Un Amour virtuel.
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Description

Cette nouvelle (en cours d'écriture) est le petit frère de mon roman qui traite du phénomène de la cyber-dépendance.
Elle décrit à travers une histoire romancée les histoires réelles et virtuelles vécues par Cyril, un jeune homme de 20 ans.

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Publié par
Publié le 30 août 2014
Nombre de lectures 23
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Langue Français

Extrait

Un amour virtuel « Il m'est lon tem s arrivé d'oublier ue derrière les ordinateurs, il avait des ens. Des ersonnes vivantes ca ables de réfléchir à la conscience ro re et ui ne seraient as le reflet-miroir ue e nourrissais dans mon ima inaire ». 2001, une datephare dans l’existence de cet homme, à présent proche de la quarantaine. Nous sommes en 2011. 10 ans plus tard, Cyrildécide d’arrêter le temps, «ce n’est pas bien difficile à faire» se ditil et il se résout à ne pas regarder sa montrel’espace d’un moment. Pendant un instant ilpouffa, un rire d’incompréhension peut-être, envers lui-même car Cyril vivait toute sa vie dans la « culture del’immédiateté». Une pratique inconscientede tous les jours qui touchait l’ensemble de son entouragepar-delà même les frontières des étendues territoriales. Toujours plus vite, toujours plus haut, la société ne l’attendrait pas.Mais aujourd’hui, plus rien de cela n’avait la moindre importance àses yeux. Pour quelques heures, au moins, le temps devenait substance intemporelle et ses préoccupations n’avaient pas lieu d’être.Cyril brassa de vieux souvenirs de 2001, des morceaux de son passé quijamais ne s’effaceraient de sa mémoire. Il se souvint avec une nostalgie très affectée de son premier passage dans l’au-delà virtuel et de ses toutes premières correspondances avec les gens. Des hommes, des femmes, de tous âges et de toutes professions ancrés comme lui dans un imaginaire collectif plus que parfait. Un tantinet rebelle comme les jeunes hommes de son âge, Cyrilse délectait à l’idée de pouvoir braver les choses interdites dans un monde parallèle. Une autre planète, un « quelque part ailleurs », un défouloir de tous les possibles où il fait bon passer son temps. Samedi 20 octobre 2001 Cyril pianote nerveusement sur son clavier. Ereinté, par-delà leslimites même de l’acceptable, la fatigue embrase son corps etaffaiblit sa capacité à réfléchir. Pourtant, dans une ardeur surréaliste,les lettres défilent rageusement sur l’écran et le pointeur de la souris tournicote dans une valse effrénée. Elle s’appelaitMarjorie, un pseudonyme peut-être… comment en être sûr? Cyril n’y attachait aucune importance, car l’échangeétaitd’une intensité sans pareille.Marjorie, découverte par hasard dans l’immense mégapole Internetse trouvait dans la même salle de conservation en temps réel que lui. Certaines bribes de cette dernière lui reviennent encore en tête. -Salut Marjorie ! -Salut ! -Je m’appelle Cyril-Cool! (dsl mais j’ai beaucoup de fenêtres ouvertes).-Pas grave, comment vas-tu ? -Bien et toi ? -Super, merci ! -ASV ? -Pardon ? -Lol, tu dois être nouveau sur Internet, je me trompe ? Elle affiche 4 émoticônes consécutifs sur la même ligne. -Excuse-moi mais je ne te comprends pas, j’ai dit quelque chose qu’il ne fallait pas? -Non non, tkt, bon, je t’explique, ASV, ça veut direâge-sexe-ville, tu comprends? C’est juste une abréviation Web. 1
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Cyril lui répondit par unpour la rassurer et peut-être de peur de la perdre dans cet océan d’anonymat.Alors, j’ai 20ans, je suis un homme et je vis à Bruxelles, et toi ? Marjorie ne lui répondit que 10 minutes plus tard, ce qui irrita quelque peu Cyril. Bruxelles, c’estoù ça ? Moi, je viens de Toulon et je viens juste de fêter mes 16 ans. Ah bon, tu es française alors! Bruxelles, c’est la capitale de la Belgique, je pense qu’avec Internet, tu pourrais…Elle ne le laissa pas terminer sa phrase. Mais oui, je sais, lol ! Et sinon, t’es étudiante? Ah non, mdr !Je suis lycéenne, la FAC, c’est pour dans deux ans au moins si j’y arrive! Ouuups, oui, tu as raison, c’est parce que moi j’ai déjà terminé, chez nous, on dit les secondairesPour ne pas être niais en lui posant des questions pourtant nécessaires à ses débuts dans la toile, Cyril se résout à chercher ses réponses en interrogeant les encyclopédies du savoir collectif, des moteurs de recherches généraux. Les heures passèrent durant lesquelles ils discutaillèrentjusqu’au petit matin.Vers 2 heures 30 du matin et au grand étonnement de Cyril qui ne pouvait concevoir qu’une fille lui en fasse la demande si rapidement, Marjorie lui demanda une photo. Dis, t’as une photo? Je peux voir ? Euh, non, je n’ai pas de photo, désolé.Même pas sur ton ordinateur? Pourtant, c’est chouette de pouvoir avoir une idée du visage de quelqu’un, t’es pas d’accord?Si si, bien sûr, et toi, je peux voir ? Bien entendu ! Il te suffit de cliquer sur ce lien et tu verras mon « profil » avec une photo. Cyril s’empressa de le faire et ce qu’il vit le charma d’emblée.Elle était blonde aux yeux bleus coiffée avec