Incertitude de la création. Intention, réalisation, réception
153 pages
Français

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Description

La création artistique est envisagée ici au travers de trois aspects : l’élaboration de l’œuvre, son aboutissement et sa réception par le public. Traditionnellement, l’œuvre plastique prend naissance dans l’atelier, lieu fondateur, d’autres fois dans la nature ou dans l’espace urbain. Le processus créateur est un phénomène complexe, voire mystérieux. Le résultat obtenu est généralement autre que le projet qui l’a suscité. Que se passe-t-il durant ce laps de temps au cours duquel l’œuvre se construit, s’organise ? Comment l’artiste procède-t-il ? Quels obstacles rencontre-t-il ? L’imprévu, la contingence, le hasard, l’accident ne manquent pas de surgir. Comment l’artiste réagit-il à ces manifestations ?


Partant de l’idée qu’il n’y a pas de création ex nihilo et que l’artiste tente néanmoins de réaliser quelque chose de nouveau, d’inédit, d’insolite, l’appropriation est au cœur de sa démarche. Que s’approprie-t-il ? Qu’est-ce qui se joue dans cette pratique particulière ? Qu’advient-il de la source ou de la référence ? Comment l’artiste affirme-t-il sa singularité ?


L’œuvre achevée poursuit son existence dans la réception qui en est faite. Alors qu’elle est un aboutissement pour l’artiste, elle devient un point de départ pour le public et pour la critique d’art. Elle échappe à son auteur. L’expérience esthétique peut procurer plaisir, déplaisir ou indifférence. L’œuvre quant à elle donne lieu à une multitude d’interprétations. Le discours sur l’œuvre peut-il alors être considéré, à son tour, comme une nouvelle création ou une recréation ?

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 2
EAN13 9791095177227
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0090€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

