Hartmut Titze, Der Akademiker-Zyklus, Göttingen, Vandenhoek et Ruprecht, 1990 ; n°1 ; vol.53, pg 70-75

Christophe Charle

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Histoire de l'éducation - Année 1992 - Volume 53 - Numéro 1 - Pages 70-75
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• Publié par: HISTOIRE_DE_L-EDUCATION
• Publié le: 01 janvier 1992
• Nombre de lectures: 10
• Langue: Français

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Christophe Charle
Hartmut Titze, Der Akademiker-Zyklus, Göttingen, Vandenhoek
et Ruprecht, 1990
In: Histoire de l'éducation, N. 53, 1992. pp. 70-75.
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Charle Christophe. Hartmut Titze, Der Akademiker-Zyklus, Göttingen, Vandenhoek et Ruprecht, 1990. In: Histoire de
l'éducation, N. 53, 1992. pp. 70-75.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hedu_0221-6280_1992_num_53_1_254670 Notes critiques
les possibilités et les impossibilités d'une recherche statistique pour
le Moyen Âge. D'un tout autre genre est la présentation - méthodo-
logiquement intéressante - d'une reconstruction de la population
étudiante dans une région géographique délimitée (article de P.
Ferté). D. Julia et J. Revel ont indiqué les possibilités et les pièges
d'une étude quantitative de grande ampleur. Par une connaissance
approfondie, une analyse scrupuleuse et une interprétation ingé
nieuse des sources, même défaillantes, un historien peut dégager les
tendances et mécanismes d'une évolution historique. C'est ce qui
ressort des deux articles de L. Brockliss, mais aussi des autres
contributions de ce livre. Dès à présent, les deux volumes de
Y Histoire sociale des populations étudiantes constituent un ouvrage
de base, du niveau des deux volumes de L. Stone. Ils n'ont pas seu
lement révisé ou nuancé la thèse présentée par Laurence Stone, mais
ils ont également apporté un affinement dans les méthodes méthodol
ogiques et dans l'interprétation des données quantitatives. Il est seu
lement regrettable que les éditeurs des deux volumes n'aient pas éta
bli à la fin de ce second volume un bilan d'ensemble de l'enquête
qu'ils ont présentée dans l'introduction du premier volume. Les
conclusions et la synthèse doivent se lire dans les contributions indi
viduelles.
Hilde DE RIDDER-SYMOENS
TITZE (Hartmut). Der Akademiker-Zyklus. Goettingen :
Vandenhoek et Ruprecht, 1990. 600 p.
L'ouvrage de Hartmut Titze est le point d'aboutissement d'une
vaste enquête collective, le projet QUÂKRI (= Qualificationskrise)
et de recherches multiples menées par l'auteur et publiées sous
forme d'articles en allemand ou en anglais, synthétisées dans une
thèse d'habilitation dont ce livre est la version éditée. Par ses dimens
ions, ses très nombreux tableaux et graphiques (parfois en plusieurs
dimensions), ses multiples références aux textes d'époque ou aux
sources d'archives, sa confrontation permanente entre les données
chiffrées, les traitements statistiques et les témoignages, ce travail
constitue un modèle pour l'histoire sociale de l'éducation. Ses
quelques défauts - surtout sensibles au lecteur français - sont plutôt
formels qu'essentiels : démarche parfois excessivement analytique,
répétitions et renvois de ce fait entre chapitres qui retraitent une Notes critiques 71
même question sous plusieurs angles, abus des résumés intermé
diaires et finaux. Ces tâches qui viennent d'un style de thèse « à
l'allemande », admis outre-Rhin, heurtent les habitudes françaises
de concision ou de prétention à un certain agrément formel mais
n'enlèvent rien à l'ambition du sujet, à l'intérêt de l'interprétation et
aux possibilités ouvertes pour des enquêtes comparatives sur
d'autres pays européens.
Le projet visait à comprendre les modalités, la cause et les consé
quences des fluctuations régulières des effectifs étudiants des uni
versités allemandes depuis que des séries statistiques homogènes
existent sur les populations diplômées. Cette alternance de phases de
déficit de candidats aux principales professions académiques puis de
surproduction remonte au XVIIP siècle et se traduit par six cycles
dont l'amplitude régulière diminue avec l'unification progressive du
