Marchés spéculatifs et anticipations rationnelles - article ; n°3 ; vol.2, pg 10-26
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Description

Revue française d'économie - Année 1987 - Volume 2 - Numéro 3 - Pages 10-26
Les économistes ne se sont penchés sur le rôle et la formation des anticipations qu'assez récemment. Keynes en a proposé une vision moderne, en insistant sur la non-objectivité des croyances et sur les interactions entre les anticipations des divers agents économiques. La doctrine des anticipations rationnelles apparaît au contraire comme une réaction post-moderne, enracinée dans la notion classique de vérité absolue. Cette approche de la modélisation économique pose de sérieuses difficultés théoriques, notamment celles de la non-convergence des prévisions individuelles et de la vulnérabilité des anticipations aux croyances — illustrées par l'existence possible d'équilibres de taches solaires. Les principales implications de la doctrine des anticipations rationnelles ont aussi été remises en question par bon nombre de résultats empiriques récents — en particulier, la volatilité excessive des cours boursiers, l'insuffisante réaction des taux d'intérêt longs aux variations des taux courts et la volatilité des taux de change. De nouveaux concepts, tels que les bulles rationnelles ou le problème du peso, pourraient faciliter la compréhension des comportements de ces marchés; toutefois, ils ne constituent pas une défense convaincante de la doctrine des anticipations rationnelles. La meilleure façon pour les économistes et les prévi-sionnistes de poursuivre leurs analyses semble donc être à présent d'exploiter l'idée selon laquelle les anticipations des individus, loin d'être autonomes, dépendent des croyances et de l'information, mais d'abandonner l'hypothèse d'homogénéité des croyances et de l'information.
The analysis of the role of private expectations is relatively recent in economics. Keynes put forward a modern vision, insisting on the non-objectivity of beliefs and the interactions between the various agents' expectations. The rational expectations doctrine appears as a post-modern reaction, rooted in the classical ideal of absolute truth. Severe theoretical difficulties beset this approach to economic modelling, especially the non-convergence of individual forecasts and the vulnerability of expectations to beliefs, illustrated by the existence of sunspot equilibria. The major conclusions of the rational expectations doctrine have also been questionned by a number of recent empirical findings — excess volatility of stock market prices, underresponsiveness of long-term interest rates, and volatility of exchange rates. New con- cepts, such as rational bubbles and peso problem, may help these market behaviors, but they not constitute convincing defences the doctrine. The best way for economists and forecasters to proceed is keep the idea that individual expectations are not autonomous but on beliefs and information, giving up the notion that has the same beliefs and set.
17 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1987
Nombre de lectures 30
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Edmund S. Phelps
Marchés spéculatifs et anticipations rationnelles
In: Revue française d'économie. Volume 2 N°3, 1987. pp. 10-26.
Citer ce document / Cite this document :
S. Phelps Edmund. Marchés spéculatifs et anticipations rationnelles. In: Revue française d'économie. Volume 2 N°3, 1987. pp.
10-26.
doi : 10.3406/rfeco.1987.1149
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfeco_0769-0479_1987_num_2_3_1149Résumé
Les économistes ne se sont penchés sur le rôle et la formation des anticipations qu'assez récemment.
Keynes en a proposé une vision moderne, en insistant sur la non-objectivité des croyances et sur les
interactions entre les anticipations des divers agents économiques. La doctrine des anticipations
rationnelles apparaît au contraire comme une réaction post-moderne, enracinée dans la notion
classique de vérité absolue. Cette approche de la modélisation économique pose de sérieuses
difficultés théoriques, notamment celles de la non-convergence des prévisions individuelles et de la
vulnérabilité des anticipations aux croyances — illustrées par l'existence possible d'équilibres de taches
solaires. Les principales implications de la doctrine des anticipations rationnelles ont aussi été remises
en question par bon nombre de résultats empiriques récents — en particulier, la volatilité excessive des
cours boursiers, l'insuffisante réaction des taux d'intérêt longs aux variations des taux courts et la
volatilité des taux de change. De nouveaux concepts, tels que les bulles rationnelles ou le problème du
peso, pourraient faciliter la compréhension des comportements de ces marchés; toutefois, ils ne
constituent pas une défense convaincante de la doctrine des anticipations rationnelles. La meilleure
façon pour les économistes et les prévi-sionnistes de poursuivre leurs analyses semble donc être à
présent d'exploiter l'idée selon laquelle les anticipations des individus, loin d'être autonomes, dépendent
des croyances et de l'information, mais d'abandonner l'hypothèse d'homogénéité des croyances et de
l'information.
Abstract
The analysis of the role of private expectations is relatively recent in economics. Keynes put forward a
modern vision, insisting on the non-objectivity of beliefs and the interactions between the various
agents' expectations. The rational expectations doctrine appears as a post-modern reaction, rooted in
the classical ideal of absolute truth. Severe theoretical difficulties beset this approach to economic
modelling, especially the non-convergence of individual forecasts and the vulnerability of expectations
to beliefs, illustrated by the existence of sunspot equilibria. The major conclusions of the rational
expectations doctrine have also been questionned by a number of recent empirical findings — excess
volatility of stock market prices, underresponsiveness of long-term interest rates, and volatility of
exchange rates. New con- cepts, such as rational bubbles and peso problem, may help these market
behaviors, but they not constitute convincing defences the doctrine. The best way for economists and
forecasters to proceed is keep the idea that individual expectations are not autonomous but on beliefs
and information, giving up the notion that has the same beliefs and set.Edmund S.
