L'accueil des immigrants et l'intégration des populations issues de l'immigration : rapport au Président de la République suivi des réponses des administrations et des organismes intéressés
De la gestion des flux migratoires aux actions d'accueil des immigrants et d'intégration des populations issues de l'immigration en passant par la lutte contre les discriminations, la Cour des comptes analyse les différentes politiques d'immigration mises en oeuvre depuis trente ans. Après avoir expliqué la genèse et décrit les modalités des actions publiques qui ont pu être conduites jusqu'ici pour répondre aux défis de l'accueil et de l'intégration, le rapport tente de dresser leur bilan en examinant la situation des populations concernées. Il cherche aussi à apprécier les conditions de la réussite des réformes en cours ou annoncées récemment à la lumière des évolutions observées dans les mouvements migratoires, des modifications intervenues dans le déroulement des séjours et des exigences nouvelles qui annoncent les besoins prévisibles du marché européen du travail. La Cour formule de nombreuses recommandations qui lui paraissent de nature à conforter la démarche engagée.
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Langue
Français
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Extrait
L
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COUR DES COMPTES _____________
LACCUEIL DES IMMIGRANTS ET LINTEGRATION DES POPULATIONS ISSUES DE LIMMIGRATION
_____________ RAPPORT AU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE SUIVI DES RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES INTÉRESSÉS NOVEMBRE 2004
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Sommaire
Délibéré . Introduction...................................................................................................Chapitre I : Les politiques publiques face aux réalités de limmigration. I - La dimension historique de lintégration ............................................... A Les origines..................................................................................... B Le tournant de 1945......................................................................... C Limmigration de 1945 à 1974 ........................................................ D De la suspension de limmigration de main duvre (1974) à la situation aujourdhui ....................................................................... II - La difficulté des choix publics ............................................................... A La méconnaissance des publics concernés ...................................... B La faiblesse des structures de pilotage ............................................ C Linsuffisante définition des objectifs ............................................. III - De nouvelles orientations « constatées » plus que choisies...................... A Des institutions en situation fréquente de décalage et dautonomie B Les éléments dune nouvelle politique ............................................ C Les conséquences de la montée en puissance du cadre européen .... Chapitre II : Le bilan de laccueil et de lintégration.................................I - Les obstacles à lévaluation ................................................................... A La mesure de lintégration .............................................................. B Problèmes liés aux statistiques et aux études .................................. C Des moyens budgétaires difficiles à identifier................................. II - Une double hypothèque ......................................................................... A La concentration des populations issues de limmigration .............. B Limmigration irrégulière................................................................ III - Des résultats peu probants ..................................................................... A Le logement ........ ............................................ ................................ B Lemploi.......................................................................................... C Lécole ............................................................................................ D Lapprentissage du français............................................................. E Les femmes issues de limmigration ............................................... F Lintégration des jeunes................................................................... G Les limites des possibilités de retour............................................... H La lutte contre les discriminations ..................................................
Chapitre III : Une démarche nécessaire qui reste à conforter..................I - De nouvelles perspectives pour l immigration....................................... A Une demande quantitative et qualitative à la hausse ....................... B Sortir des contradictions.................................................................. II - Un dispositif à préciser et concrétiser .................................................... A Des principes qui gagneraient à être précisés.................................. B La priorité donnée à laccueil, première étape du parcours dintégration .................................................................................... C Les initiatives du comité interministériel sur les déterminants de lintégration devraient être renforcées ............................................. III - Une approche à compléter et approfondir .............................................. A Intégrer les populations déjà présentes en France ........................... B La résolution nécessaire de deux préalables .................................... C Laffinement des méthodes ............................................................. D La rationalisation de lorganisation institutionnelle ........................ Conclusion.....................................................................................................Annexe 1 :Europe et immigration..................................................................Annexe 2 : ......................................................Les voies daccès à lemploiAnnexe 3 :Comité interministériel du 10 avril 2003 : relevé de décisions.....Annexe 4 :Les centres et les locaux de rétention administrative.Annexe 5 :Répartition des immigrés sur le territoire métropolitain (1999).Annexe 6 :Enfants dimmigrés (0-24 ans) par département ..........................Annexe 7 :Visas pour les consulats les plus importants (environ les trois quarts) .........................................................................................................
Répertoire des principaux sigles.................................................................
Réponses des administrations et des organismes intéressés.
La Cour des comptes publie, sous la forme dun fascicule séparé, un rapport concernant laccueil des immigrants et lintégration des populations issues de limmigration.
Conformément aux dispositions législatives et réglementaires du code des juridictions financières, la Cour des comptes, délibérant en chambre du conseil, a adopté le présent rapport public.
Ce texte a été arrêté au vu du projet qui avait été communiqué au préalable, en totalité ou par extraits, aux administrations et organismes concernés, et après quil a été tenu compte, quand il y avait lieu, des réponses fournies par ceux-ci. En application des dispositions précitées, ces réponses sont publiées ; elles engagent la seule responsabilité de leurs auteurs.
