Novalis, Grains de pollen
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¯XYUHV RXYHUWHV Décembre 2015 Novalis Grains de pollen Traduction et introduction de Laurent Margantin 2 3 LESGRAINS DE POLLEN 28 /¶e&5,785( 520$17,48( On connaît assez bien les circonstances dans lesquelles lesGrains de pollenont été composés et publiés. En 1797, Novalis a vingt-cinq ans. Il a fait GHV pWXGHV GH GURLW DX[ XQLYHUVLWpV G¶,pQD HW GH /HLS]LJ PDLV V¶HVW DXVVL LQWpUHVVp j OD SKLORVRSKLH postkantienne. Après avoir composé de nombreux poèmes, premiers exercices littéraires influencés par quelques noms glorieux de la poésie de son époque, LO V¶HVW WRXUQp YHUV O¶°XYUH GH )LFKWH GRQW YHQDLW GH paraître laDoctrine de la science &¶HVW GRQF VRXV OH signe du mélange des disciplines que Novalis LQDXJXUH XQH pFULWXUH G¶XQ W\SH QRXYHDX fragmentaire, inspirée, à la fois philosophique et littéraire, on dira bientôt : romantique. 4 0DLV OH URPDQWLVPH TX¶LQDXJXUHQW OHVGrains de pollen SRVVLEOH VDQV XQH UHQFRQWUHQ¶DXUDLW SDV pWp décisive, celle, cinq ans plus tôt, de Novalis avec Friedrich Schlegel, son aîné de quelques mois, à Leipzig où ils étudient tous les deux. Celui-ci aura XQH LQIOXHQFH GpWHUPLQDQWH VXU OH MHXQH KRPPH TX¶LO décrit en ces termes dans une lettre à son frère August Wilhelm: «Il faut que je te parle de TXHOTX¶XQ: Le destin a conduit vers moi un jeune homme dont on peut attendre énormément.

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Publié le 15 décembre 2015
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Langue Français