PHELPS
Marchés spéculatifs
et anticipations
rationnelles
es causes et conséquences des anti
cipations dans la vie sociale relevaient à l'origine du domaine
des historiens qui, il y a plus d'un siècle, produisirent des
récits captivants de divers engouements et paniques.
L'ouvrage de C. Mackay, publié en 1841 sous le titre grandi
loquent de Extraordinaires déceptions populaires et la folie des
foules, est un classique du genre. Trop sensationnel peut-être, Edmund S. Phelps 11
ce sujet était apparemment totalement étranger aux préoccu
pations des théoriciens de l'économie d'alors et à leur esprit
classique.
Le mot anticipations ne fit son apparition dans la li
ttérature économique que dans les années vingt. Hayek et
Myrdal se penchèrent sur les cas où une activité présente
n'aura de conséquences que dans le futur et où, de ce fait, ce
seront les conditions prévalant dans le futur qui détermine
ront les bénéfices qui pourront en résulter. L'analyse des
décisions d'agents privés aux prises avec de tels problèmes
intertemporels ne pouvait éviter d'introduire les anticipations
concernant l'avenir. Mais quels en sont les déterminants ? Les
premiers praticiens de l'analyse intertemporelle se contentè
rent d'examiner le cas particulier des anticipations correctes
— en supposant que les agents étaient doués d'un pouvoir de
prévision parfaite. Pour ces théoriciens, un sentier d'équilibre
correspondait nécessairement à un déroulement conforme à
des anticipations correctes, c'est-à-dire à un scénario sans sur
prise.
Incertitude et spéculation
C'est dans les travaux de Keynes que l'on trouve le premier
traitement par un économiste professionnel des anticipations
en tant que force motrice autonome de l'économie. La
réflexion de Keynes sur la nature des croyances, amorcée dès
ses premiers travaux sur les probabilités, l'a occupé toute sa
vie durant ; mais, dans les années trente, c'est sur l'incertitude
— donc l'absence d'objectivité — de la connaissance sociale
qu'il insistait. Le passage suivant, souvent cité, est représentat
if de sa conception à cette époque :
«Par connaissance incertaine..., je n'entends pas simplement
ce qui est seulement probable, en tant que distinct de ce qui
est connu avec certitude. Dans le sens où j'emploie ce terme,
le jeu de la roulette n'est pas soumis à l'incertitude... Même le 12 Edmund S. Phelps
temps météorologique n'est que modérément incertain. J'uti
lise ce terme dans le sens où la perspective d'une guerre en
Europe est incertaine ; de même le prix du cuivre et le taux
d'intérêt dans vingt ans, l'obsolescence d'une nouvelle inven
tion ou la situation des détenteurs de la richesse privée en
1970. Il n'y a, dans ces différents cas, aucune méthode scienti
fique permettant le moindre calcul de probabilité. Nous n'en
savons tout simplement rien» (J.M. Keynes [1937]).
Une incertitude de cette nature est engendrée par le
caractère imprévisible des découvertes et l'évolution continue
des structures de l'économie. Une société ne peut posséder la
connaissance objective complète — ou même très étendue —
car celle-ci impliquerait la connaissance de tous — ou presque
tous — les savoirs et valeurs futurs. Ce serait, en quelque
sorte, savoir ce que nous ne savons pas encore. De plus, les
changements structurels sont, dans la réalité, beaucoup trop
fréquents pour que les économètres puissent obtenir des est
imations précises des structures récentes : il survient toujours
quelque chose qui perturbe la forme réduite de leurs modèles.
Keynes et ses émules tirèrent de ces prémisses une
conclusion radicale : les prix des actions sur les marchés bours
iers, les taux d'intérêt sur les marchés obligataires et la valeur
des devises sur les marchés des changes — du moins lorsque
celle-ci n'est pas maintenue fixe par intervention des autorités
monétaires — reflètent ce que les spéculateurs croient être
l'opinion — dans les jours ou les heures qui vont suivre — des
autres spéculateurs à propos de l'avenir1. Cette situation évo
quait pour Keynes un certain concours de beauté, organisé
par un journal anglais, dans lequel le prix était attribué non
pas à celui qui donnerait la bonne réponse — puisqu'après
tout il ne pouvait y avoir une — mais à celui
qui aurait le mieux prédit ce que les autres participants
auraient, au cours des quelques semaines que durait le jeu,
choisi de répondre. De ce fait, ces marchés sont susceptibles
de faire apparaître des variations —, ou au contraire une Edmund S. Phelps 13
absence de variations — dépourvues de fondement, c'est-à-
dire irrationnelles. De la même façon, il est possible que
l'investissement s'effondre, entraînant l'emploi dans sa chute,
non pas parce que les entreprises ne croient plus en la possibil
ité de réaliser des bénéfices futurs en continuant à investir
dans leurs activ

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