Gustave Guillaume et le système du nombre - article ; n°2 ; vol.1, pg 71-77
8 pages
Français

Gustave Guillaume et le système du nombre - article ; n°2 ; vol.1, pg 71-77

-

Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres
8 pages
Français
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres

Description

Faits de langues - Année 1993 - Volume 1 - Numéro 2 - Pages 71-77
7 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1993
Nombre de lectures 50
Langue Français

Extrait

Guy Serbat
Gustave Guillaume et le système du nombre
In: Faits de langues n°2, Septembre 1993 pp. 71-77.
Citer ce document / Cite this document :
Serbat Guy. Gustave Guillaume et le système du nombre. In: Faits de langues n°2, Septembre 1993 pp. 71-77.
doi : 10.3406/flang.1993.1305
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/flang_1244-5460_1993_num_1_2_1305CONJONCTION ORGANIQUE : COLLECTIF/DUEL
Gustave Guillaume
et le système du nombre
GUY SERBAT*
Dans un article célèbre de 1952, où il reprend et généralise des idées
exprimées par lui vers la fin de la guerre, G. Guillaume1 a proposé une ana
lyse du « système du nombre ». Il souligne lui-même l'importance de cet
article qui donnerait, dit-il, l'esprit de son ouvrage en préparation sur la
« Psycho-mécanique du langage » (p. 240 п.). Réfléchir à ce qu'écrit
Guillaume est toujours stimulant; par ses disciples nombreux, Guillaume
reste présent, même si la démarche du Maître lui-même paraît très marquée
par les traits dominants de son époque.
1 I LE SYSTEME DE LA LANGUE
Guillaume se représente le système de la langue comme « cohérent et
rigoureux » (239) en invoquant l'autorité de Saussure et de Meillet — ce
* Université de Paris-Sorbonne
1. G. GUILLAUME, Langage et science du langage, 3e éd. Paris, Nizet, 1984 ; et notamment : p. 220-
240 : « La langue est-elle ou n'est-elle pas un système ? »
p. 157-166 : « La question de l'article ».
p. 167-183 : « Logique constructive interne du système des articles français ».
Faits de langues, 2/1993 72 Guy Serbat
dernier répétant, il est vrai, que la langue est « un système où tout se tient »,
mais suivant plutôt, en pratique, la ligne des néo-grammairiens.
Cette cohérence et cette rigueur sautent aux yeux quand on voit le sché
ma de la p. 224 : la langue y est figurée par un cercle, englobant d'autres
cercles concentriques. Ce centre commun représente le degré maximal
d'abstraction linguistique, celui où le « mécanique » demeure (presque)
seul. Les divers centres diffèrent certes par leur contenu (il y a un cercle du
mot, un cercle de la partie du discours, etc.), mais ils sont identiques par leur
structure, en vertu d'une « loi d'itération », postulée plutôt que démontrée.
« Telle est la loi de structure de la langue », écrit Guillaume ; le système
périphérique s'y répète au-dedans de lui-même sous l'espèce de systèmes
concentriques faits nécessairement à son image, et de proche en proche à
l'image les uns des autres, et n'ayant entre eux d'autre différence que celle
de leur contenu » (236). Tous les cercles sont mécaniquement des identités
(235) cf. 239 : « le système de la langue, essentiellement itératif au-dedans
de lui-même ».
2 I LE SYSTEME DU NOMBRE
A qui veut saisir la forme des contenants, le système du nombre offre
l'accès le plus commode. Indifférent à la substance des choses nombrées, le
nombre est de ce fait la catégorie la plus « mécanique » (hors l'article), celle
qui se situe au plus près du centre commun de tous les cercles.
Pénétrer la catégorie du nombre, en apercevoir le fonctionnement, ce
sera donc, en vertu de la loi d'itération, mettre au jour le mécanisme de la
langue dans son ensemble et dans toutes ses parties.
Pour Guillaume donc, la catégorie du nombre se ramène à l'opposition
de deux « pentes » (« vecteurs », « tensions », « cinétismes ») symétrique
ment opposées, l'une qui part du large, en général, du pluriel PI, pour
atteindre le singulier : l'autre prenant son point de départ dans ce même sin
gulier pour viser le pluriel (le large, le général) P2. Soit :
PI = pluriel initial de la tension I
S = singulier