une frange platine. Il essaya de ne plus se focaliser sur la partie-traîtresse pour lire tant bien que mal le contenu de sa fiche descriptive. Elle disait ceci : « Jeune lycéenne de 16 ans, chatteuse pro, modératrice et webmistress. Aime l’électro, le heavy-metal et le hip-hop. Adore aller à des concerts, les soirées entre copines et le cinéma. Message aux gros lourds, je ne suis pas célib ! » Elle mentionna son adresse email ainsi que ses identifiants de messageries instantanées. Cyril était quelque peu décontenancé par l’expression écrite de Marjorie.D’une partparce qu’à nouveau, il ne comprenait pas toute la signification des mots utilisés et d’autre part parce qu’il comprit qu’il ne devait pas tenter le diable de peur peut-être de la perdre. Marjorie, je trouve ta fiche vraiment super agréable à lire lui dit-ild’un trait.C’est gentil, il y a quelque chose de particulier qui te plait dans ce que j’ai écrit rétorqua-t-elle ? Disons que tu as l’air d’être très ancrée dans cet univers… les mots que tu utilises, tu saisIl préféra tairele fait qu’il était en train de tomber sous le charme du narcisse visuel de sa correspondante. Ah ça oui, je suis une véritable experte, lol ! Dis… je peux écrire lol aussi? Mais bien entendu, tu penses que je le prendrais mal ? mdr ! Non non, c’était juste pour lire taréaction! Marjorie se douta bien que Cyril était un novice total dans les discussions en ligne mais elle n’avait aucune envie d’être sa professeure du petit matin.L’orée des premières lueurs du jour se présentait tout doucement au dehors et Marjorie annonça à Cyril qu’elle allait devoir prendre congé de lui.
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Ecoute Cyril, je ne sais pas si t’as vu l’heure mais il est presque 6 heures du mat’… t’es un mec sympa mais je vais devoir te laisser. Je suis une régulière du « chat » donc tu me retrouveras sans problème et puis au cas oùt’as mon profil;) Allez, bn ! Bn Mar… et avant même qu’il puisse terminer d’écrire, elle prit la poudre d’escampette.Marjorie… Marjorie… il resta comme rivé sur sa fenêtre de conversation qu’il ne parvint à fermer. Il relut l’entièreté des propos échangés; ce vocabulaire qu’il ne maîtrisait pas, les émoticônes… Cyril essaya de donner du sens à ce premier contact dans le« Cyberespace ». Il ne put s’empêcher de repenser àce beau visage qui devint une hantise, un fantasme où il s’imagina être à ses côtés à la regarder sourire… et si c’était vrai? Cyril n’alla pas tout de suite se coucher car à son grand étonnement la salle principale du « chat » battait encore son plein. Une cinquantaine peut-être de personnes dont une belle partie représentées par des pseudonymes,s’exprimaientsans relâche aucune. Parmi ces noms d’emprunt, on pouvait lire «Petit_Ange», «Soleil_Noir», «Fraise »ou encore «Miss_Chocolat»… n’importe qui pouvait être n’importe quoi, peu importe lavéracité des faits car celle-ci ne devait pas exister dans le monde virtuel. Cyril regarda la profusion des mots pleuvoir sur son écran, du tout et du rien en quelque sorte. Des déclarations d’amour folichonnes à des discussions spontanées comme celle qu’il avait eu avec Marjorie en passant par des conversations vides de signification, Cyril se bidonna à la lecture de certaines phrases. Il retint plus particulièrement cet extrait qu’il trouva surréaliste tant il crût rêver. « Dam 156 » à « Miss_Chocolat » Je te nem ma petite princesse, pour toi, je ferai n’importe quoi, voilà XD, comme ça tout le monde a lu ! « Miss_Chocolat » à « Dam 156 » Han, moi aussi, t’m fort!Elle rajouta dix petits cœurssuccessifs à sa ligne. « Dam 156 » à « Miss_Chocolat » Tu veux bien sortir avec moi? J’ai trop envie de te voir! « Miss_Chocolat » à « Dam 156 » Mais oui mon prince, lol ! On retourne en MP, mdr ? « Dam 156 » à « Miss_Chocolat » Vi, vi, allez, bn les gens ! « Miss_Chocolat » à « Dam 156 » Bn tout le monde, bizoussss Cyril eut presque envie de réagir en tapant un émoticône pour soutenir leur bonheur dans la salle, voire même de questionner les tourtereaux car il ne croyait pas trop à leur histoire ; à ce stade de son immersion dans ce « nouveau monde », tout relevait de la pure fiction. L’envie était là, celle de rester un temps indéfini à contempler les innombrables lignes de « chat» et surtout à essayer de comprendre ce qui lui semblait n’être qu’un jeu théâtral.Vers 8 heures du matin, il alla chercher le sommeil avec toutes les difficultés du monde. Dans sa tête, la résonance d’un être virtuel, Marjorie.Il l’imagina belle dans la vie réelle, du moins tout aussi ravissante que sur sa photo. À cela ilne pouvait s’empêcher de croire qu’elle devait être souriante et pleine de vie. Cyril était comme assis sur un petit nuageduveteux et rien n’altérerait sa rêvasserie du moment. Sans copine depuis 10 mois, il se sentaitseul, une solitude qu’il endurait à travers sa passion de la peinture et de la musique. C’est une bonne connaissanced’école, Pierre, qui lui dit il y a à peine quelques jours qu’il serait grand temps qu’il se «relie au monde » pour ne pas moisir dans sa caverne et surtout parce que « tout le monde » a Internet.
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Une argumentation qui laissa Cyril de marbre mais qui finit par le convaincre quand il se rendit chez Pierre pour une démonstration. Ce dernier était d’une nature généralement exubérante dans son discours quand il s’agissait de persuader un ami ou un proche de faire quelque chose qui ne pourrait que lui faire du bien. Mercredi 17 octobre 2001 Ereinté par sa journée de travail et chargé d’a priori, Cyriltourne la clé de contact de sa petite carcasse de métal vieille d’une bonne dizaine d’années; il espère déjà revenir chez lui. Sur la route, un flux interminable devoitures klaxonnent, véritable fanfare urbaine qui s’égosille.Des minutes qui semblent se convertir en heures d’une attenteinsoutenables’écoulentquand Cyril arrive enfin devant l’appartementde Pierre. Un « tout petit espace de rien du tout» tel qu’ille décrivait à ses potes. Cyril s’annonça au parlophoned’une voixmolleet prit l’ascenseur pour s’arrêter au quatrième étage.Une voix grave et portante retentit jusqu’au couloir d’entrée et l’invita à franchir la porte qui était déjà grande ouverte. C’était la troisième fois à peine en plus d’un an que Cyril allait s’engager dans le gîte dePierre qu’il avait beaucoup plus l’habitude de fréquenter à l’extérieur.Pierre vivait dans un capharnaüm qu’il ne rangeait que rarement.Il se plaignait aussi régulièrement de lapetitesse de son 25 m² dont l’achat lui avait été imposé par ses parents. Dans le chambard de son logis il avait intronisé son ordinateur pour lequel il avait acheté un meuble en pin massif et une tablette coulissante pour y poser son clavier. Tout autour, par terre, un festival de câbles et un boîtier noir faisait office de modem. C’était bien la première foisde sa vie que Cyril tombait sur ce genre de dispositif informatique. Les 5 diodes rouges du joujou de Pierre battaient leur plein dans un calme mécanique remarquable. -J’arrive Cyril, donne-moi deux minutes, surtout fais comme chez toi ! cria Pierre du petit coin. -Oui, oui, pas de problème, prends ton temps ! répondit Cyril. Au bout d’un laps de temps très court, Pierre sortit en trombe du cabinet d’aisance pour aller poser une petite bise amicale sur les joues de sonpote qui d’un air admiratif laissaitcourir ses yeux le long du « prince matériel » local. -Alors, comment vas-tu depuis notre dernier verre?s’exprima Pierre visiblement content de le revoir. -Plutôt bien, juste crevé mais bon, il faut bien faire avec comme on dit ! rétorqua Cyril qui alla s’asseoir sur le canapé-lit bordeaux de Pierre. -Ça n’a pas beaucoup changé depuis la dernière fois que je suis venu chez toi lui dit-il sous un ton légèrement sarcastique. -Enfin, si, je vois quelque chose de nouveau pour moi, cette petite boite noire pleine de lumières qui clignotent; c’est ça que la presse appelle le modem,non ? -Et pas que la presse mon pote, c’estbien le terme générique pour le désigner et tout le monde en parle, ou presque ! Les deux imperturbables aimaient de temps à autre se lancer des petites piques, rien de bien méchant, juste égayer l’atmosphère à leur propre sauce. -Une petite bière pour ta panse proposa Pierre ? -Bonne idée, ça m’aidera encore à plus à décanter mes idées et les tiennes surtoutdit-il en rigolant. Cyril revint avec deux bières à forte pression, en donna une à son ami et alla se placer à côté de son ordinateur. -Wahou, dis Pierre, t’as paslésiné sur la teneur là, 9 degrés, d’autant plus que je suis à jeun! lui ditil. -T’as besoin de décompresserou non? Ouvre bien tes pavillons car ce soir, je t’ouvreles portes vers un « Nouveau Monde », ununivers qui comme moi t’emportera dans ses méandres les plus fous ! Pierre se leva et porta un toast àce qu’il considérait êtreson alter-ego électronique.
