Elles étaient seize : Les premières femmes journalistes au Canada
188 pages
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Description

Seize journalistes canadiennes, à l’été 1904, font le voyage en train pour visiter la Foire universelle de Saint-Louis. Au cours de ces dix jours riches en péripéties, elles fondent le Canadian Women’s Press Club (CWPC), premier du genre au pays.
S’appuyant sur des lettres et des entrevues, mais surtout sur les articles de journaux produits dans le sillage de l’événement, Linda Kay dresse un portrait saisissant de ces femmes qui avaient en commun de n’avoir que peu de droits civiques, et met en lumière les divergences culturelles entre les membres francophones et anglophones du groupe. À la faveur d’une analyse minutieuse des prises de position individuelles et des dynamiques collectives, elle évoque avec brio les luttes menées par ces femmes, et nous permet de mesurer l’ampleur du chemin parcouru.
Linda Kay est professeure au Département de journalisme de l’Université Concordia.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 03 mars 2015
Nombre de lectures 7
EAN13 9782760632332
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Mise en pages: Yolande Martel epub: Folio infographie Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada Kay, Linda, 1951- [Sweet sixteen. Français] Elles étaient seize: les premières femmes journalistes au Canada Traduction de: The sweet sixteen. ISBN 978-2-7606-3232-5 1. Canadian Women’s Press Club – Histoire. 2. Femmes journalistes – Canada - Biographies. 3. Femmes en journalisme – Canada – Histoire – 20 e siècle. 4. Femmes et presse – Canada – Histoire – 20 e siècle. I. Titre. II. Titre: Sweet sixteen. Français. PN4912.K3914 2014 070’.0820971 C2014-941250-9 ISBN (PDF) 978-2-7606-3234-9 ISBN (ePub) 978-2-7606-3233-2 L’édition originale de cet ouvrage est parue sous le titre: The Sweet Sixteen. The Journey That Inspired the Canadian Women’s Press Club © McGill-Queen’s University Press, 2012 Dépôt légal: 1 er trimestre 2015 Bibliothèque et Archives nationales du Québec © Les Presses de l’Université de Montréal, 2015 www.pum.umontreal.ca Cet ouvrage a été publié grâce à une subvention de la Fédération des sciences humaines de concert avec le Prix d’auteurs pour l’édition savante, dont les fonds proviennent du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada. Les Presses de l’Université de Montréal reconnaissent l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada pour leurs activités d’édition et remercient de leur soutien financier le Conseil des arts du Canada et la Société de développement des entreprises culturelles du Québec (SODEC). Elles remercient également le gouvernement du Canada de son soutien financier pour ses activités de traduction dans le cadre du Programme national de traduction pour l’édition du livre.
Introduction
Nous sommes 16. Huit Canadiennes anglaises et huit Canadiennes françaises, mais nous sommes toutes des sœurs par la pensée et par la plume, et nous nous rapprochons, unies de cœur et d’âme avant même de nous connaître. […] Ah! le bel exemple que nous avons donné là!
Anne-Marie Gleason, La Patrie, 27 juin 1904.
Les seize femmes journalistes, qui ont fondé le Canadian Women’s Press Club (CWPC) dans une voiture du train qui les menait à l’Exposition universelle de Saint-Louis en 1904, se démarquaient par là de leur époque. Les femmes n’avaient alors que peu de droits et ne jouaient aucun rôle dans les affaires de la cité. Au Canada, elles n’avaient le droit de vote ni aux élections fédérales ni aux élections provinciales et elles ne pouvaient occuper de poste dans la fonction publique. De forts préjugés s’opposaient à leur présence sur le marché du travail, particulièrement si elles étaient mariées. La femme au foyer incarnait l’image même de la respectabilité 1 , et c’était une idée communément reçue que les études supérieures ne convenaient pas au «sexe faible» 2 . En fondant une association professionnelle, ces femmes faisaient donc plus qu’un geste audacieux, elles prenaient une position politique retentissante.
Au début du siècle dernier, quelques dizaines de femmes seulement travaillaient comme journalistes au Canada. On les engageait pour tenir les pages dites féminines, qui paraissaient d’ordinaire le samedi et visaient expressément le lectorat féminin. Cette section de journal adoptait une formule éprouvée qui faisait alterner les observations personnelles d’une rédactrice avec des extraits de poésie et de prose, tirés d’autres publications, des nouvelles de la scène locale et des lettres de lectrices (accompagnées d’une réponse). Pour ces pionnières qui voulaient qu’on les prenne au sérieux comme auteures, les pages féminines représentaient un premier véhicule appréciable d’expression littéraire.
Ces journalistes ne couvraient pas l’actualité. Elles n’étaient pas engagées pour cela. Elles avaient une belle plume et mettaient à profit ce talent pour se faire une situation. En usant de pseudonymes, elles se créaient des personnalités mystérieuses. Certaines qui publiaient dans des journaux à grand tirage sont ainsi devenues de véritables vedettes. Cette célébrité n’allait toutefois pas sans paradoxe. Apparues en pleine ère victorienne, les premières journalistes se trouvaient dans une position délicate vis-à-vis de la direction de leur journal et du public, jouant à la femme nouvelle, ouverte d’esprit et audacieuse, ce qu’elles étaient véritablement, et défendant en même temps les valeurs traditionnelles d’une société qui voyait dans le mariage et la maternité la vraie vocation des femmes 3 .
À force de fréquenter le milieu journalistique, ces femmes ont su développer ce sens de la nouvelle qu’on associe aujourd’hui à la pratique même du métier. Mais elles ont dû travailler avec acharnement pour réussir à repousser les limites que leur imposaient leurs éditeurs convaincus que les femmes ne s’intéressaient qu’aux tâches ménagères. Plusieurs d’entre elles avaient reçu une formation d’institutrice, qui offrait alors une possibilité de carrière acceptable pour une célibataire, et elles transposèrent leurs talents de pédagogue dans leur écriture, se voyant comme les guides et les porte-parole de leurs lectrices en toutes matières.
Une affectation à l’Exposition universelle aurait représenté une aubaine pour n’importe quel journaliste en 1904, mais pour les seize femmes envoyées en reportage à Saint-Louis, cela constituait un accomplissement professionnel. Confinées aux pages féminines, les femmes journalistes se contentaient le plus souvent de couvrir les activités mondaines et de répondre aux questions des lectrices sur l’étiquette ou la morale. Elles avaient rarement l’occasion de voyager pour le travail et de rendre compte d’événements importants.
L’exposition marquant le Centenaire de l’achat de la Louisiane, communément désignée comme l’Exposition universelle de Saint-Louis, était la grande affaire du moment, commémorant ce que les historiens ont retenu comme la plus avantageuse vente de terrain jamais réalisée, avec la cession aux États-Unis par la France de plus de deux millions de kilomètres carrés. Ce territoire couvrait en totalité ou en partie quinze États américains et deux provinces canadiennes actuels. Et cet achat ouvrait enfin à ces deux pays la colonisation de l’ouest du continent.
L’exposition qui attira vingt millions de visiteurs et servit de cadre aux premiers Jeux olympiques tenus en Amérique du Nord fut, selon le mensuel américain National Magazine , l’un des trois plus importants sujets d’actualité en 1904, les deux autres étant la guerre russo-japonaise qui commença en février et la campagne à l’élection présidentielle qui opposa le républicain Theodore Roosevelt au démocrate Alton B. Parker 4 . Les seize journalistes canadiennes envoyées à Saint-Louis assistèrent donc à deux de ces trois événements: l’Exposition universelle et une partie de la campagne électorale qui ne figurait pas à l’origine au programme de leur voyage.
Le trajet jusqu’à Saint-Louis avec des escales à Chicago et à Détroit leur fit connaître de visu certains coins du Canada et des États-Unis et élargit considérablement leur horizon professionnel. L’exposition elle-même, avec plus de 60 pays participants, leur donnait une vue de la scène mondiale qu’autrement, dans l’ordinaire de leur travail, elles n’auraient pas eu grand chance d’observer. Elles purent ainsi découvrir de nouveaux produits et diverses innovations de partout dans le monde.
Ce voyage confirma leur statut de journalistes, elles y furent traitées avec les mêmes égards que les autres représentants de la presse, alors que leurs collègues masculins les tenaient habituellement à l’écart. Plus important encore, en fondant le CWPC, elles posèrent les bases d’une collaboration entre femmes journalistes qui contribuera, malgré les grandes distances qui les séparaient parfois, à établir leur crédibilité et à améliorer leur condition professionnelle dans les décennies suivantes.
À un moment du trajet, ces seize femmes et leur accompagnateur, George Ham, qu’on qualifierait aujourd’hui de directeur des relations publiques du Canadien Pacifique, reconnurent qu’il y avait dans cette voiture de train une concentration de talents qui gagneraient beaucoup à se regrouper. Il fallait absolument empêcher ce potentiel remarquable de se dissiper bêtement à la fin du voyage. Ham les incita à créer un organisme qui les représentât et, ensemble, ces journalistes francophones et anglophones mirent sur pied le Canadian Women’s Press Club, la première association de femmes journalistes dans le monde à se constituer sur une base nationale. Le CWPC allait par la suite devenir le club de presse féminin, établi sur une telle base, le plus ancien du monde.
Dès ses débuts, le CWPC se donna trois objectifs concrets: promouvoir et protéger les intérêts professionnels de ses membres, favoriser le développement d’un sentiment national canadien dans les journaux où elles publiaient et encourager une haute tenue littéraire dans l’écriture journalistique. À une époque où n’existait pas d’école de journalisme au Canada et où les femmes n’avaient qu’un accès limité aux études supérieures, le club devint un lieu de formation et d’information crucial. Les membres purent y échanger sur leur pratique du métier et, grâce aux laissez-passer accordés par les compagnies de chemins de fer, elles purent aussi acquérir un savoir de première main sur le Canada, sa géographie, son histoire et ses habitants.
Ce petit club professionnel pour femmes prit très vite de l’importance. Des sections locales, où les journalistes pouvaient se rencontrer régulièrement, s’ouvrirent partout au pays. Ses effectifs à l’échelle nationale atteignirent un sommet à la fin des années 1960, avec près de 700 membres. Pour en faire partie, les postulantes devaient prouver qu’elles avaient publié dans des journaux ou des magazines et qu’elles avaient été payées pour le faire. Le CWPC accrut son influence au point que d’éminentes figures politiques et même les premiers ministres Lester B. P

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