Rapport d'information fait au nom de la Commission des affaires économiques et du plan et de la Délégation du Sénat pour l'Union européenne par le groupe de travail chargé de suivre le déroulement des négociations commerciales multilatérales au sein de l'OMC sur la conférence interministérielle de l'OMC qui s'est tenue du 10 au 14 septembre 2003 à Cancun
Ce rapport fait l'historique des cinq conférences interministérielles de l'OMC (Singapour, Seattle, Doha, Cancun). Il rappelle l'avancement des négociations avant Cancun et estime que la conférence de Cancun est un échec relatif et qu'il faut surmonter la crise de jeunesse de l'OMC, en améliorant son fonctionnement, en développant les initiatives en faveur des pays en voie de développement et en renforçant l'intégration nord sud. En conclusion, le rapport préconise de conserver la primauté du multilatéralisme afin que l'OMC reste l'enceinte privilégiée pour affirmer les valeurs européennes (environnement, droit à une agriculture de qualité, mise en place de conditions stables pour le commerce international) et mener une politique ambitieuse à l'égard des pays les plus pauvres.
Paternité, pas d'utilisation commerciale, partage des conditions initiales à l'identique
Langue
Français
Extrait
N° 2
S É N A T
SESSION ORDINAIRE DE 2003-2004
Annexe au procès-verbal de la séance du 1e roctobre 2003
RAPPORT DINFORMATION
FAIT au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) et de la délégation du Sénat pour lUnion européenne (2) par le groupe de travail chargé de suivre le déroulement desnégociations commerciales multilatérales au sein de lOMC sur la conférence ministérielle de lOMC qui sest tenue du 10 au 14 septembre 2003 à Cancun, Par MM. Jean BIZET, Michel BÉCOT et Daniel SOULAGE,
Sénateurs,
(1) Cette commission est composée de :M. Gérard Larcher,président; MM. Jean-Paul Emorine, Marcel Deneux, Gérard César, Pierre Hérisson, Bernard Piras, Mme Odette Terrade,vice-présidents; MM. Bernard Joly, Jean-Paul Émin, Jean-Marc Pastor,secrétaires; MM. Jean-Paul Alduy, Pierre André, Philippe Arnaud, Gérard Bailly, Bernard Barraux, Mme Marie-France Beaufils, MM. Michel Bécot, Jean-Pierre Bel, Jacques Bellanger, Jean Besson, Claude Biwer, Jean Bizet, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Dominique Braye, Marcel-Pierre Cleach, Yves Coquelle, Gérard Cornu, Roland Courtaud, Philippe Darniche, Gérard Delfau, Rodolphe Désiré, Yves Détraigne, Mme Evelyne Didier, MM. Michel Doublet, Bernard Dussaut, André Ferrand, Hilaire Flandre, François Fortassin, Alain Fouché, Christian Gaudin, Mme Gisèle Gautier, MM. Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Charles Guené, Mme Odette Herviaux, MM. Alain Journet, Joseph Kergueris, Gérard Le Cam, Jean-François Le Grand, André Lejeune, Philippe Leroy, Jean-Yves Mano, Max Marest, Jean Louis Masson, René Monory, Paul Natali, Jean Pépin, Daniel Percheron, Ladislas Poniatowski, Daniel Raoul, Paul Raoult, Daniel Reiner, Charles Revet, Henri Revol, Roger Rinchet, Claude Saunier, Bruno Sido, Daniel Soulage, Michel Teston, Yannick Texier, Pierre-Yvon Trémel, André Trillard, Jean-Pierre Vial. (2) Cette délégation est composée de: M. Hubert Haenel,président; M. Denis Badré, Mme Danielle Bidard-Reydet, MM. Jean-Léonce Dupont, Claude Estier, Jean François-Poncet, Lucien Lanier,vice-présidents; M. Hubert Durand-Chastel,secrétaire; MM. Bernard Angels, Robert Badinter, Jacques Bellanger, Jean Bizet, Jacques Blanc, Maurice Blin, Gérard César, Gilbert Chabroux, Robert Del Picchia, Mme Michelle Demessine, MM. Marcel Deneux, Jean-Paul Émin, Pierre Fauchon, André Ferrand, Philippe François, Bernard Frimat, Yann Gaillard, Emmanuel Hamel, Serge Lagauche, Louis Le Pensec, Aymeri de Montesquiou, Joseph Ostermann, Jacques Oudin, Simon Sutour, Jean-Marie Vanlerenberghe, Paul Vergès, Xavier de Villepin, Serge Vinçon. Commerce extérieur.