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-À toi respectable ami de tous les soirs, qui me permet de goûter aux délices du miroir universel, je lève mon verreet t’affiche ma reconnaissance éternelle ! Pierre lança en direction de sa machine un clin d’œil complice comme s’il cherchait à lapersonnifier. -Pierre, tu es totalement marteau ma parole !s’écriaCyril. -Pas dupuis sait –tout, je m’exprime… et on jamais, peut être me diras-tu la même chose quand toi aussi tu t’envolerasvers la planète « Web ». Pierre soupira à l’idée de devoir jouer au mentor non pas qu’il en était contraint mais parce qu’il détenait les clésde l’évasion facile et peu coûteuse.Il invita Cyril à s’asseoir à côté de lui et alla mécaniquementchercher deux nouvelles bières dans son petit frigidaire. La soirée allait être longue et la création d’un état euphorique était de mise.Quand il revint, Cyril lui fit un large sourireen constatant qu’il avait égayé son fond d’écran d’une femme à la beauté irrésistible. -Tu as bon goût, je suppose que tu trouves tout ça sur Internet, non ? dit-il à Pierre. -Et comment ! Un moteur de recherche, c’est un peu comme la lampe merveilleused’Aladin, tu tapes un mot et il te le trouve sous la forme que tu veux…des sites, du texte, des images et même des vidéos. Cest un gigantesque dépôt planétaire où tout le monde partage le contenu dont il dispose rétorqua Pierre avec brio. -Sans limites aucune ? demanda Cyril. -Les frontières de l’imaginaire ou de l’illégalité peut-être… mais pour que tu en arrives là, il y a bien peu de chances… c’est parce que je te connais bien que je m’avance de la sorteaffirma Pierre dans un geste rassurant. Ce dernier laissa Cyril prendre le contrôle de son ordinateur afin qu’il puisse lui aussi apprécier l’usage de la recherche documentaire sur Internet.Pierre lui indiqua où taper son mot dans le champ de recherche appartenant à « Tout-Web » leader francophone de l’exploration des connaissances sur Internet.Cyril tapa le mot « femme » et se rendit vite compte du nombre considérable de pages Internet qui y faisaient référence. Il ne tarda pas à repréciser sa recherche pour voguer vers des horizons plus illustrés, plus sensuels. Les images pleuvaientà boire debout et il resta rivé à l’écranpar fascination de cette matière visuelle qui altérait son esprit. -Et c’est là que l’homme pudique devientanimal insatiable de désirsnon refoulés, n’est-ce pas Cyril ?s’esclaffa Pierre. -Et en français, ça donne quoi ? rétorqua Cyril, totalement absorbé par les mille et une photos qui défilaient frénétiquement sous les impulsions de la souris informatique. -Tu m’as très bien compris et puis surtout, j’ai une fois de plus raison… avoue le que tu craques ! enchaîna Pierre. -Que je craque? Mais n’importe quel mec deviendrait dingueà la vue de pareilles images, c’est tout à fait normal ! répondit Cyril avec véhémence. -Je ne parle pas que de ça à vrai dire... je remarque juste que tu prends ton plaisir à utiliser le Web et que tu n’as visiblement aucun mal à t’y retrouver affirma Pierre qui savait qu’il n’aurait plus vraiment de mal à convaincre Cyril de franchir les portes du virtuel. -Certes! Sache quand même que je n’ai jamais été réfractaire aux nouvelles technologies et puis ce serait débile à l’heure actuelle parce que je n’ai que 22 ans!Et puis, j’ai un ordinateur chez moi-même si je ne l’utilisepas des masses répliqua Cyril comme pour contester tout a priori exprimé à son égard. 20 minutes plus tard, après s’être rincé l’œil au travers d’unedizaine de galeries, Cyril pose la question du consommateur potentiel comblépar ce qu’il venait d’expérimenter, «c’est combien? » Pierre se régalad’avoir réussi à influencer son ami et lui répondit qu’il lui fallait juste prendre en compte les coûts respectifs d’un modem et d’un abonnement Internet. Pierre connaissait les bons filons et luiproposa de s’en occuper gratuitement pour peu qu’il lui fasse confiance. Cyril le remercia non sans exprimer un air d’étonnement àsa proposition alléchante. - Pour quand penses-tu que ce sera fait lui demanda-t-il ?
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-Donne-moi 48 heures. Dici vendredi, tu auras le matériel nécessaire ici chez moi. Nous partirons alors faire l’installation dans ta garçonnière rétorqua Pierre. -Génial !Dis Pierre… t’as pas envie de me faire un «tout gratuit » ?... parce que là, je ne sais pas combien je doisprévoir…1 -750 francs, main d’œuvre comprise! s’enthousiasma Pierre. -C’est tout?! T’es sûr que ce n’est pas de l’arnaque ton truc là? objecta Cyril. -Mais non, je suis quelqu’un de fiable, tu sais, ne t’inquiète pas!