Perception française de l Italie et traduction de l italien : histoire d un malentendu - article ; n°106 ; vol.29, pg 69-81
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Perception française de l'Italie et traduction de l'italien : histoire d'un malentendu - article ; n°106 ; vol.29, pg 69-81

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Romantisme - Année 1999 - Volume 29 - Numéro 106 - Pages 69-81
L'article s'efforce de saisir dans le renouvellement post-révolutionnaire de l'attitude envers les langues étrangères ce qui va constituer le terreau de la perception des Italiens en France jusqu'au XXe siècle. La plus grande attention est portée aux revues, qui suivent de près l'actualité littéraire de l'autre côté des Alpes et les traductions, qui montrent une connaissance honorable des réalités italiennes. Le travail de Sainte-Beuve sur Leopardi, dès le début des années 1840, est remarquable. Mais le flou dans les choix traductifs, la dichotomie de l'expression et des contenus, ne pouvaient que limiter cet élan et desservir les œuvres les plus complexes en aggravant un décalage objectif entre les deux littératures. La personnalité des auteurs - plus ou moins romancée - prend le pas sur leurs textes, en dépit d'une tendance des traductions vers la littéralité juxtalinéaire (A. Bonneau), plus exacte que littérairement fidèle, dont les produits inspireront pourtant des écrivains comme Musset, Balzac, Hugo ou Baudelaire. C'est donc, à partir de contenus nouveaux, la littérature dominante (d'arrivée) qui comble «naturellement» ce manque par sa forme et ses valeurs, d'autant plus que les rares «poètes traducteurs» du siècle ne se sont pas particulièrement intéressés aux lettres italiennes.
This paper tries to define what would have constituted the ground for perception of the Italians in France until the XXth century in the post-evolutionary change in attitude towards foreign languages. The greatest attention is lent to the reviews, which follow the literary actuality on the other side of the Alps and its translations, showing an honourable knowledge of the italian realities. Sainte-Beuve's work on Leopardi, since the beginning of the 1840 centuries, is remarkable. But the blurred aspect of the translation choices, the dichotomy in expression and contents, could only limit this spirit and harm the more complex works by worsening an objective lag between the two literatures. The authors' personalities - more or less romanced - take precedence over the texts, inspite of a trend toward juxta-linear literality (A. Bonneau), more exact than literally loyal, the products of which nevertheless would have inspired writers like Musset, Balzac, Hugo or Baudelaire. So, from new contents, it's the dominant (target) Literature which fills «naturally» this lack with its own form and values, all the more since the rare «translators poets» of the century were not particularily interested in italian letters.
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1999
Nombre de lectures 36
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

M. Jean-Charles Vegliante
Perception française de l'Italie et traduction de l'italien : histoire
d'un malentendu
In: Romantisme, 1999, n°106. Traduire au xixe siècle. pp. 69-81.
Citer ce document / Cite this document :
Vegliante Jean-Charles. Perception française de l'Italie et traduction de l'italien : histoire d'un malentendu. In: Romantisme,
1999, n°106. Traduire au xixe siècle. pp. 69-81.
doi : 10.3406/roman.1999.3453
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/roman_0048-8593_1999_num_29_106_3453Résumé
L'article s'efforce de saisir dans le renouvellement post-révolutionnaire de l'attitude envers les langues
étrangères ce qui va constituer le terreau de la perception des Italiens en France jusqu'au XXe siècle.
La plus grande attention est portée aux revues, qui suivent de près l'actualité littéraire de l'autre côté
des Alpes et les traductions, qui montrent une connaissance honorable des réalités italiennes. Le travail
de Sainte-Beuve sur Leopardi, dès le début des années 1840, est remarquable. Mais le flou dans les
choix traductifs, la dichotomie de l'expression et des contenus, ne pouvaient que limiter cet élan et
desservir les œuvres les plus complexes en aggravant un décalage objectif entre les deux littératures.
La personnalité des auteurs - plus ou moins romancée - prend le pas sur leurs textes, en dépit d'une
tendance des traductions vers la littéralité juxtalinéaire (A. Bonneau), plus exacte que littérairement
fidèle, dont les produits inspireront pourtant des écrivains comme Musset, Balzac, Hugo ou Baudelaire.
C'est donc, à partir de contenus nouveaux, la littérature dominante (d'arrivée) qui comble
«naturellement» ce manque par sa forme et ses valeurs, d'autant plus que les rares «poètes
traducteurs» du siècle ne se sont pas particulièrement intéressés aux lettres italiennes.
Abstract
This paper tries to define what would have constituted the ground for perception of the Italians in France
until the XXth century in the post-evolutionary change in attitude towards foreign languages. The
greatest attention is lent to the reviews, which follow the literary actuality on the other side of the Alps
and its translations, showing an honourable knowledge of the italian realities. Sainte-Beuve's work on
Leopardi, since the beginning of the 1840 centuries, is remarkable. But the blurred aspect of the
translation choices, the dichotomy in expression and contents, could only limit this spirit and harm the
more complex works by worsening an objective lag between the two literatures. The authors'
personalities - more or less romanced - take precedence over the texts, inspite of a trend toward juxta-
linear literality (A. Bonneau), more exact than literally loyal, the products of which nevertheless would
have inspired writers like Musset, Balzac, Hugo or Baudelaire. So, from new contents, it's the dominant
(target) Literature which fills «naturally» this lack with its own form and values, all the more since the
rare «translators poets» of the century were not particularily interested in italian letters.Jean-Charles VEGLIANTE
Perception française de l'Italie et traduction de l'italien
histoire d'un malentendu
J'ai calqué le poëme de Milton à la vitre, je n'ai pas
craint de changer le régime des verbes lorsqu'en res
tant plus français, j'aurais fait perdre à l'original
quelque chose de sa précision, de son originalité ou
de son énergie...
Œuvres complètes de Chateaubriand, Paris, Garnier
Frères, t. XI, 1830, p. 5.
Arriver à ce que l'œuvre primitive se dessine aussi
exactement dans la traduction qu'un objet placé
devant un miroir, ce serait la perfection, et elle n'est
pas de ce monde.
Roland furieux, Poème de l'Arioste, trad, nouvelle,
littérale et juxtalinéaire, A. Bonneau, Paris, I. Liseux,
1879, p. X-XI.
La citation de Chateaubriand, en tête de ses «Remarques» à sa traduction du
Paradis perdu et celle, moins connue, d'Alcide Bonneau, pourraient dessiner un
contour provisoire du champ traductif à l'époque romantique largement entendue - et
prolongée, comme il arrive toujours, dans la conscience littéraire de traducteurs qui ne
sont pas eux-mêmes partie prenante de la littérature de leur temps, c'est-à-dire qui ne
sont pas à proprement parler des écrivains. Après des décennies d'adaptations et de
réécritures, l'aspiration au respect de la lettre semble s'imposer, fût-ce, dans le cas de
Bonneau, comme un horizon inatteignable. Il n'y manquerait peut-être, dans ce cadre,
que l'absence de scrupules que nous dirions aujourd'hui textuels, et que Rivarol avait
posés une fois pour toutes dans le «Discours préliminaire» à sa traduction de Y Enfer
(1783), en se faisant le précurseur d'une nouvelle tendance de fidélité philologique et
historique aux œuvres prises dans l'époque qui les avait vues naître : trop tôt sans
doute pour impressionner le vieux comte de Tressan, qui justifiait ses infidélités à
l'Arioste, quelques années plus tard, par «ce qu'il est facile de voir que le poëte n'a
placé que pour remplir le cadre de l'espèce de strophe à laquelle il s'est assujetti» '. À
vrai dire, le comte de Tressan et un imitateur tel que «T inclément» J.-M.-B. Clément
auront davantage d'émulés que Rivarol et Chateaubriand, jusqu'à ce critique connu,
notre contemporain, qui se félicitait de voir enfin éditées des traductions de La Jéru
salem délivrée et de la Divine Comédie pouvant se lire «comme des romans». Il
s'agit moins de discussion sur les genres — assez vivace au contraire à partir des écrits
1. Voir «Discours préliminaire» à son Roland furieux, 1788, éd. revue Paris, Fimin Didot, 1822, vol. I,
XIII.
ROMANTISME n° 106(1999-4) 70 Jean-Charles Vegliante
fondateurs de Mme de Staël - que de compréhension profonde de ce qu'est le langage
poétique et de l'importance du vers en tant que tel. Ce serait là un dernier point intro-
ductif : n'étant pas spécialiste de la période considérée, il m'a semblé intéressant
d'aborder la question des antécédents plus ou moins lointains à ce qui deviendra rée
llement le terreau de la perception de l'Italie et de sa littérature en France, une sorte de
rapport à la fois sympathique et condescendant envers les produits de proches parents
un peu démunis, pas tout à fait autres (ce que j'ai appelé leur et notre presque-même),
massivement présents du reste dans l'Hexagone, provinciaux à peine particuliers en
somme dont l'aspiration était bien, sans surprise, de «monter à Paris». La première
moitié du siècle dernier, en effet, commence à connaître l'afflux moderne d'Italiens
(les exilés de 1799-1800, puis les divers conspirateurs, carbonari ou non, et bien sûr
les «masques et bergamasques » traditionnels, en général «sans famille» comme l'on
sait), tout en précédant la grande période de plus d'un siècle d'immigration italienne
contemporaine, que l'on peut dire achevée seulement avec l'application et les réalisa
tions effectives du traité de Rome, dans nos années 1970.
Toutefois, à la suite des excellents travaux des Idéologues, en particulier de l'it
alianisant Ginguené, dont Y Histoire littéraire de l'Italie est fréquemment citée, les
connaissances des réalités culturelles et littéraires de la Péninsule sont plus fines que
ne pourraient laisser croire les traductions les plus populaires, rééditées et encore
accessibles aujourd'hui (Philipon de La Madelaine, Brisset, Desplaces... ). Peu à peu
se fait jour, comme tout près de nous cela s'est produit, pour ce qui concerne notre
sujet, vers le milieu des années 1980 - en gros après la Foire «italienne» de Francf
ort, de l'automne 1984 —, une conscience des possibilités nouvelles de la langue fran
çaise, vivifiée par l'usage effectif des écrivains modernes. Il s'agit d'un tardif héritage
de Y Encyclopédie (Marmontel, en particulier, est invoqué), et de la conviction que
cette langue, par sa «marche naturelle» (Voltaire), se prête à tout traduire. Ainsi, chez
A. Mazuy, qui prétend rendre pourtant les grands poèmes italiens en prose : «Nos
efforts ont eu pour but la littéralité, l'élégance, car nous avons foi dans not

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