INTRODUCTION
Depuis la création de lOMC, cinq conférences ministérielles ont été réunies. La pérennité de lorganisation étant confiée à son Conseil général, à son Secrétariat1 et à lOrgane de règlement des différents, ainsi quà divers autres conseils et comités spécialisés,cest aux conférences ministérielles successives, réunissant lensemble des Etats membres2 les deux ans, tous que revient le soin de déterminer des programmes dactivité.La négociation se poursuit ensuite de façon continue au sein de différents groupes de négociation organisés par thèmes.
zLa conférence qui sest déroulée àSingapour 9 au du 13 décembre 1996, a décidé dengager les travaux de lOMC sur la voie de nouveaux sujets concernant léchange économique international, désormais appelés« sujets de Singapour »: investissements, concurrence, transparence des marchés publics et facilitation des échanges. Elle a également vu se cristalliser une nette opposition entre les pays les plus industrialisés et ceux en voie de développement au sujet de linstauration de normes sociales minimales.
zEn 1999, laconférence deSeattle avait pour objectif ambitieux douvrir un nouveau « round» de négociations baptisé « cycle du millénaire ». Il sagissait tout dabord dentamer de nouvelles négociations sur lagriculture et les services, thèmes dont larticle 20 de lagenda intégré à laccord de Marrakech prévoyait quils devraient être abordés au plus tard en janvier 2000.
Par ailleurs, de nombreux pays ont proposé délargir le champ des négociations à de nouveaux secteurs : outre ceux évoqués lors de la conférence de Singapour, étaient visés notamment la loyauté des échanges internationaux, le commerce électronique ou encore lenvironnement. 1 Placé sous lautorité du directeur général de lorganisation, lancien ministre du commerce thaïlandais Supachai Panitchpakdi ayant remplacé à ce poste lancien premier ministre néo-zélandais Mike Moore en septembre 2002. 2146 aujourdhui, une trentaine de pays et sept organisations internationales (dont six appartiennent au système des Nations-Unies) ayant par ailleurs le statut officiel dobservateurs.
Favorable à un tel cycleglobal négociations depuis plusieurs de années, lUnion européenne entendait fixer comme objectifs à ce nouveau cycle une meilleure prise en compte du développement durable, des spécificités des pays en développement ainsi que des préoccupations des citoyens.
Très ambitieuse en théorie, la conférence de Seattle sest conclue sur un échec que lon a pu expliquer de différentes façons. Si lUnion européenne a su rallier à son projet de « cycle large » des pays tels que le Japon, la Corée, la Norvège et les pays dEurope centrale et orientale, elle sest heurtée aux Etats-Unis et à certains pays émergents cherchant à restreindre au maximum les sujets abordés.
Par ailleurs, des pays en développement, rassemblés au sein du « Groupe des 77 », se sont opposés au lancement dun nouveau cycle tant que lévaluation des accords de Marrakech naurait pas été effectuée. Ils ont également manifesté leur mécontentement à légard de lexistence de certaines négociations informelles dont ils se sont sentis exclus. Mais cest surtout lirruption brutale et fort médiatisée de la société civile qui a le plus marqué le sommet de Seattle, perturbant de façon quasi ininterrompue son déroulement.
zDans un contexte international très perturbé, dun point de vue tant politique (attentats du 11 septembre 2001) quéconomique (effondrement des cours boursiers), laconférence de Doha sest déroulée au Qatar du 9 au 13 novembre 2001.
