un établissement.— ;allerSale pour y
L'on passeM. de Beaujeu.—commandant de l'escadre,avec ledifficultés
l'on parvientjus-les apercevoir, etbouches du Mississipi sansdevant les
dans le pays que l'on(baie de Saint-Bernard,)baie de Matagordaqu'à la
bâtitledébarque sa colonie, etle Texas.—La Sale yaujourd'hui ynomme
avec M. dedésastreuses de ses démêlésConséquencesfort Saint-Louis.—
entreprend plusieurs voy-Europe.—La Saleretourne enBeaujeu, qui s'en
Grand nombre de ses compa-le Mississipi.—inutiles pour trouverages
pourpartie de ceux qui lui restent,part avec unegnons périssent.—n
—Il est assassiné.des secours en France.de faire demanderriUinois, afin
profonde que ces scèneameurtriers horreurdémêlés entre ses ;Sanglants
de ses compagnons parviennent à—Joutel et sixcausent aux sauvages.
les indigènes etTexas sont surpris parcolons laissés aul'Illinois.—Les
et paix de Eiswick.Guerre de 1689ou emmenés en captivité.—tués
en et porteune premièrel'entreprise deLa Sale 1698,D'Iberville reprend
établissement del'année suivanteà la Louisiane ;colonie canadienne
Mississipi.—Les hugue-Anglais dans le(1699.)—Apparition desBiloxi
Sauvole lieutenant gouver-et sont refusés.—demandent à s'y établirnots
la Louisiane touchant ledu fondateur deneur.—Sages recommandations
dont on sed'argent illusionscontrée. Mines d'or et ;commerce de cette
baiecolons de Biloxi dans la desujet-Transplantation desbftrce à ceHISTOIRE DU CANADA.6
MobileBienville remplace M. de Sauvole.—LaMobile (1701.)—M, dela
exploits de cetMort de M. d'Iberville caractère etfait des progrès.— ;
commissaire ordonnateurhomme da guerre.— M. Diron d'Artaguette
languit.—La Louisiane est cédée à M. Crozat en(1708.)—La colonie
1712, pour 16 ans.
pays situédonnait autrefois le nom de Louisiane à tout leOn
Mexique, et qui s'étend depuis la baie de la Mo-sur le golfe du
sources rivières qui tombent dans lebile, à l'est, jusqu'aux des
Mississipi, à l'ouest, c'est-à-dire jusqu'au Nouveau-Mexique et
royaume deLéon. Aujourd'hui cevaste territoire estàl'ancien
: Texas, l'occident, depuis ledivisé en plusieurs États le à Rio-
del-Norte jusqu'à la Sabine la Louisiane proprement dite, au;
depuis cette dernière rivière jusqu'à la rivière auxcentre,
Perles et le Mississipi, à l'est, depuis la rivière aux Perles jus-
;
quelque distance de la baie de la Mobile l'intervalle quiqu'à ;
partie de l'Alabama. Au nord dereste jusqu'à cette baie fait
États, il a encore ceux de l'Arkansas, du Missouri, deces y
l'époque nous sommes arrivés dans cetterillinois, etc. A où
histoire, toutes ces contrées étaient inconnues. Ferdinand de
voyageur espagnol, ancien compagnon de Pizarre, n'avaitSoto,
fait que les traverser, dans les années 1539 et 1540, en courant
après un nouveau Pérou. Pai'ti de la baie du Saint-Esprit
plus îiommes de troupes, il s'étaitdans la Floride, avec de 1,000
là, tournantavancé au nord jusqu'aux Apalaches; de se vers
il avait suivi quelque temps le pied de ces montagnesl'ouest,
était venu traverser lapour se rabattre vers le sud, où il rivière
ilTombeckbé près de sa jonction à celle d'Alabama s'était di-
;
ensuite vers le nord-ouest, et était allé passer le Mississipirigé
Arkansas se tournantau-dessus de la rivière des ; encore au
sud, il avait franchi la rivière Rouge, qui avait été le terme de
course, et sur le bord de laquelle il était mort, ensa 1542, sans
qu'ilavoir trouvé ce cherchait. Moscosa, son lieutenant, l'ayant
remplacé, avait marché vers l'occident dans l'intention d'attein-
le Mexique mais, arrêté par les montagnes, il étaitdre ; revenu
sur ses pas, et était descendu vers la mer pour se rembarquer,
n'ayant plus que 350 hommes avec lui.* De cette expédition,
* Carte de la Louisiane, etc., 1782, par G. Delisle, de l'Académie fran-
çaise; elle se trouve dans "l'Itinéraire de la Louisiane," petit livre sans au-
cun mérite. Garcilasso de la Vega: Histoire de la con^uèCe de la Floride
par Ferdinand de Soto, traduction de P. RicbeletHISTOIRE DU CANADA. 7
de même que des rares voyages entrepris plus tard par les Es-
pagnols sur les côtes septentrionales du golfe, il n'était resté que
de vagues souvenirs.
