La lecture à portée de main
Description
Informations
Publié par | bibebook |
Nombre de lectures | 29 |
EAN13 | 9782824711409 |
Langue | Français |
Extrait
RA YMON D ROUSSEL
LA D OU BLU RE
BI BEBO O KRA YMON D ROUSSEL
LA D OU BLU RE
1897
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-1140-9
BI BEBO OK
w w w .bib eb o ok.comLicence
Le te xte suivant est une œuv r e du domaine public é dité
sous la licence Cr e ativ es Commons BY -SA
Except where otherwise noted, this work is licensed under
h tt p : / / c r e a ti v e c o m m on s . or g / l i c e n s e s / b y - s a / 3 . 0 /
Lir e la licence
Cee œuv r e est publié e sous la licence CC-BY -SA, ce qui
signifie que v ous p ouv ez lég alement la copier , la r e
distribuer , l’ env o y er à v os amis. V ous êtes d’ailleur s
encourag é à le fair e .
V ous de v ez aribuer l’ o euv r e aux différ ents auteur s, y
compris à Bib eb o ok.A V IS
un r oman, il doit se commencer à la pr emièr e p ag e
et se finir à la der nièr e .C
L’ A U T EU R.
n
1La D oublur e
2CHAP I T RE I
est une grande salle
A u châte au du vieux comte . Une p ortièr e saleL Sert d’ entré e . Un vieillard, en b e aux habits de deuil
Et l’air grav e , est assis sur le b ord d’un fauteuil
A dossier haut. Il met sa main sur une table
A uprès de lui, disant :
A uprès de lui, :« C’ est là le véritable
Mo y en ; quoi qu’il en soit, je ferai jusqu’au b out
Mon de v oir ; v ous p ouv ez v ous r etir er . »
Mon de v oir ; v ous p ouv ez v ous r etir er . »D eb out,
A tr ois p as de la ramp e , en é cuy er , l’ép é e
Nue en main, de pr ofil, la p oitrine drap é e
D ans un grand mante au br un, une jamb e en dehor s,
Gasp ard est immobile . Il réplique :
Gasp ard est . Il :« Pour lor s,
3La doublur e Chapitr e I
Monseigneur , si tels sont v os v œux, il ne me r este
’à r emer e l’ép é e au four r e au. »
’à r e l’ép é e au four r e au. »D’un grand g este
Ex ag éré , le vant sa main g anté e en l’air ,
Il abaisse la lame en lançant un é clair ,
Puis cher che à la r entr er ; mais il r emue et tr emble ,
Ses mains ne p euv ent p as fair e toucher ensemble ,
La p ointe , av e c le haut du four r e au noir en cuir ,
i tour nent tous les deux en p araissant se fuir .
Gasp ard, très r oug e av e c sa fraise qui l’ eng once ,
Rag e et de vient ner v eux. Une fois il enfonce
La p ointe à faux, v oulant quand même aller tr op fort,
Et la pique à côté de l’ ouv ertur e , au b ord
En cuiv r e du four r e au. Le moment semble immense ;
D ans la salle , p artout aentiv e , on commence
A chuchoter et puis à rir e ; plusieur s fois
Gasp ard r epique au b ord. T out en haut une v oix
Crie :
Crie :« Il est donc b ouché ton four r e au ? »
Crie :« Il est donc b ton four r e au ? »Ça r e double ,
Et de vant ce gr os rir e augmentant qui le tr ouble ,
Gasp ard e x asp éré , sans for ces, se r etient
D e tout abandonner p our sortir . Il p ar vient
Juste , à tr ouv er enfin l’ orifice ; bien vite
Il enfonce le fer entier . Mais on pr ofite
D e la chose , au public, p our fair e de nouv e au
Du br uit. On applaudit ; les cris « bis » et « brav o »
Se mêlent aux coups sourds des cannes. L’avanie
Énor me qu’ on lui fait, et toute l’ir onie
’il sent dans ce succès, aer r ent Gasp ard. T ant
e le tumulte dur e , imp assible il aend,
Les bras cr oisés. L’ép é e à son flanc se balance ,
Mir oitant p ar endr oits.