Les pays membres de lOMC sont parvenus à sentendre sur un programme ambitieux de négociations baptisé « Programme de Doha pour le développement », qui couvrait pas moins dune vingtaine de sujets. La conférence ministérielle de Cancùn une étape à mi-parcours entre le était lancement du cycle de Doha et sa conclusion, prévue fin 2004. Elle devait permettre deffectuer un bilan de dix-huit mois de négociations, et de tracer le cadre et les modalités des discussions à venir.
La commission des affaires économiques, déjà représentée à Doha par MM. Bizet, Bellanger et Saunier, létait à nouveau à Cancùn par trois de ses membres, auteurs du présent rapport.
Vos rapporteurs tendent pour leur part àrelativiser ce que beaucoup désignent à Cancùn comme un échec grave. La médiatisation extrême des conférences ministérielles laisse croire, bien à tort, que le sort des négociations multilatérales sy joue entièrement. Or il nen est rien, beaucoup daccords ayant dores et déjà été obtenus en dehors de ces grands rendez-vous.
En outre, deséléments extrêmement positifs de cette ressortent conférence. En premier lieu, les quinze membres de lUnion européenne ont formé une parfaite unité derrière le commissaire Pascal Lamy, porteur dun mandat très précis, fixé par le Conseil des ministres de lUnion européenne.
En deuxième lieu, un dialogue très fructueux sest engagé avec les parlementaires étrangers à loccasion de lasession de la Conférence parlementaire sur lOMCdu 9 au 12 septembre et, qui sest tenue à Cancùn a débouché sur ladoption dune déclaration commune. Les Parlements nationaux constituent, dans un contexte de contestation forte vis-à-vis de lOMC, un relais indispensable entre la société civile et les négociateurs gouvernementaux. Ils ont un rôle majeur à jouer, tant dexplication à légard des citoyens que dinfluence auprès des ministres.
En troisième lieu, le bilan des différentes consultations que vos rapporteurs ont menées auprès des représentants de la société civile est très positif. A lexception de quelques ONG, sur lattitude desquelles on peut sinterroger au regard des intérêts quelles entendent défendre, les associations et syndicats se sont montrés très constructifs dans la recherche dune amélioration du fonctionnement de lOMC.
Enfin, labsence daccord final nest pas le signe dune marginalisation inéluctable de lOMC pour cause déchec du multilatéralisme. Bien au contraire, leffervescence de Cancùn atteste de limplication croissante de tous les acteurs dans les négociations. Les pays en développement ont pris pleinement part aux discussions et se sont organisés pour se faire entendre. La courte durée des négociations -seulement un jour et demi sur le projet final- doit inciter à ne pas déclarer trop vite que la réussite du cycle de Doha est compromise. Il semble dailleurs quau final, la décision du président mexicain de la Conférence M. Luis Ernesto Derbez darrêter les négociations précocement en a surpris et déçu beaucoup.
Dès lors,pourquoi ne pas voir dans ces événements le signe dune évolution positive de lOMC? Hier encore dominée par les deux « Grands », lOMC intègre aujourdhui tous les Etats membres, à linstar de son organisme de règlement des différends auquel les pays en développement ont de plus en plus recours. Sans doute manque-t-il encore à ceux-ci une certaine expérience des négociations, une donnée qui, notamment grâce au Fonds dassistance de lOMC, est amenée à évoluer. Le sommet de Cancùn, plus que dun échec, témoignerait dans cette perspective plutôt dune « crise de jeunesse » de lOMC. Celle-ci appelle donc des réformes, afin de continuer à progresser dans la construction dun système commercial régulé et équitable.