P2 = pluriel visé par la tension II Guillaume et le système du nombre 13
Dans la tension I, l'esprit saisit la pluralité comme unité ; dans la tension
II, l'esprit, partant du singulier, construit des pluriels par addition.
Cette vue exprime, nous dit-on, une « condition de structure imperative
dans toute la langue et dans toutes les langues » ; et Guillaume souligne que
les processus mécaniques engagés doivent être entiers, « sans hiatus ni
récurrence dans leur parcours ». C'est là, affirme-t-il, une loi profonde, une
loi fondamentale, avec l'idée que la langue est un système de systèmes.
La même organisation rend compte, par exemple, du système de
l'article: on y retrouve les deux tensions, l'une anti-extensive, aboutissant à
former le singulier (« un ») à partir d'une pluralité aussi étendue qu'on vou
dra; l'autre, extensive, tendant au général (« le »).
Une « genèse secondaire » permet l'adjonction du partitif au système de
l'article (175) : parce que l'apparition du en langue est
« historiquement subséquente à celle des articles fondamentaux un et le qui
en représentent la genèse primaire ». Le partitif du, de la, des résulte, en
effet, de l'association à l'article extensif le de « l'inverseur » de, vidé de son
signifié prépositionnel.
3 I EXAMEN DES THESES DE GUILLAUME : LA « TENSION I »
La notoriété même des thèses guillaumiennes nous a permis de n'en faire
qu'une présentation succincte, point d'appui d'un examen critique.
Le système du nombre est donc tel qu'il exige deux tensions dans le
« diastème » donné. Il exige aussi que les vecteurs soient parcourus « sans
hiatus ni récurrence ». Or, si l'on aperçoit clairement que chaque position
numérique peut être occupée, jusqu'à l'infini, sur la tension II (extensive),
on voit mal comment il en aurait été de même sur la I, pourtant fon
datrice.
Guillaume, à l'évidence, médite sur les langues bien connues où existe
un « 2 » duel à côté d'un « 2 » pluriel (grec ancien : hippe/hippoi), voire sur
quelques langues moins connues qui ont aussi un triel (cf. scheme p. 169).
Ce qu'il en dit est d'une formulation brillante, mais sans grande originalité.
Que le duel exprime une pluralité saisie comme une unité (une pluralité
interne) convenable surtout pour les êtres qui vont par paire naturellement
(ou par institution) : les yeux, les oreilles / un attelage de 2 chevaux, on ne
l'ignorait pas. Que le duel soit (171) le « nombre conclusif indispensable »
dans la marche à l'unité, c'est l'évidence arithmétique même.
Mais qu'en est-il pour les chiffres supérieurs à 2 ? Guillaume reste très
discret. « Les pluriels internes dont le contenu excède 2 ne sont pas dans le 74 Guy Serbat
même cas » (171 fin). Pas d'autres précisions. A-t-on constaté quelque part
que 58 ou 263 aient deux signifiants, l'un de pluralité interne, l'autre de plu
ralité externe ?
Les belles phrases du genre de : Deux est « le pluriel interne expirant, le
pluriel externe renaissant » ; deux est l'a et Г со de toute pluralité » ; deux
(en pluralité externe) est « l'anastase du duel » (227), ne peuvent tenir lieu
d'une exploration plus précise, ni d'une réponse à la question : puisque
l'esprit doit se mouvoir tout au long de la « tension I », pourquoi la pluralité
interne ne se manifeste-t-elle qu'in extremis ?
En fait, à notre avis, cette « pluralité interne » se manifeste infiniment
plus que Guillaume ne l'affirme. Loin d'avoir été éliminée des « langues
évoluées » (selon ses termes), elle y est florissante aujourd'hui. Pour s'en
rendre compte, il suffit de sortir un peu de la stricte série numérique. Qu'est-
ce qu'une dizaine, une douzaine, une grosse, un millier, un million, sinon
chaque fois la saisie globalisante d'une pluralité interne ? Tel de mes amis
se flatttait d'avoir réussi à compter en nouveaux francs, mais avouait recour
ir à l'unité « brique » à partir du million (de centimes). Et nous ne disons
rien des « collectifs » à valeur plurielle peu précise, mais certainement
« interne » (« un groupe, une bande, une troupe, une foule »).
Si l'on c

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents