Par son œuvre innovatrice et pluridisciplinaire qui a rayonné autant ici qu’à l’étranger, Edmund Alleyn s’impose comme l’un des artistes québécois les plus importants de la période post-automatiste. Depuis sa disparition en 2004, le regain d’intérêt à son endroit a culminé avec la rétrospective que lui consacrait le Musée d’art contemporain de Montréal en 2016. Cette biographie intellectuelle prolonge la fascination qu’a suscitée le travail d’Alleyn depuis ses débuts chez les amateurs d’art et les critiques. Fruit d’une recherche approfondie, cette enquête prend la forme d’un récit rigoureux explorant tous les aspects de la vie de cet artiste inclassable qui a notamment présenté en 1970, au Musée d’art moderne de la Ville de Paris, une des toutes premières œuvres polysensorielles au monde, l’Introscaphe. En examinant à la loupe la vie et la carrière d’Alleyn, l’auteur dépeint en toile de fond toute une époque. Des années 1950 au début des années 2000, il décrit les liens entre les milieux culturels parisien et québécois, rend compte des théories artistiques de l’heure et, plus fondamentalement, analyse le rapport existentiel entre l’art et la vie. Cet ouvrage constitue ainsi une mine d’informations sur la vie personnelle d’Alleyn, sur ses idées esthétiques et son engagement comme artiste, tout en éclairant sa contribution décisive à l’histoire de l’art contemporaine du Québec. Gilles Lapointe est professeur associé au Département d’histoire de l’art de l’Université du Québec à Montréal. Spécialiste du mouvement automatiste, il est l’auteur de plusieurs études et essais, dont L’Envol des signes. Borduas et ses lettres (1996) et La Comète automatiste (2008), et a coédité les Écrits de Paul-Émile Borduas (PUM, 1987 et 1997). Il a fait paraître aux Éditions du passage, en 2013, en collaboration avec Jennifer Alleyn, les écrits sur l’art d’Edmund Alleyn, De jour, de nuit.
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Extrait
B i o g r a p h i e
Gilles Lapointe
Edmund Alleyn
Edmund Alleyn
B i o g r a p h i e
Gi l le s L a p oi nt e
Les Presses de l’Université de Montréal
L’auteur tîent à remercîer pour eur soutîen e programme du Fonds de recherche du Québec – Socîété et cuture(frqsc), e Programme d’aîde financîère à a recherche et a créatîon(parfac)de ’uqamaînsî que ecrilcq-uqam.
Magré toutes nos recherches, nous n’avons pu îdentîfier tous es auteurs des photographîes reproduîtes. Leurs droîts eur sont réservés aux Presses de ’Unîversîté de Montréa.
Mîse en page: Gîannî Caccîa
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada
Lapoînte, Gîes, 1953-
Edmund Aeyn : bîographîe
(Art+) Comprend des réérences bîbîographîques et un îndex. Pubîé en ormats împrîmé(s) et éectronîque(s).
e 1. Aeyn, Edmund, 1931-2004. 2. Art québécoîs ¬ 20 sîèce. 3. Peîntres - Québec (Provînce) ¬ Bîographîes. I. Tître.
ND249.A47L36 2017
759.11’4
e Dépôt éga : 3 trîmestre 2017 Bîbîothèque et Archîves natîonaes du Québec
Cet ouvrage a été pubîé grâce à une subventîon de a Fédératîon des scîences humaînes de concert avec e Prîx d’auteurs pour ’édîtîon savante, dont es onds provîennent du Conseî de recherches en scîences humaînes du Canada.
Les Presses de ’Unîversîté de Montréa remercîent de eur soutîen financîer e Conseî des arts du Canada et a Socîété de déveoppement des entreprîses cuturees du Québec(sodec).
i m p r i m é a u c a n a d a
Avantpropos
Ma premîère rencontre avec ’œuvre de Edmund Aeyn a îeu en 1978 à ’occasîon de son exposîtîon « Le Musée d’hîver » au Musée d’art contemporaîn de Montréa. I me audra cependant attendre ’année 1996 avant de aîre a connaîssance de ’homme, à a gaerîe Chrîstîane Chassay, ors de a présentatîon de «Slow Dance». Une amîtîé naïtra spontané-ment entre nous, à a suîte de ces échanges à a oîs chaeureux et încîsîs au cours desques sont conrontées nos convîctîons sur ’automatîsme, ’art québécoîs et a îttérature. Ce n’est touteoîs qu’au cours de a dernîère année de sa vîe, tandîs que je prépare à a hâte avec Gînette Mîchaud et Joceyn Jean un ouvrage coectî întîtuéEdmund Alleyn. Indîgo sur tous les tons, que j’auraî ’occasîon de mîeux e connaïtre. Cependant, a conjonc-ture est ragîe et dramatîque : Edmund Aeyn nous annonce en maî 2004 qu’î est atteînt d’un ma quî ne pardonne pas, que e temps uî est compté. Durant nos rencontres à son ateîer de a rue Cark à Montréa, Edmund Aeyn accepte d’évoquer ses souvenîrs, es poînts saîants de sa ormatîon, es étapes de son parcours qu’î juge décîsîves : î commente ’envîronnement prîvîégîé de a Vîeîe capîtae où î est né, sa vîe à ’écoe Saînt-Patrîck de Québec, ses étés paîsîbes et îbres e ong du fleuve à Kamouraska. Nî e récît de son adoescence maheureuse au Coège Jean-de-Brébeu nî a reatîon des rapports dîstants et tendus avec ses parents quî s’opposent pendant de ongues années à son desseîn de devenîr artîste-peîntre ne sont éudés. Tandîs qu’î projette sur un écran des dîaposîtîves de ses œuvres, qu’î commente d’un traît vî, î se remémore es cîrconstances de son aventure parîsîenne, a mîse au poînt de ’Introscapheet sa présentatîon au Musée d’art moderne de a Vîe de Parîs, son retour au Québec en 1971, ’aménagement de son ateîer de a rue Cark à Montréa. I décrît non sans humour ses années de « commîs-voyageur » comme proesseur de peînture à ’Unîversîté d’Ottawa, aors que de manîère de pus en pus însîstante s’împose dans sa pratîque e besoîn d’un art quî reflète mîeux sa « géographîe întérîeure ». Aux înstaatîons sur pexîgas nées de ses récentes observatîons de a socîété québécoîse succéderont, au fi des décennîes, d’autres cyces turbuents non moîns éconds et toujours étonnants, ceuî des années 1980 de a pérîodeIndîgo, es avîs et gouaches des Vanîtasdes années 1990 et, à a fin de sa vîe, es grands ormats desÉphémérîdes. Au fi des semaînes, î devîent caîr que nos rencontres ont pour uî une împortance quî excède es besoîns d’une strîcte chronoogîe. Aussî, orsque je uî propose d’entreprendre dès que possîbe une recherche pus ambîtîeuse quî permettraît de retracer avec précîsîon son parcours d’artîste, î acquîesce aussîtôt. Cette perspectîve sembe ravîver chez uî un désîr proond et donner un sens pus pressant encore à nos rencontres.
Avant-prop os
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Aujourd’huî, treîze ans se sont écoués depuîs que j’aî éteînt pour a dernîère oîs mon magnétophone rouge dans ’ateîer de a rue Cark. C’est e temps quî m’a été nécessaîre pour réunîr et ordonner un matérîau bîographîque abondant, mener à terme mes recherches dans es onds d’archîves et bîbîothèques, et rédîger de cet ouvrage. Magré ’exîstence de monographîes et surtout de nombreux cataogues d’exposîtîon, e parcours de cet artîste majeur n’avaît pas encore aît ’objet d’une étude systématîque. Mes recherches préîmînaîres m’ont rapîdement convaîncu que seue une enquête poussée pourraît rendre compte d’une démarche créatrîce à a oîs exîgeante et compexe quî s’étae sur pus d’un demî-sîèce. Puîsque toute bîographîe contemporaîne, qu’ee e veuîe ou non, est postbîographîque, pour emprunter cette expressîon à Antoîne Compagnon et à Phîîppe Roger, j’aî dû d’abord me demander quee posîtîon adopter et me questîonner sur a suisance, ’arrogance même, qu’î y a à vouoîr raconter a vîe d’un artîste. Sans prétendre à une pseudo-objectîvîté – e bîographe construît nécessaîrement un récît partîa, que que soît son désîr de neutraîté –, j’aî cherché à mettre en récît ce destîn sînguîer et surtout à résoudre a contradîctîon onda-mentae quî exîste entre a démarche d’un artîste dont ’œuvre est expîcîtement orîentée vers a ragmentatîon et a dîssémînatîon, et ma propre actîvîté de bîographe, quî consîste à ras-sember es ragments épars d’une vîe pour en proposer un récît à a oîs cohérent et nuancé. Ce questîonnement m’a conduît à prîvîégîer ’œuvre ee-même et à rédîger une mono-graphîe centrée sur ’îtînéraîre artîstîque sînguîer d’Aeyn. Ce partî prîs m’a en efet paru fidèe à notre entente. Afin de mîeux aîre entendre sa voîx, j’aî puîsé abondamment dans nos entretîens restés jusqu’îcî înédîts et dans sa correspondance, car ’écrîture éégante et précîse d’Aeyn ofre souvent une remarquabe quaîté d’întrospectîon. Le ecteur pourra égaement profiter de ’apport împortant de pusîeurs textes înédîts d’Aeyn quî jettent un écaîrage neu sur certaîns aspects moîns connus de sa pensée et de son œuvre. Afin de compéter une înormatîon trop souvent acunaîre ou approxîmatîve, j’aî aussî aît appe, orsque je e jugeaîs nécessaîre, aux témoîgnages des membres de sa amîe, de ses amîs et coègues de ’Unîversîté d’Ottawa et, pus argement à ’occasîon, au cerce de ses reatîons. Cet ouvrage accorde par aîeurs une arge pace à a réceptîon crîtîque quî a accom-pagné ses nombreuses exposîtîons, au Québec et à ’étranger. I paraït îndénîabe que a crîtîque d’art a joué un rôe non négîgeabe dans son parcours, à ’înstar de pusîeurs înstîtutîons, gaerîes d’art et autres acteurs de a scène artîstîque. Cerner es prîncîpaux jaons de son travaî, connaïtre es îeux où î a exposé, étabîr es aîts, es sîtuer dans eur juste contexte permet au ecteur de dîsposer d’une înormatîon neuve et sûre. Comme e dît Banche Cerquîgînî, une « bîographîe ne révèe pas seuement es partîs prîs et a sub-1 jectîvîté d’un auteur maîs aussî ’état du savoîr dîsponîbe ». Sî, jusqu’à a fin, Aeyn s’est montré dîsert et a commenté avec întérêt ’évoutîon de son œuvre, évoquant à maîntes reprîses son attachement proond à ’art, à a îttérature et à a musîque, î a aussî aît preuve d’une grande dîscrétîon sur pusîeurs aspects de sa vîe prîvée. Me sîgnîfiaît-î a présence d’une rontîère învîsîbe à ne pas outrepasser ? C’est en tout cas un seuî que je n’aî pas souhaîté ranchîr. En omettant voontaîrement d’învestîguer certaîns pans de sa vîe personnee et afectîve, sans doute aî-je contracté une dette morae envers pusîeurs personnes, amîs proches, membres de sa amîe quî seront peut-être sur-prîs de ne pas figurer dans ce îvre. J’espère qu’îs me pardonneront cette réserve, guîdée par a dîsparîtîon encore récente de ’artîste. Je doute qu’Aeyn puîsse jamaîs échapper à sa égende d’homme secret, maîs j’espère que ce îvre contrîbuera à dîssîper e mythe d’un être împénétrabe, retîré en uî-même, et encouragera d’autres chercheurs à poursuîvre e travaî sur cette œuvre essentîee.