I.DE DOHA À CANCÙN
A.DOHA : UN MANDAT AMBITIEUX
Le « Programme de Doha pour le développement » visait, aux termes de la déclaration finale,mettre les besoins et les intérêts des pays en à développement «au centre du programme de travail» de « afinremédier à la marginalisation des pays les moins avancés dans le commerce international et à améliorer leur participation effective au système commercial multilatéral».
Le système dit de négociation « » globale ou engagement d« unique », consistant à exclure tout arrangement sectoriel, a été retenu. La Conférence a ainsi pu aboutir à létablissement dun calendrier et dun programme de travail pour les trois années suivantes,en fixant un rendez-vous à mi-parcours à Cancùn en septembre 2003 pour faire le point sur lavancement des négociations.
Lagenda de Doha, global et ambitieux, varie en réalité selon les secteurs considérés.Vingt-et-un sujets ont été inscrits. Pour la majorité y dentre eux, les négociations devaient débuter lors de la conférence de Doha et aboutir au plus tard le 1er janvier 2005. Sont ainsi concernés lagriculture, les services, laccès au marché des produits industriels, lenvironnement et les règles commerciales (anti-dumping, anti-subventions, coordination entre les accords régionaux et les textes multilatéraux).
Pour dautres sujets, tels que ceux dits de Singapour, le début des négociations a été fixé à un stade ultérieur des travaux, après septembre 2003.
A linverse, léchéance des négociations a été avancée pour certains autres sujets : le mémorandum daccord pour le règlement des différents était censé aboutir en mai 2003 et le système multilatéral denregistrement des indications géographiques pour les vins et spiritueux en septembre 2003.
Enfin, concernant les problématiques sanitaires et sociales, il était prévu dune part dorganiser un régime spécifique daccès aux médicaments de base au profit des pays les moins avancés, dautre part de renvoyer à lOrganisation internationale du travail lépineuse question des normes sociales.
La » en oeuvre mise de la « question-c'est-à-dire les adaptations particulières à prévoir en faveur des pays en développement pour accompagner leur participation au système commercial multilatéral devait quant à elle faire l'objet de discussions tout au long de la période.
B.LAVANCEMENT DES NÉGOCIATIONS AVANT CANCÙN
1.Lagenda pour le développement
Parmi les nombreux sujets relatifs au développement3, certains ont dores et déjà abouti à des avancées concrètes pour les pays en développement.
En premier lieu,laccord sur laccès aux médicamentsconstitue une réussite indéniable du cycle. La déclaration de Doha avait confirmé le droit des pays touchés par des crises sanitaires à invoquer lurgence pour permettre la fabrication de médicaments sans lautorisation du détenteur des brevets. Mais cette disposition ne réglait pas le problème des pays ne pouvant produire eux-mêmes les médicaments.
Le texte fixait ainsi comme objectif dautoriser les pays en développement incapables de produire eux-mêmes leurs médicaments à faire fabriquer des génériques par un partenaire commercial sans rémunérer les brevets. Un compromis sur ce point avait été trouvé au mois de décembre 2002, mais se heurtait au refus des Etats-Unis. Ceux-ci sy sont finalement ralliés le 30 août 2003, en contrepartie de lassurance que les médicaments génériques destinés aux pays pauvres ne seraient pas réexportés vers les pays développés.
En deuxième lieu,la mise en place du Fonds global daffectation spéciale pour le Programme de Doha pour le développement venue est concrétiser lengagement des pays développés à fournir un soutien aux pays en développement pour favoriser leur intégration dans les négociations. Une conférence d'engagement a eu lieu le 11 mars 2002 avec pour objectif de réunir environ 10 millions d'euros d'assistance. En décembre 2002, ce fond d'affectation spéciale était abondé à hauteur de 16 millions d'euros pour 2003, le gouvernement français y ayant contribué pour 1 million d'euros, et lUnion européenne pour près de 10 millions.
