Réflexions sur la fonction politique chez des islamisés et des animistes : Malinké, Sia, Guro de Côte d Ivoire - article ; n°1 ; vol.13, pg 83-96
15 pages
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Réflexions sur la fonction politique chez des islamisés et des animistes : Malinké, Sia, Guro de Côte d'Ivoire - article ; n°1 ; vol.13, pg 83-96

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Description

L'Homme - Année 1973 - Volume 13 - Numéro 1 - Pages 83-96
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1973
Nombre de lectures 21
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Ariane Deluz
Réflexions sur la fonction politique chez des islamisés et des
animistes : Malinké, Sia, Guro de Côte d'Ivoire
In: L'Homme, 1973, tome 13 n°1-2. pp. 83-96.
Citer ce document / Cite this document :
Deluz Ariane. Réflexions sur la fonction politique chez des islamisés et des animistes : Malinké, Sia, Guro de Côte d'Ivoire. In:
L'Homme, 1973, tome 13 n°1-2. pp. 83-96.
doi : 10.3406/hom.1973.367330
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hom_0439-4216_1973_num_13_1_367330SUR LA FONCTION POLITIQUE RÉFLEXIONS
CHEZ DES ISLAMISÉS ET DES ANIMISTES
Malinké, Sia, Guro de Côte d'Ivoire*
par
ARIANE DELUZ
En 1958, lors d'un premier contact avec les Guro dans deux villages de la zone
forestière de Côte d'Ivoire — l'un situé à la hauteur de Daloa, l'autre à 3 km
au nord de Bouaflé — , j'eus la surprise d'entendre les anciens de deux segments
de lignages déclarer : « nos ancêtres étaient des Va1, c'est-à-dire des Malinké »,
et préciser qu'ils ne descendaient donc pas des Guro qui habitaient autrefois
une partie de l'actuel pays malinké, mais que leurs ancêtres avaient été de pieux
musulmans venus d'un village aujourd'hui occupé par des Sia. Eux-mêmes
respectaient encore l'interdiction d'une forme de mariage courante chez les
autres Guro : le mariage avec une veuve du père. Fait paradoxal quand on sait
que les Va étaient en principe musulmans : les anciens de ces segments va avaient
toujours détenu des cultes animistes considérés comme particulièrement redout
ables, et ils passaient pour utiliser des charmes capables d'empêcher leurs épouses
de les tromper ou de les quitter.
En 1964 et 1965, après avoir relevé les traditions de l'ensemble des villages
guro, je notai également celles des ethnies mwâ et sia, situées au nord des Guro,
ainsi que celles de plusieurs villages malinké voisins. Je pus alors retracer la
trajectoire des migrations sia et malinké à travers le territoire guro ; j'établis
ensuite la carte des résidus lignagers qu'elles y ont laissés et procédai à une
première étude des Sia dont certains ancêtres avaient été à l'origine de ces
migrations.
* Ce texte est une version très remaniée d'une communication présentée au Deuxième
Congrès des Africanistes à Dakar, en 1967. Les données ont été recueillies au cours de trois
enquêtes en Côte d'Ivoire, en 1958-59, 1964 et 1965-66, dont les résultats sont partiellement
publiés (Deluz 1970a et 1970b). Rappelons que les Guro sont une population d'agriculteurs,
chasseurs, tisserands, guerriers, d'origine mandé, au nombre de 110 000 environ. Ils résident
au centre de la Côte d'Ivoire et sont répartis en 57 tribus (bi) , groupes territoriaux à fonc
tions essentiellement économiques et guerrières. Ces tribus sont généralement composées
de patrilignages ou de segments de patrilignages d'origines différentes et unis par des liens
d'alliance.
1. Les Guro dénomment va tout ce qui est situé au nord par rapport à eux : régions,
peuples, individus. Les Malinké sont donc des Va. DELUZ ARIANE
Les territoires sia et guro en Côte d'Ivoire
Le présent travail porte donc sur trois sociétés distinctes : les Guro, les Sia
et les Malinké, les seconds assurant en quelque sorte la transition entre les deux
autres. J'aimerais montrer comment leur distribution dans l'espace constitue
comme l'esquisse d'un tableau combinatoire des relations entre les fonctions
politique, guerrière et agricole, étant entendu que chez les Sia et les Malinké,
la présence de l'Islam conduit à lier la fonction religieuse et la prééminence
politique, l'une et l'autre associées à la pratique du commerce. ISLAMISES ET ANIMISTES
