Il y a plus de 50 ans, dans « la technique ou l’enjeu du siècle »,  Jacques ELLUL soulignait que
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Intervention de M. Thierry Wickers, Président du Conseil National des Barreaux Il y a plus de 50 ans, dans « la technique ou l’enjeu du siècle », Jacques ELLUL soulignait que tout au long du cours de l’histoire, la technique avait été un élément de la civilisation, enserré dans une foule d’activités non techniques. Mais il constatait qu’aujourd’hui « la technique a englobé la civilisation toute entière ». Les changements techniques, lorsqu’ils sont rapides et profonds peuvent donc déboucher sur de véritables changements de civilisation. C’est probablement ce que nous sommes en train de vivre avec la « grande conversion numérique ». Malheureusement, la « fracture numérique » est d’abord une fracture générationnelle. Imaginer les incidences des changements en cours est donc particulièrement difficile pour ceux qui n’appartiennent pas à ces générations « numériques » qui émergent progressivement, et qui vont inventer les usages de ces nouvelles technologies. Mais déjà, certaines évolutions sont suffisamment visibles pour que l’on puisse se hasarder aux pronostics. Le risque est d’ailleurs limité, lorsque l’on s’exprime devant une assemblée, qui se situe, majoritairement, du même côté de la « fracture numérique ». Les nouvelles technologies vont d’abord modifier de façon profonde, le rapport au droit… L’adage « nul n’est censé ignorer la loi » est une des pierres angulaires de tout système juridique. Or c’est une évidence que de constater que ...

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Intervention de M. Thierry Wickers, Président du Conseil National des Barreaux
Il y a plus de 50 ans, dans «la technique ou l’ enjeu du sicle», Jacques ELLUL soulignait que tout au long du cours de l’ histoire, la technique avait t un lment de dansla civilisation, enserré une foule d’ activits non techniques. Mais il constatait qu’ aujourd’ hui la technique a englobé la civilisation toute entière ».
Les changements techniques, lorsqu’ ils sont rapides et profonds peuvent donc dboucher sur de véritables changements de civilisation.
C’ est probablement ce que nous sommes en train de vivre avec la grande conversion numérique ».
Malheureusement, la « fracture numérique Imaginer les d’ abord une fracture gnrationnelle. est incidences des changements en cours est donc particulièrement difficile pour ceux qui n’ appartiennent pas  ces gnrations  qui émergent progressivement, et qui vontnumériques » inventer les usages de ces nouvelles technologies.
Mais déjà, certaines évolutions sont suffisam on puisse se hasarder auxment visibles pour que l’ pronostics. Le risque est d’ ailleurs limit, lorsque l’ on s’ exprime devant une assemble, qui se situe, majoritairement, du même côté de la « fracture numérique ».
Les nouvelles technologies vont d’ abordmodifier de façon profonde, le rapportau droit…
L’ adage nul n’ est cens ignorer la loi» est une des pierres angulaires de tout système juridique.
Or c’ est une vidence que de constater que la production lgislative a depuis longtemps renvers la présomption : connaître la loi est devenu impossible.
Les systèmes de droit écrit sont noyés sous la prolifération des normes.
Quant aux systmes de common law, l’ exceptionnelle prosprit des juristes s’ y est construite en grande partie sur la difficult d’ accéder à la norme, ou à sa traduction.
« Nos lois écrites sont souvent difficiles à comprendre, mais chacun peut y lire ;lin y,neir a  ua contraire, de plus obscur pour le vulgaire, et de moins  sa porte quune lgislation fonde sur des précédents »
Or dans ce domaine, comme dans tous les autres, le premier réflexe est devenu la consultation de l’ internet.
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Dans les pays de common law, sont désormais proposés en ligne, parfois gratuitement les « legal documents la fourniture tait jusqu’  prsent u dontne source de ressources importante pour la profession juridique. Un site comme US LEGAL FORMS recense ainsi 36 000 modèles, constamment remis à jour.
Par ailleurs une rcente tude anglaise dmontre que plus de 50% des clients des cabinets d’ avocats sont poffrant des prestations en ligne qu’ un cabinet traditionnel.lus enclins  choisir un cabinet
En crant LEGIFRANCE et le service public d’ accs du droit par l’ internet, le dcret du 7 aot 2002 a donc répondu à un besoin considérable.
Depuis 2001 (époque de la véritable mise en ligne) le site est passé de 100 000 à 700 000 (2009) visites mensuelles.
En dépit de la grande médiocrité de son interface, LEGIFRANCE offre un accès à peu près exhaustif à l’ ensemble des textes lgislatifs ou rglementaires, commeaussi à la jurisprudence.
L’ existence de LEGIFRANCE a dj considrablement modifi la relation des individus avec le droit: la consultation de ce site est devenue le premier niveau de recherche, avant la consultation d’ un professionnel.
C’ est une exprience commune aujourd’ hui que de le constater, dans les cabinets d’ avocats.
D’ autres effets se manifestent dj. La vitesse avec laquelle se rpandent aujourd’ hui les dcisions a ainsi décuplé les « externalités positives » de tout précédent.
Conséquence inattendue, la stratégie des plaideurs évolue, notamment par peur du précédent défavorable et reproductible.
Pour envisager les changements  venir, il faut ici prendre en considration l’ volution souligne par Ray Kurzweil : la puissance de calcul des ordinateurs continue de doubler tous les dix huit mois de sorte qu’ en 2020, la puissance de calcul embarque dans un ordinateur de bureau sera quivalente  celle d’ un cerveau humain.
Mais si le mouvement se poursuit, et il n’ y a pas de raisonde penser qu’ il en sera autrement, en 2050, tout possesseur d’ un ordinateur aura  sa disposition la puissance de calcul de l’ humanit toute entire…
Les possibilités des systèmes à venir dépassent donc largement les capacités de notre imagination.
Mais o est la capacit c’acquis qu’ avec l’ explosion de la puissance des ordinateurs,n peut tenir pour des systèmes informatiques à délivrer une information pertinente qui va progresser dans les mêmes proportions.
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Chacun de nous a dj fait l’ exprience impressionnante du profilage individualisé réalisé par des sites comme Amazon, qui sont dj capables de dlivrer des conseils de lecture ou d’ anticiper les gots de l’ internaute.
Dans le domaine de l’ information juridique, c’ est la capacit du simple citoyen  accéder directement à une information pertinente, sans aucune médiation, qui va évoluer à une vitesse extraordinaire.
En aot 1999, Luc STEELS avait prdit l’ apparition de ce qu’ il appelait les anges digitaux se », référant au concept connu par la plupart des grandes mythologies, des agents intelligents, capables de résoudre à la place des humains les problèmes de toute sorte.
Depuis, ces anges digitaux ont commencé de faire leur apparition.
L’ anne dernire, le Conseil National des Barreaux a lanc une campagne reposant en partie sur l’ utilisation d’ un agent artificiel intelligent, capable de rpondre  des questions juridiques simples.
Il est clair que de tels systmes sont appels  se rpandre et  s’ amliorer, sans qu’ il soit possible de savoir quel niveau de problèmes ils seront capables de résoudre.
Un deuxime mouvement significatif, est celui du dveloppement des systmes d’ aide  la génération de documents juridiques. Là encore, les technologies évoluent à très grande allure (elles sont d’ ailleurs apparentées à celles qui permettent la mise au point des agents conversationnels).
Il ne fait aucun doute que prochainement, les actes juridiques, jusqu’  un certain niveau de complexit, pourront tre rdigs en ligne, sans l’ assistance d’ un professionneldu droit. Certains logiciels proposés aux études de notaires se rapprochent déjà de ce modèle.
Un autre axe de changement est à rattacher aux nouvelles pratiques des générations « numériques » habituées aux réflexes de consultation des réseaux sociaux. On peut tenir pour acquis que la ressource juridique se retrouvera assurément également sur internet, sous cette forme « collaborative ».
Des tudes ralises en Angleterre ont permis de constater qu’ une forte minorit (38%) des personnes interrogées préférait déjà consulter un site internet, ou appeler un centre de services, plutt que de se rendre dans un cabinet d’ avocat.
Il est évident que les juridictions ne seront pas laissées de côté dans le mouvement qui se dessine
Au-del de l’ informatisation djacquise des juridictions, la communication électronique est la premire des manifestations de l’ usage des nouvelles technologies.
La mise en place de cette communication se fait sous nos yeux.
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Dans le contentieux judiciaire, la mise au rôle électronique de l’ appel prvue par le dcret du 9 décembre 2009 entrera en vigueur dans moins de trois mois. Pour la première fois, certaines données du litige vont être saisie en ligne et intégrées directement dans le système de la juridiction.
Il est d’ ores et dj acquis que les transferts papier, vont se substituer aux échanges électroniques qu’ il s’ agisse de l’ introduction de l’ instance, de la communication des pices ou de l’ change des mémoires.
Le systme SAGACE permet, on le sait la consultation de l’ volutiondu dossier, le système ARAMIS devrait permettra aux juridictions administratives de combler le retard qu’ elles ont dsormais pris sur les juridictions judiciaires, devant lesquelles, dans les cas où la représentation est obligatoire, la totalité de la mise en état du dossier, le dépôt des écritures, etc. est désormais dématérialisée.
Mais somme toute, les nouvelles technologies de la communication n’ ont t utilises pour le moment que pour simplifier (voir remplacer) la communication papier.
Même si le papier est entièrement éliminé de la chaîne de production, de transmission, et d’ exploitation nature de sa l’ impression, par document numrique peut  tout instant retrouver,; le document « écrit ».
