Séduction perverse, séduction hédoniste dans le roman du XVIIIe siècle
122 pages
Français

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Description

Cette étude, qui tente d’explorer l’imaginaire à l’œuvre dans le récit libertin galant du XVIIIe siècle, montre que la scène mondaine est dominée par deux types de séducteurs : le purement hédoniste et le résolument pervers. Chacune de ces figures manie les signes et les valeurs conformément à sa vision et selon des stratégies et des tactiques appropriées. Aussi, l’érotique et le politique se conjuguent-ils pour préfigurer des rapports intersubjectifs commandés soit par le diplomatiquement correct soit par l’esprit guerrier.
Sur le plan esthétique, l’étude souligne l'implication réciproque entre le dit et le dire. La perversité et l’hédonisme s’expriment selon des modalités qui leur sont propres, donnant ainsi lieu à des effets de lectures contrastés.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 07 juin 2019
Nombre de lectures 21
EAN13 9782304047639
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

SEduction perverse,
SEduction hédoniste


ISBN 9782304047639
© mars 2019
E ditions Le Manuscrit
Paris


Mohammed Aït Rami
Seduction perverse,
seduction hédoniste
dans le roman du xviii e siècle




« Ecrire un roman, ce n’est pas raconter quelque chose en relation directe avec le monde réel. C’est établir un jeu entre l’auteur et le lecteur. Ça relève de la séduction. »
Georges Perec, Entretien avec P. Fardeau, France nouvelle, 1079, EC2, p. 56