En troisième lieu, sagissant dutraitement spécial et différencié(TSD), le mandat de Doha consistait à examiner les 140 dispositions sur le TSD pour les rendre plus opérationnelles. Les pays en développement, considérant quelles étaient inappliquées, voulaient les rendre obligatoires. Les pays de la « quad »4 un examen de lutilisation des mesures demandaient existantes etune réflexion sur les critères de différenciation entre les pays en développement selon leur degré de développement. Les partenaires ont
3 Traitement ; spécial et différencié ; mise en uvre ; assistance technique pays les moins avancés ; produits de base ; petites économies ; commerce, dette et finances ; et commerce et transfert de technologie. 4Les Etats-Unis, lUnion européenne, le Japon et le Canada.
finalement réussi à se mettre daccord sur un ensemble de 24 mesures, reprises dans le projet de déclaration présenté avant Cancùn5. Enfin, sur mise en uvre la, les négociations ont été plus difficiles. Cette question incluait notamment le problème de lextension de la protection des indications géographiques à des produits autres que les vins et spiritueux, demande de pays en développement soutenue par lUnion européenne6. Le projet du mois daoût ne prévoyait finalement que« la poursuite des négociations ».
2.Louverture des marchés
a)Laccès au marché de services
LAccord Général sur le Commerce des Service (AGCS) prévoit, dune part, des règles générales applicables à toutes les activités (les ouvertures commerciales doivent obéir à la clause de la nation la plus favorisée), et dautre part la mise en place dengagements de libéralisation sectoriels.
Chaque membre devait rédiger ses offres de libéralisation et les adapter au vu de ce que les autres lui proposaient. Le 30 juin 2002, les membres ont déposé leurs demandes de libéralisation et, le 30 mars 2003, leurs offres conditionnelles. LUnion européenne a procédé au dépôt de 109 demandes auprès de ses partenaires. Ces propositions, ambitieuses, excluent les secteurs de laudiovisuel, de la santé, de léducation. Puis elle a déposé son offre conditionnelle le 20 avril 2003.
Seules 25 offres de libéralisation avaient été remises avant la conférence de Cancùn. Au demeurant, celle-ci ne représentait pas véritablement une échéance de négociation sur ce sujet qui, de fait, na pas été au centre des débats.
5 Le président du conseil général de lOMC, lUruguayen Carlos Perez del Castillo, a présenté un projet de déclaration le 24 août 2003, qui a finalement été retiré de la table des négociations au début de la conférence. 6 Produits tels que bière, thés, riz, cafés, intéressant les pays dAfrique, dAsie et dEurope centrale.
b)Laccès au marché des produits non agricoles
Après un demi siècle de réduction de droits, le niveau des droits moyens pondérés cache souvent le maintien de nombreuxpics tarifaires(supérieurs à 15 %) ainsi quun phénomène« descalade tarifaire7». Trois objectifs ont été fixés à Doha : réduction ou élimination des droits de douane, prenant en compte les pics tarifaires et les phénomènes descalade tarifaire, déclaration obligatoire à lOMC des droits maximum appliqués par chaque pays pour tous les produits (« consolidation » des droits), et traitement spécial et différencié des pays en développement.
Léchéance du 31 mai 2003 pour létablissementdes modalités de négociationna pas été tenue. Finalement, le président du groupe de négociations, M. Girard, a proposé deux modalités : uneformule unique de réductiondes droits de douane (différenciant selon les efforts en fonction du niveau de départ des droits moyens), et desinitiatives sectorielles parallèles, allant au-delà de la formule.
LUnion européenne et les Etats-Unis étaient favorables à une réductionambitieuse droits de douane, associée à une participation des obligatoire aux initiatives sectorielles. Ils proposaient dexclure les pays les moins avancés8des obligations de réduction de droits et proposaient laccès en franchise de droits pour un certain pourcentage de leurs produits.
Les pays en développement étaient opposés à l'harmonisation de leurs droits de douane (abaisser beaucoup plus les droits les plus élevés pour réduire l'écart entre les droits élevés et les droits faibles). Un certain nombre dentre eux ont fait valoir quen application du traitement spécial et différencié prévu par le mandat de Doha,les engagements de réduction de droits ne devaient 9 pas obéir à une totale réciprocité . Dans ce contexte, une approche-cadre fixant les principes de la négociation devait être agrée à Cancùn.
7valeur ajoutée, qui pénalise les exportations de Taxation progressive des différents stades de produits transformés des pays en développement. 8Les pays les moins avancés, au nombre de 49, correspondent à une catégorie défini par lONU sur la base de trois critères : le PIB par habitant, la part des industries manufacturières dans le PIB et le taux dalphabétisation. 9 Réductions tarifaires moins importantes, application dun coefficient différent, participation facultative aux initiatives sectorielles de réduction pour les pays en développement.
c)Laccès au marché des produits agricoles
La conférence de Doha a replacé les négociations agricoles dans un cycle plus large, tout en précisant leur calendrier : lagriculture fait désormais partie de lengagement unique, devant aboutir au 1erjanvier 2005.
Sur le fond, le compromis final de Doha assignait trois objectifs principaux aux négociations : des améliorations substantielles de laccès aux marchés, des réductions de toutes les formes de subventions à lexportation en vue de leur retrait progressif, des réductions substantielles des soutiens internes ayant des effets de distorsion des échanges.
A ces « trois piliers » essentiels, la déclaration finale ajoutait comme objectif la prise en compte dun «traitement spécial et différencié pour les pays en développement» et de «considérations autres que dordre commercial» (indications géographiques, environnement, sécurité alimentaire, développement rural ...).
Très peu de temps après le sommet de Doha, les Etats-Unis ont adoptéune nouvelle loi agricole, le Farm bill,prévoyant une forte augmentation des dépenses agricoles. Cette réforme concentrait en outre ces moyens sur les aides couplées à la production10 (qui représentent aujourdhui 72 % des aides). Désormais, le soutien par agriculteur américain est ainsi trois fois supérieur au soutien européen11. De plus, le mécanisme du« marketing loan » constitue en fait unerestitution déguisée à lexportation: en garantissant aux agriculteurs le paiement dun prix minimum sils commercialisent leurs productions, les Etats-Unis subventionnent leurs exportations, puisque 40 % de la production américaine est exportée12.
10 de Marrakech divisait en effet les soutiens internes à lagriculture en trois « boîtes »Lac d cor faisant lobjet chacune dun régime spécifique : - la « boîte verte » regroupe des aides autorisées car découplées de la production et produisant donc des effets nuls ou quasi nuls sur les échanges ; - la « boîte bleue » regroupe des aides couplées à la production ou associées à une maîtrise de loffre et appelées à disparaître ; - la « boîte orange » regroupe les aides interdites car produisant un effet de distorsion sur les échanges ». 11Source : OCDE. 12 Les américains sont le troisième exportateur mondial, avec un surplus de 10 milliards de dollars en 2000, soit sept fois le déficit européen.
Le président du groupe de négociations agricoles, M. Stuart Harbinson, a présenté à la mi-février 2003 un premier projet tentant de rapprocher les parties. Reprenant en partie à son compte les positions défendues par les Etats-Unis et le groupe de Cairns13, il fixait des échéanciers de réduction pour chacun des trois piliers. Ce texte, qui aboutissait à un démantèlement de la politique agricole européenne sans apporter damélioration à la situation des pays les plus pauvres, a été rejeté.
