Légitimer la légitimation de l art populaire - article ; n°24 ; vol.6, pg 153-167
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Description

Politix - Année 1993 - Volume 6 - Numéro 24 - Pages 153-167
On legitimating the legitimation of popular art.
Richard Shusterman. [153-167].
Through the reply to some of the criticisms he received after the publication of his book, Pragmatist /Æsthetics, Richard Shusterman shows how the legitimation of popular art remains a necessity.
Légitimer la légitimation de l'art populaire.
Richard Shusterman. [153-167].
A travers les réponses à une série de critiques ayant suivi la parution de son livre L'Art à l'état vif,
Richard Shusterman montre combien la légitimation de l'art populaire demeure une nécessité.
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1993
Nombre de lectures 58
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Richard Shusterman
Légitimer la légitimation de l'art populaire
In: Politix. Vol. 6, N°24. Quatrième trimestre 1993. pp. 153-167.
Abstract
On legitimating the legitimation of popular art.
Richard Shusterman. [153-167].
Through the reply to some of the criticisms he received after the publication of his book, Pragmatist /Æsthetics, Richard
Shusterman shows how the legitimation of popular art remains a necessity.
Résumé
Légitimer la légitimation de l'art populaire.
Richard Shusterman. [153-167].
A travers les réponses à une série de critiques ayant suivi la parution de son livre L'Art à l'état vif,
Richard Shusterman montre combien la légitimation de l'art populaire demeure une nécessité.
Citer ce document / Cite this document :
Shusterman Richard. Légitimer la légitimation de l'art populaire. In: Politix. Vol. 6, N°24. Quatrième trimestre 1993. pp. 153-167.
doi : 10.3406/polix.1993.1593
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polix_0295-2319_1993_num_6_24_1593.
;
Légitimer la légitimation
de l'art populaire
Temple University, Richard Shusterman Philadelphie
UNE PARTIE CENTRALE de mon livre Pragmatist /Esthetics : Living Beauty,
Rethinking Art (en français, L'Art à l'état viß est consacrée à la
légitimation et à l'analyse esthétique de l'art populaire1. Je considère
cette tâche aussi problématique qu'importante et je voudrais, dans cet
article, explorer quelques une des difficultés que j'étais incapable de traiter
suffisamment dans le livre. D'ailleurs certaines ne sont apparues qu'après les
réactions aux arguments du livre ainsi que suite à d'étonnants problèmes liés à
sa traduction et à sa réception. Je ne reprendrai pas ici mes arguments contre
les six attaques esthétiques principales visant l'art populaire, ni ma défense
face aux quatre grandes accusations socio-culturelles dont il fait l'objet2. Ce ne
sont pas les critiques spécifiques devant être surmontées lors de la légitimation
de l'art populaire qui m'intéressent ici mais plutôt les problèmes généraux
posés par l'idée même d'une telle légitimation. Je commencerai toutefois par
résumer les quatre problèmes généraux — on pourrait presque dire «meta»
problèmes — de légitimation, discutés plus longuement dans le livre.
Le premier problème, c'est que le projet de légitimation de l'art populaire face
à sa critique intellectuelle, si répandue et véhémente, implique plus ou moins
de porter la bataille en territoire ennemi. La tentative même de répondre à la
critique intellectuelle implique à la fois qu'on accepte l'exigence qui est la
sienne de réclamer une réponse, et qu'on reprenne les termes mêmes de son
accusation, qui sont loin d'être neutres. Si les défenses de l'art populaire ne
sont pas très fréquentes, c'est en partie du fait que la plupart de ceux qui
s'enthousiasment pour la culture populaire ne pensent pas que la critique
intellectuelle soit assez pertinente ou assez puissante pour mériter qu'on y
réponde. Ils ne voient pas la nécessité de défendre leur goût contre ce qu'il
considère comme des attaques bizarres d'intellectuels coincés, de même qu'ils
ne voient pas la nécessité de trouver une justification ailleurs que dans le
plaisir qu'il leur procure. Il s'ensuit que de nombreuses personnes qui
pourraient défendre l'art populaire ne le font pas autrement qu'à travers leur
* Traduit de l'américain par Hélène Borraz et Sylvain Bourmeau.
1. Voir Shusterman (R.), Pragmatist /Esthetics ,• Living Beauty, Rethinking Art, Oxford, Basil
Blackwell, 1992, particulièrement les chapitres 7 et 8 L'Art à l'état vif, Paris, Minuit, 1991, chapitres
4 et 5.
