Les enfants de Soundiata et de Pokou
157 pages
Français

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Les enfants de Soundiata et de Pokou , livre ebook

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Français

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Description

Le pays éburnéen vit la période la plus incertaine de son histoire. A peine installé au pouvoir, l'héritier politique du Père de l'indépendance a mis en oeuvre l'"éburnité", nationalisme culturel conduisant à des mesures discrimatoires sur la scène socio-politique.
A travers ce roman, l'auteur nous fait côtoyer, voire toucher certains problèmes du quotidien communs à tant de sociétés africaines aujourd'hui, dénonçant la mauvaise gouvernance, le gaspillage des ressources du pays, le népotisme, le tribalisme, la guerre, les emprisonnements arbitraires etc.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2007
Nombre de lectures 225
EAN13 9782296631366
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LES ENFANTS

DE SOUNDIATA ET POKOU
© L’H ARMATTAN, 2007
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris

L’H ARMATTAN, I TALIA s.r.l.
Via Degli Artisti 15 ; 10124 Torino
L’H ARMATTAN H ONGRIE
Könyvesbolt ; Kossuth L. u. 14-16 ; 1053 Budapest
L’H ARMATTAN B URKINA F ASO
1200 logements villa 96 ; 12B2260 ; Ouagadougou 12
E SPACE L’H ARMATTAN K INSHASA
Faculté des Sciences Sociales, Politiques et Administratives
BP243, KIN XI ; Université de Kinshasa – RDC
L’H ARMATTAN G UINEE
Almamya rue KA028
En face du restaurant Le cèdre
OKB Agency
Conakry – Rép. de Guinée
BP 3470

http://www. librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-02501-1
EAN : 9782296025011

Fabrication numérique : Socprest, 2012
Ouvrage numérisé avec le soutien du Centre National du Livre
Diaby Salif