Nous avons vu l'accueil gracieux que La Sale avait reçu de
Louis XIV, en 1683, à son retour de la découverte de l'embou-
cliure du Mississipi, La Sale proposa aumonarque de réunir au
Canada la vallée qu'arrose ce grand fleuve, et d'assurer ainsi à
le domainela France des pays intérieurs situés entre la mer du
Nord et le golfe du Mexique. Ce vaste projet fut bien accueilli
roi, qui aimait tout ce qui avait de ladu grandeur, et La Sale
lui-même fut chargé de le mettre à exécution en colonisant la
Louisiane,
Quatre vaisseaux furent mis sous ses ordres. C'étaient le
Joli, de 40 canons, capitaine Beaujeu la Belle,; de G canons,
en présent par le roi l'Aimable,donnée ; de trois cents tonneaux,
appartenant à un armateur de La Eoehelle, et un autre petit na-
levire, nommé Saint-François, qui était frété pour Saint-
Domingue. La Sale s'embarqua avec quatre à cinq cents per-
compris les équipages. Parmisonnes, y elles se trouvaient des
Canadiens, des gentilshommes et huit missionnaires. Cette
escadre, commandée par M. de Beaujeu,petite homme vaniteux
et jaloux, fit voile de La Eoehelle le 24 juillet 1684. A peine
fut-elle enmer que la mésintelligence se mit entre les deux chefs.Bientôt cette dégénéra en une haine profonde,
qui eut les conséquences les plus désastreuses. La première
la perte de l'un des navires, qui fut enlevé par lesfut Espagnols
Saint-Domingue,sous l'île de Ensuite, trompés par la direction
des courants du golfe du Mexique, et par des observations faites
instruments astronomiques inexacts,avec des les Français se
crurent à l'est, tandis qu'ils étaient à l'ouest de la principale
bouche du Mississipi, Les terres, dépourvues d'arbres et plus
basses même que ce fleuve, qui n'est retenu dans son lit que
par des atterrissements et des digues naturelles, ne présentaient,
la mer, aucun signeau bord de qui pût guider les vaisseaux. Les
Français passèrent devant le fleuve sans le reconnaître. Quel-
jours après, La Sale,ques sur les indications des sauvages de la
côte, soupçonna quelqu'erreur, et voulut que l'on virât de bord
;
Beaujeu, plusmais de en plus offensé d'être commandé par unCANADA.HISTOIRE DU8
que la cour avait mis au-n'était pas militaire, etquihomme
l'écouter.représentations,* refusa delui malgré sesdessus de
l'aventure vers l'ouest. Le 14à voguer àcontinuaOn
Saint-Bernard, aujour-face de la baie deon arriva enfévrier,
Texas, à 120 lieues au delà duMatagorda, dans led'hui baie de
découvert aucuneLa Sale, n'ayantque l'on cherchait.fleuve
résolution presque désespérée de dé-Mississipi, prit latrace du
donna l'ordre au com-en cet endroit, et ilbarquer son monde
officier, fai-dans la baie. Cetde l'Aimable d'entrermandant
les rescifs,f où le navire etd'obéir, se jeta sursant semblant
malheur étaitcargaison furent perdus. Cepartie de laune
portait les munitions deplus grand que ce bâtimentd'autant
presque tous les outils.guerre et
punir le coupable, le reçut sur son bord pourBeaujeu, loin de
La Sale il refusa à celui-ci, soussoustraire à la vengeance de ;le
prétextes frivoles, divers objets pour remplacer ceux quides
et mit à la voile le 14 mars, abandonnant àavaient été perdus,
cent quatre-vingts, sursort les colons, au nombre d'environleur
oii le hasard les avait conduits.la plage inconnue
cultiver la terre, et à se construirecolons commencèrent àCes
mettre à l'abri des attaques des sauvages.un fort pour se
en fît commencer unce fort fut assez avancé, La SaleLorsque
à deux lieues plus haut, sur la rivière aux Vaches, danssecond,
avantageux. Placé sur une éminence, ce fort,un endroit plus
avaitil donna le nom de Saint-Louis, une vue supe