…luirassura Pierre. Les deux amis se regardèrent en esquissant un sourire; en quelque sorte, c’est le pacte de lajoie qui venait tout juste d’être établi.Une décision sans équivoque qui allait plonger Cyril dans une nouvelle dimension de l’humanité, le « tout virtuel ». Il en connaissait déjà les rudiments à travers quelques rapides incursions dans le cadre de sa scolarité et chez ses amis dont Pierre lui offrit sa première débauche. Sans doute étaitil à mille lieux de penser que ce canal de communication le rendrait dans quelque temps accro, une dépendance sans fins qui le plongerait dans les précipices du désir interactif. Cyril prit congé de Pierre en lui serrant fermement la pince. -À vendredi alors au plus tard lui dit-il. -Tout à fait, chez toi, vers 20 heures, je serai là avec le matos nécessaire répondit Pierre. -À plus Cyril ! -À toute Pierre ! Cyril découvrait pour la toute première fois l’expression «à plus »,venue visiblement d’un autre vocabulaire qu’il supposa provenir d’Internet.Une fois le seuil la porte franchie, il dévala les escaliers des quatre étages, regagna sa voiture et démarra dare-dare. Les images des galeries sensuelles lui trottèrent encore dans la tête et les portes du probable, peut-être en matière amoureuse, grandes ouvertes. Force était de constater qu’il ne souhaitait plusendurer son célibat malgré son jeune âge ; le virtuel l’aiderait sans doute à briser les multiplesdifficultés de la première rencontre. Cyril regarda sa montre,l’heure était plombante, 2heures du matin. Il était enfin arrivé à destination. Sans plus tarder, il franchit le trottoir et les quelques mètresqui le séparèrent du seuil d’entrée de son appartement. Logé au rez-de-chaussée, il n’allait pas avoir fort à fairepour gagner son plumard. Peut-être ne trouverait-il pas le sommeil facile car il étaittoujours sous l’emprise d’unenouvelle drogue dure qui ne le lâcherait pas de sitôt. Cyril pensa à la dure journée de labeur qui l’attendrait, à ses collègues, à sa Direction qui ne manqueraient pas d’air pour luifaire le moindre reproche. Il avait récemment terminé une formation d’électricien malgré une scolarité difficile. Une orientation qui lui a permis de facilement dégotter ce poste dans une petite sociétéd’électriciens professionnels. À nouveau, une ribambelle de choses lui transpercèrent toute espérance d’un repos bien mérité tel un tourbillon dévastateur. 3 heures plus tard, la fatigue naturelle reprit le dessus et le grand enfantfinit par s’endormir.Jeudi 18 octobre 2001 Le réveil fut atroce dès lors que ses horaires de travail lui imposèrent une présence à 7 heures bien tapantes. Une réalité que sa propre horloge biologique avait encore du mal à accepter. Cyril allait être dans la lune toute sa journée, rompu du monde réel, la lutte avec soi-même allait être difficile pour tenirjusqu’àla fin de cette après-midi mais il le fallait. C’est Bertrand, jeune collègue tout aussi fraîchement sorti de l’école qui le salua le premier.1 L’Euroa été mis en circulation le 1er janvier 2002 sous sa forme fiduciaire.6
-Heps Cyril, ça va? T’as l’air totalement nazece matin, tu t’es encore tapé une soirée de malade ? lui dit-il. -Du tout, juste une petite insomnie… avec le boulot qu’on a à faire, ça passera bien vite! répondit Cyril avec fermeté. -T’es blême… enfin, jedis ça, je dis rien, faut dormir le soir, mec ! Bertrand avait cette fâcheuse habitude de balancer des commentaires sur les différents états de ses collègues ; Cyril pensa à lui fermer son clapet mais se retint de tout dérapage inutile. -Oui, bien raison ! Bon,ce n’est pas tout ça mais le travail m’attend, le boss est là? demanda Cyril. -Et comment, il pète la forme avec ses dix mille cafés matinaux ! répondit Bertrand qui s’écartait vers ses autres collègues. Cyril n’avait pas la moindre envie de travailler ce matin, à un âge où la quasi-totalité des jeunes de sa trancheétaient toujours assis sur les bancs de l’éducation nationale.Le boulot d’électricien était un vrai travail d’orfèvre où la moindre erreurdans la manipulation des systèmes de supports électriques pouvait conduire à des conséquences sérieuses. Il pressa le pas pour arriver devant le bureau du patron, la tête toujours dans les étoiles mais à la conscience professionnelle suffisante. Arrivé devant celui-ci, il fut pris d’une envie irrésistible de rebrousser chemin et de rentrer roupiller. Il reprit vite ses esprits et toqua doucement à la porte. Le patronau ton sec lui répondit et l’invita à pousser cette dernière.Son bureau était sens dessus dessous et empestait le tabac. Aussi, une multitude de câbles jonchaient lesol, un véritable capharnaüm où Cyril n’espérait rester qu’une poignée de minutes.