marché de l'emploi académique dans l'espace germanique. Leur
durée se réduit également à mesure que les chiffres absolus concer
nés deviennent plus importants et que les mesures de contrôle auto
ritaire de l'accès aux études sont de moins en moins praticables avec
le changement de la hiérarchie sociale, l'évolution de la fonction des
études dans les mécanismes de mobilité sociale et l'autonomisation
croissante du système d'enseignement supérieur. Des cycles forts
alternent aussi avec des cycles faibles et aboutissent à de graves
crises sociales comme celle qui marque les années de la République
de Weimar, terreau favorable au ralliement d'une partie de la jeu
nesse étudiante sans avenir aux solutions radicales et simplistes pro
posées par le nazisme (1).
Le mécanisme du cycle est double et rappelle un peu la dyna
mique des cycles classiques de la conjoncture économique : un défi
cit apparaît dans un secteur professionnel ce qui crée un effet
d'attraction ; une fois atteint le comblement du déficit, l'effet
d'appel continue en raison du retard dans la perception de la situa
tion par les jeunes générations ce qui engendre progressivement une
situation de surproduction relative de diplômés. Dans cette nouvelle déséquilibrée, se met en place un « effet-repoussoir » qui
détourne vers d'autres filières les cohortes nouvelles d'étudiants, ce
qui donne les conditions, quand la génération plus ancienne se retire
d'un coup, d'un nouveau déficit enclenchant un nouveau cycle. Ce
cycle standard se module selon les professions : plus une carrière est
ouverte, plus l'amplitude du cycle est forte car les groupes sociaux
(1) Ce phénomène est étudié plus en détail dans le livre récent de Konrad H.
Jarausch : The Unfree Professions, German Lawyers, Teachers, and Engineers, 1900-
1950, Oxford, Oxford University Press, 1990. 72 Notes critiques
susceptibles d'envoyer leurs enfants dans ces filières de promotion
sont sensibles aux obstacles économiques et sociaux à l'entrée dans
l'enseignement supérieur. Les facultés de théologie et de philoso
phie (cette dernière regroupe au XIXe siècle en Allemagne les lettres
et les sciences et forme les professeurs) sont dans ce cas. Les cycles
sont marqués aussi, selon H. Titze, par une « double sélectivité » :
dans les périodes difficiles, l'ouverture sociale se restreint car les
élèves aux origines modestes sont découragés avant même l'entrée à
l'Université ; inversement, en période faste, la petite bourgeoisie
pousse ses enfants vers les carrières académiques où les débouchés
s'ouvrent de nouveau même pour ceux qui sont sans héritage cultu
rel ; la sociologie des filières varie ainsi par des phénomènes de
transfert interne selon le stade du cycle où se trouve une faculté. Le
droit et la médecine, les plus exclusifs, aux cycles moins nets, sont
les derniers à s'ouvrir aux nouvelles couches. La faculté de philoso
phie, dont les effectifs, notamment à la fin du XIXe siècle, augment
ent considérablement, se démocratise plus vite, attirant les anciens
étudiants de théologie et les nouveaux entrants du fait de l'extension
du système d'enseignement secondaire qui offre de nouvelles posi
tions plus attractives que le pastorat. La crise des années 1880-1890
correspond à la fin de la construction du nouvel enseignement
secondaire. La crise de surproduction académique de l' entre-deux-
guerres est du même type : la structure d'âge du corps professoral,
rajeunie juste avant la guerre de 1914, est telle qu'elle libère peu de
postes, tout comme celle des autres professions libérales. Or les dif
ficultés économiques des classes moyennes détentrices d'un capital
économique poussent nombre de leurs enfants vers les études
longues comme assurance contre le chômage et stratégie de recon
version de familles en déclin social.
S'il y a autonomisation progressive du système d'enseignement
par rapport aux changements sociaux extérieurs avec le passage
d'incitations ou d'entreprises de découragement personnalisées par
les autorités de tout type (première moitié du XIXe siècle) à des phé
nomènes de contagion à travers des réseaux de communication
sociale intégrés (livres pub