L'incertitude de la création Intention, réalisation, réception

par
DOMINIQUE BERTHET




| Collection Arts et esthétique |


Introduction
Cet ouvrage sur la création artistique, questionne trois aspects, l’un est lié au créateur, l’autre à l’œuvre, le troisième au récepteur. Ces trois aspects correspondent à trois étapes du processus allant de l’élaboration de l’œuvre à sa réception par le public. Construit en quatre parties, cet essai s’ouvre tout d’abord sur une réflexion concernant l’atelier où, traditionnellement, se pense et s’élabore l’œuvre. Ce lieu n’est toutefois pas exclusif puisque la nature comme l’espace urbain peuvent également être des environnements de création. Tout dépend de la pratique de l’artiste.
Le premier chapitre propose une typologie de l’atelier en tant que lieu atypique, singulier, mystérieux, fermé sur lui-même ou, au contraire, ouvert sur le monde. Ce lieu est envisagé comme un laboratoire à la fois de pensée et d’explorations dans lequel l’artiste donne forme à ce qui l’anime, le préoccupe, l’habite. L’atelier est l’antre où se manifeste la création dans toute sa nécessité. L’artiste y construit progressivement son œuvre. Il recèle tous les secrets relevant des modalités de réalisation. C’est un lieu fondateur.
Les deux chapitres suivants interrogent la création artistique en tant que pensée et acte. La création est liée à la notion d’action dans la mesure où celle-ci donne naissance à l’œuvre. C’est également en termes d’entre-deux que la création est présentée du fait de l’oscillation constante qu’elle opère entre deux pôles opposés, quoique complémentaires. Le dernier chapitre de cette première partie est consacré à la relation qu’entretiennent l’ombre et la lumière dans le processus d’élaboration de l’œuvre. La création disait Olivier Revault d’Allonnes :
« suppose l’existence en puissance, déjà quelque part dans l’ombre, de ce à quoi elle va donner l’être en acte […]. L’acte de création serait alors une mise en lumière, ou une illumination […]. Tout ce qui illumine ainsi l’acte de création est tourné vers la lumière créatrice unique, et tourné vers cette seule direction » [1] .
L’idée défendue dans cet ouvrage est qu’il existe une relation de complémentarité entre ces deux notions, l’ombre étant tout aussi essentielle que la lumière. L’une n’existant que par rapport à l’autre.
Afin de mieux saisir l’objet de cet essai, rappelons ce qu’Étienne Souriau disait de l’art d’une manière générale : «  l’art, c’est l’activité instauratrice  » [2] . L’art est certes « activité », mais il est aussi acte. Au travers de cet acte, de cette action, l’artiste donne naissance à quelque chose qui n’existait pas auparavant. Quelles sont les modalités de cette création, la façon dont le processus créateur évolue ? Quelles sont les démarches qui conduisent à l’achèvement de l’œuvre ? Ces interrogations sont d’autant plus légitimes que l’on sait qu’au cours de ce processus surgissent l’imprévu, la contingence, l’accident, le hasard, la maladresse, etc. Ces démarches, choisies et orientées, contribuent à extraire quelque chose « du néant ou du chaos initial » [3] afin de lui donner forme, c’est-à-dire existence, présence. C’est ce processus en tant que cheminement qui va du projet à l’accomplissement de l’œuvre qui est étudié, dans les deux premières parties de ce livre, à la fois dans sa dimension pratique et au travers des raisons qui l’orientent. Toujours dans sa tentative de définir l’art, Souriau écrivait que « l’art n’est pas seulement ce qui fait l’œuvre, mais il est ce qui la guide et l’oriente » [4] .
Nous retiendrons aussi une autre idée de Souriau : l’art en tant que «  sagesse instaurative  » [5] . Le terme sagesse est ici synonyme de « savoir directeur » [6] et savoir anticipateur. L’auteur prend l’exemple du peintre et toute la complexité de son geste : « Chaque coup de pinceau qu’il donne a sa raison d’être, brièvement et ardemment calculée, bien que sans mots et comme en éclair » [7] . Souriau considère qu’une touche de pinceau est un jugement. Elle relève d’une décision, d’un choix. Elle est un jugement par le fait que le peintre applique cette touche « parce qu’il juge que telle couleur à telle place, appliquée de telle manière, est à propos pour mener le tableau vers sa bonne fin ; et cela, en raison de tout ce qu’il sait de son art » [8] , écrit-il. Par expérience le peintre sait ce que produira son geste et de quelle façon il concourra au résultat d’ensemble. Cela dit, il peut être tout à fait incapable d’expliquer et de justifier son geste, alors que celui-ci était calculé et assumé et que le résultat était anticipé. C’est ce que Souriau veut dire par « bien que sans mots ».
Cela dit, le fil conducteur suivi par le peintre, c’est-à-dire le voulu, n’exclut pas un autre phénomène : l’éventualité de l’insatisfaction, de la prévision déçue, de ce qui ne correspond pas au résultat escompté. Couleur inappropriée, geste imprécis ou maladroit, matériau qui regimbe, ce qui progressivement s’élaborait, prend un chemin imprévu. Il faut alors réenvisager, rattraper, modifier, reprendre, recouvrir, réorienter. Ce qui avait été entrepris s’oriente dans une nouvelle direction. Ce qui graduellement sortait du néant régresse, recule, reflue. La lutte reprend, jusqu’à l’ultime coup de pinceau, ce moment particulier, décisif, où l’artiste décide que l’œuvre est achevée, que toute nouvelle action sera inutile, voire fatale. Cette décision d’arrêter le travail, quitte à le poursuivre sur une autre toile, est aussi un jugement. Le peintre ne voulant pas ajouter une touche supplémentaire, décide que l’œuvre est achevée, qu’elle a atteint un état satisfaisant à ses yeux, ce qui lui donne valeur d’achèvement.
En d’autres termes, ces remarques posent la question de l’écart qui existe entre l’intention de l’artiste et l’œuvre réalisée. L’intention est généralement considérée comme l’idée qui préside à la mise en œuvre et le fil conducteur qui guide la réalisation. Toutefois, cette intention est malmenée par tous les imprévus qui se manifestent en cours d’exécution et qui, à des degrés divers, mettent en crise le projet. C’est ce dont traite la seconde partie de cet ouvrage.
Au regard de la façon dont s’élabore l’œuvre et des obstacles rencontrés en cours de réalisation, il convient sans doute d’avoir une approche plus « élargie » de l’intentionnalité artistique. Michel Guérin dans plusieurs ouvrages considère que l’on se fait une idée fausse de l’intention à partir du moment où on l’envisage comme antérieure au langage, au discours. « L’intention est originairement accidentée, ou mieux : modifiée. Elle n’est que cette modification, cet écart-à-soi qui, justement, ne va plus cesser de faire résurgence et de mobiliser l’expression » [9] , écrit-il. Dans un ouvrage plus récent, l’auteur revient sur ce sujet. Il estime qu’il ne faut pas placer l’intention en amont de l’œuvre, « dans un avant absolu de l’esprit précédant sa traduction langagière ou expressive », mais « dans un après qui, plus exactement, correspond la plupart du temps avec le processus en cours » [10] . On peut s’accorder sur le fait que l’intention n’est pas antérieure au langage. C’est par le langage qu’elle prend sens. La verbalisation la concrétise, l’intention se fait alors projet ; un projet plus ou moins clair et précis. Envisageons une intention double : une intention initiale qui relève du projet global, précède le geste, dynamise la mise en œuvre, et une intention adaptée qui se poursuit dans le geste, fait corps avec l’évolution et l’avancée du travail. Cette intent

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