-Comment va ma jeune recrue ?s’enthousiasma le chef-électricien fort de ses 35 années de métier. -Bien, Monsieur André, je suis chez vous pour ma directive répondit Cyril pour en venir rapidement au fait. -Très simple, jeune homme, aujourd’hui, ce sera un simple dépannage chez une de nos clientes qui se plaint d’un faux contact dans son salon. Rien de bien compliqué, vérifie juste le tableau électrique ainsi que le compteur et opère si nécessaire; si t’as des questions tu appelles la centrale, ok? Il lui donna l’adresse de la cliente qu’il écrivit sur un petitpost-it, une certaine Madame Frelon. C’est seulement ta seconde semaine chez nous alors on y va molo lui dit-il sur une voix amusée. La consigne était claire à la seule différence que Cyril allait devoirœuvrertout seul pour la première fois dans son contrat. -Bien Monsieur, jevous ferai un rapport complet dès que j’en aurai terminé, bonne journée, rétorqua Cyril sur le point de partir. -Cyril ? -Oui Monsieur ? -T’es électricien, pas écrivain, t’as pas le temps d’écrire des rapports de 10 kilomètres, sois juste efficace dans ceque le client te demande et je serai content, c’est tout! -Bien Monsieur André. -Et arrête de m’appeler Monsieur André, André suffira, la politesse des rois, ce n’estpas pour la maison, file ! Cyril virevolta en direction de la porte d’entrée et s’engageavers la sortie du bureau. Il étaitpressé d’en finir, peut-être qu’il ne s’agissait là que d’une simple besogne qu’il aillait terminer bien vite. Cyril traversa la petite cour qui entourait la petite société sans croiser ses collègues et regagna son tacot. Il consulta sur sa carte routièrel’emplacement «du frelon» et ne put s’empêcher de se marrer en imaginant partir à la rencontred’unesorte de femme-vipère qui le harponnerait en lui enfonçant 7
dans sa peau de blanc-bec un dard probablede furiosité s’il ne parvenait pas à résoudre son problème. Par chance, le trajet était fort court et ne prendrait probablement qu’un petit quart d’heure pour y poser ses pattes. Il démarra le moteur de sa petite cylindrée d’occasion et se retrouva vite faitsur le bitume en compagnie d’un flot ininterrompu d’autres automobilistes. Le nerf matinal du capitalisme avec sa coulée individualiste exhortait le monde à la précipitation quotidienne. Cyril choisit de rompre l’espace de quelques minutes avec lebrouhaha des véhicules et de la vulgarité ambiante. Il inséra dans son lecteur CD une compilation de musiques électroniques datant de la vieille école des années 90. Ce genre musical avait la faculté de facilement le transporter dans les méandresd’une jubilation éphémère. Il arriva au « 34, avenue des possibles » après 20 minutes de conduite extatique. La demeure attirait le regard, une façade en briques rouges saillantes flanquée d’unbalcon où fleurissaientune multitude de plantes et d’arbustes.Cyril franchit le seuil d’entrée et sonna à la portetrois fois. Une sonnette électrique au son fracassant qui ramènerait un mort à la vie plaisanta Cyril envers lui-même. Au bout de presque cinq minutes d’attentes, unevoix assez jeune et féminine lui demanda de décliner son identité. -Oui, c’est pour quoi? dit la voix. -C’est l’électricien pour MadameFrelon, elle a contacté notre centrale pour un problème de faux contact dans le salon répondit-il. -Ah oui, il s’agit dema grand-mère, je vous ouvre ! rétorqua le bel organe. C’est alors que Cyriltomba nez à nez avec une demoiselle, début de la vingtaine, peut-être moins. Il lui tira un sourire de convenance et elle le lui rendit sans ambages. Le jeune homme essaya de détacher son regard du joli minois de son interlocutrice pour ne pas lui montrer explicitement que sa beauté le déstabilisait quelque peu. - Suivez-moi, elle arrivera dans quelques minutes lui dit-elle. Cyril la suivit machinalement jusque dans la cuisine où elle lui proposa de se désaltérers’il le souhaitait. -On a de l’eau, du café, du thé, du jus d’orange…il l’interrompit en s’arrêtant sur le café en rajoutant qu’il serait heureux que ce dernier soit bien corsé.La jeune femme excéda la dose généralement admissible du nombre de cuillèreset en l’espace de quelques secondes à peine, Cyril quitta sa stratosphère constituée de vapeurs oniriques et d’effluves sentimentaux pour retomber sur terre.Ses yeux parlèrent à la place des mots, sa gestuelle n’échappa pas à sa locutrice qui essaya sans succès de contenir un petit rire furtif. -Comment t’appelles-tu ? lui demanda-t-elle aussitôt qu’il eût terminé sa tasse.La question arriva à l’impromptu etCyril se régala de pouvoir profiter du moment présent en attendant que la mamie vienne à sa rencontre. -Je m’appelle Cyrildit-il à travers un regard expressif qui faisait miroiter la même question à la jeune femme. -Salut Cyril, moi, c’est Virginie, contente de faire ta connaissance ! dit-elle avec enthousiasme. « Moi aussi, merci, répondit-ild’un airtimide. Cyril ne voulait aucunement courir le moindre risque de rentrer dans le jeu de l’attirance naturelle ou pire de se prendre un râteau ; il se contenta de sourire avec un brin de stoïcisme sans engager la suite de la conversation. Il tâcha de demeurer impassible àl’éclat du visage de Virginie en baladant ses yeux dans la cuisine mais finit par rougir comme une tomate. Avant même que Virginie eut le temps d’embrayer sur d’autres propos, des craquements d’escaliers se firent entendre.
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La vieille descendait en ayant pris tout son temps, une forme de délivrance peut-être pour Cyril qui se trouvait dans une situation qui lui semblait paradoxale ; il fallait revenir au travail. Il l’attendaittout en détournant progressivement son regard de Virginie. En moins de temps qu’il ne faut pour le dire,la dame se retrouva dans la sphère de discussion et s’excusa du retard occasionné par deux, trois petites bricoles. Madame Frelon avait toutes lescaractéristiques d’une femme d’âge avancé.Le front creusé pardes rides dont l’histoire se porte sur plus d’une soixantaine d’années, des cheveux de neigeet l’air fier sans pour autant tomber dans la condescendance.Elle considéra l’espace de quelques secondes le jeune faciès de Cyril et ne put s’empêcher de le lui faire remarquer. -Vous êtes vraiment de plus en plus jeunes dans vos équipes et elle esquissa un sourire. -J’ai 20 ans Madame et j’aime mon métier rétorquaCyril machinalement. -Ah mais ne le prenez pas mal mon enfant, je suis sûre que vous faites du bon travail lui dit-elle. La dameétait d’humeur taquine mais elle n’eut pas le temps d’évoquer l’existence de ses propres enfants et de sa petite fille car Cyril lui demanda de lui montrer la localisation de la panne d’électricité.- Oui, bien sûr, vous êtes pressé Monsieur, veuillez me suivre, nous allons nous rendre au salon lui répondit-elle d’un aircompréhensif. Cyril la suivit sans se poser de questions et tous deux se détachèrent du regard de Virginie qui continua tranquillement à absorber son café dans l’espace-cuisine. Le salon était d’unebeauté manifeste, bien aménagé, il regorgeait de souvenirs ramenés lors des multiplesvoyages de la dame, veuve depuis une dizaine d’années.Elle avait perdu son mari, atteint d’une crise cardiaque, une tragédie dont elle n’avait pu faire le deuiltellement son Marcel, un homme, d’une robustesse incroyable dans ses jeunes années lui manquait. Il était pour elle le conjoint idéal car il présentait aussi de fortes compétences culinaires et une passion pour les travaux manuels. Depuis sa disparition, Geneviève Frelon recourait systématiquement à des aides extérieures pour la moindre tuile pouvant survenir dans sa modeste demeure. Elle ne chercha pas non plus à mobiliser sa petite fille quand elle lui rendait visite car les travaux électriques et de plomberie, c’était avant toute chose une affaire d’hommes.- Voilà Monsieur, nous y sommes dit-elle. Elle pointa du doigtl’interrupteur noir du salon et lui pria de l’appuyer pour qu’il se rende compte de son non fonctionnement. Cyril pressa le bouton et confirma le constat de la grand-mère. - Il y a deux possibilités Madame, soit, les ampoules de votre chandelier sont plates, soit, il y a un problème avec votre boîte à fusibles lui ditil. - Je peux aller vérifier ça dans votre cave si ça ne vous pose pas de problème, ça ne prendra qu’une minuterépondit Cyril dans un élan de quasi-certitude. - Oui, bien sûr, faites donc jeune homme, Virginie vousaccompagne car les marches de l’escalier sont trop étroites pour mon grand âge, elle sourit. La jeune demoiselle agrée et invite Cyril à la suivre. Tous deux sortent du living en direction du couloir d’entrée.Parmi les différentes entrées possibles, uneporte cadenassée se trouvait là, à l’abri des regards, discrète comme violette sous la mousse. Une fois devant cette dernière, Virginie la libère de son geôlier, une libération conditionnelle qui offrirait à ce sous-sol le bienfait d’un appel d’air frais.- Suivez-moi et attention aux marches, elles sont très étroites, lance-t-elle à Cyril tout en allumant la lumière. La cave sentait le refermé, une odeur de vieux meubles et de vêtements délabrés qui déplut à Cyril. Il espéra tout bas que le couac serait résolu en un claquement de doigts.
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Tout au long de la petite descente, des toiles d’araignéesjonchaient un pauvre mur, crasseux, laissé à l’abandonpar sa propriétaire. Au bout de celle-ci se trouvait la boîte à fusibles, elle ruisselait de poussière. Àpartir de là, rien de bien sorcier pour le jeune électricien puisqu’un simple coup d’œil sur le panneau électrique lui suffisait pour tirer promptement sa conclusion. Il dirigea son regard versl’adolescente et lui montra du doigtla source de la panne de courant. -Mademoiselle, un de vos disjoncteurs n’est pas réarmé, il porte le numéro 4, celui qui alimente votre salon dit-ilplein d’assurance.- Ah bon,ce n’est que ça, rien de grave alors? répondit Virginie. La naïveté de cette dernièredonna envie à Cyril d’esquisser un sourire qu’il contint.- Non, regardez, il vous suffit de relever le disjoncteur et le courant sera rétabli sur le champ. Voilà, voulez-vous bien aller demander à votre grand-mèred’appuyer sur l’interrupteur du salon s’il vous plaît? lui demanda-t-il. Sans tarder, Virginie se presse, rejoindre samamie, elle s’attend déjà à la voirtoute heureuse de revoir le chandelier brûler de ses mille feux car le résultat étaitaux dires de l’électricien, garanti.Sitôt arrivée en haut de la cave, elle tombe nez à nez avec Geneviève qui était restée dans le couloir, impatiente de connaître le diagnostic du travailleur. -Alors, Virginie, qu’a-t-il dit ? lui demande-t-elle. -Il n’y a vraiment pas de quoi s’alarmer mamy, selon lui, tout devrait fonctionner, tu veux bien presser l’interrupteurdit-elle. Elles se dirigent toutes deux, confiantes, vers le salon et sans tarder, Geneviève Frelon appuie de sonindex le bouton d’alimentation. En une fraction de seconde à peine, le chandelier inonda de lumière le living à la surprise de la damequi s’étonna du travail si rapide du jeune électricien.Virginie se réjouit de retrouver la pièce à nouveau toute lumineuse et le visage radieux de sa grand-mère qui ne tarde pas à exprimer son contentement. - Quel brave garçon quand même! Comment s’appelle-t-il encore demanda-t-elle à sa petite fille. - Cyril, répond-elle en partageant la satisfaction de cette dernière. -Je m’en vais d’ailleurs lui dire que tout fonctionne, je reviensmamy lui dit-elle tout en se précipitant vers la cave. Pendant ce temps, l’électricien était resté dans lapénombre de la pièce souterraine à attendre patiemment une réaction de sa cliente. Ilse disait tout bas que d’autres problèmes électriques pourraient survenir si l’appareillage électrique n’était pas entretenu, il décida d’en toucher un mot à la propriétaire.Son analyse du dispositif prit une fin inopinée quand derrière lui apparut le visage de Virginie. Elle paraissait radieuse. - Voilà, la lumière est revenue dans le salon comme vous avez dit lui ditelle ! - Tant mieux! Comme je vous l’ai expliqué il suffisait tout simplement de relever le petit levier vert du disjoncteur numéro 4, c’est celui qui alimente votre salon. Tous les leviers doivent être normalement levés sauf en cas d’incident électrique où ilspourraient être baissés, vous comprenez ? Cyril se la joua bon pédagogue car il ne souhaitait pas que le même scénario puisse se reproduire à l’avenir.- Oui, oui, ne vous inquiétez pas, elle lui jette un regard conciliant et un sourire qui malgré la faible luminosité de la cave illuminèrent sa joli personne. - Merci répondit-t-il en lui offrant un sourire timide. - On remonte ? lui dit-elle. Le jeune électricienacquiesce d’un signe de têteet ils regagnèrent sans tarder le salon où les attendait sous une pluie de lumière Madame Frelon. Sitôt arrivés devant elle, Cyril se fait couvrir de paroles élogieuses. - Jeune homme, vous avez fait un travail extraordinaire, vraiment, vous pouvez être fier de vous ! lui dit-elle dans un élan de gratitude qui le déstabilisa quelque peu. - De rien Madame, avec plaisir ! lui réponditil. - Je vous dois combien ? demanda la Frelon. - À moi, rien Madame, on vous enverra une facture dans les prochains jours.
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- Très bien mais dites-moi, vous ne refuserez pas un petit quelque chose en plus ? lui dit-elle spontanément. -Je… que voulez-vous dire ? Il balbutie. - Tenez ! La dame sort subitement un billet de 50 francs de sa poche ; son geste surprit aussi bien Cyril que Virginie. -Madame, je… Il rougit à la vue duprésent qui allait lui être bien utile en ce milieu de mois. - Prenez, prenez donc, votre sympathie et votre professionnalisme le méritent amplement ! rétorque la Frelon en le regardant droit dans les yeux. -Merci… merci Madame… il se tut en interrogeantdu regard Virginie qui lui sourit en retour. Comme l’horloge professionnelle avançait ne l’attendait pas, Cyril annonça son départ en signalant que la facture de sa prestation leur serait expédiée par voie postale. Il prit alors congé de sa cliente et deVirginie qu’il remercia tant pour l’accueil que pour le cadeau pécunier. Sur le cheminvers la sortie, il s’entretint encore avec labelle adolescente à propos de sa grand-mère et de sa gentillesse dont celle-cine faisait pas l’unanimité au sein de lasociété qui l’avait engagé. -Vous savez, on a souvent des préjugés sur les personnes que l’on ne prend pas le temps de connaître, en tout cas on peut dire que ma mamy vous apprécie ! lui dit-elle toute souriante. -Oui, n’oubliez pas encore de la remercier pour moi… vraiment… le côté émotionnel de Cyril refit surface mais il n’avait plus le temps depenser à quoi que ce soit hormis le fait de franchir le seuil et de regagner son quatre roues. Il la regarda une dernière fois, son sourire resplendissant, son minois angélique, ses yeux bleus comme l’océanet sa longue chevelure blonde. L’espace d’une demi-seconde, il eut envie de la prendre dans ses bras fragiles, peut-être même de l’embrasser mais ce n’étaitabsolument pas raisonnable se dit-il et il refoula son désir. La porte PVC se referma derrière lui et dans sa tête un beau moment de partage. Il se dirigea vers sa voiture et reprit la direction de la compagnie, le cadran numérique affichait 8 heures 30,il était donc resté auprès de sa cliente près d’une bonne heure.La journée allait être longue. Cyril n’eut pas la chance de retrouver la même ambiancechaleureuse à travers les cinq autres dépannages qui jonchèrent sa journée. Une boite à fusible défectueuse, des câbles d’alimentation à remplacer,il tenait bon malgré la pression des particuliers à fournir un travail rapide et de qualité qui pèserait lourd dans la balance de son évaluation professionnelle. Quand il eut terminé à 18 heures et adressé les factures au service comptable, il rentra chez lui, éreinté. Il n’avait qu’une envie, celle de s’affaler sur son canapé-lit. Ne penser à rien, se laisser tomber dans lesabysses du sommeil, la nuit le porterait jusqu’au petit matin et un nouveau jour se lèvera. 2 «In girum imus nocte et consumimur igni » Demain, c’est le grand jour, il revoit Pierre, celui qui va en toute vraisemblancecréer le bouleversement dans sa vie et pour y arriver, il le relierait tout simplement au Cyberespace. Cyril ne se soucia guère des questions techniques qui entraveraient sans doute sa mise en route, il cherchaà s’endormir en se plongeant dans l’écoute de musiques, du rock, des sons électroniques, des morceaux choisis qui généralement le mettaient dans un état de transe agréable à la lisière de l’euphorie.Par moments, Cyril décolle et quand il ferme les yeux, il se laisse emporter par son imaginaire sans limites. Il n’est plus seul.UneAphrodite à la beauté éclatante lui sourit et l’invite à la rejoindre.
2 « Nous tournons en rond dans la nuit et nous sommes dévorés par le feu. »
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