La politique de l apolitisme. Sur l autonomisation du champ sportif - article ; n°50 ; vol.13, pg 13-27
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La politique de l'apolitisme. Sur l'autonomisation du champ sportif - article ; n°50 ; vol.13, pg 13-27

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Politix - Année 2000 - Volume 13 - Numéro 50 - Pages 13-27
Politics of Apolitism. On the autonomization of sport's field Jacques Defrance Apolitical attitudes are characteristic features of sport's culture. «Apolitism», «neutralism», «pacifism», «third stream», «anti-parlementarism», constitute the different ways to withdraw from critical situations, controversies and political struggles. The meaning of these kinds of withdrawal, their extent, their strength, vary during the XXth century. They grow as the field of physical activities and sports gets more autonomy. They assert themselves in front of the strengthening of civic norms which require to involve oneself in public matters. Socio-historic analysis shows how this forms of distanciation can be coupled with forms of commitment into politics and sport, or can be contradicted by an historical situation which requires to take a stand.
La politique de l'apolitisme. Sur l'autonomisation du champ sportif Jacques Defrance Les attitudes apolitiques sont une dimension constitutive de la culture sportive. « Apolitisme », « neutralisme », « pacifisme », « troisième voie », « antiparlementarisme », représentent les diverses manières de s'écarter des situations critiques, des controverses et des luttes politiques. La signification de ces formes de retrait, leur extension, leur force, varient au cours du XXe siècle. Elles s'accroissent à mesure que le champ des activités physiques et des sports s'autonomise. Elles s'affirment en réponse au renforcement des normes civiques exigeant de participer aux affaires publiques. L'analyse socio-historique montre comment cette forme de distanciation peut être doublée de formes d'engagement politique et « sportif », ou comment elle peut être directement contredite par la situation historique qui contraint à prendre parti.
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 2000
Nombre de lectures 63
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Jacques Defrance
La politique de l'apolitisme. Sur l'autonomisation du champ
sportif
In: Politix. Vol. 13, N°50. Deuxième trimestre 2000. pp. 13-27.
Résumé
La politique de l'apolitisme. Sur l'autonomisation du champ sportif
Jacques Defrance
Les attitudes apolitiques sont une dimension constitutive de la culture sportive. « Apolitisme », « neutralisme », « pacifisme », «
troisième voie », « antiparlementarisme », représentent les diverses manières de s'écarter des situations critiques, des
controverses et des luttes politiques. La signification de ces formes de retrait, leur extension, leur force, varient au cours du XXe
siècle. Elles s'accroissent à mesure que le champ des activités physiques et des sports s'autonomise. Elles s'affirment en
réponse au renforcement des normes civiques exigeant de participer aux affaires publiques. L'analyse socio-historique montre
comment cette forme de distanciation peut être doublée de formes d'engagement politique et « sportif », ou comment elle peut
être directement contredite par la situation historique qui contraint à prendre parti.
Abstract
Politics of Apolitism. On the autonomization of sport's field
Jacques Defrance
Apolitical attitudes are characteristic features of sport's culture. «Apolitism», «neutralism», «pacifism», «third stream», «anti-
parlementarism», constitute the different ways to withdraw from critical situations, controversies and political struggles. The
meaning of these kinds of withdrawal, their extent, their strength, vary during the XXth century. They grow as the field of physical
activities and sports gets more autonomy. They assert themselves in front of the strengthening of civic norms which require to
involve oneself in public matters. Socio-historic analysis shows how this forms of distanciation can be coupled with forms of
commitment into politics and sport, or can be contradicted by an historical situation which requires to take a stand.
Citer ce document / Cite this document :
Defrance Jacques. La politique de l'apolitisme. Sur l'autonomisation du champ sportif. In: Politix. Vol. 13, N°50. Deuxième
trimestre 2000. pp. 13-27.
doi : 10.3406/polix.2000.1084
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polix_0295-2319_2000_num_13_50_1084La politique de l'apolitisme
Sur rautonomisation du champ sportif
Jacques DEFRANCE
Une valeur durable de la culture sportive est l'apolitisme. Attitude
ancienne, multiforme, ostensiblement affirmée, l'apolitisme peut
passer pour un fondement « naturel » de la vie associative sportive,
une nécessité technique ou une disposition juridique normale qui ne mérite
pas qu'on s'y arrête. Nous nous proposons au contraire de l'analyser, de
voir dans quelles conditions un « apolitisme sportif » s'élabore et comment il
fonctionne comme une prise de position dans l'espace public, dotée de
significations politiques diverses.