2. Ces accusations esthétiques sont que l'art populaire ne procure qu'une fausse satisfaction, qu'il
ne propose aucune activité, aucun effort mais simplement une réponse passive, qu'il est trop
superficiel pour engager l'intellect, qu'il est n'est pas créatif et standardisé, qu'il manque de dignité
esthétique, et qu'il manque de forme. Les accusations socio-culturelles sont que l'art populaire
encourage un commercialisme excessif, qu'il est destructeur de la haute culture, qu'il corrompt son
public, abaisse la qualité intellectuelle de la société dans son ensemble et la rend plus sensible au
totalitarisme. Pour un examen détaillé de toutes ces accusations ainsi que d'autres, voir le chapitre
4 de L'Art à l'état vif
Politix, n°24, 1993, pages 153 à 1Ö7 153 Richard Shusterman
consommation continue, ce qui n'est pas en soi une réponse adéquate à
l'accusation d'illégitimité esthétique. Nous, les théoriciens de la culture, ne
pouvons cependant pas ignorer cette question de la légitimité, non seulement
parce que c'est notre devoir professionnel que d'évaluer une telle critique
esthétique, mais aussi parce que, pour ceux d'entre nous — nombreux — qui
consommons cet art, le dénigrement de l'art populaire revient à nous dresser
contre nous-mêmes. On nous fait mépriser les choses qui nous donnent du
plaisir et éprouver de la honte pour le plaisir qu'elles nous donnent.
Une deuxième difficulté, du reste assez proche, vient du fait que les intellectuels
qui font l'apologie de l'art populaire ont tendance à faire un peu trop
l'apologie de ses défauts. Souscrivant sans discernement à l'idéologie du grand
art et à sa critique esthétique de la culture populaire, ils défendent l'art
populaire en faisant appel aux «circonstances atténuantes» que fournissent les
nécessités sociales et les principes démocratiques, plutôt qu'en affirmant sa
validité esthétique1. L'art populaire, disent-ils, n'est bon que pour ceux qui,
manquant d'éducation et de culture, n'accèdent pas à la véritable valeur
esthétique du grand art. Il ne doit pas être célébré mais simplement toléré,
jusqu'à ce que nous puissions procurer suffisamment de ressources éducatives
pour que «chacun puisse choisir parmi les formes culturelles d'un goût plus
noble»2. Ces apologies sociales de l'art populaire sapent toute sa véritable
défense, dans la mesure où elles perpétuent le mythe de pauvreté esthétique
que les critiques intellectualistes qu'elles combattent ont mis en place.
Une défense plus efficace de l'art populaire exige sa justification esthétique,
mais alors apparaît une troisième difficulté. Tandis que nous pensons l'art
élevé uniquement à travers les œuvres de génie les plus célèbres, l'art
populaire est en général identifié à ses productions les plus médiocres et les
plus standardisées. Il existe cependant beaucoup d'oeuvres qui, relevant de l'art
élevé, sont hélas médiocres, voire franchement mauvaises, ainsi que le
reconnaissent même les plus ardents avocats de la grande culture. Et, de même
que le grand art n'est pas une collection irréprochable de chef-d' œuvres, de
même l'art populaire n'est pas un abîme indistinct livré au mauvais goût, loin
de de tout repère esthétique. La ligne qui les sépare n'étant pas intrinsèque,
mais flexible et historique3, il est possible et nécessaire de juger de leurs
succès et de leurs échecs du point de vue esthétique.
Le quatrième problème que j'ai traité concerne la tendance, dans le discours
intellectuel, à réserver le terme d'«esthétique» exclusivement au grand art et au
style sophistiqué, comme si la notion même d'esthétique populaire offrait
presque une contradiction dans les termes. L'exemple le plus frappant de cette
regrettable tendance est Pierre Bourdieu. Bien qu'il regarde avec sympathie les
besoins culturels populaires et bien qu'il expose rigoureusement l'économie
cachée et les contradictions de l'esthétique prétendument désintéressée de
1. Voir, par exemple, Gans (H. J.), Popular Culture and High Culture : An Analysis and Evaluation
of Taste, New York, Basic Books, 1974.
2. Ibid., p. 128.
3- Même à l'intérieur d'une même période culturelle, une œuvre peut fonctionner soit comme
populaire soit comme grand art,

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