Souhaitant aborder les négociations en position offensive, lUnion européenne a choisi deréformer sa politique agricole commune (PAC). Cette nouvelle PAC, finalement acceptée par les Etats membres de lUnion lors du Conseil de Luxembourg le 26 juin 2003, a modifié en profondeur la physionomie du système agricole communautaire afin notamment de le mettre à labri des critiques traditionnelles :
principalemesure, le découplage des aides consiste à supprimer, selon des modalités variables, tout ou partie des liens entre le versement de laide et le volume de la production. Accordées sous forme de paiements uniques par exploitation, les nouvelles aides seront subordonnées au respect de normes de santé humaine, animale et végétale ;
la révision des organisations de marché se traduit par une réduction des prix dintervention (lait et beurre) et des majorations (céréales) ;
la politique de développement rural se trouve renforcée au moyen du système dit de « modulation » des aides, consistant à les transférer pour partie du premier au second pilier ;
un mécanisme de discipline financière est prévu à partir de 2007 pour garantir le respect du cadre budgétaire assigné à une Union européenne élargie à 25 jusquen 2013.
Afin de relancer les négociations avant le sommet de Cancùn, lUnion européenne et les Etats-Unis se sont engagés, au terme dune réunion ministérielle de 25 pays membres de lOMC qui sest tenue les 29 et 30 juillet 2003 à Montréal, à présenter une position commune sur les principaux aspects du volet agricole.
Cest finalement le 13 août quun telprojet euro-américain, soutenu par le directeur général de lOMC, M. Supachai Panitchpakdi, a été présenté. Ce texte reposait sur des concessions réciproques : en échange dune réduction des aides européennes, lUnion européenne obtenait un encadrement de laide
13 Les membres du groupe de Cairns (Afrique du Sud, Argentine, Australie, Bolivie, Brésil, Canada Chili, Colombie, Costa Rica, Guatemala, Indonésie, Malaisie, Nouvelle-Zélande, Paraguay, Philippines, Thaïlande, Uruguay) ont en commun de bénéficier davantages comparatifs importants en matière agricole, et plaident pour une suppression totale des mécanismes de soutien aux agriculteurs.
alimentaire américaine14 età égalité de toutes les aides à un traitement lexportation, englobant notamment le crédit-export américain. La détermination des chiffres était repoussée à une date ultérieure.
Reprochant à lUnion européenne ses subventions à lexportation et aux Etats-Unis leurs soutiens internes, un groupe de pays emmené par le Brésil, le G20 (devenu ensuite le G23), a présenté le 20 aoûtune contre-proposition très explicitement des objectifs de suppression totale et affichant immédiate de ces deux types daides.
Le projet de déclaration du 24 août du président Del Castillo sinspirait fortement du document commun Union européenne - Etats-Unis. Il prévoyait notamment lélimination des subventions à lexportation pour les produits « dun intérêt particulier pour les pays en développement », et leur « réduction en vue de leur démantèlement » pour les autres produits, ainsi quun dispositif identique pour les crédits à lexportation et les subventions octroyées par les entreprises commerciales dEtat15.
3.Le renforcement des règles et disciplines multilatérales
a)La clarification des réglementations
Le renforcement des règles et disciplines multilatérales figurait à lagenda de Doha. En premier lieu, il sagissait de clarifier les réglementations permettant aux membres de se protéger contre des pratiques privées (dumping) ou publiques (subvention).
De plus en plus dEtats adoptent des législationsanti-dumping. Les Etats-Unis, qui utilisent beaucoup cette procédure, ont émis des propositions très timides, souhaitant simplement en améliorer la transparence. A linverse, les « Amis de lantidumping » (Brésil, Chili, Costa Rica, Chine, Japon ) ont présenté 31 propositions pour limiter lusage de cet instrument. LUnion européenne a soutenu une position intermédiaire, visant à réduire les coûts de ces procédures et à instaurer un mécanisme de règlement des différends accéléré pour limiter les ouvertures abusives denquête.
14la Dree, selon les années, entre le cinquième et le quart des exportations américainesDaprès de céréales seffectuent par le biais de laide alimentaire. 15 par certains membres du groupe de Cairns (Canada, Australie, Nouvelle-Zélande), Instituées ces entreprises publiques dotées dun monopole dexportation pratiquent des variations de prix entraînant des distorsions de concurrence.