Les conduites de la vie quotidienne sont soumises aux déterminismes
sociaux ordinaires. Elles divergent selon certaines lignes de partage. Elles
obligent à faire des choix et à prendre position dans des différends qui
structurent l'espace social le plus proche. Ces conduites sont, en outre, à des
degrés variables, « prises » dans les divisions qui se construisent dans
l'espace de la politique. On peut supposer que toute forme d' apolitisme
résulte d'un effort particulier et d'un travail pour échapper à un double
système d'incitations à s'engager, au sein des relations sociales et au sein du
champ politique.
Deux dimensions sont donc discernées pour décrire comment les pratiques
sportives sont établies et pensées dans la vie sociale : d'une part, les relations
sociales qui constituent des cadres d'interaction et structurent durablement
des perceptions, selon la configuration caractéristique de la société à un
instant donné ; d'autre part, les enjeux politiques qui ne se construisent que
Politix. Volume 13 - n° 50/2000, pages 13 à 27 Politix n° 50 14
par la médiation d'institutions politiques et varient plus rapidement. Un
domaine d'action et un ensemble d'agents, comme il s'en forme avec le
sport, se dégagent des contraintes sociales selon une première logique. Ils se
distancient des engagements politiques selon une seconde Dans le
premier cas, nous parlerons de processus d'autonomisation des pratiques
sportives par rapport aux normes et aux finalités des pratiques ordinaires de
la vie sociale (bien être, éducation, civisme, etc.), au sens défini par Pierre
Bourdieu, et qui aboutit à découper un champ spécialisé nouveau doté de
ses enjeux propres et de ses règles du jeu1. Dans le second cas, il s'agit de
processus de dénégation du politique (doctrines, partis, etc.) qui sont
fonction du mode de construction du politique auquel ils s'opposent, de
l'intensité de la politisation au moment et dans le lieu où ils s'accomplissent
et d'un ensemble de facteurs sociaux que l'enquête doit mettre au jour dans
chaque cas d'espèce.
Une fois discernés, ces deux processus peuvent être mis en relation.
L'hypothèse est que les formes de dénégation et d'affirmation du politique
changent à mesure que le champ sportif connaît des poussées
d'autonomisation ou des poussées en sens contraire (le processus est
réversible). Il s'agit de voir si les voies par lesquelles les sportifs se libèrent des
engagements politiques varient lorsque les conditions historiques changent,
entre la fin du XIXe siècle et aujourd'hui. On établira que la signification d'une
prise de position apolitique n'est pas la même selon les époques : par exemple,
pour des associations gymnastiques ou sportives, en 1910, face aux
déchirements entre laïcs et confessionnels, ou en 1937, quand les blocs
fascistes, socialistes et démocrates s'affrontent. Dans le cadre de cet article, il
s'agit de repérer les formes concrètes successivement prises par ces stratégies
momentanées. Ultérieurement, il serait nécessaire de construire un tableau
plus général permettant de les classer, de les comparer dans le cadre d'une
analyse politique et de les expliquer. La série des « apolitismes » sportifs
servira - dans un projet à plus long terme - à marquer les étapes d'un
processus d'autonomisation du champ sportif2.
Le sport « pur » contre l'engagement confessionnel
Les clubs sportifs et les sociétés de gymnastique de la période 1880-1920 ont
une forme associative et se donnent des buts qui peuvent, ou non, exclure
les débats politiques. De fait, au cours de cette période, les groupements
dans le monde des activités physiques et des sports sont politisés. Par le
1. Bourdieu (P.), Les règles de l'art. Genèse et structure du champ littéraire, Paris, Le Seuil, 1992.
2. Defrance (].), « L'autonomisation du champ sportif (1890-1970) », Sociologie et société, 27 (1),
1995 ; Defrance (J.), « Histoire du sport, régulations sociales et contrôle public : entre
autonomisation et mise sous tutelle », in Basson (J.-C.), dir., Sport et ordre public, Paris, La
Documentation française, 2000. La politique de l'apolitisme 15
biais de l'affiliation des associations à des unions ou des fédérations
nationales, et par l'inscription dans les objectifs de visées éducatives
précises, se mettent en place des blocs partisans de toutes sortes. Cest en
adhérant à une société patriote, à une association catholique, à un club
socialiste, que l'individu fait acte politique, même lorsque les débats
doctrinaux sont interdits ou limités au sein du club.
Deux stratégies de promotion du sport
Dans leur phase d'implantation en France, les pratiques sportives sont liées
à un projet pédagogique. Les premiers clubs de sports athlétiques sont
fondés par des jeunes gens, des enseignants et des négociants en relation
avec l'Angleterre, qui pensent la pratique comme une occupation formatrice
du caractère, une activité douée de vertus éducatives3. Les gymnastiques,
établies avant les sports, s'inscrivent elles aussi dans un projet socialement et
politiquement indexé, avec d'autres visées en direction d'une éducation
civique et patriotique.
Les fondateurs et les promoteurs des activités physiques et des sports ont
des positions politiques affirmées, qui sont différenciées. Un aristocrate
rallié à la République co

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