Notre-Dame de Dijon ou le gothique revisité par Soufflot et Viollet-le-Duc - article ; n°2 ; vol.143, pg 435-445
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Notre-Dame de Dijon ou le gothique revisité par Soufflot et Viollet-le-Duc - article ; n°2 ; vol.143, pg 435-445

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Description

Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres - Année 1999 - Volume 143 - Numéro 2 - Pages 435-445
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1999
Nombre de lectures 38
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur Roland Recht
Notre-Dame de Dijon ou le gothique revisité par Soufflot et
Viollet-le-Duc
In: Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 143e année, N. 2, 1999. pp. 435-
445.
Citer ce document / Cite this document :
Recht Roland. Notre-Dame de Dijon ou le gothique revisité par Soufflot et Viollet-le-Duc. In: Comptes-rendus des séances de
l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 143e année, N. 2, 1999. pp. 435-445.
doi : 10.3406/crai.1999.16001
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/crai_0065-0536_1999_num_143_2_16001COMMUNICATION
NOTRE-DAME DE DIJON OU LE GOTHIQUE REVISITÉ
PAR SOUFFLOT ET VIOLLET-LE-DUC*, PAR M. ROLAND RECHT
« On parlera dans la postérité du temps [...] où le projet d'élever
un monument à la patronne de la France fut conçu ; et ce monu
ment présentera aux siècles les plus reculés le premier modelle de
la parfaite architecture. » Ainsi s'exprime l'abbé Laugier dans son
Discours sur le rétablissement de l'architecture antique en 1760. Le
monument dont il parle est l'église Sainte -Geneviève dont
Jacques -Germain Soufïlot a commencé la construction trois ans
plus tôt et qui est sans doute l'expression la plus aboutie de l'a
rchitecture néo-classique. Dès le début des années 60, Soufflot et
ses amis sont obligés de mener une campagne très active afin de
convaincre les membres de l'Académie de la solidité de son
ouvrage. A l'appui de sa démonstration, Soufïlot examine des cas
concrets comme San Agostino de Piacenza construit par
Abbate Bagarotti en 1669 ou esquisse une véritable théorie de
l'architecture. Un des éléments constitutifs de cette théorie sera le
Mémoire sur l'architecture gothique dont il donnera lecture à l'Aca
démie le 22 décembre 1761.
Ce mémoire, Soufïlot l'avait déjà présenté devant l'Académie
des Sciences de Lyon le 12 avril 1741, alors qu'il n'était âgé que de
28 ans. Il le définit comme « une espèce de parallèle » entre les
églises gothiques et « les églises bâties suivant les règles de l'archi
tecture antique ». Par l'appréciation négative qu'il donne de l'o
rnement gothique « presque toujours de mauvais goût, mais
quelquefois d'une exécution fort délicate » il se montre
conforme à une tradition historiographique qui remonte à Vasari.
Mais son jugement est bien plus nuancé en ce qui concerne la
« construction » gothique : dans les monuments gothiques,
remarque Soufïlot, les piliers de la grande nef « sont plus ou
moins gros mais toujours posés diagonalement de manière qu'ils
présentent un de leurs angles à la grande nef», tandis que les
* Une version plus développée de ma communication paraît dans le volume des Monum
ents Piot de 2000 sous le titre : * Le modèle gothique à l'âge classique. Notre-Dame de
Dijon revisitée par Soufflot et Viollet-le-Duc. » Je tiens à remercier M. Bernard Krespine,
conservateur de la bibliothèque de Dijon pour son aide. 436 COMPTES RENDUS DE L'ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS
piliers de l'architecture moderne « paroissent toujours plus lourds
parce qu'on voit nécessairement deux faces en entrant dans les
églises ». Il observe aussi que dans les monuments gothiques les
« grandes buttés qui, quoique suffisament fortes, pour résister à la
poussée des voûtes paroissent cependant fort légères, par la façon
dont elles sont construites » pendant que les butées des églises de
son temps « sont souvent très massives ».
Après avoir distingué la «disposition» des églises, puis leur
« décoration », Soufïlot parle de la « construction » : « pour peu