I. — Siamorifï Bamba, les Sia et les Malinké
La localisation et l'organisation des Sia, que je considérerai provisoirement
comme une ethnie, découlent directement des événements rapportés ci-dessous :
aussi y reviendrai-je. Les informateurs guro désignent Gbeima (sous-préfecture
de Mankono), ainsi que Dandougou (nommé également Dantogo, sous-préfecture
de Séguéla) qu'ils connaissent sous le nom de Vayafla, comme les localités d'où
étaient issus ceux de leurs ancêtres reconnus comme Va. Les anciens des groupes
musulmans de ces villages possèdent effectivement des tariqhs ; ils refusèrent
de les laisser lire ou photographier mais acceptèrent d'en exposer oralement le
contenu. Je transcris donc ici textuellement ce qu'ils ont dicté1.
Texte recueilli à Gbeima, sous-préfecture de Mankono, et dit par un homonyme
de Siamorifï Bamba.
Mori Kana Bamba était le grand-père de Siamorifï Bamba (altération
de Sika Morifï « le grand marabout de la race noire »). Mori Kana
était venu de Mafara, du Mandé2. Il a quitté le pays à cause d'une femme.
Il était riche, il avait beaucoup de captifs, beaucoup d'épouses. Un jour,
l'épouse de son fils3 est allée puiser de l'eau au puits. Il y avait là, couché,
un serpent qui l'a mordue. La femme chef de famille (belle-mère de la
jeune femme) a demandé à un homme d'aller tuer le serpent qui avait
mordu sa bru. Au moment où on a coupé la tête du serpent, la tête du
serpent a sauté entre le ciel et la terre. Au moment où elle a sauté, la tête
a dit à haute voix : « Durant toute l'année, il n'y aura pas de pluie dans
votre village. Pendant 7 ans, 7 mois, 7 jours4, il n'y aura pas de ici. »
La vieille a répondu : « Ce que la tête du serpent a dit ne signifie rien,
c'est comme rien. Même s'il n'y a pas de pluie je vais nourrir tous les
gens de ma tribu. » Pendant 7 ans, 7 mois, 7 jours, il n'y a pas eu de pluie.
Pendant 7 ans, 7 mois, la reine (elle s'appelait Masokolo, son fils, Buru
Diara, était le mari de la fille mordue) a fourni sa province en nourriture
et en eau. Il restait 7 jours, et là, elle n'a plus rien pu faire. Tout le monde
avait faim et soif, tous se sont dispersés, la vieille a dit à tout le
de se sauver du village. C'est comme cela que Mori Kana est venu du
Mandé. Il a fondé « Siaknga », en face de Gorhetta5. C'est là qu'est né
Siamorifï Bamba.
1. Les termes entre parenthèses sont les réponses faites par les anciens à des questions
incidentes. Les informations et éclaircissements supplémentaires recueillis chez les Sia mais
aussi chez des Malinké de la région de Séguéla sont communiqués en note.
2. Le thème de la dispersion des peuples du Mandé consécutive à une sécheresse causée
par la rupture d'un interdit se retrouve chez Delafosse 1912, I : 256-262.
3. Selon les vieux de Kourougba, autre village sia, il s'agit de l'épouse d'un neveu utérin
de leur ancêtre.
4. Les vieux de Kourougba ajoutent « 7 heures ». Notez ici le nombre sept : 3, chiffre
masculin + 4, chiffre féminin.
5. Village de l'actuelle tribu Mi des Guro. •
86 ARIANE DELUZ
Siamorifï Bamba a grandi là-bas. Devenu grand, il est allé à La Mecque.
Dieu lui a accordé tout ce qu'il a demandé. Il a copié le Coran. Il a fait
le pèlerinage à l'âge de trente ans. Les marabouts de La Mecque lui ont
dit : « Nous avons appris qu'il y a un fruit chez vous qu'on appelle cola » ;
il a répondu : « Oui, il y a la cola chez nous. » Les marabouts lui ont alors
demandé : « Quelle est la forme de la cola ?» Il a montré la forme de la
cabosse de cola. Puis il a ouvert la main et, miracle, une noix de cola est
tombée de sa main. Il a dit aux marabouts : « Voici un don d'Allah, la
cola. » Tous les marabouts lui ont dit : « Vous êtes le plus puissant. » Puis
il a quitté La Mecque et il est revenu dans cette région.
Il s'est fait accompagner par un descendant du Prophète, nommé
Chérif1. A son arrivée à Lsnga, les habitants de Borô2 sont venus lui dire :
« Vous avez amené un descendant du Prophète ? » Morifï Bamba répondit :
« Oui, c'est vrai. » Les représentants des gens de Borô l'ont prié de leur
confier son étranger afin que ce dernier vienne leur accorder ses bénédict
ions. Siamorifï, qui était accompagné de deux descendants du Prophè

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