LES ENFANTS

DE SOUNDIATA ET DE POKOU


roman


L’Harmattan
A Jean Hélène de Rfi
A toutes les victimes
de la haine
INTRODUCTION
Kélétigui Sanogo appartient, à travers sa mère, à une famille de propriétaires terriens qui a donné son nom à la ville de Tiézankro, au cœur du pays éburnéen. Très jeune, il est animé par une farouche volonté de réussir. A l’approche de la quarantaine, il est à la tête de l’une des plus grandes fortunes de la zone forestière.
Chez les Sanogo, on milite de père en fils dans les rangs du Rassemblement du Peuple Eburnéen. Seulement, les temps ont changé. La réinstallation du multipartisme contraint l’ancien parti unique à la cohabitation avec une centaine de formations politiques.
Entre temps, l’héritier constitutionnel du père de l’indépendance crée un concept politique, l’éburnité, lequel se nourrit de tribalisme, de xénophobie et d’exclusion. Lorsqu’il apparaît qu’un candidat à la Présidence de la République est capable de battre le professeur Hermann Broh, successeur du Père de la Nation, le clan de l’éburnité au sein du RPE mène des manœuvres pour le disqualifier. Ce candidat auquel le clan attribue une origine étrangère est dans l’incapacité constitutionnelle de briguer la Présidence de la République Eburnine de Biélérazi compte tenu de la loi sur l’éligibilité. Telle est la situation dans laquelle se trouve Noah Diawara, ancien ministre de l’Economie et des Finances du Père Fondateur.
C’est un procédé que désapprouve Kélétigui Sanogo. Le notable de Tézankro, membre du bureau politique du RPE quitte ce parti pour soutenir le combat de l’opposition contre l’éburnité. Ses compagnons d’hier ne le lui pardonnent pas. Ils lui trouvent une origine étrangère. Il est arrêté et jeté en prison. Tiézankro est secouée par cet événement.
La République Eburnine de Biélérazi est le théâtre d’une chasse aux sorcières. La suspicion s’installe entre les Biéléraziens. Le pays bascule dans la guerre. C’est le temps des escadrons de la mort et des charniers.
I
L’horloge indique cinq heures. La ville reste pourtant muette. Seul le chant du coq fend de temps en temps le silence. En dehors de cela, rien d’autre. Les rues sont désertes. Y a-t-il des fidèles à vouloir prendre le risque d’aller narguer, sous le couvre-feu, au nom de la foi, du sens de l’absolu de Dieu, les hommes en armes postés aux principaux carrefours de Tiézankro ? S’il s’agit de mourir en martyr, la ville avait déjà accompli sa part de sacrifice. La chasse aux assaillants, décrétée par les autorités locales, avait coûté la vie à quelques jeunes arrêtés abusivement, puis morts sous les sévices.
Une fois de plus, l’appel du muezzin ne prendra pas son envol au-dessus des quartiers. Il reste désespérément cloué au sol. Il en est ainsi depuis des mois. Certes, les fidèles d’Allah ne sont pas les seuls à subir ces contraintes en fonction desquelles les églises et les temples ont réaménagé leurs heures de culte.
Kélétigui Sanogo se tient debout dans un coin de son salon. Tourné vers l’orient, il multiplie les prosternations devant Allah. Il est rattrapé par les soucis quotidiens avant même d’avoir quitté le tapis. Consécutive à un coup d’Etat militaire avorté, la crise politique que subit le pays parasite les affaires. La cartoucherie de Kélétigui Sanogo est fermée à la suite d’un ordre donné par le préfet du département quand sa boulangerie accumule les pertes. Sont également pour lui une source d’inquiétude son dépôt de pharmacie, sa librairie, sa station d’essence, sa société de transport et surtout ses plantations désertées par la main d’œuvre d’origine étrangère de plus en plus victime d’agressions xénophobes.
Les habitants de Tiézankro se sont davantage appauvris en ces jours d’incertitude. Ils en sont réduits à recourir à certaines astuces pour pouvoir satisfaire leurs besoins alimentaires. Par exemple, ils échangent volontiers le peu de cacao et de café récolté contre le riz, l’huile et le sucre.
De toute évidence, ce troc profite surtout aux commerçants libano-syriens installés depuis des générations à Tiézankro. Ceux-ci sont détenteurs du monopole s’agissant de la distribution des denrées de base. Il leur est attribué d’être habiles dans le maniement des dessous de table, pratique honteuse devant laquelle les fonctionnaires de Lagoonville aux salaires dérisoires sont si vulnérables.
"C’est l’arme qu’ont utilisée les familles Toufic, Jaber et Assef", jure-t-on à Tiézankro, "pour écarter les concurrents locaux du commerce juteux des produits alimentaires de base".
Redoutables Libano-Syriens qui attisent la frustration de la population toujours pauvre autour d’eux. Ils possèdent de belles résidences. Leurs magasins sont parmi les plus grands et leurs camions parmi les plus gros de la région.
Alors que le soleil peine à dissiper l’épaisse brume dans laquelle la ville s’est drapée, quelques tracteurs roulent en direction des exploitations agricoles encore entretenues autour de la cité.
Ce matin-là, Kélétigui déploie un ensemble bazin bleu clair imprégné de la luminosité de l’amidon et surmonté, à la hauteur de la poitrine, par une somptueuse broderie dorée. Il exhibe une toque blanche et de splendides babouches marocaines. Il s’installe sur un canapé au bout d’un hangar construit devant sa villa. Derrière une cloison de bois, des individus occupent une rangée de chaises. Ce sont en majorité des chefs de famille, une charge difficile à porter en ces temps de crise. Aussi, ont-ils laissé leur orgueil chez eux pour venir frapper à la porte de Kélétigui Sanogo. Car chacun sait dans la cité que cet homme est une exception. Même si les affaires ne marchent pas, il reste sensible à la souffrance des gens. Pendant qu’ils l’attendaient, sa maison les faisait rêver. Avant qu’il ne la bâtisse, l’idée était répandue à Tiézankro que l’automobile, mieux qu’un simple outil, était un attribut de la réussite sociale. De telle sorte que les gros planteurs, tout en continuant à dormir dans une obscure "deux chambres-salon" de la cour familiale, reculaient rarement devant l’acquisition coûteuse d’un véhicule bâché ou d’une berline lorsque venait à remonter le cours du cacao et du café.
Kélétigui quant à lui a ajouté à la voiture le confort d’une maison. A présent, sa demeure suscite les commentaires les plus élogieux au marché et à la gare routière du chef-lieu départemental. Certains affirment qu’elle offre un plus grand nombre de chambres que la résidence du préfet de Tiézankro.
Selon ces mêmes personnes, le sol carrelé brille avec un tel éclat chez Kélétigui qu’il rappelle les reflets de la rivière sous un soleil de saison sèche. Les uns et les autres pensent que l’exemple de cet homme va faire tâche d’huile en raison de l’émulation qu’entretiennent les grandes familles de Tiézankro. Encore une dizaine ou une quinzaine de villas comme celle-ci et la population verra la cité s’embellir d’un quartier à l’autre de joyaux de l’immobilier.
C’est l’heure des audiences. Un vieil habitant du nord de la ville rejoint son hôte de l’autre côté de la cloison. Il lui raconte que le plus jeune de ses enfants tousse sans arrêt. Il lui a administré des remèdes à base de racines et d’écorces qu’il a l’habitude d’utiliser. Grâce à ce traitement, il s’est débarrassé par le passé de ses toux les plus tenaces. Or, cette fois la moindre amélioration quant à l’état de l’enfant ne s’est manifestée. Très inquiet, il l’a conduit à l’hôpital.
Le docteur veut bien

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