Mir p ar endr oits.Enfin quand le silence
Après assez longtemps se rétablit p artout,
4La doublur e Chapitr e I
Le vieux comte , r esté calme , se met deb out ;
Et Gasp ard, dénouant ses bras av e c emphase ,
Commence , en r epr enant assurance , une phrase
Entortillé e et longue , affir mant que jamais
Per sonne ne saura le sombr e se cr et. Mais
A vant de ter miner sa tirade il s’ embr ouille ,
Et sur plusieur s ser ments successifs qu’il br e douille ,
Parlant de son honneur , de son nom, et du sort
i l’aend au pr o chain le v er du jour , il sort
Par la p ortièr e , av e c tout un nouv e au tap ag e
D’ir oniques rapp els.
D’ir rapp els. Grande , une femme en p ag e ,
D ans un costume tout en v elour s noir et bleu,
i sans êtr e ajusté , dessine encor e un p eu
Sa taille longue , est près d’ entr er ; la plume blanche
D e son chap e au frissonne . Un p oing sur une hanche ,
Elle maintient, chacun p ar sa laisse , deux grands
Lé v rier s ; der rièr e elle , un tas de figurants
Causent très bas ; l’un d’ eux trip ote sa cuirasse
i, p our lui, semble tr op étr oite et l’ embar rasse .
Gasp ard, sans s’ar rêter , tour ne ; là-bas au fond,
D eux escalier s de b ois très courts, tout usés, font
Les deux p endants ; il va vite à celui de dr oite ,
Et tr ouvant la lar g eur des mar ches tr op étr oite ,
Il les monte dès les pr emièr es deux p ar deux.
Les figurants font un cliquetis autour d’ eux ;
Un gr os r oug e étudie un grand g este de haine
Du bras dr oit ; à trav ers le dé cor , sur la scène ,
On entend le vieillard qui p arle , encor e seul,
Jurant « p ar le tomb e au de son illustr e aïeul
Le duc Louis, le grand batailleur , dont il p orte
Le nom très glorieux et fameux ».
Le nom très et fameux ».Une p orte
Est là sur un p alier , massiv e , tout en fer ;
Gasp ard, en ar rivant au b out du nombr e imp air
5La doublur e Chapitr e I
D es mar ches, va dessus et du bras il la p ousse ;
Puis p our p asser il la maintient av e c son p ouce ,
Et sort en la cognant du pie d sans le v ouloir .
Là , pr esque tout de suite , à g auche d’un couloir
A u fond duquel on v oit le cadran d’une horlog e ,
Il se tr ouv e de vant la p orte de la log e
Numér o vingt. Il entr e et r efer me très fort
A v e c rag e ; la clé , de l’autr e côté , sort
D e la ser r ur e , tomb e en résonnant, puis saute
A vant de se p oser tout à fait. Gasp ard ôte
Vite , en tirant les doigts ner v eusement, ses g ants
Gris, ter minés p ar deux grands p oignets élég ants ;
Puis av e c ses doigts nus, il enlè v e sa fraise
i le gêne . Et tombant alor s sur une chaise
Capitonné e , et d’ où sort un p eu de coton
Par une dé chir ur e , il saisit son menton,
Le coude sur la cuisse , et mur mur e à v oix basse ,
Le r eg ard ang oissé tout p erdu dans l’ esp ace ,
Dirig é fix ement en bas, v er s le milieu
D e la p orte : « Mon Dieu. . . mon Dieu. . . mon Dieu. . . mon Dieu. . .
L’ esprit, dans une crise aiguë , en pr oie au doute .
††
La log e est encombré e et p etite ; elle est toute
En longueur ; à main g auche en entrant, un côté
Long, est plein de p endoir s ; un p antalon cr oé
Pendant au pr emier , a, sauf une seule p ae ,
Ses br etelles en place ; on v oit une cravate ;
Une chemise au col trav er sé d’un b outon
D e nacr e , cache pr esque en entier un v eston.
En face , à l’autr e mur , une longue tablee ,
P leine de fards div er s et d’ objets de toilee ,
Est en désordr e ; auprès du couv er cle d’un p ot
D e p ommade , un flacon d’huile montr e un dépôt
Jaunâtr e , plus foncé que le r este . Une coup e
En gr os v er r e , a b e aucoup de p oudr e qu’une houpp e
6La doublur e Chapitr e I
Sur monte . D es cise aux aux tranchants é cartés
Sont couv erts de r eflets cassés et de clartés ;
Le dessus d’un des deux tranchants for me une lime
Étr oite , av e c son b ord ; un p eu de r ouille abîme
Une des p ointes dont l’acier n’ est plus ardent.
Un p eigne est moitié gr os, moitié fin ; une dent
Manque du côté fin. Sur le mur une glace
Assez grande , a dans un de ses coins une place
P lus clair e , qui p ara