Extrait

Œuvres ouvertes
Décembre 2015
Novalis
Grains de pollen
Traduction et introduction
de Laurent Margantin
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LESGRAINS DE POLLENOU L’ÉCRITURE ROMANTIQUEOn connaît assez bien les circonstances dans lesquelles lesGrains de pollenont été composés et publiés. En 1797, Novalis a vingt-cinq ans. Il a fait des études de droit aux universités d’Iéna et de Leipzig, mais s’est aussi intéressé à la philosophie postkantienne. Après avoir composé de nombreux poèmes, premiers exercices littéraires influencés par quelques noms glorieux de la poésie de son époque, il s’est tourné vers l’œuvre de Fichte, dont venait de paraître laDoctrine de la science. C’est donc sous le signe du mélange des disciplines que Novalis inaugure une écriture d’un type nouveau, fragmentaire, inspirée, à la fois philosophique et littéraire, on dira bientôt : romantique.
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Mais le romantisme qu’inaugurent lesGrains de pollenpossible sans une rencontren’aurait pas été décisive, celle, cinq ans plus tôt, de Novalis avec Friedrich Schlegel, son aîné de quelques mois, à Leipzig où ils étudient tous les deux. Celui-ci aura une influence déterminante sur le jeune homme qu’il décrit en ces termes dans une lettre à son frère August Wilhelm : « Il faut que je te parle de quelqu’un: Le destin a conduit vers moi un jeune homme dont on peut attendre énormément.Il m’a beaucoup plu et je suis allé vers lui, car il m’a grand ouvert le sanctuaire de son cœur. Je m’y suis installé et prospecte à présent.Un tout jeune homme, de bonne éducation, avec un visage très fin et des yeux
noirs, d’une expression splendide lorsqu’il parle avec feu de quelque chose de beauun feu d’une ardeur indescriptible - il dit trois fois plus de choses et parle
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trois fois plus vite que nous autres très grande rapidité de son intelligence et de sa sensibilité. Grâce à l’étude de la philosophie, il a acquis une grande facilité à former de belles pensées philosophiquespour lui compte le Beau, et non le Vraises auteurs préférés sont Platon et Hemsterhuis une des premières soirées passées ensemble, il m’a présenté ses idées avec une ardeur extrêmele Mal n’existe pas en ce monde et nous nous approchons à nouveau de l’âge d’or. Jamais je n’avais vu ainsi la 1 jeunesse dans sa pureté». C’est l’ardeur de la pensée et l’enthousiasme de Novalis qui frappent d’emblée
son nouvel ami qu’il n’oubliera pas, puisque, quatre ans plus tard, en 1796 doncun an avant la soit composition desGrains de pollen, ils se
1  Lettre de janvier 1792, cité par Gerhard Kurz,Novalis, Hambourg, Reinbeck, p.35.
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retrouveront et échangeront plusieurs écrits. Dans la lettre des retrouvailles, on peut lire les lignes suivantes, qui annoncent les années de « symphilosophie » à venir : «Je ne t’ai absolument pas oublié et ne le pouvais si facilement, sans m’oublier moiTu sais: « -même », et il ajoute 2 combien tu as jadis contribué à mon éducation » . Depuis ses années d’études, Friedrich Schlegel, philologue de formation, avait beaucoup travaillé. Dans cette même lettre, Novalis évoque ses essais sur la poésie grecque parus dans différentes revues , et lui écrit à ce sujet : « Tu parles de choses totalement nouvelles, tu enrichis le langage et l’esprit 3 Deux auteurs avaient» . crées une critique  Tu
2 Lettre du 8 juillet 1796, inWerke, Tagebücher und Briefe Friedrich von Hardenbergs, volume 1, Munich / Vienne, Carl Hanser Verlag, 1978 (2004), p.599-600. 3 Ibid.,.id.
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permis à Friedrich Schlegel d’élaborer une conception nouvelle de la littérature, fondée sur la notion de fragment : Lessing et Chamfort. L’auteur de Nathan le sage était réévaluée et qualifiée par son disciple de « fragmentariste », car, selon lui, « Ce que Lessing dit de mieux est ce qu’il lance, comme s’il l’avait deviné et inventé, en quelques paroles souples pleines de force, d’esprit et de sel». L’écriture fragmentaire, on le voit, n’était pas conçue comme une nouveauté propre au romantisme naissant, mais toute œuvre littéraire – et celle de Lessing en premier lieu, qui agissait aux yeux de Schlegel comme un révélateurdevait être comprise comme naturellement fragmentaire, car elle était toujours l’expression de l’infini dans le fini. Toute œuvre, face à l’idéal de beauté formelle instauré par le classicisme, était condamnée à être inachevée, et
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devait donc être considérée comme un fragment. Il restait simplement à revendiquer ce caractère fragmentaire de l’œuvre littéraire comme le propre de la littérature, ce que faisait l’ami de Novalis en recourant également à la figure de Chamfort, dont il avait luMaximes et pensées, caractères et anecdotes (1795), œuvre publiée en allemand en 1797. Dans ses propresFragments critiquesla même parus annéequi sont avec les et Grains de pollenune espèce de manifeste de l’écriture fragmentaire et du premier romantisme allemand, Friedrich Schlegel évoque lesMaximesde Chamfort comme « son œuvre posthume la plus délectable», et les définit comme un « livre plein de Witz vierge, de Sens profond, de sensibilité délicate, de raison mûre et de virilité ferme ainsi que des intéressantes traces du caractère le plus passionné ; et de plus un livre
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choisi, et d’une expression parfaite; sans comparaison, le plus grand et le premier de son 4 espèce » . On retrouve le terme de Witz dans les Grains de pollen, mot difficilement traduisible en français, surtout dans son sens romantique. Il peut difficilement être rendu par le mot « saillie », car le Witz n’est pas simplement humoristique, il est le produit d’une véritable réflexion philosophique (ainsi Schlegel parle de « Sens profond ») alliée à une émotion esthétique. Dans le Witz se produisent en effet des combinaisons nouvelles, des associations d’éléments les plus variés, de manière à offrir à l’esprit du lecteur des perspectives totalement inédites. Il est également souvent question chez les romantiques d’espritwitzig, capable de transcender les catégories de la logique pour accéder à un niveau 4 In :L’Absolu littéraire,Paris, Seuil, 1978, p.95.
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de conscience où des éléments contradictoires peuvent être reliés et harmonisés au-delà de leur incompatibilité d’un point de vue rationnel.On retrouve ce souci d’associer les éléments les plus hétérogènes dans lesGrains de pollende Novalis. Il y est question de littérature (avec des références à Goethe, auteur duWilhelm Meister, qui intéresse vivement le petit groupe romantique), de philosophie (Kant et Fichte sont toujours en arrière-plan), mais aussi d’histoire et de politique, car la Révolution française ne cesse de hanter les esprits allemands. De nombreux fragments évoquent également les sciences de l’époque et sont parcourus d’allusions à la médecine. C’est que l’esprit, souffrant de maux divers, a besoin d’un traitement nouveau, à travers lequel il atteindra une santé spirituelle supérieure. Tout système de penséequ’il soit philosophique,
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