Etaient présents : M. Séguin, premier président ; MM. Collinet, Delafosse, Fragonard, Carrez, Bénard, présidents de chambre, MM. Mignot, Ménasseyre, Gastinel, présidents de chambre maintenus en activité ; MM. Chartier, Limouzin-Lamothe, Zuber, Capdeboscq, Murret-Labarthe, Sallois, Vianes, Giquel, Billaud, Cretin, Berthet, de Mourgues, Malingre, Paugam, Kaltenbach, Babusiaux, Hespel, Houri, Richard, Devaux, Rossignol, Arnaud, Bayle, Bouquet, Rémond, Chabrol, Picq, Ganser, XH Martin, Schneider, Lefoulon, Mirabeau, Beaud de Brive, Cardon, Mmes Froment Meurice, Ruellan, M. Cazanave, Mme Bellon, MM. Ritz, Duchadeuil, Moulin, Steyer, Lesouhaitier, Lefas, Lafaure, Dupuy, Banquey, Mme Fradin, MM. Auger, Delin, Mme Dayries, MM. Phéline, Gautier Jean, Tournier, Mme Colomé, M. Vivet, Mme Moati, MM. Cossin, Diricq, conseillers maîtres, MM. Lazar, Audouin, Pascal, Gleizes, Lemasson, Cultiaux, Schaefer, conseillers maîtres en service extraordinaire, Mme Bazy Malaurie, conseiller maître, rapporteur général.
Etait présente et a participé aux débats : Mme Gisserot, procureur général de la République, assistée de M. Feller, avocat général.
Madame Démier, secrétaire générale, assurait le secrétariat de la chambre du conseil.
Na pas pris part aux délibérations : M. Courtois, conseiller maître.
Fait à la Cour, le 4 novembre 2004.
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La population immigrée dans les départements métropolitains français (en pourcentage de la population totale en 1999)
% de la population immigrée dans la population totale ( )
Source : INSEE recensement 1999
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Introduction
Limmigration constitue, en France, un sujet à la fois extrêmement sensible et récurrent. Son actualité demeure dautant plus forte que les perspectives démographiques en Europe laissent pressentir un recours encore accru, dans un proche avenir, à ses ressources. La diversité et lampleur de ses implications dans nombre de domaines de la vie nationale justifient que laction publique en la matière fasse régulièrement lobjet dune analyse attentive : du degré de réussite de la politique dimmigration et, plus particulièrement, des actions daccueil et dintégration dépend en effet, pour une large part, la cohésion nationale.
La notion de politique de limmigration est généralement utilisée de manière indistincte pour caractériser la seule gestion des flux migratoires ou lensemble des actions concernant les migrants. La Cour a choisi, dans le rapport, de privilégier la deuxième acception, conformément à la conviction quelle sest forgée quen la matière, une politique doit être cohérente et globale.
Un tel intérêt est dautant plus nécessaire que limmigration est une question mal connue, où des éléments statistiques nécessaires font souvent défaut et où les fréquentes approximations conceptuelles et sémantiques traduisent de réelles ambiguïtés et de non moins franches confusions. Il est vrai que si limmigration est lobjet dun débat public permanent et souvent passionné, celui-ci tend à se polariser sur certains des aspects du dossier et semble parfois ignorer les autres. Ainsi, le problème de lopportunité et des modalités de la maîtrise des flux est-il au centre des préoccupations, comme en témoigne le contenu des interventions du législateur depuis les lendemains de la seconde guerre mondiale : depuis 1974, lordonnance de 19451 aura été modifiée à trente-trois reprises et tout dernièrement à loccasion du vote de la loi du
1) Ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions dentrée et de séjour des étrangers en France.
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26 novembre 20032. On ne saurait dire, en revanche, que les voies et moyens de laccueil et de lintégration des immigrants aient bénéficié dune attention comparable.
Surtout, la vigueur des polémiques a souvent caché lextrême complexité de la matière et on a mis au compte dune hypothétique volonté de dissimulation ce qui nétait souvent que la traduction de la difficulté à figer, dans les catégories juridiques et dans les chiffres, une réalité en perpétuelle évolution.
Ce nest pas seulement quen lespèce limprécision constitue un risque à la fois fréquent et particulièrement lourd de conséquences et que la plus grande prudence simpose. En fait, cest le point dapplication même dune politique de limmigration quil est difficile de définir. On sait lorsquun étranger cesse de lêtre. Rien, juridiquement, nindique, en revanche, quon ne fait plus partie de la population issue de limmigration.
Seul, en réalité, limmigrant est identifiable comme tel. Mais cette qualité se perd sans doute dès linstallation accomplie, assurément en cas de naturalisation et certainement lors de la génération suivante. Pour les autres, tous les autres, il nest pas de réponse autre que subjective.
Cest assez dire quentre autres difficultés, les partenaires des politiques mises en uvre ont celle davoir à sinterroger en permanence sur le choix de leurs bénéficiaires.
Si lon sentêtait à retenir lacception courante du mot « immigré », on en serait réduit à constater quon ne sait pas, au juste, de qui il sagit puisquil est impossible de dénombrer et circonscrire. Le problème est quon nest pas toujours sûr non plus que pour ce public indistinct, un traitement spécifique soit forcément légitime et nécessaire. La seule certitude quon ait est que toute insuffisance de la politique conduite peut constituer un danger pour la République.
Ces constats paradoxaux donnent la mesure des problèmes posés problèmes que ne suffit pas à régler la substitution quasi-systématique du
2) Loi n° 2003-119 du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de limmigration, au séjour des étrangers et à la nationalité au sujet de laquelle la Commission nationale consultative des droits de lHomme a émis les observations suivantes : « la législation sur les étrangers ne cesse dêtre modifiée et est de plus en plus complexe. Il en résulte un droit extrêmement touffu auquel, à lexception des spécialistes, peu de personnes et surtout pas les principaux intéressés, cest-à-dire les étrangers, ont la possibilité daccéder. A cette complexité juridique, accrue par un nombre imposant de circulaires, sajoute une suspicion trop fréquente à légard des étrangers, ainsi quun manque de moyens administratifs particulièrement criant.»