qu'on examine celle des églises gothiques, dit-il, on verra qu'elle
est plus ingénieuse, plus hardie, et même plus difficile que celle
des nôtres. » La « composition » des piliers « tend à les rendre
légers à la vue, et quelquefois ils sont en effet aussi forts que les
nôtres » : « ils ont toujours su faire tomber la principale poussée
dans l'endroit de la résistance. » Au sujet des « proportions » des
édifices gothiques, « elles ont toujours deux fois et demy ou trois
fois plus de hauteur que de largeur, et les nôtres ont plus souvent
plus du double [...] si nous entrons dans une église gothique, nos
yeux, trompés par ses proportions, procurent à notre âme un plai
sir qui la surprend et l'étonné d'abord... »
Cette conception de l'architecture gothique, Soufïlot va pouvoir
la renforcer à l'aide de relevés dressés par Perronet à partir du
chœur de la collégiale de Mantes et soumis à l'Académie le
1er février 1762. Ensuite, l'assemblée examinera ceux de Notre-
Dame de Dijon exécutés par Jallier et envoyés par Charles-Élie Le
Jolivet, dont elle demandera un rapport à Soufïlot et à
P. L. Moreau Desproux. Cette stratégie pour fonder une théorie à
partir d'un examen empirique de monuments exemplaires va por
ter ses fruits puisque Emiland Gauthey pourra étudier en 1771,
dans son Mémoire sur l'application des principes de la méchanique à la
construction des voûtes et des dômes, le système de couverture de
Sainte-Geneviève dans sa relation avec ses prototypes gothiques.
Sainte- Geneviève apparaît alors comme l'heureuse synthèse entre
le génie constructif gothique et la science du beau des anciens
Grecs : avec ce monument, la colonnade n'est pas le simple sup
port d'un entablement, mais de la voûte entière. Gauthey dira de
Soufflot qu'il a su nous ramener « à la pureté et à l'élégance de
l'architecture grecque en la conciliant avec les exemples savans
que nous ont laissé les architectes goths pour l'art des construc
tions » et son élève Brébion pourra proclamer en 1780 que « le
principal objet de M. Soufflot en bâtissant son église a été de
réunir sous une des plus belles formes la légèreté de la construc
tion des édifices gothiques avec la pureté et la magnificence de
l'architecture grecque ». f\V\i _ v -i-l i ^ ioin -A i
NOTRE-DAME DE DIJON 437
L'examen des relevés de Notre-Dame de Dijon exécutés par Jallier
occupe la séance de l'Académie du 20 décembre 1762 (fig. 1-2) :
« L'église de Notre-Dame de Dijon est d'architecture gothique
moderne ou arabe, selon les mémoires joints aux desseins ; elle a
été bâtie dans le XIIIe siècle avec assez de solidité pour n'avoir souff
ert d'aucune altération jusqu'à présent, malgré la légèreté de la
plus grande portion de ses parties, qui est telle que bien des archi
tectes pourroient traiter d'ignorant dans l'art de bâtir et de témér
aire quiconque le proposeroit comme un projet à exécuter. »
L'église est jugée « comme un chef d'œuvre de construction » et le
travail de Le Jolivet- Jallier, « s'il n'est pas d'un grand usage quant
au goust d'architecture que nous avons abbandonné avec raison,
pourroit être de la plus grande utilité pour prouver jusqu'à quel
point nous avons poussé l'abus de l'emploi des matériaux dans les
églises bâties à Paris depuis environ deux siècles, et faire revenir
du préjugé que semblent avoir eu, et avoir encore, la plus part des
architectes qu'on ne peut bâtir des églises qu'avec de gros pilliers
quarrés et des arcades, d'épaisses murailles et des contreforts
considérables, faute sans doute d'avoir examiné l'église de Notre-
Dame et quelques autres du même genre à Paris et la chapelle du
roy à Versailles ». Soufflot aurait été si satisfait du travail de Le
Jolivet-Jallier qu'il l'aurait « fait exécuter en bois avec toutes ses
proportions et ses colonnes » si l'on en croit Courtépée.
C'est donc par l'économie des matériaux et la légèreté de la struc
ture que l'église de Dijon frappe les architectes du XVIIIe siècle. Dans
les deux derniers volumes du Cours d'architecture de Blondel, dus
à Pierre Patte et publiés en 1777-1778, le gothique est an

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