Brevet, protection et diffusion des connaissances : une relecture néo-institutionnelle des propriétés de la règle de droit - article ; n°1 ; vol.79, pg 233-254
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Brevet, protection et diffusion des connaissances : une relecture néo-institutionnelle des propriétés de la règle de droit - article ; n°1 ; vol.79, pg 233-254

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Description

Revue d'économie industrielle - Année 1997 - Volume 79 - Numéro 1 - Pages 233-254
En suivant une approche néo-institutionnelle inspirée de celle de North, nous montrons comment le brevet joue son rôle d'incitation à l'innovation et de vecteur de sa diffusion. En général, on suppose que la règle de droit incite à une codification des connaissances en échange de la création de droits de propriété temporaires. Selon nous, la difficulté et le coût de ces deux opérations empêchent une codification complète de la connaissance et l'établissement de droits non ambigus d'usage et de captation des fruits de l'innovation. Le brevet est donc incomplet. Cette incomplétude est palliée par l'organisation, à un niveau institutionnel ou bilatéral (contractuel), d'un débat entre les inventeurs, leurs concurrents et les utilisateurs des inventions. Ces négociations permettent d'une part, d'assurer le transfert des connaissances, d'autre part de préciser au cas par cas l'étendue effective des droits de propriété de chacun. Selon nous, les politiques publiques de la science et de la technologie doivent tenir compte de ces négociations qui confèrent ses propriétés effectives à la règle de droit. Nous soulignons notamment que l'actuel droit du brevet permet d'adapter finement les droits d'usage effectifs des inventions à l'économie spécifique des différents domaines des connaissances ainsi qu'à la particularité de chaque situation concurrentielle.
Following a New-lnstitutional approach inspired by North, we show how patents play their role of protecting the innovators while being the vectors of knowledge diffusion. The general approach states that the Patent Law incites innovators to codify their inventions in exchange of temporary property rights on them. We show that it is intrinsically too difficult and too costly to perfectly codify knowledge and to state unambiguous rights of using and benefiting from the effects of inventions. Consequently patents are incomplete. This incompletness is overcome by the organization at an institutional level or at a bilateral (contractual) level of debates between the innovator, the competitors and the users of the invention. These negotiations enable them, on the one hand, to transmit knowledge even if its stays partially tacit and private, on the other hand, to state clearly the effective extent of each party's property rights. According to this analysis, public policies for science and technology should take into account these bargaining processes that rally round the patent system because they affect deeply the properties of legal rules. We especially show that the existing (incomplete) patent law enables economic agents to finely adapt the usage rights of innovations to the specific economics of the various knowledge domains and to the particularities of each competitive situation.
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1997
Nombre de lectures 28
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Christian Bessy
Eric Brousseau
Brevet, protection et diffusion des connaissances : une relecture
néo-institutionnelle des propriétés de la règle de droit
In: Revue d'économie industrielle. Vol. 79. 1er trimestre 1997. pp. 233-254.
Citer ce document / Cite this document :
Bessy Christian, Brousseau Eric. Brevet, protection et diffusion des connaissances : une relecture néo-institutionnelle des
propriétés de la règle de droit. In: Revue d'économie industrielle. Vol. 79. 1er trimestre 1997. pp. 233-254.
doi : 10.3406/rei.1997.1663
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rei_0154-3229_1997_num_79_1_1663Résumé
En suivant une approche néo-institutionnelle inspirée de celle de North, nous montrons comment le
brevet joue son rôle d'incitation à l'innovation et de vecteur de sa diffusion. En général, on suppose que
la règle de droit incite à une codification des connaissances en échange de la création de droits de
propriété temporaires. Selon nous, la difficulté et le coût de ces deux opérations empêchent une
codification complète de la connaissance et l'établissement de droits non ambigus d'usage et de
captation des fruits de l'innovation. Le brevet est donc incomplet. Cette incomplétude est palliée par
l'organisation, à un niveau institutionnel ou bilatéral (contractuel), d'un débat entre les inventeurs, leurs
concurrents et les utilisateurs des inventions. Ces négociations permettent d'une part, d'assurer le
transfert des connaissances, d'autre part de préciser au cas par cas l'étendue effective des droits de
propriété de chacun. Selon nous, les politiques publiques de la science et de la technologie doivent
tenir compte de ces négociations qui confèrent ses propriétés effectives à la règle de droit. Nous
soulignons notamment que l'actuel droit du brevet permet d'adapter finement les droits d'usage effectifs
des inventions à l'économie spécifique des différents domaines des connaissances ainsi qu'à la
particularité de chaque situation concurrentielle.
Abstract
Following a New-lnstitutional approach inspired by North, we show how patents play their role of
protecting the innovators while being the vectors of knowledge diffusion. The general approach states
that the Patent Law incites innovators to codify their inventions in exchange of temporary property rights
on them. We show that it is intrinsically too difficult and too costly to perfectly codify knowledge and to