Cet exemple est significatif des pesanteurs du passé.et du fait que les technologies nouvelles sont pour le moment encore utilisées par des générations de juristes de la « galaxie Gutenberg ».
Par force, l’ environnement numrique c’ est d’ abord dvelopp en s’ appuyant sur les lments de la culture imprimée, une culture dont nous sommes les derniers représentants.
C’ est ainsi que la principale mtaphore structurante des premiers outils de l’ internet est reste la lecture. Les nouveaux outils ont t qualifis d’ diteurs de texte, lisant des pages web ».
La réalit est videmment diffrente. pas grand y a n’ Il-chose de commun entre la page imprimé, caractrise par sa fixit, et la page numrique, dynamique et virtuelle, et dont mme l’ apparence peut varier, en fonction des outils avec lesquels on la lit.
La pag la plupart des cas  dans sa signification  l’ ordre linaire qu’ elle prsuppose,e imprime doit, la temporalit de la lecture qu’ elle impose et prsuppose.
La page numérique instaure une forme de lecture ouverte et différente, elle est plus « spatiale » et privilgie l’ accs.
L’ explosion rcente des wikis » a ainsi montré comment le numérique pouvait rapidement dynamiter une des caractéristiques principales de la page imprimée : sa relation avec son auteur !
La prochaine étape verra donc le remplacement de la « page papier » par de véritables pages numériques, dotées de liens hyper texte autorisant la «navigation  l’ intrieur du dossier».
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La capacité du numérique est également de transporter autre chose que du papier. Les fichiers peuvent contenir du son ou/ et de l’ image.
La nature des « pièces » du dossier va donc sensiblement évoluer. Les parties ne peuvent en effet se priver des possibilités nouvelles qui leur sont ainsi offertes.
L’ expertise se prte tout particulirement bien  cette volution.
Pas seulement parce que les experts appartiennent bien souvent à des professions techniques qui maîtrisent souvent mieux que les juristes les nouvelles technologies ; mais aussi parce que les constatations ou les dmonstrations d’ un rapport d’ expertise seprêtent particulièrement bien à l’ emploi de la vido, des fichiers sons, ou des modlisations par ordinateur.
Au- est bien entendu l’ audience qui va connatre de srieux changements.del, c’
Au-delà de techniques déjà connues et utilisées comme par exemple la présentation Powerpoint, c’ est la possibilit de produire des animations, des simulations, des vidos qui va probablement rvolutionner le contenu du dossier, et la forme de l’ audience.
Dj le code de procdure pnale permet, soit l’ audition de tmoins par visio-conférence, soit d’ viter (en matire pnale) les dplacements physiques.
Là encore, les techniques évoluent à très grande vitesse.
A l’ occasion du jugement de l’ affaire du bloody Sunday cour charge du dossier bnficia d’ un la système de reconstitution virtuelle de la ville de Londonderry.
Un système 360° qui permettait aux témoins de se resituer dans les lieux et de refaire dans les rues leur parcours.
De tels systèmes ont aussi déjà permis de reconstituer des crashs aériens.
Ils vont assurément se multiplier.
Se posera enfin une question : une cour est-elle un lieu, ou un prestataire de services ?
Les nouvelles technologies permettent de rompre le lien entre une juridiction, et un territoire.
Money Claim online est un système développé en Angleterre pour la gestion directe en ligne des litiges de recouvrement de créances.
MCOL est accessible 24 heures par jour, 7 jours sur 7. Les décisions sont rendues pour tout le pays par la Cour de Northampton.
Bien entendu les recours peuvent être déposés en ligne, et les parties ont accès à la procédure.
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Pour le moment, le litige n’ est pas rgl en ligne en cas d’ opposition du dfendeur, et il est alors redirigé vers une cour « réelle ».
L’ Etat n’ a certes déjà pas le monopole de la justice, Il connaît la concurrence des médiations et des arbitrages qui peuvent relever d’ une justice prive.
Mais les systmes de traitement des litiges en ligne qui se mettent en place sont d’ une toute autre dimension.
Le plus connu est certainement « squareTrade », le service de règlement des litiges en ligne du site e-bay . Il règle des milliers de litiges, entre internautes de toutes les nationalités.
Mais on peut aussi citer « cybersettle » un service particulièrement bien adapté à la résolution des litiges de dommages qui a ainsi été chargé par la ville de NY du règlement de 1200 dossiers contentieux, dont 66% ont pu être réglés en ligne, dans un délai de 30 jours.
Enfin ICOURTHOUSE est un service actuellement disponible sur internet.
Cette cour de justice ne comporte aucun juge. Elle respecte les règles essentielles de procédure du procs nord amricain et connat de litiges qui n’ ont rien de virtuel, entre des parties qui se sont contractuellement engagées à respecter ses dcisions…
C’ est le premier exemple d’ une justice rendue non plus au nom du peuple, mais par le peuple », celui des internautes, qui peuvent tous proposer leurs services comme juré.
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