Introduction
« Tout champ de lutte est obligatoirement champ de significations ; il est le lieu potentiel de déplacements signifiants – d’ordre physique ou dialectique – relevant de la sphère de la communication, qu’il appartient à la stratégie de cerner à l’avance, et à la tactique de réaliser. »
Jean R. Joseph, Crébillon fils. Économie érotique et narrativ e, Lexington, Kentucky, French forum, Publshers, 1984, p. 21.
Jean Baudrillard avait formulé l’hypothèse selon laquelle le phénomène de la séduction est de nature fondamentalement sémiologique 1 . La séduction opère et prospère dans le terreau des signes ; les désirs, les rivalités, les tensions engendrent nécessairement la manipulation plus ou moins insidieuse des signes. Inscrites dans un contexte de conflits, la communication est dès lors minée, brouillée, biaisée… Aussi, tous les usagers du langage – qu’il soit verbal ou non verbal – ont-ils, à un moment ou à un autre, affaire à la contrefaçon, à la simulation/dissimulation, au jeu des apparences. Telle qu’elle apparaît dans les œuvres de fiction, la séduction fonctionne systématiquement selon les mêmes principes. Elle se joue constamment des valeurs, des codes et des discours.
Le présent ouvrage se propose d’étudier les relations séductives telles qu’elles sont mises en scène dans un corpus de textes romanesques du XVIIIe siècle. L’étude voudrait formuler quelques réponses à une question que nous avons posée à ces textes : quelle signification particulière les protagonistes accordent-ils au maniement des signes ? Cette question est d’autant plus essentielle que le système de la séduction, tel que nous l’observons dans ces textes, fonctionne selon un ensemble de discours et de conduites méthodiques 2 . Le système de la séduction suppose cohérence et interdépendance de ses composantes ; il s’oppose ainsi, point par point, à un autre système également cohérent et structuré : le système de la rectitude .
La visée déclarée ou inavouée des tenants du premier système est de dévoyer ceux qui se réclament du second. La séduction se pose donc en s’opposant systématiquement à tout ce qui se réclame de la doxa , du code et de la loi . Elle apparaît comme l’antithèse de la rectitude. Ce positionnement lui vaut, de la part de la morale traditionnelle, une condamnation sans appel.
Précisons cependant que l’étude des textes permet d’affirmer que la séduction n’a pas toujours pour finalité la malfaisance. Mieux encore, l’étude des textes nous autorise à distinguer deux types de séduction. La première, qui relève d’une sorte de sens commun, est jugée perverse – nous l’appellerons ainsi – : le séducteur-manipulateur, nécessairement narcissique, ne cherche qu’à jouir, de manière plus ou moins cruelle, de sa « victime ». Les effets, de l’ordre de la morale et de la société, sont alors néfastes. Comme dans la tradition dramaturgique classique, la séduction débouche souvent sur le tragique. La seconde, que nous appellerons hédoniste , participe d’une jouissance, certes toujours narcissique, mais où les motivations profondes du séducteur consistent à éviter, à la fois pour lui-même et pour son objet de désir, ce qu’on pourrait appeler, faute de mieux, le déplaisir . La jouissance est à entendre ici au sens d’un plaisir émanant d’un usage intelligent des signes. Cette hypothèse de lecture part du fait que ces deux types de séduction participent de la problématique générale du libertinage .
Les chercheurs sont à cet égard quasi unanimes : la notion de libertinage présente une grande élasticité sémantique 3 . L’étymologie apporte un éclairage intéressant. À l’origine, le mot Libertinus signifie un « esclave affranchi ». C’est à partir du XVII e siècle que le sens moderne est définitivement fixé : le libertin est un « libre penseur ». A partir de ce sens va s’opérer un glissement sémantique qui fera du libertin un être dissolu. La dimension morale est désormais consubstantielle à la définition du mot. Cela explique en partie pourquoi la tradition philosophique a retenu le « libertinage de pensée » et le « libertinage de mœurs » 4 . Aussi le mot libertin peut-il désigner soit un « libre penseur » soit un être « dissolu », soit les deux à la fois.
Dans les textes que nous avons retenus, les deux acceptions se rejoignent et se recoupent sans cesse pour désigner une posture sociale et intellectuelle singulière : le libertin adopte systématiquement une démarche pragmatique « fondée sur le scepticisme 5 », l’esprit critique et l’esprit de jeu. Le libertinage, tel que nous le définissons dans cette étude, est une dynamique subversive, un discours relativement libre à l’égard de la religion, de la morale, de la langue, de la famille et des relations intersubjectives... Bien qu’il soit un « phénomène diffus 6 », notre ambition est d’en cerner les contours, d’en analyser la configuration tout à la fois textuelle et énonciative. Nous proposons de qualifier ce libertinage par l’épithète « galant » 7 . Tout en reconnaissant l’ambivalence de l’épithète, il est utile d’en souligner le style remarquable : la galanterie contraint le mondain à un comportement social fortement codifié ; il doit impérativement éviter la crudité langagière et la brutalité des gestes. Est galant, généralement, l’homme serviable à l’égard des femmes.
Séduction perverse, séduction hédoniste, libertinage, galanterie sont autant de paradigmes qui permettent d’analyser les textes retenus. Il faut préciser en effet que le récit romanesque du siècle des Lumières, qui a touché à tous les domaines de la pensée et de la vie, a réservé à la phénoménologie amoureuse une place de choix. Le large éventail de cette phénoménologie – allant du lyrisme le plus candide à l’inconcevable sadisme , en passant par la pornographie la plus débridée – a été déplié et largement exploré.
De l’impressionnante profusion de textes sur les rapports amoureux, nous n’avons retenu que les récits libertins galants . Nous pensons que ces récits occupent une position mitoyenne entre deux imaginaires amoureux : le lyrique et le pornographique . Ils se présentent comme une sorte de tampon entre l’idéal amoureux de La Princesse de Clèves et l’abondante littérature dont l’ambition est de créer un effet de désir . Les récits que nous avons regroupés sous la même étiquette véhiculent relativement les mêmes idées , traitent à peu près des mêmes thèmes, emploient la même langue ; ils sont identiques de par leur structuration narrative et discursive. Tous ces textes puisent, à divers degrés, dans l’imaginaire du Grand siècle et du siècle des Lumières.
Les textes du corpus 8 – qui s’étalent sur presque tout le XVIII e siècle – ont été analysés indépendamment des circonstances de leur production et de leur réception. À cela une raison d’ordre méthodologique : la signifiance du texte lui est globalement immanente 9 . Nous pensons en effet que cette approche rendrait mieux compte de l’ imaginaire et de l’esthétique de toute une époque.
L’étude comporte deux axes distincts mais complémentaires. Le premier axe a été consacré aux marges externes ( paratexte ) et internes ( incipit et excipit ) des récits. Souvent passés sous silence, ces zones limitrophes donnent à voir comment, par un travail purement formel, le romancier cherche à séduire (ou à ne pas séduire) le lecteur. Les péritextes , ont été examinés en premier, car ils constituent un passage obligé aux œuvres et ont pour rôle initial de susciter immédiatement l’ intérêt romanesque .
Les titres des récits ont été étudiés dans le but d’apprécier leur pouvoir suggestif, de saisir le lien subtil les unissant et de souligner les rapports qu’ils entretiennent les uns avec les autres. Il s’agit, par la même occasion, de savoir s’ils s’intègrent dans une titulature signifiante.
L’examen des préfaces a permis aussi de rendre compte des différentes questions éthiques , esthétiques et lectrices au

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