state unambiguous rights of using and benefiting from the effects of inventions. Consequently patents
are incomplete. This incompletness is overcome by the organization at an institutional level or at a
bilateral (contractual) level of debates between the innovator, the competitors and the users of the
invention. These negotiations enable them, on the one hand, to transmit knowledge even if its stays
partially tacit and private, on the other hand, to state clearly the effective extent of each party's property
rights. According to this analysis, public policies for science and technology should take into account
these bargaining processes that rally round the patent system because they affect deeply the properties
of legal rules. We especially show that the existing (incomplete) patent law enables economic agents to
finely adapt the usage rights of innovations to the specific economics of the various knowledge domains
and to the particularities of each competitive situation.Christian BESSY
CEE & ATOM (université de Paris 1)
Éric BROUSSEAU
Université de Nancy II & ATOM (université de Paris 1)
BREVET, PROTECTION ET DIFFUSION
DES CONNAISSANCES :
UNE RELECTURE NÉO-INSTITUTIONNELLE
DES PROPRIÉTÉS DE LA RÈGLE DE DROIT*
Mots dés : Brevet - Contrat - Droit de la propriété intellectuelle - Économie des connais
sances - Économie du droit - Économie néo-institutionnelle - Institutions - Licence.
Key words : Patents - Contracts - Intellectual Property Rights - Laws economics - New
Institutional Economics - Institutions - Licences.
En matière de propriété intellectuelle, les politiques publiques de la science
et de la technologie mettent fréquemment l'accent sur le rôle du brevet. La
problématique centrale semble être la définition de l'étendue optimale et la
durée des droits d'exclusivité accordés aux inventeurs pour permettre de st
imuler l'innovation tout en assurant sa diffusion. En écho, l'analyse écono
mique aborde principalement la question du brevet à partir du dilemme pro
tection-diffusion (cf. la littérature passée en revue par Deffains [1997]). De
nombreuses analyses ont déjà contribué à nuancer ce conflit en considérant le
système du brevet comme un mécanisme de coordination (Foray [1995]) et en
mettant l'accent sur ses propriétés informationnelles (Kitch [1977]). On peut
également citer les recherches prenant en considération les accords de licence
(e.g. Ordover [1991]).
Dans cet article, nous prolongeons cette seconde voie d'analyse en montrant
comment le brevet joue son rôle de protection de l'innovateur et de vecteur de
la diffusion des connaissances. Toutefois, nous insistons sur le fait que ces
(*) Cet article est issu d'une recherche menée au sein du centre ATOM (université de Paris 1 )
et financée par une subvention du Commissariat Général du Plan dans le cadre de son
Programme « L'entreprise et l'économie de l'immatériel ». Nous remercions les partici
pants au séminaire ATOM, en particulier Armelle Mazé, ainsi que Francis Hagel pour
leurs critiques d'une première version de ce texte. Nous restons cependant les seuls re
sponsables des lacunes qui pourraient subsister dans la présente version.
REVUE D'ÉCONOMIE INDUSTRIELLE — n° 79, 1" trimestre 1997 233 fonctions ne sont pas « automatiquement » assurées par la règle de droit. deux
En suivant une démarche néo-institutionnelle inspirée de celle de North
[1990], nous rappelons que la règle de droit participe du cadre institutionnel
qui définit des contraintes formelles et informelles pesant sur les comporte
ments individuels. Ces contraintes n'assurent pas d'emblée la coordination,
mais elles permettent de définir un cadre commun au sein duquel les agents ont
recours à des ajustements en fonction des spécificités des situations dans le
squelles ils se trouvent. Dans ce contexte, il apparaît que le système du brevet
organise la protection et la diffusion d'une manière différente de celle que l'on
suppose généralement. Il permet d'instaurer les bases de négociations menées
soit de manière publique devant des tiers, soit de manière bilatérale et privati
ve, au cours desquelles se réalise réellement la transmission des connaissances
(tacites et codifiées), la définition des droits d'usage de celles-ci, les modalit
és de leur rémunération.
Par une sorte de renversement, il apparaît alors que l'incitation à l'innova
tion n'est pas liée à une protection rigide, conférée par la définition claire de
l'étendue et de la durée des titres de propriété, mais, paradoxalement, à la défi
nition minimale et incomplète d'un principe de droit de la propriété intellec
tuelle qui permet aux acteurs de négocier les modalités effectives de valorisa
tion de leur effort d'invention. De la même façon, nous insisterons sur le rôle
des débats contradictoires et des négociations bilatérales dans la diffusion des
connaissances. Selon nous, si la codification obligatoire joue un rôle import
ant, le débat technique qui est instauré entre des déposants puis les détenteurs
des brevets et leurs partenaires ou concurrents économiques est la principale
voie de révélation.
Dans ce contexte analytique, les marges de manoeuvres des gestionnaires
des politiques scientifiques et technologiques apparaissent comme plus larges
et complexes que dans les analyses traditionnelles, car l'environnement inst
itutionnel ne produit pas d'effets mécaniques sur les comportements.
Ce travail s'appuie sur une enquête menée auprès d'une dizaine d'entre
prises françaises innovantes et internationalisées. Elle porte sur la manière
dont elles gèrent (c'est-à-dire développent, protègent et valorisent) leurs re
ssources cognitives dans le cadre de leurs relations avec leurs partenaires éco
nomiques. Menée au travers d'entretiens approfondis avec les responsables
des services de gestion de la propriété intellectuelle ainsi qu'avec le

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