Andy Warhol Interview - article ; n°1 ; vol.30, pg 164-178
16 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Andy Warhol Interview - article ; n°1 ; vol.30, pg 164-178

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
16 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Communications - Année 1979 - Volume 30 - Numéro 1 - Pages 164-178
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1979
Nombre de lectures 20
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Patrick Mauriès
Alain Breton
Andy Warhol Interview
In: Communications, 30, 1979. pp. 164-178.
Citer ce document / Cite this document :
Mauriès Patrick, Breton Alain. Andy Warhol Interview. In: Communications, 30, 1979. pp. 164-178.
doi : 10.3406/comm.1979.1452
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/comm_0588-8018_1979_num_30_1_1452Patrick Mauriès
Andy Warhol Interview :
l'esthétique de la conversation
(1)
Andrea. "Tape 1, You're side A: going A. to W.: have well, to work this from is the now beginning, on 1..."
... bruits, done : bruits de pas, froissement des robes, paroles abîmées.
Bruits sur lesquels, comme un relief sur une surface, va s'enlever la
conversation, l'échange audible des informations. Ce sont ces bruits
qui, trop aigus par instants, obligent à résumer ce qui s'est dit, à parler
en substance (à moins que ce ne soit la machine, la bande enregis
treuse, qui ait défailli, mène à la reconstitution) : la restitution fidèle,
sans retouches, est à ce point interrompue, et c'est un prétexte, un
argument, qui surgit: "(Ingmar Bergman), (fiction), (Minneapolis),
(quitted smoking), (...), (communism),*' etc. Quelque chose qui (un
compendium) n'est déjà plus de l'ordre de la parole, n'appartient pas
encore à celui de l'écriture, en a pourtant toute la puissance de résumé.
Bruit : mais c'est la conversation elle-même qui, portée à un niveau
d'intelligence supérieur, en est un; l'entretien ne peut être qu'un bloc
1. Le corpus de références de ce qui suit devait être initialement constitué
d'une année complète d' Interview, revue publiée à New York sous la caution
d'Andy Warhol, et à laquelle il collabore régulièrement (le premier numéro
est paru en 1970). Cette revue qui, comme son titre l'indique, est entièrement
composée d'entretiens avec les personnalités du jour, paraissait offrir un
objet d'étude particulièrement intéressant pour un volume dont le sujet,
pour le moins improbable, était la conversation.
Il s'est vite avéré cependant qu'un tel corpus excéderait de loin les limites
d'une réflexion de quelques pages; les citations dans le cours du texte ne sont
donc extraites que de deux entretiens (que l'on doit considérer comme des
"emblèmes" du reste en quelque sorte; cette façon de réduire le tout à la
partie, ou du moins de ne pas les opposer hiérarchiquement, étant d'ailleurs,
comme on va le voir, tout à fait conforme à l'essentiel de la démarche même
de Warhol). Le premier — extrait d'Interview, vol. vu, n° 6, juin 1977 —
s'intitule "Andrea de Portago, the farouche woman: shy but wild" (entretien
de Warhol avec une cover-girl chargée d'une campagne publicitaire pour
Nina Ricci, illustré de photos d'Ara Gallant); il sera cité en anglais. Le
second, cité en français, est tiré d'Art Press, n° 9, juillet 1977, p. 14-15;
il s'intitule "L'horreur des restes", et a pour motif l'exposition Hammer and
Sickle. Toute autre référence sera donnée dans le cours du texte. Warhol Interview 165 Andy
de notes orales, un début de sens effrangé, émargé, pas mal tremblant.
Un matériau ou un rebut, suivant ce que l'on en fera (dans un second
temps : où se ressaisir, donner une assiette au propos), échange de
paroles qui — parce qu'il est tout entier tourné vers un futur — ne
peut avoir d'avenir propre. Le futur de la parole, c'est le livre ("les
conversations sont un ouvrage que l'on construit, et il faut que chacun
concoure à cet ouvrage", Montesquieu); l'écriture est le contretype,
le tirage positif de ce qui n'aurait pu rester qu'un rien de parole — rien
profondément dispendieux puisque proféré en pure perte — et James
aurait réussi la plus économique des opérations en faisant, dit Blanchot,
de la nullité mondaine de quelques conversations d'après-midi le pivot
et lieu d'articulation (périphrastique, en l'occurrence, d'un secret)
de la plupart de ses grands ouvrages comme de certaines de ses nouv
elles.
Tout cela, les lois de l'échange en quelque sorte, AW, supposerons-
nous, les connaît très bien (et déjà, en une phrase, tout est dit ou peu
s'en faut). Que va-t-il en faire? Rien de bien reconnaissant, on s'en
doute; les lois pourtant ne sont pas absentes du travail en question;
elles peuvent même s'y ramener à l'unité du légal en général, du prin
cipe unique (jamais, par exemple, AW ne voudra jouer le pluriel — des
lois régionales, distribuées, dialectisables — contre l'essentiel massif,
l'une fois, de la loi per se). Mais la loi, c'est alors, de toute façon
(c'est-à-dire de toutes les façons possibles), celle, compacte, fétiche,
de la Répétition et du Compulsif — autrement dit : sinon le contraire,
du moins l'incarnation même du raté juridique (véritable, original,
symbolique). Il ne faut donc pas s'attendre à voir tel ou tel locuteur
(ou les deux) nier rageusement les règles de la bonne entente, du bien
dire, et de l'entretien en général ; il faut même prévoir tout le contraire :
penser que l'interdit sera respecté, et par suite débordé, par excès en
quelque sorte.
AW soutiendra donc lui aussi que la conversation, puis le livre,
sortent d'une lutte incessante, d'une pacification appropriatrice du
bruit (sous ses deux espèces : purement anarchique, et déjà médiatisée
par le jeu de la parole) et que, par conséquent, la compréhension ne
doit cesser de gagner en extension, le dicible en unité, en consistance.
Mais ce souci de cohérence, il ne se contentera pas de le formuler,
ou de le mettre en pratique (à vrai dire, il ne Yexprime même pas),
il le poussera aux extrêmes pour en faire un principe régulier : si bien
que, pour finir, ce ne sera plus le bruit qui, comme on le suppose généra
lement, contiendra l'information (lui sera constamment polémique :
murmure de la mort et de l'entropie contre la progression en rationnel)
mais le contraire : il y a plus de positif que d'incompréhensible, plus
de symbolisable que d'indicible. A la limite, le bruit n'est pas l'autre
du positif; on peut en restaurer le "contenu", et, du même coup, il
n'est jamais véritablement propre (d'une propriété d'altérité), et
toujours déjà maquillé, réadapté — mais il l'est à peine: tout juste
pour pouvoir être entendu (comme si le quantitatif pouvait basculer
sur le qualitatif; l'a peine servir de commutateur entre l'insensé et le 166 Patrick Mauriès
sémantique). Unique propos d'AW, règle singulière de toutes ses
activités : il s'agirait de reculer le seuil absolu de la lisibilité, de forclore
l'inaudible. Il ne faut pas lire autrement le mouvement de projection,
dans le champ de l'esthétique, d'une boîte de soupe, de lessive, d'une
image de presse — éléments qui, tel le gros orteil de la Reine, font
intrusion, dissonance, incongruité; et cette démarche est, sans nul
doute, héritée de Duchamp, mais Duchamp ri a pu que la faire avec
violence (car la violence est ici une faute, une perte de maîtrise et une
dépense inutile), au lieu de souverainement la systématiser. Ce qui
originalise AW, paradoxalement, c'est le système. Ranger sous la
même rubrique, au même titre, V utilisation cinématographique d'un
mauvais grain, d'une facture lâche, de l'image (rien n'est bon à jeter...)
ou encore d'un morceau de pornographie : et le sexe enrubanné du
gigolo de Trash n'est plus rien qu'un petit bout de chair, qu'un détail
anatomique sans importance, parce qu'il n'est pas {vraisemblablement,
faudrait-il dire) filmé avec une tendresse voyeuriste, mais avec indiffé
rence — comme tel ou tel autre bruit de l'intelligible, qui est désormais
consommable, asémique
"...ce que les gens ne mangent pas au restaurant doit être
revendu dans un autre restaurant.
— Pourquoi pas de reste?
— Il faut tout utiliser. Mais si quelque chose peut dis
paraître sans laisser de traces, c'est fascinant. Oest pour
ça que f adore les gangsters 1,"
traduisons donc que, menée à bout, tenue avec rigueur, la logique de ces
entretiens vient accomplir une histoire (celle qui, de Montesquieu à
James, et peut-être &#

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents